Vu les procédures suivantes :
1° La société d'étude et de promotion hôtelière internationale (SEPHI) a demandé au tribunal administratif de Versailles de condamner l'Etat à lui verser une indemnité d'un montant total de 5 799 euros correspondant à la taxe communale sur la consommation finale d'électricité (TCCFE) et à la taxe départementale sur la consommation finale d'électricité (TDCFE) qu'elle aurait indûment supportées au titre des années 2016 à 2018.
Par une ordonnance n° 2002693 du 9 février 2021, le président de la 7ème chambre de ce tribunal a rejeté cette demande comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.
Par une ordonnance n° 21VE00862 du 20 juillet 2021, enregistrée le même jour au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président de la cour administrative d'appel de Versailles a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi de la SEPHI, enregistré le 23 mars 2021 au greffe de cette cour.
Par ce pourvoi, enregistré sous le n° 454784, et un mémoire en réplique enregistré le 28 avril 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SEPHI demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance du 9 février 2021 du président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Versailles ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° La SEPHI a demandé au tribunal administratif de Versailles de condamner l'Etat à lui verser une indemnité d'un montant total de 2 533,83 euros correspondant à la TCCFE et à la TDCFE qu'elle aurait indûment supportées au titre de l'année 2015.
Par une ordonnance n° 1905366 du 9 février 2021, le président de la 7ème chambre de ce tribunal a rejeté cette demande comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.
Par une ordonnance n° 21VE00863 du 20 juillet 2021, enregistrée le même jour au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président de la cour administrative d'appel de Versailles a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi de la SEPHI, enregistré le 23 mars 2021 au greffe de cette cour.
Par ce pourvoi, enregistré sous le n° 454786, et un mémoire en réplique enregistré le 28 avril 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SEPHI demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance du 9 février 2021 du président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Versailles ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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3° La SEPHI a demandé au tribunal administratif de Versailles de condamner l'Etat à lui verser une indemnité d'un montant total de 2 504 euros correspondant à la TCCFE et à la TDCFE qu'elle aurait indûment supportées au titre de l'année 2014. Par une ordonnance n° 1905363 du 9 février 2021, le président de la 7ème chambre de ce tribunal a rejeté cette demande comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.
Par une ordonnance n° 21VE00864 du 20 juillet 2021, enregistrée le même jour au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président de la cour administrative d'appel de Versailles a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi de la SEPHI, enregistré le 23 mars 2021 au greffe de cette cour.
Par ce pourvoi, enregistré sous le n° 454787, et un mémoire en réplique enregistré le 28 avril 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SEPHI demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance du 9 février 2021 du président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Versailles ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la directive 2008/118/CE du Conseil du 16 décembre 2008 ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Nicolas Polge, conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Cabinet Briard, avocat de la société d'étude et de promotion hôtelière internationale (SEPHI) ;
Vu la note en délibéré, enregistrée, sous les trois numéros, le 7 juillet 2022, présentée par la SEPHI ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces des dossiers soumis au juge du fond que la société d'étude et de promotion hôtelière internationale (SEPHI) a demandé au tribunal administratif de Versailles, par trois requêtes distinctes, de condamner l'Etat à lui verser trois indemnités d'un montant cumulé de 10 836,83 euros correspondant à la taxe communale sur la consommation finale d'électricité (TCCFE) et à la taxe départementale sur la consommation finale d'électricité (TDCFE) qu'elle estime avoir indûment acquittées au titre des années 2014 à 2018. Par trois ordonnances du 9 février 2021, dont la SEPHI demande l'annulation, le président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Versailles a rejeté les trois demandes indemnitaires de la société comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.
2. Les trois pourvois de la société d'étude et de promotion hôtelière internationale visés ci-dessus présentent à juger la même question. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.
