Vu la procédure suivante :
Monsieur A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 21 décembre 2018 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice a fixé le solde de ses congés annuels à 21,5 jours et la décision du 8 avril 2019 portant rejet de son recours gracieux, et de condamner l'Etat à l'indemniser des jours de congés détenus sur son compte épargne-temps et au paiement des jours de congés annuels non utilisés avant son détachement au 16 décembre 2018, ou, à titre subsidiaire, à l'indemniser de la perte de chance occasionnée en raison d'un défaut d'information.
Par un jugement n° 1912396/5-2 du 28 octobre 2021, le tribunal administratif de Paris a annulé les décisions des 21 décembre 2018 et 8 avril 2019 et rejeté le surplus des conclusions de la requête.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 28 décembre 2021 et 28 mars 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etat au paiement des jours de congés annuels non utilisés sur la période allant du 1er janvier 2017 au 30 juillet 2018 ou, subsidiairement, à l'indemnisation de la perte de chance résultant d'un défaut d'information relatif à son compte épargne-temps;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa requête ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail ;
- les arrêts C-350/06 et C-520/06 du 20 janvier 2009, C-214/10 du 22 novembre 2011, C-337/10 du 3 mai 2012, n° C-341/15 du 20 juillet 2016 et n° C-569/16 et C-570/16 du 6 novembre 2018 de la Cour de justice de l'Union européenne ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 84-972 du 26 octobre 1984 ;
- le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 ;
- le décret n° 2002-634 du 29 avril 2002 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Catherine Moreau, conseillère d'Etat en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Sevaux, Mathonnet, avocat de M. C... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. C..., attaché principal à la direction de la protection judiciaire de la jeunesse du ministère de la justice, adjoint au chef du bureau de la législation et des affaires juridiques depuis le 1er juin 2012, a été placé en congé de longue maladie du 30 septembre 2015 au 30 juillet 2018. Le 21 décembre 2018, date à laquelle M. C... a été placé en détachement auprès du Centre des monuments nationaux, le garde des sceaux, ministre de la justice a établi le décompte de ses jours de congés annuels pour l'année 2018 à 21,5 jours, sur un total de 50,5 jours de congés. Par un recours gracieux et une demande préalable indemnitaire en date du 8 février 2019, M. C... a contesté ce décompte et sollicité l'indemnisation de 25 jours de congés annuels non pris. Par un courrier du 8 avril 2019, le garde des sceaux, ministre de la justice a refusé de faire droit à ces demandes. Par un jugement du 28 octobre 2021, le tribunal administratif de Paris, a annulé, à sa demande, les décisions ministérielles des 21 décembre 2018 et 8 avril 2019, et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à l'indemniser des jours de congés annuels non utilisés pendant la période allant du 1er janvier 2017 au 30 juillet 2018 ou, subsidiairement, à l'indemniser de la perte de chance occasionnée en raison d'un défaut d'information relatif à son compte épargne-temps. M. B... se pourvoit en cassation contre ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
2. Aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative : " Toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif ou qui y a été régulièrement appelée (...) peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance. Toutefois, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort : / (...) 8° Sauf en matière de contrat de la commande publique sur toute action indemnitaire ne relevant pas des dispositions précédentes, lorsque le montant des indemnités demandées n'excède pas le montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15 ; / (...). Par dérogation aux dispositions qui précèdent, en cas de connexité avec un litige susceptible d'appel, les décisions portant sur les actions mentionnées au 8° peuvent elles-mêmes faire l'objet d'un appel (...) ". En vertu de l'article R. 222-14 de ce code, le montant des indemnités visées par le 8° de l'article R. 811-1, déterminé conformément à ce que prévoit l'article R. 222-15, est fixé à 10 000 euros.
3. La demande d'un fonctionnaire ou d'un agent public tendant seulement au versement de traitements, rémunérations, indemnités, avantages ou soldes impayés, sans chercher la réparation d'un préjudice distinct du préjudice matériel objet de cette demande pécuniaire, ne revêt pas le caractère d'une action indemnitaire au sens du 8° de l'article R. 811-1 du code de justice administrative. Par suite, une telle demande n'entre pas, quelle que soit l'étendue des obligations qui pèseraient sur l'administration au cas où il y serait fait droit, dans le champ de l'exception, prévue à ce 8°, en vertu de laquelle le tribunal administratif statue en dernier ressort.
4. En premier lieu, les conclusions de la demande de première instance de M. B... tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui payer les jours de congés annuels non utilisés pendant la période allant du 1er janvier 2017 au 30 juillet 2018 ne revêtent pas un caractère indemnitaire au sens du 8° de l'article R. 811-1 du code de justice administrative. Dès lors, le jugement du tribunal administratif de Paris n'a, en tant qu'il statue sur ces chefs de conclusion, pas été rendu en dernier ressort. La requête de M. C... ne présente donc pas, en tant qu'elle est dirigée contre le jugement en tant qu'il statue sur ces conclusions, le caractère d'un pourvoi en cassation mais celui d'un appel, qui ressortit à la compétence de la cour administrative d'appel de Paris.
5. En second lieu, les conclusions de la demande de première instance de M. B... tendant à la condamnation de l'Etat à l'indemniser, à titre subsidiaire, de la perte de chance en raison du défaut d'information sur le solde de son compte épargne-temps et sur la possibilité de dépôt et d'indemnisation des jours contenus dans son compte épargne-temps, présentent un lien de connexité avec celles mentionnées au point précédent. Par suite, le jugement du 28 octobre 2021 du tribunal administratif de Paris, en tant qu'il statue sur ces conclusions, peut également faire l'objet d'un appel devant la cour administrative d'appel de Paris, en application des dispositions de l'avant-dernier alinéa de l'article R. 811-1 du code de justice administrative cité ci-dessus.
6. Il résulte de ce qui précède que les conclusions de la demande de M. B... ayant le caractère d'un appel, il y a lieu, en application des dispositions de l'article R. 351-1 du code de justice administrative, d'attribuer le jugement de sa requête à la cour administrative d'appel de Paris.
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement de la requête de M. C... est attribué à la cour administrative d'appel de Paris.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Monsieur A... C... et au garde des sceaux, ministre de la justice.
Délibéré à l'issue de la séance du 2 juin 2022 où siégeaient : Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre, présidant ; Mme Suzanne von Coester, conseillère d'Etat et Mme Catherine Moreau, conseillère d'Etat en service extraordinaire-rapporteure.
Rendu le 19 juillet 2022.
La présidente :
Signé : Mme Isabelle de Silva
La rapporteure :
Signé : Mme Catherine Moreau
La secrétaire :
Signé : Mme Marie-Adeline Allain