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09/12/2021 | FRANCE | N°438692

France | France, Conseil d'État, 9ème chambre, 09 décembre 2021, 438692


Vu la procédure suivante :

La société d'exploitation des aéroports de Rennes et Dinard (SEARD) a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la réduction des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie, au titre des années 2013 et 2014, dans les rôles de la commune de Saint-Jacques-de-la-Lande, à raison du site de l'aéroport de Rennes-Saint-Jacques.

Par un jugement nos 1504750, 1601951 du 13 février 2019, le tribunal administratif de Rennes, après avoir constaté que les méthodes d'évaluation prévues

l'article 1499 du code général des impôts et aux 1° et 2° de l'article 1498 du m...

Vu la procédure suivante :

La société d'exploitation des aéroports de Rennes et Dinard (SEARD) a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la réduction des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie, au titre des années 2013 et 2014, dans les rôles de la commune de Saint-Jacques-de-la-Lande, à raison du site de l'aéroport de Rennes-Saint-Jacques.

Par un jugement nos 1504750, 1601951 du 13 février 2019, le tribunal administratif de Rennes, après avoir constaté que les méthodes d'évaluation prévues à l'article 1499 du code général des impôts et aux 1° et 2° de l'article 1498 du même code ne pouvaient, en l'espèce, être mises en œuvre afin de déterminer la valeur locative cadastrale de l'établissement industriel constitué par l'aéroport de Rennes-Saint-Jacques, a décidé, avant dire droit, un supplément d'instruction afin de permettre à la SEARD de produire tous éléments et pièces permettant d'établir la liste exhaustive des biens qui composaient aux 1er janvier 2013 et 2014, cet établissement industriel et qui devaient être soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties dont elle est redevable au titre de ces deux années, et d'arrêter les modalités d'évaluation de leur valeur locative.

Par un jugement nos 1504750, 1601951 du 18 décembre 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses demandes tendant à la décharge de la cotisation de taxe foncière sur les propriétés bâties.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire enregistrés les 14 février et 25 mai 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SEARD demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ces deux jugements ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses demandes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Cécile Nissen, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de la société d'exploitation des aéroports de Rennes et Dinard (SEARD) ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une convention de délégation de service public du 4 janvier 2010, la société d'exploitation des aéroports de Rennes et de Dinard a été chargée par la région Bretagne de l'exploitation des aéroports de Rennes-Saint-Jacques et de Dinard-Pleurtuit pour une durée de quatorze ans et dix mois. Pour la détermination des bases de la taxe foncière sur les propriétés bâties, dont le délégataire supporte la charge en application de l'article 77 de la convention, les installations foncières de ces aéroports ont été évaluées selon la méthode comptable définie à l'article 1499 du code général des impôts. Par deux réclamations des 29 décembre 2014 et 4 novembre 2015, la société a contesté l'application de cette méthode d'évaluation pour les installations aéroportuaires de Rennes-Saint-Jacques, en soutenant que ces installations devaient être évaluées selon la méthode d'appréciation directe prévue au 3° de l'article 1498 du code général des impôts. En conséquence, elle a sollicité la réduction de la cotisation de taxe foncière mise à sa charge au titre des années 2013 et 2014. Après le rejet de ses réclamations, elle a saisi le tribunal administratif de Rennes qui, par un jugement avant dire droit du 13 février 2019 a décidé un supplément d'instruction afin de permettre à la SEARD de produire tous éléments et pièces permettant d'établir la liste exhaustive des biens qui composaient aux 1er janvier 2013 et 2014 cet établissement industriel et qui devaient être soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties dont elle est redevable au titre de ces deux années, et d'arrêter les modalités d'évaluation de leur valeur locative par la voie de l'appréciation directe. Par un jugement du 18 décembre 2019 faisant suite à cette mesure d'instruction, le tribunal a rejeté les requêtes de la SEARD tendant à la décharge de la cotisation de taxe foncière sur les propriétés bâties.

2. Aux termes de l'article 1498 du code général des impôts : " La valeur locative de tous les biens autres que les locaux visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : 1° Pour les biens donnés en location à des conditions de prix normales, la valeur locative est celle qui ressort de cette location ; 2° a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison (...) 3° A défaut de ces bases, la valeur locative est déterminée par voie d'appréciation directe. (...) ". Aux termes de l'article 1499 du même code : " La valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de leurs différents éléments (...) des taux d'intérêt fixés par décret en Conseil d'Etat (...) ". Selon l'article 1500 du même code, dans sa rédaction issue de la loi du 30 décembre 2008 : " Les bâtiments et terrains industriels sont évalués : / 1° selon les règles fixées à l'article 1499 lorsqu'ils figurent à l'actif du bilan de leur propriétaire ou de leur exploitant, et que celui-ci est soumis aux obligations définies à l'article 53 A ; / 2° selon les règles fixées à l'article 1498 lorsque les conditions prévues au 1° ne sont pas satisfaites ".

