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20/05/2022 | FRANCE | N°457501

France | France, Conseil d'État, 7ème chambre, 20 mai 2022, 457501


Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 457501, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 14 octobre 2021 et 15 mars 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... C... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 26 avril 2021 du Président de la République portant nomination et titularisation dans le grade de professeur de 2ème classe des écoles nationales supérieures d'architecture en tant qu'il n'y figure pas et la décision implicite de rejet de son recours gracieux contre ce décret en tant q

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2°) d'enjoindre au Président de la République de le no...

Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 457501, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 14 octobre 2021 et 15 mars 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... C... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 26 avril 2021 du Président de la République portant nomination et titularisation dans le grade de professeur de 2ème classe des écoles nationales supérieures d'architecture en tant qu'il n'y figure pas et la décision implicite de rejet de son recours gracieux contre ce décret en tant qu'il n'y figure pas ;

2°) d'enjoindre au Président de la République de le nommer en qualité de professeur de 2ème classe à compter du 1er septembre 2020 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° Sous le n° 460989, par une ordonnance n° 2103869 du 31 janvier 2022, enregistrée le 1er février 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la présidente du tribunal administratif de Lyon a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 341-2 du code de justice administrative, la requête présentée à ce tribunal par M. C....

Par cette requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 25 mai et 18 octobre 2021 au greffe du tribunal administratif de Lyon, et par un nouveau mémoire, enregistré le 15 mars 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, l'arrêté du 19 novembre 2020 par lequel la ministre de la culture a retiré l'arrêté du 21 juillet 2020 le nommant professeur de 2ème classe des écoles nationales supérieures d'architecture titulaire à compter du 1er septembre 2020 et l'affectant à l'école nationale supérieure d'architecture de Saint-Etienne et, d'autre part, l'arrêté du 20 novembre 2020 par lequel la ministre a retiré l'arrêté du 22 juillet 2020 le radiant du corps des maîtres de conférences des écoles nationales supérieures d'architecture à compter du 1er septembre 2020 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- l'ordonnance n° 58-1136 du 28 novembre 1958 ;

- le décret n° 2018-105 du 15 février 2018 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Didier Ribes, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Mireille Le Corre, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes visées ci-dessus présentent à juger des questions connexes. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

2. A l'issue de la procédure organisée en 2020 en vue du recrutement d'enseignants au sein de l'école nationale supérieure d'architecture de Saint-Etienne (ENSASE) et après avis favorable du comité de sélection mis en place conformément aux dispositions du décret du 15 février 2018 portant statut particulier du corps des professeurs et du corps des maîtres de conférences des écoles nationales supérieures d'architecture, M. C..., maître de conférences des écoles nationales supérieures d'architecture, a été nommé en qualité de professeur de 2ème classe des écoles nationales supérieures d'architecture par un arrêté de la ministre de la culture du 21 juillet 2020, classé au 3ème échelon de ce grade à compter du 1er septembre 2020, et affecté à l'ENSASE. Par un second arrêté du 22 juillet 2020, la ministre de la culture a prononcé la radiation de M. C... du corps des maîtres de conférences à compter de la date de sa nomination comme professeur. Par deux arrêtés des 19 et 20 novembre 2020, notifiés à l'intéressé le 26 avril 2021, la ministre a retiré, respectivement, les arrêtés précités des 21 et 22 juillet 2020. Par ailleurs, par un décret du 26 avril 2021, le président de la République a procédé à la nomination et à la titularisation, à compter du 1er septembre 2020, de professeurs de 2ème classe des écoles nationales supérieures d'architecture. M. C... demande, d'une part, l'annulation des arrêtés de la ministre de la culture des 19 et 20 novembre 2020 et, d'autre part, l'annulation, en tant que son nom n'y figure pas, du décret du 26 avril 2021 du Président de la République et de la décision implicite de rejet de son recours gracieux contre ce décret. Ces dernières conclusions doivent être regardées comme dirigées contre le refus implicite du Président de la République de le nommer professeur de 2ème classe des écoles nationales supérieures d'architecture à compter du 1er septembre 2020.

Sur les conclusions dirigées contre les arrêtés des 19 et 20 novembre 2020 :

3. Aux termes de l'article L. 242-1 du code des relations entre le public et l'administration : " L'administration ne peut abroger ou retirer une décision créatrice de droits de sa propre initiative ou sur la demande d'un tiers que si elle est illégale et si l'abrogation ou le retrait intervient dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision ".

