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21/04/2022 | FRANCE | N°448136

France | France, Conseil d'État, 6ème - 5ème chambres réunies, 21 avril 2022, 448136


Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 448136, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 24 décembre 2020 et 4 janvier 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association One Voice demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 23 octobre 2020 de la ministre de la transition écologique et du ministre de l'agriculture et de l'alimentation fixant les conditions et limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant le loup (Cani

s lupus) ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au t...

Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 448136, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 24 décembre 2020 et 4 janvier 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association One Voice demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 23 octobre 2020 de la ministre de la transition écologique et du ministre de l'agriculture et de l'alimentation fixant les conditions et limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant le loup (Canis lupus) ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° Sous le n° 448185, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 28 décembre 2020 et 21 mars 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Association pour la protection des animaux sauvages (ASPAS) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 23 octobre 2020 de la ministre de la transition écologique et du ministre de l'agriculture et de l'alimentation fixant les conditions et limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant le loup (Canis lupus) ;

2°) à titre subsidiaire, de transmettre à la Cour de justice de l'Union européenne une question préjudicielle relative à la conformité des dispositions de l'arrêté attaqué avec l'article 16 de la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

3° Sous le n° 448210, par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 29 décembre 2020 et 29 mars 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association FERUS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 23 octobre 2020 de la ministre de la transition écologique et du ministre de l'agriculture et de l'alimentation fixant les conditions et limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant le loup (Canis lupus) ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la Constitution et son Préambule ;

- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 ;

- le code de l'environnement ;

- le décret n° 2018-786 du 12 septembre 2018 ;

- le décret n° 2019-722 du 9 juillet 2019 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Airelle Niepce, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, Sebagh, avocat de l'association Ferus ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article 12 de la directive 92/43/CEE du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, dite " directive Habitats " : " 1. Les Etats membres prennent les mesures nécessaires pour instaurer un système de protection stricte des espèces animales figurant à l'annexe IV point a), dans leur aire de répartition naturelle, interdisant : a) toute forme de capture ou de mort intentionnelle de spécimens de ces espèces dans la nature ; b) la perturbation intentionnelle de ces espèces, notamment durant la période de reproduction et de dépendance (...) ". Le loup est au nombre des espèces figurant au point a) de cette annexe IV de la directive. L'article 16 de la même directive énonce toutefois que : " 1. A condition qu'il n'existe pas une autre solution satisfaisante et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle, les Etats membres peuvent déroger aux dispositions des articles 12, 13, 14 et de l'article 15 points a) et b) : (...) b) pour prévenir des dommages importants notamment aux cultures, à l'élevage, aux forêts, aux pêcheries, aux eaux et à d'autres formes de propriété ".

2. Aux termes du I de l'article L. 411-1 du code de l'environnement, pris pour la transposition de la directive du 21 mai 1992 précitée : " Lorsqu'un intérêt scientifique particulier, le rôle essentiel dans l'écosystème ou les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation (...) d'espèces animales non domestiques (...) et de leurs habitats, sont interdits : 1° (...) la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d'animaux de ces espèces (...) ". Aux termes de l'article L. 411-2 du même code, pris pour la transposition de l'article 16 de la même directive : " I. - Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles sont fixées : 1° La liste limitative des habitats naturels, des espèces animales non domestiques (...) ainsi protégés ; 2° La durée et les modalités de mise en œuvre des interdictions prises en application du I de l'article L. 411-1 ; 3° La partie du territoire sur laquelle elles s'appliquent (...) ; 4° La délivrance de dérogations aux interdictions mentionnées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 411-1, à condition qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante, pouvant être évaluée par une tierce expertise menée, à la demande de l'autorité compétente, par un organisme extérieur choisi en accord avec elle, aux frais du pétitionnaire, et que la dérogation ne nuise pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle : / a) Dans l'intérêt de la protection de la faune et de la flore sauvages et de la conservation des habitats naturels ; b) Pour prévenir des dommages importants notamment aux cultures, à l'élevage (...) et à d'autres formes de propriété ".

