Vu les procédures suivantes :
1° M. J... A... F... et Mme E... A... F... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution des décisions des 15 février et 18 mars 2021 par lesquelles le maire de Pluneret (Morbihan) a refusé d'inscrire leur fille B... à l'école maternelle Germaine Tillion au titre de l'année scolaire 2021-2022, et de la décision du 25 mai 2021 rejetant leur recours gracieux. Par une ordonnance n° 2104076 du 26 août 2021, le juge des référés a suspendu l'exécution de ces décisions et a enjoint au maire de Pluneret d'inscrire à titre provisoire l'enfant B... Le F... à l'école maternelle Germaine Tillion dans un délai de dix jours à compter de la notification de son ordonnance.
Sous le n° 456625, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 13 et 29 septembre 2021 et le 15 avril 2022, au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de Pluneret demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) de mettre à la charge de M. et Mme A... F... la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° M. G... K... a demandé au tribunal administratif de Rennes de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de la décision du 8 juillet 2021 par laquelle le maire de Pluneret a refusé d'inscrire sa fille H... à l'école maternelle Germaine Tillion au titre de l'année scolaire 2021-2022. Par une ordonnance n° 2104077 du 26 août 2021, le juge des référés a suspendu l'exécution de cette décision et a enjoint au maire de Pluneret d'inscrire à titre provisoire l'enfant H... K... à l'école maternelle Germaine Tillion dans un délai de dix jours à compter de la notification de son ordonnance.
Sous le n° 456626, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 13 et 29 septembre 2021 et le 15 avril 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de Pluneret demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) de mettre à la charge de M. K... la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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3° M. O... A... I... et Mme D... A... P... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution des décisions des 4 et 9 mars 2021 par lesquelles le maire de Pluneret a refusé d'inscrire leur fille C... à l'école maternelle Germaine Tillion au titre de l'année scolaire 2021-2022, ainsi que la décision du 25 mai 2021 rejetant leur recours gracieux. Par une ordonnance n° 2104079 du 26 août 2021, le juge des référés a suspendu l'exécution des décisions litigieuses et a enjoint au maire de Pluneret d'inscrire à titre provisoire l'enfant C... M... à l'école maternelle Germaine Tillion dans un délai de dix jours à compter de la notification de son ordonnance.
Sous le n° 456627, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 13 et 29 septembre 2021 et le 15 avril 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de Pluneret demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) de mettre à la charge de M. A... I... et de Mme L... la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code de l'éducation ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Edouard Solier, maître des requêtes ;
- les conclusions de M. Frédéric Dieu, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Didier-Pinet, avocat de la commune de Pluneret et à la SCP Delamarre, Jéhannin, avocat de M. et Mme A... F... ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (...) ".
2. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Rennes que par plusieurs décisions confirmées sur recours gracieux, le maire de Pluneret a refusé d'inscrire les enfants B... A... F..., née le 17 janvier 2019, H... K..., née le 3 février 2019, et C... M..., née le 18 février 2019, en classe de très petite section de l'école maternelle Germaine Tillion pour l'année scolaire 2021-2022. Par trois ordonnances du 26 août 2021, le juge des référés, saisi par M. et Mme A... F..., par M. K... et par M. A... I... et Mme A... P... sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a suspendu l'exécution de ces décisions et a enjoint au maire de Pluneret d'inscrire à titre provisoire les enfants B... A... F..., H... K... et C... A... I... dans cette école, dans un délai de dix jours. La commune de Pluneret se pourvoit en cassation contre ces trois ordonnances.
3. Les pourvois de la commune de Pluneret présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.
Sur les interventions de la Fédération des conseils des parents d'élèves des écoles publiques et de la Fédération des conseils des parents d'élèves des écoles publiques du Morbihan :
4. Eu égard à son caractère accessoire par rapport au litige principal, une intervention, aussi bien en demande qu'en défense, n'est recevable, lorsqu'elle est présentée à l'appui d'une demande de suspension de l'exécution d'une décision administrative sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, qu'à la condition que son auteur soit également intervenu dans le cadre de l'action principale tenant à l'annulation de cette décision, à moins qu'il n'en ait par ailleurs lui-même directement demandé l'annulation.
