Vu la procédure suivante :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 24 octobre 2019 par laquelle la présidente de l'Institut supérieur des arts de Toulouse a rejeté sa demande tendant au versement de l'allocation d'aide au retour à l'emploi et d'enjoindre à l'Institut supérieur des arts de Toulouse de procéder à la liquidation de son allocation d'aide au retour à l'emploi à compter du 5 février 2018. Par un jugement n° 1907298 du 18 décembre 2020, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Par une ordonnance n° 21BX00562 du 11 mars 2021, la présidente de la cour administrative d'appel de Bordeaux a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête de Mme B... tendant à l'annulation de ce jugement.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 15 mars et 25 juin 2021 et le 10 février 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de l'Institut supérieur des arts de Toulouse la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du travail ;
- le décret n°86-83 du 17 janvier 1986 ;
- le décret n° 2020-741 du 16 juin 2020 ;
- le règlement général annexé à la convention du 14 avril 2017 relative à l'assurance chômage ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Martin Guesdon, auditeur,
- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat de Mme A... B... et à la SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, avocat de l'Institut supérieur des arts de Toulouse.
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B..., recrutée par le ministère de la culture le 15 juillet 2008 en vertu d'un contrat à durée indéterminée, a été placée en congé de mobilité à compter du 1er janvier 2013 et a exercé, à compter du 1er septembre 2014, les fonctions de directrice de l'Institut supérieur des arts de Toulouse (ISDAT), établissement public de coopération culturelle. Avant la fin de son contrat à durée déterminée, elle a présenté sa démission, qui a été acceptée par l'ISDAT à compter du 5 octobre 2017. Par un courrier du 18 septembre 2017, le ministère de la culture a, par ailleurs, informé Mme B... qu'elle serait maintenue, en l'absence d'emploi vacant assorti d'une rémunération équivalente à son ancien poste, en position de congé sans rémunération. Mme B... a demandé le bénéfice de l'aide au retour à l'emploi à l'issue d'une période de 121 jours suivant sa démission, ce qui lui a été refusé par une décision de l'ISDAT du 10 avril 2018. Par un jugement du 18 septembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cette décision et enjoint à l'ISDAT de réexaminer la demande de Mme B.... Par un jugement du 18 décembre 2020, contre lequel Mme B... se pourvoit en cassation, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de l'ISDAT du 24 octobre 2019 refusant de nouveau de lui verser l'aide au retour à l'emploi demandée.
2. Aux termes de l'article L. 5421-1 du code du travail : " En complément des mesures tendant à faciliter leur reclassement ou leur conversion, les travailleurs involontairement privés d'emploi (...), aptes au travail et recherchant un emploi, ont droit à un revenu de remplacement dans les conditions fixées au présent titre ". Ces dispositions sont applicables aux agents des collectivités territoriales dans les conditions prévues par l'article L. 5424-1 du code du travail. Aux termes du paragraphe 1er de l'accord d'application n° 12 du 14 avril 2017 pris pour l'application de l'article 46 du règlement général annexé à la convention du 14 avril 2017 relative à l'assurance chômage, applicable au litige : " Une ouverture de droit aux allocations ou un rechargement ou une reprise des droits peut être accordé au salarié qui a quitté volontairement son emploi, et dont l'état de chômage se prolonge contre sa volonté, sous réserve que les conditions suivantes soient réunies : / a) l'intéressé doit avoir quitté l'emploi au titre duquel les allocations lui ont été refusées, depuis au moins 121 jours ou lorsqu'il s'agit d'une demande de rechargement des droits au titre de l' article 28 , avoir épuisé ses droits depuis au moins 121 jours ; / b) il doit remplir toutes les conditions auxquelles le règlement général annexé subordonne l'ouverture d'une période d'indemnisation, à l'exception de celle prévue à l' article 4 e) ; / c) il doit enfin apporter des éléments attestant ses recherches actives d'emploi, ainsi que ses éventuelles reprises d'emploi de courte durée et ses démarches pour entreprendre des actions de formation. / Le point de départ du versement des allocations ou de la reprise des droits ainsi accordées est fixé au 122e jour suivant : - la fin de contrat de travail au titre de laquelle les allocations ont été refusées en application de l'article 4 e) (...) ".
3. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour juger que Mme B... n'était pas fondée à demander l'annulation de la décision attaquée, la cour administrative d'appel a relevé que les démarches qu'elle avait effectuées demeuraient peu nombreuses et que sa participation à des ateliers afin de retrouver un emploi n'était pas établie. Il ressort cependant des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B..., qui n'a pu, en dépit de sa demande formulée le 12 juin 2017, être réemployée par le ministère de la culture à l'issue de son congé de mobilité, s'est inscrite sur la liste des demandeurs d'emploi dès le 5 octobre 2017. Mme B... a alors sollicité, au cours du mois d'octobre, plusieurs établissements d'enseignement supérieur pour y assurer des interventions ponctuelles et s'est portée candidate pour un emploi de directrice de la culture au sein de l'abbaye royale de Fontevraud. Elle a, par ailleurs, participé, au cours du mois de novembre, à un atelier portant sur la création d'entreprise, s'est inscrite à une formation et a eu recours aux services de l'association pour l'emploi des cadres. Après avoir actualisé son projet personnalisé d'accès à l'emploi le 2 janvier 2018, elle a poursuivi ses démarches de formation en s'inscrivant, le 4 janvier, à une formation professionnelle pour l'obtention du certificat de coach praticien et à différents ateliers proposés par Pôle emploi. En estimant qu'elle ne justifiait ni de recherches actives d'emploi ni de démarches pour entreprendre des actions de formation, la cour a dénaturé les pièces du dossier. Par suite, en jugeant que Mme B... ne pouvait être qualifiée de travailleuse involontairement privée d'emploi, la cour a inexactement qualifié les faits. Dès lors, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, Mme B... est fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque.
4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
5. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 que Mme B... remplissait la condition prévue au c) du paragraphe 1er de l'accord d'application n°12 du 14 avril 2017 pris pour l'application de l'article 46 du règlement général annexé à la convention du 14 avril 2017 relative à l'assurance chômage. Il est, par ailleurs, constant qu'à la date de sa demande, Mme B... remplissait les autres conditions auxquelles est subordonné l'octroi de l'allocation d'aide au retour à l'emploi. Par suite, Mme B... est fondée à demander l'annulation de la décision de la présidente de l'ISDAT du 24 octobre 2019 refusant de faire droit à sa demande tendant au bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi à compter du 122ème jour suivant sa démission, soit le 4 février 2018.
6. En revanche, l'état de l'instruction ne permettant pas de déterminer le montant exact des droits de Mme B..., il y a lieu de la renvoyer devant l'ISDAT pour que soient calculées et versées, dans un délai d'un mois, les allocations d'aide au retour à l'emploi qui lui sont dues. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à ses conclusions aux fins d'astreinte.
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'ISDAT le versement à Mme B... d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de Mme B... qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 18 décembre 2020 du tribunal administratif de Toulouse est annulé.
Article 2 : La décision de l'ISDAT refusant d'accorder à Mme B... le bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi à compter du 4 février 2018 est annulée.
Article 3 : Mme B... est renvoyée devant l'ISDAT pour le calcul et le versement des allocations d'aide au retour à l'emploi qui lui sont dues, dans les conditions fixées au point 6.
Article 4 : L'ISDAT versera à Mme B... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Les conclusions présentées par l'ISDAT au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B... devant le tribunal administratif de Toulouse est rejeté.
Article 7 : La présente décision sera notifiée Mme A... B... et à l'Institut supérieur des arts de Toulouse.
Délibéré à l'issue de la séance du 16 novembre 2022 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; M. Guillaume Goulard, président de chambre ; M. Stéphane Verclytte, M. Christian Fournier, M. Hervé Cassagnabère, M. Jonathan Bosredon, Mme Françoise Tomé, conseillers d'Etat ; M. Julien Autret, maître des requêtes et M. Martin Guesdon, auditeur-rapporteur.
Rendu le 14 décembre 2022.
La présidente :
Signé : Mme Christine Maugüé
Le rapporteur :
Signé : M. Martin Guesdon
La secrétaire :
Signé : Mme Elsa Sarrazin