3. Pour l'application de ces dernières dispositions, l'article R. 411-1 du code de l'environnement prévoit que la liste des espèces animales non domestiques faisant l'objet des interdictions définies à l'article L. 411-1 est établie par arrêté conjoint du ministre chargé de la protection de la nature et du ministre chargé de l'agriculture. L'article R. 411-6 du même code précise que : " Les dérogations définies au 4° de l'article L. 411-2 sont accordées par le préfet, sauf dans les cas prévus aux articles R. 411-7 et R. 411-8. / (...) ". Le 2° de son article R. 411-13 prévoit que les ministres chargés de la protection de la nature et de l'agriculture fixent par arrêté conjoint, pris après avis du Conseil national de la protection de la nature, "... si nécessaire, pour certaines espèces dont l'aire de répartition excède le territoire d'un département, les conditions et limites dans lesquelles les dérogations sont accordées afin de garantir le respect des dispositions du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement ".

4. Sur le fondement de ces dispositions, l'arrêté du 23 octobre 2020 fixant les conditions et limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant le loup (Canis lupus), précise les modalités selon lesquelles des dérogations aux interdictions de destruction de loups peuvent être accordées par les préfets en vue de la protection des troupeaux domestiques aux fins de prévenir et limiter les dommages occasionnés par les attaques de loup. Son article 2 prévoit que le nombre maximum de loups dont la destruction est autorisée, en application de l'ensemble des dérogations qui pourront être accordées par les préfets, est fixé chaque année selon des modalités prévues par arrêté ministériel. Ses articles 3 à 5 prescrivent diverses mesures pour assurer le respect de ce plafond, en particulier l'obligation pour les bénéficiaires de dérogations d'informer les préfets, en cas de destruction ou de blessure d'un loup lors des opérations qu'ils mettent en œuvre, et, pour les préfets, d'informer les administrations et établissements publics concernés ainsi que les autres bénéficiaires de dérogations. Les autres dispositions de l'arrêté encadrent les conditions dans lesquelles il peut être recouru à des mesures, d'effet gradué et pouvant être combinées, destinées à mettre les troupeaux à l'abri de la prédation du loup. Ainsi, peuvent être opérées des opérations d'effarouchement aux fins d'éviter les tentatives de prédation du loup, des tirs de défense, éventuellement renforcée, destinés à défendre directement les troupeaux d'une attaque et des tirs de prélèvement, qui permettent la destruction de spécimens en dehors d'une opération de protection immédiate d'un troupeau. Par ailleurs, dans certaines zones identifiées au sein de " fronts de colonisation du loup ", où il a été établi que les modes de conduite des troupeaux les rendent particulièrement vulnérables aux attaques de loups en l'absence de mesures de protection à la fois efficaces et compatibles avec ces modes de conduite, l'article 31 de l'arrêté permet, sous certaines conditions, de recourir aux tirs de défense et de prélèvement sans que les troupeaux bénéficient de mesure de protection.

5. Les requêtes nos 448136, 448185 et 448210 formées respectivement par l'association One Voice, l'Association pour la protection des animaux sauvages (ASPAS) et l'association FERUS tendent à l'annulation pour excès de pouvoir de cet arrêté. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

Sur la légalité externe :

6. En premier lieu, d'une part, il résulte des dispositions de l'article L. 123-19-1 du code de l'environnement que la personne publique concernée doit mettre à la disposition du public des éléments suffisants pour que la consultation du public organisée, en vertu de ces dispositions, sur un projet de décision ayant une incidence sur l'environnement puisse avoir lieu utilement. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué a fait l'objet d'une consultation du public sur le site internet dédié du ministère chargé de l'environnement entre le 17 août et le 13 septembre 2020, accompagné d'une note de présentation exposant de façon précise et détaillée le cadre juridique applicable, l'objet et le bilan tiré de l'expérimentation menée en 2019 et 2020 en vue d'une évolution de ce cadre juridique, ainsi que les modifications envisagées dans le projet. Contrairement à ce qui est soutenu, ces éléments étaient de nature à permettre au public de participer utilement à la consultation ainsi organisée. La circonstance qu'il n'aurait pas été tenu compte du sens de la majorité des observations formulées à l'occasion de cette consultation n'est, en tant que telle, pas de nature à entacher l'arrêté d'illégalité. De même, le défaut de publication de la synthèse des observations du public ainsi que des motifs de l'arrêté attaqué antérieurement ou concomitamment à sa publication est, par lui-même, sans incidence sur la légalité de celui-ci.