4. Aux termes de l'article 2 de l'ordonnance du 28 novembre 1958 portant loi organique concernant les nominations aux emplois civils et militaires de l'Etat : " Sont nommés par décret du Président de la République : (...) Les professeurs de l'enseignement supérieur (...) ". Aux termes de l'article 52 du décret du 15 février 2018 portant statut particulier du corps des professeurs et du corps des maîtres de conférences des écoles nationales supérieures d'architecture : " Les professeurs sont nommés, par décret, en qualité de stagiaire pour une durée d'un an. (...) Les stagiaires appartenant au corps des maîtres de conférences des écoles d'architecture à la date de leur nomination et les enseignants associés qui ont satisfait aux épreuves des concours pour le recrutement des professeurs sont dispensés de stage. (...) "

5. En premier lieu, il résulte de ces dispositions que si la ministre de la culture est compétente pour arrêter le classement indiciaire et l'affectation d'un professeur des écoles nationales d'architecture, elle n'est pas compétente pour décider du recrutement d'un tel professeur ni par voie de conséquence, pour prononcer la radiation de l'intéressé du corps des maîtres de conférences des écoles nationales supérieures d'architecture. Elle pouvait donc légalement procéder, pour ce motif qui suffit à lui seul à les justifier, aux retraits de l'arrêté du 21 juillet 2020 portant recrutement de M. C... en qualité de professeur de 2ème classe des écoles nationales supérieures d'architecture et de l'arrêté du 22 juillet 2020 radiant M. C... du corps des maîtres de conférences des écoles nationales supérieures d'architecture.

6. En second lieu, d'une part, contrairement à ce que soutient M. C..., la ministre a pris ces décisions de retrait les 19 et 20 novembre 2020, soit avant l'expiration du délai de quatre mois dont elle disposait. La circonstance que ces décisions de retrait ne lui aient été notifiées que le 22 avril 2021, donc après l'expiration du délai de quatre mois imparti à la ministre, est sans incidence sur leur légalité. D'autre part, il résulte de ce qui a été dit au point précédent que la ministre était tenue de procéder au retrait des arrêtés des 21 et 22 juillet 2020. Le moyen tiré de ce que ces décisions de retrait ne seraient pas motivées est, par suite, inopérant.

7. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à demander l'annulation des arrêtés du 19 et du 20 novembre 2020. Sa requête dirigée contre ces arrêtés doit, par suite, être rejetée.

Sur les conclusions dirigées contre le refus implicite du Président de la République de nommer M. C... professeur des écoles nationales supérieures d'architecture :

8. Aux termes de l'article 47 du décret du 15 février 2018 portant statut particulier du corps des professeurs et du corps des maîtres de conférences des écoles nationales supérieures d'architecture : " Les professeurs sont recrutés par concours ouverts par établissement en vue de pourvoir un ou plusieurs emplois d'une même discipline vacants parmi les candidats inscrits sur une liste de qualification aux fonctions de professeurs des écoles d'architecture établie par le conseil national des enseignants-chercheurs des écoles nationales supérieures d'architecture ".

9. En premier lieu, il n'est pas contesté que M. C... remplissait les conditions prévues par l'article 47 du décret du 15 février 2018 précité et qu'il a été classé premier du concours organisé en 2020 pour le recrutement d'un professeur des écoles nationales supérieures d'architecture dans la discipline " Théories et pratiques de la conception architecturale et urbaine (TPCAU) au sein de l'Ecole nationale supérieure d'architecture de Saint-Etienne ".

10. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que si M. C... a participé aux réunions du conseil pédagogique et scientifique de l'établissement et de plusieurs comités de sélection mis en place pour le recrutement de maîtres de conférences dans le cadre du même cycle de recrutement, il n'a pas participé à la procédure de recrutement aux postes de professeur auxquels il a été candidat et n'a pas bénéficié d'informations qui lui auraient conféré des avantages sur les autres candidats. Ainsi, contrairement à ce que soutiennent la ministre de la culture et la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, il n'est pas établi que cette procédure de recrutement aurait été entachée d'irrégularité.

11. Par suite et en l'absence d'invocation par l'administration d'un autre motif susceptible de faire obstacle à la nomination de l'intéressé, le Président de la République était tenu de nommer M. C..., lauréat du concours de recrutement organisé à cet effet, en qualité de professeur des écoles nationales supérieures d'architecture.

12. Il résulte de ce qui précède que M. C... est fondé à demander l'annulation du refus implicite du Président de la République de le nommer dans le grade de professeur de 2ème classe des écoles nationales supérieures d'architecture et à ce qu'il lui soit enjoint de le faire.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. C... enregistrée sous le n° 460989 est rejetée.

Article 2 : Le refus implicite du Président de la République de nommer M. C... dans le grade de professeur de 2ème classe des écoles nationales supérieures d'architecture est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au Président de la République de nommer et titulariser M. C... dans le grade de professeur de 2ème classe des écoles nationales supérieures d'architecture à compter du 1er septembre 2020.

Article 4 : L'Etat versera à M. C... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. A... C..., à la Première ministre, à la ministre de la culture et à la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.

Délibéré à l'issue de la séance du 21 avril 2022 où siégeaient : M. Olivier Japiot, président de chambre, présidant ; M. Gilles Pellissier, conseiller d'Etat et M. Didier Ribes, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 20 mai 2022.

Le président :

Signé : M. Olivier Japiot

Le rapporteur :

Signé : M. Didier Ribes

La secrétaire :

Signé : Mme Pierrette Kimfunia


Synthèse
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 457501
Date de la décision : 20/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 20 mai. 2022, n° 457501
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Didier Ribes
Rapporteur public ?: Mme Mireille Le Corre

Origine de la décision
Date de l'import : 31/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:457501.20220520
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