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06/04/2022 | FRANCE | N°451409

France | France, Conseil d'État, 2ème chambre, 06 avril 2022, 451409


Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 12 février 2021 par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé la modification du décret du 15 octobre 2020 accordant la nationalité française à ses parents, M. C... et Mme B... pour y mentionner son nom.

Par une ordonnance n° 2102883 du 6 avril 2021, le président du tribunal administratif de Nantes a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête présentée à ce tribunal par M. B....
>Par cette requête et un mémoire réplique, enregistrés les 15 mars et 13 septembr...

Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 12 février 2021 par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé la modification du décret du 15 octobre 2020 accordant la nationalité française à ses parents, M. C... et Mme B... pour y mentionner son nom.

Par une ordonnance n° 2102883 du 6 avril 2021, le président du tribunal administratif de Nantes a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête présentée à ce tribunal par M. B....

Par cette requête et un mémoire réplique, enregistrés les 15 mars et 13 septembre 2021 respectivement au greffe du tribunal administratif de Nantes et au secrétariat de la section du contentieux, M. B... doit être regardé comme demandant au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du ministre de l'intérieur du 5 février 2021 refusant de modifier le décret du 15 octobre 2020 accordant la nationalité française à son père, M. C..., pour y porter son nom ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de modifier le décret du 15 octobre 2020 afin d'y porter le nom de M. B... ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 000 euros en vertu de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code civil ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bertrand Mathieu, conseiller d'Etat en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Philippe Ranquet, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article 22-1 du code civil : " L'enfant mineur dont l'un des deux parents acquiert la nationalité française, devient français de plein droit s'il a la même résidence habituelle que ce parent ou s'il réside alternativement avec ce parent dans le cas de séparation ou divorce. / Les dispositions du présent article ne sont applicables à l'enfant d'une personne qui acquiert la nationalité française par décision de l'autorité publique ou par déclaration de nationalité que si son nom est mentionné dans le décret ou dans la déclaration ". Aux termes de l'article 21-25-1 du même code : " La réponse de l'autorité publique à une demande d'acquisition de la nationalité française par naturalisation doit intervenir au plus tard dix-huit mois à compter de la remise de toutes les pièces nécessaires à la constitution d'un dossier complet contre laquelle un récépissé est délivré immédiatement. Le délai visé au premier alinéa est réduit à douze mois lorsque l'étranger en instance de naturalisation justifie avoir en France sa résidence habituelle depuis une période d'au moins dix ans au jour de cette remise. Les délais précités peuvent être prolongés une fois, par décision motivée, pour une période de trois mois ".

2. Il résulte de ces dispositions qu'un enfant mineur ne peut devenir français de plein droit par l'effet du décret qui confère la nationalité française à l'un de ses parents qu'à condition, d'une part, que ce parent ait porté son existence, sauf impossibilité ou force majeure, à la connaissance de l'administration chargée d'instruire la demande préalablement à la signature du décret et, d'autre part, qu'il ait, à la date du décret, résidé avec ce parent de manière stable et durable sous réserve, le cas échéant, d'une résidence en alternance avec l'autre parent en cas de séparation ou de divorce. En l'absence de prescription en disposant autrement, cette condition d'âge s'apprécie à la date de signature du décret pris sur son fondement, quand bien même ce décret est intervenu après l'expiration des délais normalement impartis à l'administration par l'article 21-25-1 du code civil pour statuer sur une demande de naturalisation.

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté, que M. B... était devenu majeur à la date de la signature du décret accordant la nationalité française à ses parents, le 15 octobre 2020. Le Premier ministre ne pouvait dès lors légalement le faire bénéficier de l'effet collectif prévu à l'article 22 1 du code civil à la date à laquelle il a naturalisé M. C... et Mme B..., sans qu'ait d'incidence à cet égard la circonstance que le décret est intervenu après une longue procédure d'instruction, au-delà du délai imparti par l'article 21-25-1 du code civil et sans que l'intéressé puisse utilement invoquer les principes de continuité du service public et d'égalité.

4. En deuxième lieu, la décision attaquée, qui ne fait pas obstacle à ce que M. B..., s'il s'y croit fondé, présente une demande de naturalisation sur le fondement de l'article 21-15 du code civil, ne porte pas une atteinte excessive au droit au respect de la vie privée de celui-ci, garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et de libertés fondamentales.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 1er de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Au sens de la présente Convention, un enfant s'entend de tout être humain âgé de moins de dix-huit ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est applicable ".

6. Il ressort des pièces du dossier que M. B... était âgé de dix-huit ans à la date de la décision attaquée. Par suite, il ne saurait utilement invoquer, à l'appui de sa demande, les stipulations des articles 3-1, 8 et 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

7. En dernier lieu, M. B... ne saurait pas plus utilement se prévaloir, à l'encontre de la décision administrative attaquée, des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatives au droit à un procès équitable.

8. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 12 février 2021 par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé de faire droit à sa demande de modification du décret du 15 octobre 2020 et de le faire bénéficier de l'effet collectif attaché à l'acquisition de la nationalité française de ses parents. Ses conclusions aux fins d'injonction, ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 451409
Date de la décision : 06/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 06 avr. 2022, n° 451409
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bertrand Mathieu
Rapporteur public ?: M. Philippe Ranquet

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:451409.20220406
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