3. D'une part, aux termes de l'article L. 2333-2 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable au litige : " Il est institué, au profit des communes ou, selon le cas, au profit des établissements publics de coopération intercommunale ou des départements qui leur sont substitués au titre de leur compétence d'autorité organisatrice de la distribution publique d'électricité visée à l'article L. 2224-31, une taxe communale sur la consommation finale d'électricité, relevant du code NC 2716 de la nomenclature douanière. " Aux termes de l'article L. 2333-3 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " La taxe mentionnée à l'article L. 2333-2 s'applique dans les mêmes conditions que celles mentionnées à l'article L. 3333-2. " En vertu de l'article L. 2333-4 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable au litige : " La taxe mentionnée à l'article L. 2333-2 est assise selon les mêmes règles que celles mentionnées à l'article L. 3333-3. " En vertu du cinquième alinéa de l'article L. 2333-5 du même code, dans sa version applicable au litige : " Le droit de reprise de la commune, les réclamations relatives à l'assiette et au recouvrement de la taxe ainsi que les contestations relatives aux poursuites s'effectuent dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article L. 3333-3-3. " D'autre part, aux termes de l'article L. 3333-2 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable au litige : " I.- Il est institué, au profit des départements, une taxe départementale sur la consommation finale d'électricité relevant du code NC 2716 de la nomenclature douanière. / II.- Le fait générateur de la taxe intervient lors de la livraison de l'électricité par un fournisseur à chaque point de livraison, situé en France, d'un utilisateur final. (...) ". Aux termes de l'article L. 3333-3 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " La taxe mentionnée à l'article L. 3333-2 est assise sur la quantité d'électricité fournie ou consommée, exprimée en mégawattheures ou fraction de mégawattheure. " Aux termes du I. de l'article L. 3333-3-3 de ce code, dans sa rédaction applicable au litige : " Le droit de reprise des collectivités territoriales bénéficiaires de la taxe s'exerce jusqu'au 31 décembre de la troisième année qui suit celle au cours de laquelle la taxe est devenue exigible. "
4. D'autre part, aux termes de l'article L. 199 du livre des procédures fiscales : " En matière d'impôts directs et de taxes sur le chiffre d'affaires ou de taxes assimilées, les décisions rendues par l'administration sur les réclamations contentieuses et qui ne donnent pas entière satisfaction aux intéressés peuvent être portées devant le tribunal administratif. Il en est de même pour les décisions intervenues en cas de contestation pour la fixation du montant des abonnements prévus à l'article 1700 du code général des impôts pour les établissements soumis à l'impôt sur les spectacles. / En matière de droits d'enregistrement, d'impôt sur la fortune immobilière, de taxe de publicité foncière, de droits de timbre, de contributions indirectes et de taxes assimilées à ces droits, taxes ou contributions, le tribunal compétent est le tribunal judiciaire. Les tribunaux judiciaires statuent en premier ressort. (...) ".
5. Il résulte des dispositions citées au point 4 ci-dessus que les tribunaux de l'ordre judiciaire sont seuls compétents pour connaître de toutes les contestations concernant l'assiette et le recouvrement de la TCCFE et de la TDCFE, ces taxes revêtant le caractère de contributions indirectes. Toutefois, la juridiction administrative est seule compétente pour connaître des actions indemnitaires introduites par les personnes qui supportent financièrement ces taxes, lorsqu'elles entendent rechercher la responsabilité pour faute de l'Etat ou de toute autre personne publique du fait de son activité normative, qu'elle soit législative ou réglementaire.
6. Il ressort des pièces des dossiers soumis au juge du fond, notamment des termes des trois mémoires produits devant le tribunal administratif de Versailles par la société requérante, qu'à l'appui de ses conclusions indemnitaires dirigées contre l'Etat, cette société soutenait notamment que la TCCFE et la TDCFE mises à sa charge méconnaissaient les principes posés par la directive 2008/118/CE du 16 décembre 2008 relative au régime général d'accise et que cette illégalité était constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat à son égard. Par suite, en jugeant que les conclusions de la requérante tendant à la condamnation de l'Etat à l'indemniser des préjudices subis relevaient de la compétence de la juridiction judiciaire, alors qu'était en cause la responsabilité de l'Etat du fait de son activité législative, le président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Versailles a commis une erreur de droit.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la SEPHI est fondée à demander l'annulation des trois ordonnances qu'elle attaque.
8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : Les trois ordonnances nos 2002693, 1905366 et 1905363 du 9 février 2021 du président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Versailles sont annulées.
Article 2 : Les trois affaires sont renvoyées au tribunal administratif de Versailles.
Article 3 : L'Etat versera à la SEPHI une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société d'étude et de promotion hôtelière internationale et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Délibéré à l'issue de la séance du 7 juillet 2022 où siégeaient : M. Thomas Andrieu, conseiller d'Etat, présidant ; Mme Anne Egerszegi, conseillère d'Etat et M. Nicolas Polge, conseiller d'Etat-rapporteur.
Rendu le 21 juillet 2022.
Le président :
Signé : M. Thomas Andrieu
Le rapporteur :
Signé : M. Nicolas Polge
La secrétaire :
Signé : Mme Laurence Chancerel