7. En second lieu, aux termes de l'article R. 134-28 du code de l'environnement, les membres du Conseil national de la protection de la nature " reçoivent, quinze jours au moins avant la date de la réunion, une convocation comportant l'ordre du jour et, le cas échéant, les documents nécessaires à l'examen des affaires qui y sont inscrites ". Il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce qui est soutenu, les membres du Conseil national de la protection de la nature ont été destinataires, préalablement à la réunion de celui-ci, de tous les documents nécessaires à l'examen du projet d'arrêté attaqué. Par ailleurs, s'ils n'ont été convoqués que le 25 juin 2020, pour une réunion fixée au 2 juillet 2020, soit moins de quinze jours avant cette date, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'une telle irrégularité aurait exercé une influence sur l'avis rendu le 12 juillet 2020 par le Conseil, ni qu'elle aurait privé les personnes intéressées d'une garantie. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué aurait été adopté au terme d'une procédure irrégulière, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 134-28 du code de l'environnement, doit être écarté.

Sur la légalité interne :

S'agissant de la condition posée au 4° du I de l'article L. 411-2 du code de l'environnement relative à l'objectif de prévenir des dommages importants à l'élevage :

8. Il résulte des dispositions du 4° du I de l'article L. 411-2 du code de l'environnement qu'elles ne subordonnent pas la légalité des dérogations qu'elles prévoient au constat préalable de dommages importants occasionnés directement au troupeau susceptible de bénéficier de l'octroi d'une telle dérogation, mais à l'existence d'un risque suffisamment avéré de tels dommages, que la dérogation a pour objet de prévenir.

9. Il ressort des pièces du dossier que si les dommages occasionnés à l'élevage par des attaques de loups ont eu tendance à se stabiliser sur le territoire national au cours des dernières années après une forte augmentation depuis l'année 2010, 3 742 attaques occasionnant 12 451 victimes sur 35 départements ont encore été dénombrées en 2019 faisant suite aux 3 660 attaques occasionnant 12 523 victimes sur 31 départements dénombrées en 2018. Ces dommages ont donné lieu au versement d'un peu plus de 3 millions d'euros d'indemnisation aux éleveurs en 2019, selon les données publiées par le préfet coordonnateur du plan national d'actions sur le loup. Afin de prévenir ou limiter ces dommages, les articles 11 à 29 de l'arrêté attaqué précisent les modalités selon lesquelles des opérations de destruction de loups par la mise en œuvre de tirs pour défendre les troupeaux ou de tirs de prélèvement peuvent être réalisées, l'article 2 de l'arrêté posant un principe de concentration des moyens d'intervention sur les territoires ou les élevages les plus touchés par la prédation.

10. En premier lieu, en vertu de l'article 11 de l'arrêté attaqué, la caractérisation d'une attaque est conditionnée à l'existence d'au moins une victime indemnisable au titre de la prédation du loup, ce dont il résulte nécessairement que la responsabilité du loup a été retenue dans les conditions prévues par le décret du 9 juillet 2019 relatif à l'indemnisation des dommages causés aux troupeaux domestiques par le loup, l'ours et le lynx. Par suite, contrairement à ce qui est soutenu, seuls les dommages imputables au loup dans les conditions prévues par ce décret sont pris en compte par l'arrêté attaqué pour justifier le cas échéant la délivrance d'une autorisation de tirs de défense. Par ailleurs, il résulte des termes de son article 12 que les tirs de défense ne peuvent être mis en œuvre que dans les territoires soumis à la prédation du loup, à proximité du troupeau concerné et sur les pâturages, surfaces et parcours mis en valeur par le bénéficiaire de la dérogation ainsi qu'à leur proximité immédiate.

