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30/12/2021 | FRANCE | N°443886

France | France, Conseil d'État, 10ème - 9ème chambres réunies, 30 décembre 2021, 443886


Vu la procédure suivante :

M. O... M..., Mme F... Z..., M. W... H..., M. AI... P..., Mme S... L..., M. T... B..., Mme D... B... épouse B..., M. C... Q..., Mme I... X... épouse Q..., M. V... E..., Mme AC... G... et M. AE... J... ont demandé au tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler la décision du 9 mai 2017 par laquelle le chef du service de l'urbanisme de la Polynésie française a délivré à la société " Les Hauts de Taapuna " un permis de travaux immobiliers pour la construction d'un immeuble de 15 logements sur la parcelle n° AX n° 131 de la commune d

e Punaauia.

Par un jugement n°1700315 du 15 mai 2018, le tribunal a...

Vu la procédure suivante :

M. O... M..., Mme F... Z..., M. W... H..., M. AI... P..., Mme S... L..., M. T... B..., Mme D... B... épouse B..., M. C... Q..., Mme I... X... épouse Q..., M. V... E..., Mme AC... G... et M. AE... J... ont demandé au tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler la décision du 9 mai 2017 par laquelle le chef du service de l'urbanisme de la Polynésie française a délivré à la société " Les Hauts de Taapuna " un permis de travaux immobiliers pour la construction d'un immeuble de 15 logements sur la parcelle n° AX n° 131 de la commune de Punaauia.

Par un jugement n°1700315 du 15 mai 2018, le tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 18PA02828 du 9 juin 2020, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par les mêmes requérants contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 9 septembre et 10 décembre 2020, 16 novembre et 13 décembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. M..., Mme Z..., M. H..., M. P..., Mme L... et M. J... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur appel ;

3°) de mettre à la charge de la Polynésie française et de la société " Les Hauts de Taapuna " la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi organique n°2004-192 du 27 février 2004 ;

- l'ordonnance n°2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de l'aménagement de la Polynésie française ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Isabelle Lemesle, conseillère d'Etat,

- les conclusions de M. Arnaud Skzryerbak, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Buk Lament - Robillot, avocat de M. H..., de M. P..., de Mme L..., de M. J..., de M. M... et de Mme Z... et à la SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller, avocat de la Présidence de la Polynésie française et la SCP Spinosi, avocat de la SARL Les Hauts de Taapuna ;

Considérant ce qui suit :

Sur la régularité de la procédure devant la cour administrative d'appel de Paris :

1. Le juge, auquel il incombe de veiller à la bonne administration de la justice, n'a aucune obligation, hormis le cas où des motifs exceptionnels tirés des exigences du débat contradictoire l'imposeraient, de faire droit à une demande de report de l'audience formulée par une partie.

2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les requérants ont demandé à la cour administrative d'appel de Paris, par une requête enregistrée le 17 août 2018, l'annulation du jugement du tribunal administratif de la Polynésie française rejetant leur demande d'annulation de la décision du 9 mai 2017 par laquelle le chef du service de l'urbanisme de la Polynésie Française a délivré à la société " les Hauts de Taapuna " un permis pour la construction d'une résidence de 15 logements à Punaauia. Par un mémoire en réplique enregistré le 12 février 2020, ils se sont bornés à présenter des observations en réponse à une fin de non-recevoir soulevée par les mémoires en défense enregistrés les 19 et 25 décembre 2019, sans répliquer à l'argumentation de la Polynésie française et de la société bénéficiaire du permis de construire qui soutenaient par ailleurs que les moyens soulevés par les requérants n'étaient pas fondés. Alors que l'audience était initialement prévue le 31 mars 2020, elle a fait l'objet d'un report à la séance du 26 mai 2020, ce dont les parties ont été informées par un avis d'audience en date du 7 mai. Par courriers des 12 et 19 mai 2020, le conseil des requérants a fait part à la cour administrative d'appel de Paris de l'impossibilité, pour lui comme pour ses clients, d'assister à l'audience au motif qu'à cette date, les vols commerciaux entre la Polynésie française et la métropole, suspendus en raison de la crise sanitaire, n'avaient pas encore repris, et a demandé que l'audience soit reportée. Il a renouvelé cette demande le 24 mai 2020 après avoir pris connaissance du sens des conclusions du rapporteur public, qui proposait de conclure au rejet de la requête de ses clients. Par lettres du 13 mai et du 20 mai 2020, cette demande a été rejetée et l'affaire a été examinée lors de l'audience du 26 mai 2020, à laquelle ni les requérants, ni les défendeurs n'étaient présents ou représentés.

