La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/12/2022 | FRANCE | N°450472

France | France, Conseil d'État, 5ème - 6ème chambres réunies, 20 décembre 2022, 450472


Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, sous le n° 1706539, d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2017 par lequel le maire de Gardanne (Bouches-du-Rhône) a prononcé à son encontre une astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la notification de cet arrêté et ce jusqu'au dépôt d'une attestation de la conformité des travaux entrepris en application de l'arrêté du 15 octobre 2014 de péril ordinaire concernant l'immeuble situé 5 boulevard Bontemps à Gardanne dont il est propriétaire et, d'autre part,

sous le n° 1808994, d'annuler le titre de recettes émis le 5 septembre 2...

Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, sous le n° 1706539, d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2017 par lequel le maire de Gardanne (Bouches-du-Rhône) a prononcé à son encontre une astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de la notification de cet arrêté et ce jusqu'au dépôt d'une attestation de la conformité des travaux entrepris en application de l'arrêté du 15 octobre 2014 de péril ordinaire concernant l'immeuble situé 5 boulevard Bontemps à Gardanne dont il est propriétaire et, d'autre part, sous le n° 1808994, d'annuler le titre de recettes émis le 5 septembre 2018 par la commune de Gardanne pour un montant de 50 000 euros. Par un jugement n° 1706539, 1808994 du 13 janvier 2020, le tribunal administratif de Marseille, après les avoir jointes, a rejeté ces deux demandes.

Par une ordonnance n° 20MA04323 du 7 janvier 2021, le premier vice-président de la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté, sur le fondement des dispositions du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, l'appel formé par M. A... contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 8 mars et 8 juin 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Gardanne la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Hortense Naudascher, auditrice,

- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de M. A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. A... a saisi le tribunal administratif de Marseille de deux demandes distinctes, la première, présentée par le ministère d'un avocat et enregistrée sous le n° 1706539, tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 juillet 2017 par lequel le maire de Gardanne (Bouches-du-Rhône) a prononcé à son encontre une astreinte afin de le contraindre à accomplir les travaux destinés à faire cesser l'état de péril ordinaire affectant l'immeuble dont il est propriétaire dans cette commune, la seconde, enregistrée sous le n° 1808994 et présentée, sans recourir au ministère d'un avocat, par le moyen du téléservice dénommé " Télérecours citoyens " régi par les dispositions alors applicables de l'article R. 414-6 du code de justice administrative, tendant à l'annulation du titre de recettes émis le 5 septembre 2018 et procédant à la liquidation de cette astreinte à hauteur de 50 000 euros. Par un unique jugement du 13 janvier 2020, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ces deux demandes après les avoir jointes. M. A... se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 13 janvier 2020 par laquelle le premier vice-président de la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté pour tardiveté l'appel qu'il avait formé contre ce jugement, par application des dispositions du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative qui permettent aux magistrats qu'elles désignent de rejeter par ordonnance une requête entachée d'une irrecevabilité manifeste insusceptible d'être couverte en cours d'instance.

2. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 751-3 du même code : " Sauf disposition contraire, les décisions sont notifiées le même jour à toutes les parties en cause et adressées à leur domicile réel, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, sans préjudice du droit des parties de faire signifier ces décisions par acte d'huissier de justice ". Aux termes des deux premiers alinéas de l'article R. 751-4-1 du même code dans sa rédaction applicable au litige : " Par dérogation aux articles R. 751-2, R. 751-3 et R. 751-4, la décision peut être notifiée par le moyen de l'application informatique mentionnée à l'article R. 414-1 aux parties qui sont inscrites dans cette application ou du téléservice mentionné à l'article R. 414-6 aux parties qui en ont accepté l'usage pour l'instance considérée. / Ces parties sont réputées avoir reçu la notification à la date de première consultation de la décision, certifiée par l'accusé de réception délivré par l'application informatique, ou, à défaut de consultation dans un délai de deux jours ouvrés à compter de la date de mise à disposition de la décision dans l'application, à l'issue de ce délai. Sauf demande contraire de leur part, les parties sont alertées de la notification par un message électronique envoyé à l'adresse choisie par elles ".

3. La jonction des requêtes qu'est susceptible d'opérer une juridiction est sans effet sur l'application des règles de notification de ses décisions, lesquelles peuvent en particulier différer selon ses modes de saisine, ainsi qu'il résulte des articles cités au point précédent.

