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05/12/2022 | FRANCE | N°459329

France | France, Conseil d'État, 7ème chambre, 05 décembre 2022, 459329


Vu la procédure suivante :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 4 juillet 2019 par laquelle le directeur de la Caisse des dépôts et consignations, agissant en qualité de gestionnaire de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL), lui a adressé son décompte définitif de pension de retraite, en tant que sa pension a été calculée sur la base d'un traitement brut indiciaire erroné, ainsi que les décisions des 10 juillet et 10 septembre 2019 par lesquelles le directeur de la Caisse des dépôts et

consignations a rejeté ses demandes tendant à la revalorisation de sa...

Vu la procédure suivante :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision du 4 juillet 2019 par laquelle le directeur de la Caisse des dépôts et consignations, agissant en qualité de gestionnaire de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL), lui a adressé son décompte définitif de pension de retraite, en tant que sa pension a été calculée sur la base d'un traitement brut indiciaire erroné, ainsi que les décisions des 10 juillet et 10 septembre 2019 par lesquelles le directeur de la Caisse des dépôts et consignations a rejeté ses demandes tendant à la revalorisation de sa pension de retraite.

Par un jugement n° 1903609 du 14 octobre 2021, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 10 décembre 2021 et 1er mars 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de la Caisse des dépôts et consignations la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Frédéric Gueudar Delahaye, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. C... et à la SCP L. Poulet, Odent, avocat de la Caisse des dépôts et consignations ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. C..., titularisé le 12 septembre 1984 dans le cadre d'emploi des officiers de sapeurs-pompiers professionnels au grade de capitaine, a été détaché à partir du 1er septembre 1994 en qualité d'attaché temporaire d'enseignement et de recherche auprès de l'académie d'Amiens et, à partir du 1er septembre 1995, en qualité de maître de conférences sur un poste d'enseignant-chercheur au sein de l'UFR de pharmacie de l'université de Picardie. Il a été maintenu en position de détachement de longue durée en qualité de maître de conférences des universités auprès de l'académie d'Amiens jusqu'à sa mise à la retraite et sa radiation des cadres le 26 juillet 2014. Par courriers des 9 juillet et 28 août 2019, M. C... a sollicité la révision de sa pension en tant que celle-ci a été calculée sur la base de l'indice brut 750 correspondant à celui détenu dans son corps d'origine et non de l'indice brut 920 correspondant à celui détenu dans son emploi de détachement en tant que maître de conférences des universités, ce qui lui a été refusé par décisions des 10 juillet et 10 septembre 2019 du directeur de la Caisse des dépôts et consignations. M. C... a demandé au tribunal administratif d'Amiens l'annulation de la décision du 4 juillet 2019 par laquelle le directeur de la Caisse des dépôts et consignations lui a adressé son décompte définitif de pension de retraite, ainsi que les décisions des 10 juillet et du 10 septembre 2019 rejetant ses recours gracieux tendant la révision de son brevet de pension. Par un jugement du 14 octobre 2021, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes.

2. Aux termes de l'article 64 de la loi du 26 janvier 1984 : " Le détachement est la position du fonctionnaire placé hors de son cadre d'emploi, emploi ou corps d'origine mais continuant à bénéficier, dans ce corps, de ses droits à l'avancement et à la retraite. / (...) ". L'article 65 de la même loi dispose, dans sa rédaction applicable à la date de l'admission à la retraite de M. C... : " Le fonctionnaire détaché ne peut, sauf dans le cas où le détachement a été prononcé dans une administration ou un organisme implanté sur le territoire d'un Etat étranger ou auprès d'organismes internationaux ou pour exercer une fonction publique élective, être affilié au régime de retraite dont relève la fonction de détachement, ni acquérir, à ce titre, des droits quelconques à pensions ou allocations, sous peine de la suspension de la pension de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales. / Il reste tributaire de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales et effectue les versements fixés par le règlement de cette caisse sur le traitement afférent à son grade et à son échelon dans le service dont il est détaché. / Dans le cas où le fonctionnaire est détaché dans un emploi conduisant à pension du régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ou relevant du code des pensions civiles et militaires de retraite, la retenue pour pension est calculée sur le traitement afférent à l'emploi de détachement. / L'organisme auprès duquel le fonctionnaire est détaché est redevable envers la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales d'une contribution pour la constitution des droits à pension de l'intéressé, dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat (...) ".

3. Aux termes de l'article 5 du décret du 26 décembre 2003 : " Le fonctionnaire détaché dans un emploi ne conduisant pas à pension de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ou du régime de retraite relevant du code des pensions civiles et militaires de retraite verse la retenue pour pension prévue à l'article 3 du présent décret. Cette retenue est calculée sur le traitement afférent à son grade et à son échelon dans le service dont il est détaché. / La retenue versée par le fonctionnaire détaché dans un emploi conduisant à pension de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ou du régime de retraite relevant du code des pensions civiles et militaires de retraite est calculée sur le traitement afférent à l'emploi de détachement ".

4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, pour liquider les droits à pensions de M. C..., la CNRACL a retenu l'indice brut 750 correspondant à celui détenu par l'intéressé en qualité de capitaine des sapeurs-pompiers professionnels. Pour écarter le moyen du requérant tiré de ce qu'il devait bénéficier de l'indice brut 920, correspondant à celui qu'il détenait dans son emploi de détachement en tant que maître de conférences des universités, le tribunal administratif d'Amiens s'est borné à juger que M. C... ne pouvait invoquer utilement, à l'appui de ce moyen, les dispositions précitées des articles 64 et 65 de la loi du 26 janvier 1984 et de l'article 5 du décret du 26 décembre 2003, qui régissent seulement les modalités de cotisation des agents territoriaux détachés et qui ne sont pas relatives aux modalités de liquidation de leur pension. En statuant ainsi, alors qu'il appartenait aux premiers juges de rechercher si les retenues pour pension versées par M. C... calculées, en sa qualité d'agent détaché sur un emploi ouvrant droit à une pension de retraite relevant du code des pensions civiles et militaires de retraite, sur le traitement afférent à son emploi de détachement, ouvraient droit pour l'intéressé à la liquidation de sa pension sur le fondement de l'indice qu'il détenait dans cet emploi, le tribunal administratif a commis une erreur de droit. Par suite, M. C... est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la Caisse des dépôts et consignations la somme de 3 000 euros à verser à M. C..., au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 14 octobre 2021 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif d'Amiens.

Article 3 : La Caisse des dépôts et consignations versera à M. C... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. D... C... et à la Caisse des dépôts et consignations.

Délibéré à l'issue de la séance du 26 octobre 2022 où siégeaient : M. Gilles Pellissier, assesseur, présidant ; M. Benoît Bohnert, conseiller d'Etat et M. Frédéric Gueudar Delahaye, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 1er décembre 2022.

Le président :

Signé : M. Gilles Pellissier

Le rapporteur :

Signé : M. Frédéric Gueudar Delahaye

La secrétaire :

Signé : Mme Corinne Sak


Synthèse
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 459329
Date de la décision : 05/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 05 déc. 2022, n° 459329
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Frédéric Gueudar Delahaye
Rapporteur public ?: M. Marc Pichon de Vendeuil
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, THIRIEZ ; SCP L. POULET-ODENT

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:459329.20221205
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