11. En deuxième lieu, aux termes de l'article 14 de l'arrêté attaqué, les tirs de défense simple " peuvent intervenir dès lors que des mesures de protection ont été mises en œuvre ou que le troupeau est reconnu comme ne pouvant être protégé ". Si, ce faisant, la délivrance d'une autorisation de tirs de défense simple n'est pas subordonnée à l'existence d'une attaque préalable directe contre chacun des troupeaux susceptibles de faire l'objet de ces tirs, d'une part, les dispositions de l'article L. 411-2 du code de l'environnement ne conditionnent pas la légalité des dérogations à un tel constat, d'autre part, ces tirs ne peuvent en pratique être régulièrement mis en œuvre que dans des territoires où la prédation du loup a été préalablement identifiée et à proximité du troupeau, dans un contexte où le risque d'attaque peut donc être regardé comme suffisamment avéré. En outre, si l'article 15 de l'arrêté attaqué prévoit que l'autorisation de tir de défense simple peut être mise en œuvre pour une durée maximale de cinq ans, il n'a ni pour objet, ni pour effet de dispenser cette autorisation des conditions de mise en œuvre de ces tirs précisées aux articles 12 et 14.

12. En troisième lieu, outre les conditions posées à l'article 12 de l'arrêté attaqué mentionnées au point 10, la mise en œuvre de tirs de défense renforcée ne peut intervenir, aux termes de son article 17, que dès lors que des mesures de protection ont été mises en œuvre ou que le troupeau est reconnu comme ne pouvant être protégé et que, malgré la mise en place effective de ces mesures et après un recours préalable à des tirs de défense simple, le troupeau, soit " a subi au moins trois attaques dans les douze mois précédant la demande de dérogation ", soit se situe dans un territoire où il est constaté au cours des derniers mois, sur la base du suivi des dommages dus au loup effectué en application de l'article 6 de l'arrêté, " des dommages importants dans les élevages ayant mis en œuvre les tirs de défense simple et malgré l'installation de mesures de protection des troupeaux (sauf pour les troupeaux reconnus comme ne pouvant être protégés) ". Ce faisant, l'arrêté attaqué ne permet le recours à des tirs de défense renforcée que dans l'hypothèse où le troupeau concerné a déjà subi des dommages caractérisés ou se trouve à proximité de troupeaux ayant subi de tel dommages sans que les tirs de défense simple aient montré leur efficacité.

13. En quatrième lieu, aux termes de l'article 22 de l'arrêté attaqué, des tirs de prélèvement peuvent être autorisés à l'encontre de loups, soit s'il est constaté, sur la base du suivi des dommages effectué en application de son article 6, des " dommages exceptionnels dans les élevages ayant mis en œuvre les tirs de défense simple ", soit s'il est constaté " des dommages exceptionnels au cours des 12 derniers mois sur une zone de présence permanente du loup non constituée en meute (...) et isolée géographiquement d'autres zones de présence permanente, dans les élevages ayant installé des mesures de protection des troupeaux (sauf pour les élevages reconnus comme ne pouvant être protégés), et / - au moins deux autorisations de tirs de défense renforcée tels que prévus aux articles 16 à 17 ont été mises en œuvre au cours des 12 derniers mois ; et - dans la mesure où les troupeaux demeurent dans les conditions où ils sont exposés à la prédation du loup ". Si la notion de " dommages exceptionnels " n'est pas définie en tant que telle, elle implique que la prédation du loup constitue une perturbation d'ampleur portée aux activités pastorales occasionnant des dommages qui vont au-delà des dommages pouvant être qualifiés d'importants, notamment au regard de leur récurrence et du nombre de victimes constatées.

14. Il résulte ce qui précède que, contrairement à ce qui est soutenu par les associations requérantes, les dispositions de l'arrêté attaqué encadrent le recours aux différents types de tirs de destruction qu'elles prévoient de façon à garantir qu'en toute hypothèse, ces tirs répondent à l'objectif de prévenir des dommages importants causés à l'élevage. Par suite, les moyens tirés d'une méconnaissance des dispositions du 4° du I de l'article L. 411-2 du code de l'environnement sur ce point doivent être écartés.

