Vu les procédures suivantes :
Mme M... K..., M. O..., M. E... J..., M. G... B..., Mme F... A..., M. D... I..., Mme H... N..., M. L... C... et la Société civile immobilière (SCI) des Trésoriers ont demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 3 août 2020 par lequel le maire de la commune de Neuilly-Plaisance a délivré à la société anonyme HLM France Seqens un permis de construire en vue de la construction d'un immeuble d'habitation comprenant trente-huit logements et un parc de stationnement en sous-sol.
Par un jugement n° 2010356 du 8 juillet 2021, le tribunal administratif de Montreuil a annulé ce permis de construire en tant que le projet de construction prévoit l'abattage de l'ensemble des arbres de haute tige préexistants sur le terrain d'assiette du projet.
1° Sous le n° 456477, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 8 septembre ainsi que les 9 et 10 décembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de Neuilly-Plaisance demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler les articles 1er, 2 et 4 de ce jugement;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter les conclusions présentées par Mme K... et autres ;
3°) de mettre solidairement à la charge de Mme K... et autres la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° Sous le n° 456489, par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 8 septembre et 8 décembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société HLM France Seqens demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le même jugement en ce qu'il a annulé le permis de construire litigieux en tant que le projet de construction prévoit l'abattage de l'ensemble des arbres de haute tige préexistants sur le terrain d'assiette du projet ;
2°) de mettre solidairement à la charge de Mme K... et autres la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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3° Sous le n° 456858, par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 20 septembre et 20 décembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme M... K..., M. E... J..., M. L... C..., M. G... B..., Mme H... N..., M. D... I... et Mme F... A... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le même jugement en tant qu'il n'a pas fait intégralement droit à leurs conclusions ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur demande ;
3°) de mettre solidairement à la charge de la commune de Neuilly-Plaisance et de la société HLM France Seqens la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Amélie Fort-Besnard, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Clément Malverti, rapporteur public,
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de la commune de Neuilly-Plaissance, à la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et associés, avocat de la société HLM France Seqens, et à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de Mme K... et autres ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 3 juin 2022, présentée par la société HLM France Seqens ;
Considérant ce qui suit :
1. Les pourvois de la commune de Neuilly-Plaisance, de la société HLM France Seqens, de Mme M... K... et autres sont dirigés contre le même jugement du tribunal administratif de Montreuil du 8 juillet 2021, qui a annulé le permis de construire délivré par le maire de Neuilly-Plaisance à la société HLM France Seqens en tant que le projet prévoit l'abattage de l'ensemble des arbres de haute tige préexistant sur le terrain d'assiette. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.
Sur les conclusions du pourvoi de Mme M... K... et autres tendant à l'annulation totale du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme : " L'illégalité pour vice de forme ou de procédure (...) d'un plan local d'urbanisme (...) ne peut être invoquée par voie d'exception, après l'expiration d'un délai de six mois à compter de la prise d'effet du document en cause. (...) Les deux alinéas précédents ne sont pas applicables lorsque le vice de forme concerne : - soit la méconnaissance substantielle ou la violation des règles de l'enquête publique sur (...) les plans locaux d'urbanisme (...) ; - soit l'absence du rapport de présentation ou des documents graphiques ".
3. Pour écarter le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la délibération du conseil municipal réduisant le périmètre d'attente de projet d'aménagement global prévu par le plan local d'urbanisme de Neuilly-Plaisance en raison de l'erreur alléguée dans le rapport du commissaire enquêteur, le tribunal administratif a estimé qu'à la supposer établie cette erreur n'avait pas eu d'incidence sur le sens de la délibération du conseil municipal. Par suite et alors que les premiers juges ne se sont pas prononcés sur la recevabilité du moyen qu'ils ont écarté comme non-fondé, le moyen du pourvoi tiré de ce qu'en écartant le moyen comme irrecevable faute pour ce vice de forme de pouvoir être regardé comme une méconnaissance substantielle ou une violation des règles de l'enquête publique le tribunal aurait commis une erreur de droit ne peut qu'être écarté.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 4.1 des dispositions communes du règlement du plan local d'urbanisme de Neuilly-Plaisance : " Composition d'ensemble et intégration dans le paysage : Toutes constructions nouvelles dans leur ensemble, y compris les ouvrages et édicules techniques et les extensions, doivent par leur architecture, leur dimension ou leur aspect extérieur, respecter le caractère et l'intérêt des lieux avoisinants, des sites et des paysages urbains locaux. Toute utilisation de matériaux susceptibles de donner un aspect provisoire à la construction est interdit. Les matériaux, tels que les carreaux de plâtre, briques creuses, parpaings destinés à être recouverts d'un parement ou d'enduit, ne peuvent être laissés apparents ni sur les façades et les pignons des constructions, ni sur les clôtures (...) ".
5. En estimant, pour juger que le projet en litige d'un immeuble d'habitation comprenant trente-huit logements et un parc de stationnement en sous-sol ne méconnaissait pas les dispositions citées ci-dessus, que ce projet était d'architecture neutre, en R+5 et de dimensions relativement limitées dans une zone qui comportait à proximité d'autres immeubles de même gabarit ou plus élevés, le tribunal administratif s'est livré à une appréciation souveraine, exempte de dénaturation.