4. Pour rejeter comme tardive la requête, enregistrée le 23 novembre 2020 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, dirigée contre le jugement du 13 janvier 2020 du tribunal administratif de Marseille, l'ordonnance attaquée se fonde sur la circonstance que la notification du jugement du tribunal administratif, accompagnée de l'indication des voies et délais de recours, a été mise à disposition de M. A... le 15 janvier 2020 dans l'application " Télérecours citoyens " et que ce dernier devait être réputé en avoir reçu notification régulière au plus tard deux jours ouvrés à compter de cette mise à disposition.

5. Il résulte toutefois de ce qui a été dit au point 3 que si la mise à disposition de M. A..., dans le téléservice " Télérecours citoyens ", du jugement du tribunal administratif rejetant ses deux demandes, était, en application de l'article R. 751-4-1 du code de justice administrative, de nature à faire courir à son égard le délai d'appel contre ce jugement en tant qu'il rejette la demande qu'il avait introduite sans ministère d'avocat par l'intermédiaire de ce téléservice, il n'en va pas de même en ce qui concerne le rejet de son autre demande formée par ministère d'avocat, contre lequel le délai d'appel n'a commencé à courir, en application des dispositions de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, qu'à compter de la notification du jugement faite au domicile réel du requérant par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

6. Ainsi, en retenant qu'à défaut de consultation dans un délai de deux jours ouvrés à compter de la date de mise à disposition du jugement dans le téléservice " Télérecours citoyens ", le délai de recours avait, à l'issue de ce délai de deux jours, commencé à courir à l'encontre de M. A... en ce qui concerne le rejet de sa demande enregistrée sous le n° 1808994, l'auteur de l'ordonnance attaquée, qui s'est livré à une appréciation souveraine des faits de l'espèce exempte de dénaturation, n'a pas commis d'erreur de droit et ne peut être regardé comme ayant porté atteinte au droit à un recours effectif.

7. En revanche, en rejetant comme tardives les conclusions d'appel formées par M. A... contre le jugement attaqué en tant qu'il a rejeté sa demande enregistrée sous le n° 1706539, l'auteur de l'ordonnance attaquée a commis une erreur de droit qui emporte, dans cette mesure, l'annulation de cette ordonnance.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... est seulement fondé à demander l'annulation de l'ordonnance qu'il attaque en tant qu'elle rejette son appel contre le jugement du 13 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande enregistrée au greffe de ce tribunal sous le n° 1706539.

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Gardanne une somme de 3 000 euros à verser à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du 13 janvier 2020 du premier vice-président de la cour administrative d'appel de Marseille est annulée en tant qu'elle rejette l'appel formé par M. A... contre le jugement du 13 janvier 2020 en tant qu'il a rejeté sa demande enregistrée au greffe de ce tribunal sous le n° 1706539.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, à la cour administrative d'appel de Marseille.

Article 3 : La commune de Gardanne versera à M. A... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions du pourvoi est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. B... A... et à la commune de Gardanne.

Délibéré à l'issue de la séance du 28 novembre 2022 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre, M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre ; Mme Suzanne von Coester, Mme Fabienne Lambolez, conseillères d'Etat ; M. Olivier Yeznikian, M. Cyril Roger-Lacan, M. Laurent Cabrera, conseillers d'Etat et Mme Hortense Naudascher, auditrice-rapporteure.

Rendu le 20 décembre 2022.

Le président :

Signé : M. Jacques-Henri Stahl

La rapporteure :

Signé : Mme Hortense Naudascher

La secrétaire :

Signé : Mme Anne-Lise Calvaire


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

PROCÉDURE - JUGEMENTS - JONCTION DE REQUÊTES – INCIDENCE – ABSENCE.

54-06-065 La jonction des requêtes qu’est susceptible d’opérer une juridiction est sans effet sur l’application des règles de notification de ses décisions, lesquelles peuvent en particulier différer selon ses modes de saisine.

PROCÉDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - QUESTIONS GÉNÉRALES - JONCTION DES POURVOIS - INCIDENCE SUR LES RÈGLES DE NOTIFICATION – ABSENCE.

54-07-01-01 La jonction des requêtes qu’est susceptible d’opérer une juridiction est sans effet sur l’application des règles de notification de ses décisions, lesquelles peuvent en particulier différer selon ses modes de saisine.


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 20 déc. 2022, n° 450472
Mentionné aux tables du recueil Lebon
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Hortense Naudascher
Rapporteur public ?: M. Florian Roussel
Avocat(s) : SARL LE PRADO – GILBERT

Origine de la décision
Formation : 5ème - 6ème chambres réunies
Date de la décision : 20/12/2022
Date de l'import : 29/01/2023

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 450472
Numéro NOR : CETATEXT000047060942 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2022-12-20;450472 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award