S'agissant de la condition posée au 4° du I de l'article L. 411-2 du code de l'environnement relative à l'absence d'autre solution satisfaisante :

15. En premier lieu, il ressort des données publiées par le préfet coordonnateur du plan national d'actions sur le loup que le montant des financements alloués aux fins de mise en place des mesures de protection prévues par l'arrêté du 19 juin 2009 relatif à l'opération de protection de l'environnement dans les espaces ruraux (OPEDER) portant sur la protection des troupeaux contre la prédation, auquel s'est substitué l'arrêté du 28 novembre 2019 ayant le même objet, était de l'ordre de 6 millions d'euros en 2010, pour atteindre près de 26,8 millions d'euros en 2019 et plus de 28,6 millions d'euros en 2020. Il ressort à cet égard des pièces du dossier qu'en 2019, plus de 2 700 structures agricoles bénéficiaient du dispositif de l'OPEDER représentant une augmentation de 7 % par rapport à 2018. Or, malgré l'importance de ces investissements dans des mesures de protection, le niveau des dommages occasionnés à l'élevage par des attaques de loups n'a, ainsi qu'il a été relevé au point 9, cessé d'augmenter sur la même période 2010-2020 même s'il tend à se stabiliser depuis 2018. Dans ce contexte, les mesures destinées à protéger les troupeaux de même que les mesures destinées à éloigner les loups, telles les opérations d'effarouchement mentionnées aux articles 7 à 10 de l'arrêté attaqué et déjà prévues dans le dispositif réglementaire antérieurement applicable, ne sauraient être regardées comme de nature à constituer, à elles seules, des alternatives satisfaisantes aux tirs de destruction prévus par l'arrêté attaqué pour prévenir des dommages importants à l'élevage.

16. En deuxième lieu, si les dispositions du III de l'article 12 et du II de l'article 27 de l'arrêté attaqué prévoient de façon similaire, respectivement s'agissant des conditions de mise en œuvre des tirs de défense et des tirs de prélèvement, que tous les moyens susceptibles d'améliorer les tirs de défense simple et de défense renforcée et les tirs de prélèvement, notamment les moyens pour détecter la présence de spécimens de loups, pourront être utilisés, cette circonstance est sans incidence sur les conditions posées à la délivrance de l'autorisation de procéder à ces différents types de tirs et en particulier sur la nécessité de procéder à une réponse graduée et d'établir l'absence d'autre solution satisfaisante. A cet égard, ces dispositions n'ont ni pour objet ni pour effet de conduire à poser des conditions identiques à la mise en œuvre de tirs de défense et de tirs de prélèvement.

17. En troisième lieu, d'une part, les dispositions des articles 14, 17 et 22 de l'arrêté attaqué soumettent l'intervention respectivement des tirs de défense simple, des tirs de défense renforcée et des tirs de prélèvement à la mise en œuvre de mesures de protection qui, en vertu des dispositions du III de l'article 6 du même arrêté, correspondent à " l'installation effective et proportionnée de moyens de prévention de la prédation par le loup dans le cadre de l'opération de protection de l'environnement dans les espaces ruraux portant sur la protection des troupeaux contre la prédation, en application de l'arrêté du 28 novembre 2019 susvisé (arrêté OPEDER cité au point 11), ou de mesures jugées équivalentes par les directions départementales des territoires et des territoires et de la mer ". A cet égard, l'article 5 de l'arrêté du 28 novembre 2019 liste plusieurs options pour le dispositif de protection des troupeaux, soit le gardiennage renforcé, la surveillance renforcée, les chiens de protection, les investissements matériels (parcs électrifiés), une analyse de vulnérabilité et un accompagnement technique, qui sont précisées par une instruction technique du ministre chargé de l'agriculture en vertu de l'article 16 du même arrêté. Si les associations requérantes soutiennent que le caractère effectif de la mise en place de ces mesures de protection ainsi que leur efficacité ne seraient pas suffisamment contrôlés ou devraient faire l'objet d'une étude d'impact et que l'arrêté ne comporte pas de dispositions encadrant les modalités selon lesquelles ces contrôles devraient être effectués, ces considérations sont par elles-mêmes sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué.