6. En troisième lieu, aux termes du même article 4.1 des dispositions communes à toutes les zones du règlement du plan local d'urbanisme de Neuilly-Plaisance: " Toitures : Les toitures doivent assurer un bon couronnement de la construction et être en harmonie de par leur forme, leur couleur ou leur matériau avec celles des constructions avoisinantes. Les toitures terrasses, accessibles ou inaccessibles, ainsi que leurs acrotères doivent être aménagés avec soin et traitées comme une façade. Les gaines techniques doivent faire l'objet d'un camouflage en harmonie avec l'architecture de la construction. La végétalisation des toitures terrasses est encouragée. Les couvertures ondulées ou d'aspect ondulé ainsi que celles présentant un aspect de papier goudronné sont interdites. Les couvertures des constructions annexes visibles depuis la rue doivent être traitées en harmonie avec celle du bâtiment principal. En outre, elles devront se fondre dans l'environnement des cœurs d'îlots végétaux (...) ". Et aux termes de l'article 4.2.2 du même règlement : " En cas de constructions neuves avec toitures terrasses, les toitures terrasses doivent être fonctionnalisées en mettant en place, au choix, les solutions suivantes : - exploitation d'énergies renouvelables (panneaux solaires ou photovoltaïque, petit éolien domestique...) ; - agriculture urbaine (jardin potager, ruche...) ; - végétalisation dans un objectif écologique ; - récupération et/ou rétention des eaux pluviales ".
7. En jugeant que les terrasses, prévues par le projet, " produites par le retrait en attique et accessibles depuis les logements " n'étaient pas soumises à la règle de fonctionnalisation prévue par l'article 4.2.2, comme ne constituant pas des couronnements de construction et par suite des terrasses au sens de ces dispositions, le tribunal administratif, qui s'est livré à une appréciation souveraine exempte de dénaturation, n'a pas davantage commis d'erreur de droit.
8. En dernier lieu, selon l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5-1, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé, limite à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixe le délai dans lequel le titulaire de l'autorisation pourra en demander la régularisation, même après l'achèvement des travaux. Le refus par le juge de faire droit à une demande d'annulation partielle est motivé. "
9. Après avoir estimé que le permis de construire contesté était illégal en tant que le projet de construction ne pouvait, sans qu'il en soit justifié, être réalisé sans l'abattage de l'ensemble des arbres préexistants sur son terrain d'assiette, le tribunal a considéré qu'une telle illégalité était susceptible de régularisation, dès lors qu'elle n'apporterait pas un bouleversement tel à l'économie générale du projet qu'il en modifierait la nature. Ce faisant et alors qu'une telle régularisation n'impliquait qu'une diminution de l'ampleur du projet, le tribunal s'est livré à une appréciation souveraine exempte de dénaturation.
10. Il résulte de ce qui précède que les conclusions du pourvoi de Mme K... et autres tendant à l'annulation totale du jugement du tribunal administratif de Montreuil doivent être rejetées, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Sur les conclusions des pourvois de la commune de Neuilly-Plaisance et de la société HLM France Seqens tendant à l'annulation partielle du jugement :
11. Aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision mentionne que l'audience a été publique, sauf s'il a été fait application des dispositions de l'article L. 731-1. (...) Mention est également faite de la production d'une note en délibéré ". Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'il est régulièrement saisi, à l'issue de l'audience, d'une note en délibéré émanant de l'une des parties, il appartient dans tous les cas au juge administratif d'en prendre connaissance avant de rendre sa décision ainsi que de la viser, sans toutefois l'analyser dès lors qu'il n'est pas amené à rouvrir l'instruction et à la soumettre au débat contradictoire pour tenir compte des éléments nouveaux qu'elle contient.
12. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, après l'audience publique, qui a eu lieu le 8 juin 2021, la société HLM France Seqens a adressé au tribunal administratif de Montreuil une note en délibéré, enregistrée le 10 juin 2021 au greffe de cette juridiction. Le jugement attaqué, dont les visas ne font pas mention de cette pièce, est entaché pour ce motif d'une irrégularité.
13. En conséquence, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens des pourvois, la société HLM France Seqens et la commune de Neully-Plaisance sont fondées à demander l'annulation de l'article 1er qui annule partiellement le permis litigieux et, par voie de conséquence, des articles 2 et 4.
14. Il résulte de ce qui précède que les articles 1er, 2 et 4 du jugement attaqué doivent être annulés.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
15. Ces dispositions font obstacle à ce que des sommes soient mises à ce titre à la charge de la société HLM France Seqens et de la commune de Neuilly-Plaisance Il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de Mme K... et des autres requérants les sommes que réclament à ce titre la société HLM France Seqens et la commune de Neuilly-Plaisance.
D E C I D E :
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Article 1er : Les articles 1er, 2 et 4 du jugement du tribunal administratif de Montreuil du 8 juillet 2021 sont annulés.
Article 2 : Le pourvoi de Mme K... et autres est rejeté.
Article 3 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Montreuil
Article 4 : Les conclusions de la société HLM France Seqens et de la commune de Neuilly-Plaisance tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la commune de Neuilly-Plaisance, à la société HLM France Seqens, à M. E... J..., à Mme M... K..., à MM. François C... et M. G... B..., à Mme H... N..., à M. D... I..., à Mme F... A... et au tribunal administratif de Montreuil.