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15/04/2022 | FRANCE | N°440308

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 15 avril 2022, 440308


Vu la procédure suivante :

La société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) Maymat, MM. Marc Belabed, Gérard Palais, Christophe Corpelet, Patrick Marin et Mmes I... F..., Sandrine Daval, et Isabelle Brisson, pharmaciens biologistes coresponsables de cette SELARL, ont saisi le conseil central de la section G de l'ordre des pharmaciens d'une plainte dirigée contre la société d'exercice libéral par actions simplifiée (SELAS) Gen-Bio et contre MM. Xavier A..., Dominique C... et Thomas B..., pharmaciens biologistes coresponsables de cette SELAS.

Par une dé

cision n° AD 4677 du 7 février 2018, la chambre de discipline du conseil ...

Vu la procédure suivante :

La société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) Maymat, MM. Marc Belabed, Gérard Palais, Christophe Corpelet, Patrick Marin et Mmes I... F..., Sandrine Daval, et Isabelle Brisson, pharmaciens biologistes coresponsables de cette SELARL, ont saisi le conseil central de la section G de l'ordre des pharmaciens d'une plainte dirigée contre la société d'exercice libéral par actions simplifiée (SELAS) Gen-Bio et contre MM. Xavier A..., Dominique C... et Thomas B..., pharmaciens biologistes coresponsables de cette SELAS.

Par une décision n° AD 4677 du 7 février 2018, la chambre de discipline du conseil central de la section G de l'ordre des pharmaciens a, d'une part, rejeté cette plainte en tant qu'elle était dirigée contre M. A..., d'autre part, prononcé contre la SELAS Gen-Bio la sanction de l'interdiction d'exercer la pharmacie pendant une durée de 15 jours et prononcé contre MM. C... et B... la sanction de l'interdiction d'exercer la pharmacie pendant une durée d'un mois, assortie d'un sursis de 15 jours et mis à la charge des personnes poursuivies, solidairement, la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une décision n° AD 4677 du 17 janvier 2020, la chambre de discipline du Conseil national de l'ordre des pharmaciens, statuant sur l'appel de la SELAS Gen-Bio et autres et sur l'appel incident de la SELARL Maymat et autres, a, en premier lieu, rejeté cet appel incident en tant qu'il visait M. A..., en deuxième lieu, annulé la décision de première instance en tant qu'elle mettait la condamnation prononcée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à la charge de M. A..., solidairement, en troisième lieu, annulé la décision de première instance en tant qu'elle prononçait une interdiction d'exercer la pharmacie contre la SELAS Gen-Bio, en quatrième lieu, prononcé contre la SELAS Gen-Bio la sanction de l'interdiction de pratiquer des examens de biologie médicale pendant une durée de 15 jours et contre MM. C... et B... la sanction de l'interdiction d'exercer la pharmacie pendant une durée d'un mois, assortie d'un sursis de 15 jours.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 28 avril et 25 juin 2021 et le 7 février 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SELAS Gen-Bio, M. C... et M. B... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette décision en tant qu'elle rejette le surplus de leurs conclusions d'appel ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à l'intégralité de leur appel ;

3°) de mettre à la charge de la SELARL Maymat et autres la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu

- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur ;

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP L. Poulet, Odent, avocat de la SELAS Gen-bio, de M. G... C... et de M. D... B... et à la SCP Gaschignard, avocat de la société SELARL Maymat ;

Considérant ce qui suit :

1. La SELAS Gen-Bio et autres se pourvoient en cassation contre la décision du 17 janvier 2020 par laquelle la chambre de discipline du Conseil national de l'ordre des pharmaciens, se fondant en particulier sur la publication dans les journaux La Montagne et Demain Clermont entre 2015 et 2016 de quatre articles qui leur étaient favorables, a prononcé contre la SELAS Gen-Bio la sanction de l'interdiction de pratiquer des examens de biologie médicale pendant une durée de 15 jours et contre MM. C... et B... la sanction de l'interdiction d'exercer la pharmacie pendant une durée d'un mois, assortie d'un sursis de 15 jours.

2. S'il résulte de l'article R. 4234-34 du code de la santé publique qu'en cas de plainte émanant d'un pharmacien, la tentative de conciliation constitue un préalable obligatoire à la saisine de la chambre de discipline de première instance, il résulte également des dispositions des articles R. 4234-36 et R. 4234-37 du même code que le refus d'une des parties de prendre part à la tentative de conciliation est sans incidence sur la transmission de la plainte. Par suite, la chambre de discipline du Conseil national de l'ordre n'a pas entaché sa décision d'irrégularité en s'abstenant de répondre au moyen tiré du caractère irrecevable de la plainte dès lors que, fondé sur le refus des auteurs de la plainte de participer à la tentative de conciliation organisée par le conseil central de la section G de l'ordre, il présentait le caractère d'un moyen inopérant.

3. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 6222-8 du code de la santé publique : " Toute forme de publicité ou de promotion, directe ou indirecte, en faveur d'un laboratoire de biologie médicale est interdite. "

4. Les dispositions de l'article L. 6222-8 du code de la santé publique n'introduisent aucune différence de traitement entre les directeurs de laboratoires de biologie, selon leur profession. Par suite, la SELAS Gen-Bio et autres sont fondés à soutenir que la chambre de discipline, en retenant que les médecins biologistes se trouvaient dans une situation différente des pharmaciens biologistes, a entaché sa décision d'une erreur de droit. Toutefois, le moyen présenté par la SELAS Gen-Bio, tiré de ce que le principe d'égalité est méconnu, dès lors que la chambre disciplinaire du Conseil national de l'ordre des médecins fait une application plus souple des dispositions précitées que la chambre disciplinaire du Conseil national de l'ordre des pharmaciens et autres, est inopérant. Il y a lieu de substituer ce motif qui ne repose sur aucune appréciation des faits de l'espère, à celui, erroné, retenu par la décision de la chambre disciplinaire du Conseil national de l'ordre, dont il justifie le dispositif.

5. Le moyen tiré de ce que l'article L. 6222-8 du code de la santé publique serait inapplicable au litige comme incompatible avec l'article 56 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et à la directive du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 sur le commerce électronique est nouveau en cassation et n'est pas d'ordre public. La SELAS Gen-Bio et autres ne peuvent, par suite, utilement soutenir que la chambre de discipline du Conseil national de l'ordre a insuffisamment motivé sa décision et commis une erreur de droit en se fondant sur les dispositions de l'article L. 6222-8 sans se prononcer sur son incompatibilité avec celles issues du droit de l'Union telles qu'interprétées de manière constante par la Cour de justice de l'Union européenne.

6. La chambre de discipline du Conseil national de l'ordre a relevé que quatre articles consacrés à la SELAS Gen-Bio avaient paru dans la presse régionale destinée au grand public du territoire où cette société est implantée entre 2015 et 2016, que ces articles procédaient à une mise en valeur de la société ainsi que des pharmaciens biologistes qui la composaient, qu'ils soulignaient notamment, en termes élogieux, ses performances techniques ainsi que l'essor de son activité économique et qu'ils détaillaient ses implantations géographiques, sans se borner à une simple information du lecteur. Elle a également relevé que si les pharmaciens poursuivis soutenaient ne pas avoir pris l'initiative de ces publications, cette circonstance n'était pas de nature à les exonérer de leur responsabilité, dès lorsqu'il leur appartenait en toute hypothèse de veiller au respect de leurs obligations déontologiques et réglementaires. En déduisant de l'ensemble de ces éléments que les articles en litige constituaient une publicité interdite par les dispositions de l'article L. 6222-8 du code de la santé publique et que leur publication fautive exposait la SELAS Gen-Bio et autres à une sanction disciplinaire, elle a exactement qualifié les faits de l'espèce et n'a pas commis d'erreur de droit.

7. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions du pourvoi de la SELAS Gen-Bio et autres doivent être rejetées, y compris, par voie de conséquence, leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SELAS Gen-Bio et autres la somme de 3 000 euros à verser à la SELARL Maymat et autres au titre des mêmes dispositions.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la SELAS Gen-Bio et autres est rejeté.

Article 2 : La SELAS Gen-Bio et autres verseront la somme de 3 000 euros à la SELARL Maymat et autres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société d'exercice libéral par actions simplifiée Gen-Bio, première dénommée, à la société d'exercice libéral à responsabilité limitée Maymat, première dénommée, au Conseil national de l'ordre des pharmaciens.

Copie en sera adressée au directeur de l'Agence régionale de santé d'Auvergne-Rhône-Alpes.

Délibéré à l'issue de la séance du 24 mars 2022 où siégeaient : M. Olivier Yeznikian, assesseur, présidant ; M. Jean-Philippe Mochon, conseiller d'Etat et M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 15 avril 2022.

Le président :

Signé : M. Olivier Yeznikian

Le rapporteur :

Signé : M. Jean-Dominique Langlais

Le secrétaire :

Signé : M. E... H...


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 440308
Date de la décision : 15/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 15 avr. 2022, n° 440308
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Dominique Langlais
Rapporteur public ?: M. Florian Roussel
Avocat(s) : SCP L. POULET-ODENT ; SCP CELICE, TEXIDOR, PERIER ; SCP GASCHIGNARD

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:440308.20220415
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