18. D'autre part, les mêmes articles de l'arrêté attaqué prévoient respectivement que des tirs de défense simple, des tirs de défense renforcée et des tirs de prélèvement peuvent être autorisés au bénéfice d'un troupeau dont il est reconnu qu'il ne peut pas être protégé au sens du III de son article 6. En vertu de ces dernières dispositions, un ou plusieurs troupeaux ou une partie d'un troupeau peuvent être reconnus, par le préfet de département, sur la base d'une analyse technico-économique réalisée au cas par cas et soumise pour avis au préfet coordonnateur du plan national d'actions sur le loup, comme ne pouvant être protégés. Cette analyse a notamment pour objet de déterminer si des mesures de protection sont susceptibles de constituer une alternative satisfaisante aux mesures de dérogation prévues par l'arrêté. La circonstance que ces dispositions ne confient pas expressément la réalisation de cette analyse technico-économique à la direction départementale des territoires, contrairement à ce qui est précisé à l'article 5 du décret du 9 juillet 2019 relatif à l'indemnisation des dommages causés aux troupeaux domestiques par le loup, l'ours et le lynx, est sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué, qui n'a pas été pris pour l'application de ce décret.

19. En quatrième lieu, l'article 17 de l'arrêté attaqué, relatif aux conditions de mise en œuvre des tirs de défense renforcée, prévoit en son III que, lorsqu'un loup est tué lors d'une opération de tir de défense renforcée, l'autorisation de tir délivrée est en principe suspendue. Si les mêmes dispositions permettent néanmoins au préfet de prolonger cette autorisation, ce n'est que si les conditions de fond prévues au II du même article demeurent respectées. Ainsi, le préfet ne peut prolonger une autorisation de tir de défense renforcée après l'abattage d'un loup que, d'une part, si des mesures de protection ont été mises en œuvre ou que le troupeau a été reconnu comme ne pouvant être protégé et, d'autre part, si malgré la mise en place effective de ces mesures, soit le troupeau a subi trois attaques dans les douze mois précédents, soit il se situe dans un territoire sur lequel des dommages importants aux élevages ont été constatés alors que des tirs de défense simple ont été mis en œuvre et des mesures de protection effectivement mises en place. Par suite, contrairement à ce qui est soutenu, la prolongation de l'autorisation de tirs de défense est bien conditionnée à la démonstration de l'absence d'autre solution satisfaisante.

20. En dernier lieu, si en vertu des dispositions du II de l'article 31 de l'arrêté attaqué, le recours à des tirs de destruction peut être autorisé sans que les troupeaux bénéficient de mesures de protection, cette possibilité n'est ouverte, en vertu des dispositions du I du même article, que dans des zones identifiées par voie réglementaire, répondant à des critères cumulatifs destinés notamment à vérifier que les mesures de protection sont insusceptibles d'y constituer une alternative satisfaisante aux mesures de dérogation prévues à l'article L. 411-2 du code de l'environnement.

21. Il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de la méconnaissance de la condition relative à l'absence d'autre solution satisfaisante posée au 4° du I de l'article L. 411-2 du code de l'environnement ainsi que du caractère injustifié et disproportionné des mesures édictées par l'arrêté attaqué au regard des dispositions de ce même article doivent être écartés.

S'agissant de la condition posée au 4° du I de l'article L. 411-2 du code de l'environnement relative au maintien de l'espèce dans un état de conservation favorable dans son aire de répartition naturelle :

22. Aux termes du I de l'article 2 de l'arrêté attaqué, " le nombre maximum de spécimens de loups (...) dont la destruction est autorisée, en application de l'ensemble des dérogations qui pourront être accordées par les préfets, est fixé chaque année selon des modalités prévues par arrêté ministériel ". L'arrêté attaqué se borne à préciser les modalités selon lesquelles des tirs de destruction peuvent être mis en œuvre dans la limite du plafond fixé par cet autre arrêté.