5. La Fédération des conseils des parents d'élèves d'écoles publiques et la Fédération des conseils des parents d'élèves des écoles publiques du Morbihan interviennent en demandant le rejet des pourvois de la commune de Pluneret. Toutefois elles ne justifient ni même n'allèguent être intervenues en demande au soutien des requêtes à fin d'annulation présentées par M. et Mme A... F..., par M. K... et par M. A... I... et Mme A... P... devant le tribunal administratif de Rennes ou avoir elles-mêmes demandé l'annulation pour excès de pouvoir des décisions en litige. Ainsi, leurs interventions en cassation sont irrecevables.
Sur les pourvois :
6. L'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue. Il lui appartient également, l'urgence s'appréciant objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de chaque espèce, de faire apparaître dans sa décision tous les éléments qui, eu égard notamment à l'argumentation des parties, l'ont conduit à considérer que la suspension demandée revêtait un caractère d'urgence.
7. Pour estimer que la condition d'urgence était remplie, le juge des référés du tribunal administratif de Rennes s'est borné à relever que les décisions litigieuses retardaient de manière irréversible l'accès des enfants des requérants aux premiers apprentissages scolaires, et préjudiciaient ainsi de manière suffisamment grave et immédiate à leurs intérêts, sans tenir compte de l'argumentation en défense, qui n'était pas inopérante, de la commune de Pluneret, relative à l'impossibilité dans laquelle elle se trouvait, eu égard notamment à l'absence de projet éducatif propre à l'accueil des enfants n'ayant pas atteint l'âge de l'obligation scolaire, de locaux et de matériels adaptés, d'accueillir dans de bonnes conditions en classe de très petite section de maternelle les enfants âgés de moins de trois ans. Ses trois ordonnances sont ainsi entachées d'erreur de droit et d'insuffisance de motivation et doivent, dès lors, être annulées, sans qu'il y ait lieu de se prononcer sur les autres moyens des pourvois.
8. Il y a eu lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler les affaires au titre des procédures de référé engagées par M. et Mme A... F..., par M. K... et par M. M... et Mme A... P..., en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
Sur les demandes de suspension :
9. Aux termes de l'article L. 113-1 du code de l'éducation : " Dans les classes enfantines ou les écoles maternelles, les enfants peuvent être accueillis dès l'âge de deux ans révolus dans des conditions éducatives et pédagogiques adaptées à leur âge visant leur développement moteur, sensoriel et cognitif, précisées par le ministre chargé de l'éducation nationale. Cet accueil donne lieu à un dialogue avec les familles. Il est organisé en priorité dans les écoles situées dans un environnement social défavorisé, que ce soit dans les zones urbaines, rurales ou de montagne et dans les régions d'outre-mer (...) ". Aux termes de l'article D. 113-1 du même code : " Les enfants qui ont atteint l'âge de deux ans au jour de la rentrée scolaire peuvent être admis dans les écoles et les classes maternelles dans la limite des places disponibles. Ils y sont scolarisés jusqu'à la rentrée scolaire de l'année civile au cours de laquelle ils atteignent l'âge de six ans. / L'accueil des enfants de moins de trois ans est assuré en priorité dans les écoles et classes maternelles situées dans un environnement social défavorisé, que ce soit dans les zones urbaines, rurales ou de montagne et dans les régions d'outre-mer, et particulièrement en zone d'éducation prioritaire ". Ces dispositions, qui n'instituent pas un droit pour les enfants âgés de moins de trois ans à l'issue de l'année civile où a lieu la rentrée scolaire, qui ne sont pas soumis à l'obligation scolaire, à être accueillis dans les écoles et classes maternelles, impliquent que lorsque cet accueil peut être organisé, il le soit en priorité dans les écoles et classes maternelles situées dans un environnement social défavorisé et dans la limite des places disponibles. Saisi d'une demande d'admission dans une classe ou une école maternelle d'un enfant de moins de trois ans non soumis à l'obligation scolaire, il appartient au maire de se prononcer conformément aux dispositions précitées des articles L. 113-1 et D. 113-1 du code de l'éducation, en prenant en considération la situation particulière de l'école ou de la classe en cause, le cas échéant en lien avec les services de l'éducation nationale. Il ne peut en revanche refuser une telle admission sur le fondement de considérations de principe portant sur la scolarisation des enfants de moins de trois ans qu'il n'est pas compétent pour édicter.
