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06/04/2022 | FRANCE | N°450279

France | France, Conseil d'État, 4ème chambre, 06 avril 2022, 450279


Vu la procédure suivante :

Le médecin-conseil, chef du service médical de la région Rhône-Alpes, au titre de l'échelon local du service médical de la Loire, et la directrice de la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire ont porté plainte contre M. D... C... devant la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de Rhône-Alpes de l'ordre des chirurgiens-dentistes. Par une décision du 23 mai 2019, la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance a infligé à M. C... la sanction de l'interdiction de

donner des soins aux assurés sociaux pour une durée de deux mois a...

Vu la procédure suivante :

Le médecin-conseil, chef du service médical de la région Rhône-Alpes, au titre de l'échelon local du service médical de la Loire, et la directrice de la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire ont porté plainte contre M. D... C... devant la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de Rhône-Alpes de l'ordre des chirurgiens-dentistes. Par une décision du 23 mai 2019, la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance a infligé à M. C... la sanction de l'interdiction de donner des soins aux assurés sociaux pour une durée de deux mois assortis du sursis et l'a condamné à verser la somme de 7 686,55 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire.

Sur appels respectifs de la directrice de la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire et du médecin-conseil, chef de service du service médical de la région Rhône-Alpes, la section des assurances sociales du Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes a, par une décision du 4 février 2021, d'une part, infligé à M. C... la sanction de l'interdiction de donner des soins aux assurés sociaux pour une durée de six mois, assortis du sursis pour la période excédant trois mois et dont la partie ferme est à exécuter du 1er mars au 31 mai 2021, avec publication, et, d'autre part, l'a condamné à verser la somme de 10 093 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire.

Par un pourvoi enregistré le 1er mars 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette décision ;

2°) de mettre à la charge du médecin-conseil, chef de service médical de la région Rhône-Alpes, et de la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Thalia Breton, auditrice,

- les conclusions de M. Frédéric Dieu, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de M. C... et à la SCP Foussard, Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que d'une part, le médecin-conseil, chef du service médical de la région Rhône Alpes, au titre de l'échelon local du service médical de la Loire, et d'autre part, la directrice de la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire ont porté plainte contre M. D... C... devant la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de Rhône-Alpes de l'ordre des chirurgiens-dentistes à la suite d'une analyse de son activité. Par une décision du 23 mai 2019, la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance a infligé à M. C... la sanction de l'interdiction de donner des soins aux assurés sociaux pour une durée de deux mois assortis du sursis et l'a condamné à verser la somme de 7 686,55 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire. M. C... se pourvoit en cassation contre la décision du 4 février 2021 par laquelle la section des assurances sociales du Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes, sur les appels respectifs de la directrice de la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire et du médecin-conseil, chef de service du service médical de la région Rhône-Alpes, d'une part, lui a infligé la sanction de l'interdiction de donner des soins aux assurés sociaux pour une durée de six mois, assortis du sursis pour la période excédant trois mois et dont la partie ferme est à exécuter du 1er mars au 31 mai 2021, avec publication, et, d'autre part, l'a condamné à verser la somme de 10 093 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire.

2. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 145-2 du code de la sécurité sociale : " Les sanctions susceptibles d'être prononcées par la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance ou par la section spéciale des assurances sociales du conseil national de l'ordre des médecins ou des chirurgiens-dentistes (...) sont : / (...) 3°) l'interdiction temporaire ou permanente, avec ou sans sursis, du droit de donner des soins aux assurés sociaux ; / 4°) dans le cas d'abus d'honoraires ou d'actes ou prestations réalisés dans des conditions méconnaissant les règles prévues à l'article L. 162-1-7, le remboursement à l'assuré du trop-perçu ou le reversement aux organismes de sécurité sociale du trop-remboursé (...) ". Constituent des honoraires abusifs au sens de ces dispositions ceux qui sont réclamés pour un acte facturé sans n'avoir jamais été réalisé, pour un acte surcoté, pour un acte réalisé dans des conditions telles qu'alors même qu'il a été effectivement pratiqué, il équivaut à une absence de soins, ou encore ceux dont le montant est établi sans tact ni mesure.

3. Il ressort des énonciations de la décision attaquée que la section des assurances sociales du Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes, après avoir relevé que M. C... avait coté des actes qui n'étaient pas remboursables ainsi que des actes qui n'avaient pas été réalisés ou constatés ou des actes antidatés, qu'il avait pratiqué la double cotation d'un même acte dans trois dossiers et qu'il avait facturé des actes non conformes aux données acquises par la science, a jugé qu'il devait être condamné à verser la somme de 10 093 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire en se bornant à justifier cette somme par " de nombreuses anomalies [qui] remplissent une ou plusieurs des conditions mentionnées à l'article L. 145-2 CSS et constituent des abus d'honoraires ". En statuant ainsi, sans préciser, parmi les anomalies qu'elle avait relevées, celles qui étaient constitutives d'honoraires abusifs tels que définis au point 2 ni les modalités de calcul du montant de la sanction pécuniaire, la section des assurances sociales du Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes a entaché sa décision d'insuffisance de motivation.

4. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que M. C... est fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque.

5. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du médecin-conseil, chef de service médical de la région Rhône-Alpes, et de la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire une somme à verser à M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces mêmes dispositions font obstacle à ce que la somme demandée par la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire à ce titre soit mise à la charge de M. C... qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision de la section des assurances sociales du Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes du 4 février 2021 est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la section des assurances sociales du Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes.

Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi est rejeté.

Article 4 : Les conclusions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. D... C..., au médecin-conseil, chef du service médical de la région Rhône-Alpes, et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire.

Délibéré à l'issue de la séance du 24 février 2022 où siégeaient : Mme Fabienne Lambolez, conseillère d'Etat, présidant ; Mme Carine Soulay, conseillère d'Etat et Mme Thalia Breton, auditrice-rapporteure.

Rendu le 6 avril 2022.

La présidente :

Signé : Mme Fabienne Lambolez

La rapporteure :

Signé : Mme Thalia Breton

La secrétaire :

Signé : Mme A... B...


Synthèse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 450279
Date de la décision : 06/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 06 avr. 2022, n° 450279
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Thalia Breton
Rapporteur public ?: M. Frédéric Dieu
Avocat(s) : SCP FOUSSARD, FROGER ; SAS BOULLOCHE, COLIN, STOCLET ET ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 22/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:450279.20220406
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