23. En premier lieu, d'une part, les dispositions du I de l'article 3 de l'arrêté attaqué prévoient que toutes les dérogations accordées cessent de produire effet lorsque ce plafond est atteint. En vertu des dispositions du II du même article, le préfet coordonnateur du plan national d'actions sur le loup peut suspendre les autorisations de tirs de défense renforcée et de tirs de prélèvement à compter du 1er septembre et pour une période pouvant aller jusqu'au 31 décembre. Par ailleurs, l'article 1er de l'arrêté du 23 octobre 2020 fixant le nombre maximum de spécimens de loups dont la destruction pourra être autorisée chaque année, qui fixe le plafond de destructions autorisées à 19 % de l'effectif moyen de loups estimé annuellement, prévoit que, lorsque le seuil de 17 % est atteint avant la fin de l'année civile, les tirs de prélèvement ne peuvent plus être mis en œuvre que dans les " fronts de colonisation " du loup définis à l'article 31 de l'arrêté attaqué. D'autre part, les dispositions de l'article 5 de l'arrêté attaqué imposent aux bénéficiaires de dérogations d'informer immédiatement le préfet de département " de toute destruction ou blessure de loup intervenue dans le cadre des opérations qu'ils ont mis en œuvre ", le préfet devant lui-même informer aussitôt tous les autres bénéficiaires de dérogations, les maires, les administrations et les établissements publics concernés du département ainsi que les préfets des autres départements qui doivent procéder de même à l'égard les bénéficiaires de dérogations, des maires, des administrations et des établissements publics concernés de leur département. Ce faisant, contrairement à ce qui est soutenu, l'arrêté attaqué, tel que complété par les dispositions de l'arrêté du même jour fixant le nombre maximum de spécimens de loups dont la destruction pourra être autorisée chaque année, comporte des dispositions suffisantes propres à éviter tout dépassement du plafond des destructions autorisées annuellement de nature à porter atteinte au maintien de l'espèce dans un état de conservation favorable dans son aire de répartition naturelle.

24. En deuxième lieu, la circonstance que les dispositions de l'article 20 de l'arrêté attaqué prévoient que les tirs de prélèvement peuvent être mis en œuvre dès le 1er juillet, alors qu'ils ne pouvaient l'être auparavant qu'à compter du mois de septembre, est par elle-même sans incidence, en l'absence d'élément permettant de penser que le loup serait particulièrement vulnérable durant l'été, sur le respect de la condition du maintien de l'espèce dans un état de conservation favorable dans son aire de répartition naturelle posée au 4° du I de l'article L. 411-2 du code de l'environnement. Par ailleurs, si les dispositions de l'article 12 de l'arrêté attaqué, qui précisent les conditions communes de mise en œuvre des tirs de défense simple et renforcée, ne comportent aucune restriction concernant la période au cours de laquelle ces tirs peuvent être employés et si les dispositions de son article 20 prévoient que les opérations de tirs de prélèvement peuvent être mises en œuvre jusqu'au 31 décembre, soit pendant une partie de la période de reproduction, il en était déjà ainsi en application des dispositions de l'arrêté jusqu'alors en vigueur, dont il n'est pas établi qu'elles auraient eu une incidence sur la croissance de la population de loups constatée en France.

25. En troisième lieu, si les dispositions du III de l'article 9, du II de l'article 12 et du I de l'article 19 de l'arrêté attaqué prévoient que les tirs ne peuvent être mis en œuvre dans le cœur des parcs nationaux dont le décret portant création interdit la chasse ainsi que, s'agissant des tirs de défense et de prélèvement, dans les réserves naturelles nationales constituées pour des motifs incluant la conservation de la faune sauvage, elles n'ont ni pour objet, ni pour effet, de limiter à ces zones protégées l'aire de répartition naturelle du loup à prendre en compte pour apprécier la légalité de la faculté de dérogation ouverte à l'article L. 411-2 du code de l'environnement. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté comporterait une définition de la notion d'aire de répartition naturelle contraire aux dispositions de l'article 16 de la directive du 21 mai 1992 et de l'article L. 411-2 du code de l'environnement doit être écarté.

26. En quatrième lieu, l'association FERUS soutient que, en tant qu'il ne prévoit pas un encadrement systématique des opérations de tirs de destruction par des agents de l'Office français de la biodiversité (OFB), ni de contrôle des chasseurs lorsqu'ils mettent en œuvre de tels tirs, l'arrêté attaqué ne permettrait pas de garantir que les autorisations de tirs accordées par le préfet ne nuiront pas au maintien de l'espèce dans un état de conservation favorable dans son aire de répartition naturelle. Toutefois, l'arrêté attaqué prévoit une définition des modalités de tirs " sous le contrôle technique de l'OFB ou d'un lieutenant de louveterie " ainsi qu'une obligation de formation auprès de l'OFB qui, contrairement à ce qui est allégué, s'impose à toutes les personnes effectuant des tirs de défense et de prélèvement, y compris les chasseurs. Par ailleurs, il ressort des termes mêmes du dernier alinéa de son article 27 relatif aux moyens d'amélioration de l'efficacité des tirs de prélèvement que ces moyens ne sont pas autorisés dans le cadre des battues ou autres modes de chasse au grand gibier réalisées en application des articles 25 et 26 de l'arrêté.