3. Il résulte des dispositions de ce dernier article que, dès lors que le propriétaire ou l'exploitant de bâtiments et de terrains industriels passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est soumis aux obligations déclaratives définies à l'article 53 A du code général des impôts et que ces immobilisations industrielles figurent à l'actif de son bilan, la valeur locative de ces immobilisations est établie selon les règles fixées à l'article 1499 du code. En outre, dans l'hypothèse où l'absence d'inscription des immobilisations industrielles à l'actif du bilan du propriétaire ou de l'exploitant procède d'une méconnaissance, par celui-ci, de ses obligations comptables, l'administration fiscale est fondée, après avoir, conformément au principe général des droits de la défense, mis le redevable de la taxe foncière à même de présenter ses observations, à corriger de cette omission les éléments déclarés en application des dispositions de l'article 53 A du code général des impôts, puis à établir la taxe foncière selon les règles fixées à l'article 1499 du même code.

4. Aux termes de l'article 38 quater de l'annexe III au code général des impôts : " Les entreprises doivent respecter les définitions édictées par le plan comptable général, sous réserve que celles-ci ne soient pas incompatibles avec les règles applicables pour l'assiette de l'impôt. ". L'article 393-1, devenu 621-8, du plan comptable général, relatif aux immobilisations faisant l'objet d'une concession de service public ou de travaux publics, prévoit que " les biens mis dans la concession par le concédant ou par le concessionnaire sont inscrits à l'actif du bilan de l'entité concessionnaire ". Ces dispositions s'appliquent aux contrats de délégation de service public mettant à la charge du délégataire les investissements correspondant à la création ou à l'acquisition des biens nécessaires au fonctionnement du service public, notamment les investissements de premier établissement.

Sur les conclusions du pourvoi relatives au jugement avant-dire droit du 13 février 2019 du tribunal administratif de Rennes :

5. Si le contribuable demande l'annulation du jugement avant-dire droit du 13 février 2019 du tribunal administratif de Rennes, aucun des moyens du pourvoi n'est dirigé contre les motifs de ce jugement. Il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions du pourvoi dirigées contre ce jugement dont aucune énonciation n'est critiquée par les parties.

Sur les conclusions du pourvoi relatives au jugement rendu au fond, dans la même affaire, le 18 décembre 2019 par le tribunal administratif de Rennes :

6. En confirmant, pour rejeter les requêtes de la SEARD dans le jugement attaqué du 18 décembre 2019, les valeurs locatives sur la base desquelles les impositions litigieuses ont été établies, d'après la méthode comptable, au motif que les éléments produits en réponse au supplément d'instruction ne le mettaient pas à même de procéder valablement à la détermination de la valeur locative de l'aéroport de Rennes-Saint-Jacques selon la méthode d'appréciation directe, dès lors qu'il demeurait des divergences entre les parties s'agissant des immobilisations à prendre en compte dans les bases taxables, et ce alors même qu'il avait relevé, par des motifs que ne contestaient d'ailleurs aucune des parties, que seule la méthode d'appréciation directe était applicable pour apprécier la valeur locative de l'aéroport, le tribunal a méconnu son office. En conséquence, la SEARD est fondée à demander, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi, l'annulation du jugement du 18 décembre 2019.

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la SEARD au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement nos 1504750, 1601951 du tribunal administratif de Rennes du 18 décembre 2019 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée dans cette mesure au tribunal administratif de Rennes.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 3 000 euros à la société d'exploitation des aéroports de Rennes et Dinard au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions du pourvoi de la société d'exploitation des aéroports de Rennes et Dinard est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société d'exploitation des aéroports de Rennes et Dinard et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré à l'issue de la séance du 25 novembre 2021 où siégeaient : M. Frédéric Aladjidi, président de chambre, présidant ; M. Thomas Andrieu, conseiller d'Etat et Mme Cécile Nissen, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.

Rendu le 9 décembre 2021.

Le président :

Signé : M. Frédéric Aladjidi

La rapporteure :

Signé : Mme Cécile Nissen

La secrétaire :

Signé : Mme A... B...


Synthèse
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 438692
Date de la décision : 09/12/2021
Type d'affaire : Administrative

Publications
Proposition de citation : CE, 09 déc. 2021, n° 438692
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Cécile Nissen
Rapporteur public ?: Mme Céline Guibé
Avocat(s) : SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 14/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:438692.20211209
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