3. Dans les circonstances rappelées au point précédent, et alors, en premier lieu, que les requérants ne se trouvaient pas dans l'incapacité de se faire représenter utilement par un autre conseil en métropole, en deuxième lieu, qu'aucun élément nouveau auquel ils n'auraient pu répondre n'est intervenu postérieurement à la production des mémoires en défense en décembre 2019, en troisième lieu, qu'ils ont sollicité et obtenu, avant la lecture de l'arrêt de la cour, le texte des conclusions du rapporteur public leur permettant de produire utilement une note en délibéré et, en quatrième et dernier lieu, qu'il est constant qu'ils se sont bornés à solliciter un report de l'audience et non sa tenue par un moyen de télécommunication audiovisuelle ou sonore, dans les conditions prévues à l'article 7 de l'ordonnance du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période, les intéressés ne justifient pas de motifs exceptionnels tirés des exigences du débat contradictoire qui imposaient que l'examen de ce litige d'excès de pouvoir portant sur le permis de construire un programme de logements soit reporté à une audience ultérieure. Par suite, ils ne sont pas fondés à soutenir qu'en refusant de reporter l'audience du 26 mai 2020, la cour administrative d'appel de Paris a entaché son arrêt d'irrégularité.

Sur les autres moyens du pourvoi

4. En premier lieu, en relevant que l'étude technique jointe au dossier de demande de permis de construire comportait des recommandations en matière de terrassement et de dimensionnement particulier des murs de soutènement et qu'elle ne comportait pas d'anomalie en termes de fondations, la cour administrative d'appel de Paris a, contrairement à ce qui est soutenu, répondu au moyen tiré de ce que cette étude ne mentionnait pas les dispositions constructives exigées par l'article 2.1.1.3 du règlement du plan de prévention des risques de Punaauia.

5. En deuxième lieu, en jugeant que l'administration, saisie d'une demande de délivrance d'une note de renseignements d'aménagement, n'avait pas été induite en erreur par la présence, dans le dossier de demande, d'un titre de servitudes incomplet, qui n'était pas au nombre des pièces dont le code de l'aménagement de la Polynésie française imposait la production, la cour n'a pas commis d'erreur de droit.

6. En troisième lieu, il résulte des dispositions de l'article UCc 10 du plan général d'aménagement de Punaauia que la hauteur des constructions est en principe limitée à un rez-de-chaussée, deux niveaux et des combles mais que, pour certaines constructions adossées à la montagne ou proches du talus et ne créant pas de masque gênant pour les propriétés situées en amont, un dépassement de ce plafond peut être admis dans des proportions raisonnables, sans pouvoir excéder un rez-de-chaussée, quatre niveaux et des combles. En jugeant que l'espace sous pilotis situé au niveau du jardin, sous le bâtiment B, ne pouvait être regardé comme un rez-de-chaussée et, par suite, comme un étage d'habitation devant être pris en compte dans le calcul de la règle de hauteur, la cour administrative d'appel a porté sur les faits de l'espèce une appréciation souveraine exempte de dénaturation et n'a pas commis d'erreur de droit. Elle n'a pas davantage dénaturé les faits de l'espèce en jugeant que le dépassement de la hauteur plafond était raisonnable et qu'elle n'avait pas pour effet de créer un masque gênant pour les propriétés situées en amont, alors au demeurant que la propriété de M. M... se situe en aval.