27. En dernier lieu, si en vertu de l'article 31 de l'arrêté attaqué, le recours à des tirs de défense et de prélèvement peut être autorisé selon des modalités dérogatoires précisées à son II, dans des zones délimitées par arrêté au sein des fronts de colonisation tels que définis à son article 30, dans lesquelles, " du fait des modes de conduite des troupeaux d'animaux domestiques, la mise en œuvre des mesures de protection des troupeaux contre la prédation du loup présente des difficultés importantes, constatées à la suite d'une ou plusieurs attaques de loup sur les troupeaux ", la possibilité ainsi ouverte de recourir à des tirs de destruction selon des modalités dérogatoires ne peut s'exercer que dans la limite du plafond annuel fixé par l'arrêté prévu à l'article 2 de l'arrêté attaqué, lui-même soumis à l'exigence de garantir le maintien de l'espèce dans un état de conservation favorable dans son aire de répartition naturelle.

28. Il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de la méconnaissance de la condition relative au maintien de l'espèce dans un état de conservation favorable dans son aire de répartition naturelle posée au 4° du l'article L. 411-2 du code de l'environnement doivent être écartés.

S'agissant du moyen tiré de la méconnaissance du principe de non-régression :

29. En adoptant les dispositions de l'article L. 411-2 du code de l'environnement citées ci-dessus, le législateur a entendu déroger à l'interdiction de destruction de certaines espèces protégées et de leurs habitats, posée par l'article L. 411-1 du même code, conformément aux objectifs et principes de la directive du 21 mai 1992, en précisant les conditions préalables à la délivrance d'une dérogation selon le motif invoqué. Ainsi, une dérogation ne peut être accordée que si elle répond à l'un des motifs limitativement énumérés à l'article L. 411-2 du code de l'environnement, s'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante et qu'elle ne nuit pas au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle. Par ailleurs, cet article renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de fixer les conditions, notamment procédurales, de l'octroi d'une telle dérogation ainsi que les modalités de contrôle et d'évaluation de leurs effets. Ce faisant, le législateur a établi un cadre législatif et réglementaire spécifique ayant précisément pour objet de permettre, au regard des données scientifiques les plus récentes et dans le respect des conditions strictes qu'il pose, qu'il soit porté atteinte à une espèce protégée sans que son état de conservation favorable dans son aire de répartition naturelle soit mise en cause. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions générales du 9° du II de l'article L. 110-1 du code de l'environnement posant le principe de non-régression de la protection de l'environnement doit en tout état de cause être écarté.

30. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il y ait lieu de transmettre une question préjudicielle à la Cour de justice de l'Union européenne, que les associations requérantes ne sont pas fondées à demander à l'annulation de l'arrêté attaqué. Par suite, leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

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Article 1er : Les requêtes de l'association One Voice, de l'ASPAS et de l'association FERUS sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'association One Voice, à l'Association pour la protection des animaux sauvages, à l'association FERUS, à la ministre de la transition écologique et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation

Délibéré à l'issue de la séance du 23 mars 2022 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; M. B... H..., M. Fabien Raynaud, présidents de chambre ; M. L... E..., Mme G... K..., M. F... I..., M. A... J..., Mme Bénédicte Fauvarque-Cosson, conseillers d'Etat et Mme Airelle Niepce, maître des requêtes-rapporteure.

Rendu le 21 avril 2022.

La présidente :

Signé : Mme Christine Maugüé

La rapporteure :

Signé : Mme Airelle Niepce

La secrétaire :

Signé : Mme D... C...


Synthèse
Formation : 6ème - 5ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 448136
Date de la décision : 21/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 21 avr. 2022, n° 448136
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Airelle Niepce
Rapporteur public ?: M. Nicolas Agnoux

Origine de la décision
Date de l'import : 07/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:448136.20220421
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