10. Il ressort des pièces des dossiers que pour refuser d'inscrire les enfants B... A... F..., H... K... et C... A... I..., nées respectivement les 17 janvier, 3 février et 18 février 2019 en classe de très petite section à l'école maternelle Germaine Tillion au titre de l'année scolaire 2021-2022, le maire de Pluneret s'est fondé sur trois motifs. S'il résulte de ce qui est dit au point 9 que le maire ne pouvait légalement, ni refuser par principe d'admettre à l'école maternelle les enfants âgés de moins de trois ans en invoquant des considérations générales relatives au bien-être de l'enfant et à la " bienveillance éducative ", ni se borner à invoquer l'absence de droit pour les enfants de moins de trois ans à être accueillis dans les écoles et classes maternelles, il ressort des pièces des dossiers qu'il aurait pris la même décision s'il était fondé uniquement sur le motif tenant à l'absence de projet éducatif relatif à l'accueil des enfants non encore soumis à l'obligation scolaire et à l'insuffisance des moyens humains et matériels nécessaires à l'accueil de ces très jeunes enfants, alors même que de tels enfants étaient, au cours des années scolaires précédentes, accueillis au sein des classes de petite et moyenne sections de l'école maternelle Germaine Tillion. Eu égard à ces motifs, les moyens tirés de ce que les décisions attaquées méconnaîtraient les dispositions des articles L. 113-1 et D. 113-1 du code de l'éducation et seraient entachées d'erreur manifeste d'appréciation ne sont pas, en l'état de l'instruction, de nature à faire naître un doute sérieux sur leur légalité. Il en va de même du moyen tiré de ce que ces décisions seraient insuffisamment motivées.
11. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la condition d'urgence ni sur la recevabilité des demandes en tant qu'elles tendent à la suspension des courriels en date des 15 février et 4 mars 2021, que les demandes de suspension présentées par M. et Mme A... F..., par M. K... et par M. A... I... et Mme A... P... doivent être rejetées.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la commune de Pluneret qui n'est pas, dans les présentes instances, la partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Pluneret au titre de ces mêmes dispositions ni, en tout état de cause, à celles présentées par la Fédération des conseils des parents d'élèves des écoles publiques et la Fédération des conseils des parents d'élèves des écoles publiques du Morbihan, qui ne sont pas parties aux présentes instances.
D E C I D E :
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Article 1er : Les interventions de la Fédération des conseils des parents d'élèves des écoles publiques et de la Fédération des conseils des parents d'élèves des écoles publiques du Morbihan ne sont pas admises.
Article 2 : Les ordonnances du 26 août 2021 du tribunal administratif de Rennes sont annulées.
Article 3 : Les demandes présentées par M. et Mme A... F..., par M. K... et par M. A... I... et Mme A... P... devant le juge des référés du tribunal administratif de Rennes sont rejetées.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Pluneret, de M. et Mme A... F..., de M. K..., de M. A... I... et de Mme A... P..., et de la Fédération des conseils des parents d'élèves des écoles publiques et de la Fédération des conseils des parents d'élèves des écoles publiques du Morbihan présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la commune de Pluneret, à M. J... et Mme E... A... F..., à M. G... K..., à M. N... A... I... et à Mme D... A... P..., à la Fédération des conseils des parents d'élèves des écoles publiques et à la Fédération des conseils des parents d'élèves des écoles publiques du Morbihan.
Copie en sera adressée au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Délibéré à l'issue de la séance du 9 mai 2022 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; Mme Maud Vialettes, Mme Gaëlle Dumortier, présidentes de chambre ; Mme Carine Soulay, Mme Fabienne Lambolez, M. Jean-Luc Nevache, M. Damien Botteghi conseillers d'Etat ; M. Sylvain Monteillet, maître des requêtes et M. Edouard Solier, maître des requêtes-rapporteur ;
Rendu le 1er juin 2022.
La présidente :
Signé : Mme Christine Maugüé
Le rapporteur :
Signé : M. Edouard Solier
La secrétaire :
Signé : Mme Sylvie Alleil