7. En quatrième lieu, en écartant le moyen tiré de la méconnaissance de la règle de distance à la limite séparative de la parcelle appartenant à M. M... au motif que les requérants n'avaient produit aucun élément permettant de déterminer la situation de cette propriété par rapport aux différentes façades du bâtiment, dont les hauteurs varient de manière très sensible selon l'orientation, la cour n'a ni méconnu son office, ni dénaturé les écritures dont elle était saisie.

8. En cinquième lieu, pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 9 du règlement du plan général d'aménagement applicable, qui impose que les places de stationnement aient une longueur minimale de cinq mètres, la cour a relevé que le plan du niveau rez-de-chaussée faisait état d'une longueur de 4,90 m pour dix places mais que cette indication ne correspondait pas à l'espace effectivement disponible pour le stationnement des véhicules sur ces places. Ce faisant, la cour, qui a entendu se fonder sur le contenu de ce plan produit au dossier de la demande de permis de construire, a suffisamment motivé son arrêt et porté sur les faits de l'espèce une appréciation souveraine exempte de dénaturation.

9. En sixième lieu, le premier alinéa de l'article D. 132-1 du code de l'aménagement de la Polynésie française, qui figure dans le chapitre consacré à l'accessibilité aux personnes handicapées à mobilité réduite, dispose que : " La voirie, les établissements recevant du public, ainsi que les grands programmes d'habitation, doivent comporter des dispositions d'aménagement ou d'architecture destinées à les rendre utilisables et accessibles aux personnes handicapées à mobilité réduite ". L'article D. 132-2 du même code prévoit que les dispositions de ce chapitre s'appliquent " aux installations suivantes : 1° la voirie publique, les parties de la voirie privée qui reçoivent du public ou desservent des établissements recevant du public, et, de manière générale, tous les espaces publics ou privés aménagés en vue de leur utilisation par le public, le mobilier urbain qui y est implanté, ainsi que les accès aux immeubles d'habitation et les parkings ; (...) / 4° les grands programmes d'habitation en immeubles collectifs, groupes d'habitations et lotissement bâtis ". En jugeant que ces dispositions ne s'appliquaient pas au projet litigieux, relatif à un " petit immeuble collectif de quinze logements " ne pouvant être qualifié de " grand programme d'habitation " au sens de ces dispositions, la cour, dont l'arrêt est suffisamment motivé, a porté sur les faits de l'espèce une appréciation souveraine exempte de dénaturation et n'a commis aucune erreur de droit

10. En septième et dernier lieu, la cour n'a pas entaché son arrêt de dénaturation en jugeant que les voies de desserte du projet étaient d'une largeur suffisante pour accueillir les véhicules de secours et de lutte contre l'incendie.

11. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi doit être rejeté. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des requérants la somme que les défendeurs demandent sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. M... et autres est rejeté.

Article 2 : Les conclusions présentées par la Polynésie française et la société " Les Hauts de Taapuna " au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. O... M..., premier dénommé, à la Polynésie française et à la SARL " Les Hauts de Taapuna ".

Copie en sera adressée au Haut-Commissaire de la République en Polynésie française.

Délibéré à l'issue de la séance du 17 décembre 2021 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. AA... Y..., M. Frédéric Aladjidi, présidents de chambre ; Mme AD... K..., M. AF... N..., Mme A... AG... M. R... U..., M. Bruno Delsol, conseillers d'Etat et Mme Isabelle Lemesle, conseillère d'Etat-rapporteure.

Rendu le 30 décembre 2021.

Le président :

Signé : M. Rémy Schwartz

La rapporteure :

Signé : Mme Isabelle Lemesle

La secrétaire :

Signé : Mme AB... AH...


Synthèse
Formation : 10ème - 9ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 443886
Date de la décision : 30/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 déc. 2021, n° 443886
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Isabelle Lemesle
Rapporteur public ?: M. Arnaud Skzryerbak
Avocat(s) : SCP BUK LAMENT - ROBILLOT ; SCP SPINOSI ; SCP DE CHAISEMARTIN, DOUMIC-SEILLER

Origine de la décision
Date de l'import : 04/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:443886.20211230
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