La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/12/2021 | FRANCE | N°439700

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 06 décembre 2021, 439700


Vu la procédure suivante :

La société Barca Investissements a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler les titres de perception émis à son encontre les 23 mars et 30 juillet 2015 au titre de la taxe d'aménagement et de la redevance d'archéologie préventive à raison d'une autorisation de construire 94 logements sur le territoire de la comme de Ballancourt-sur-Essonne, de la décharger des sommes ainsi mises à sa charge et d'annuler la décision du 25 octobre 2017 de la direction départementale des territoires de l'Essonne rejetant sa réclamation du 28 juin 2

017.

Par un jugement n° 1709048 du 20 janvier 2020, le tribunal adm...

Vu la procédure suivante :

La société Barca Investissements a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler les titres de perception émis à son encontre les 23 mars et 30 juillet 2015 au titre de la taxe d'aménagement et de la redevance d'archéologie préventive à raison d'une autorisation de construire 94 logements sur le territoire de la comme de Ballancourt-sur-Essonne, de la décharger des sommes ainsi mises à sa charge et d'annuler la décision du 25 octobre 2017 de la direction départementale des territoires de l'Essonne rejetant sa réclamation du 28 juin 2017.

Par un jugement n° 1709048 du 20 janvier 2020, le tribunal administratif de Versailles a prononcé l'annulation des titres de perception émis le 23 mars 2015 en tant que leurs bases reposaient sur une surface taxable supérieure à 8 326 mètres carrés, déchargé la société Barca Investissements des sommes correspondantes, annulé la décision du 25 octobre 2017 et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 21 mars et 14 août 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Barca Investissements demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Ballancourt-sur-Essonne une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Guiard, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Melka-Prigent-Drusch, avocat de la société Barca Investissements et à la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de la commune de Ballancourt-sur-Essonne ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Barca Investissements a obtenu le 25 juin 2013 un permis de construire 94 logements à Ballancourt-sur-Essonne représentant une surface totale taxable de 11 136 mètres carrés. Par un arrêté du 27 septembre 2013, le maire de la commune a prononcé au profit de la société anonyme d'habitation à loyer modéré Essonne Habitat, le transfert partiel de ce permis de construire correspondant à la réalisation de 28 logements sociaux pour une surface taxable de 2 810 mètres carrés. Deux titres de perception ont été émis à l'encontre de la société Barca Investissements le 23 mars 2015, l'un concernant la première échéance de la taxe d'aménagement mise à sa charge au taux de 20 %, l'autre portant sur la redevance d'archéologie préventive due par la société. Un troisième titre de perception a été émis le 30 juillet 2015 afin de recouvrer la seconde moitié de la taxe d'aménagement. Par un jugement du 20 janvier 2020, le tribunal administratif de Versailles a prononcé l'annulation des titres de perception émis le 23 mars 2015 en tant que leur base imposable reposait sur une surface taxable supérieure à 8 326 mètres carrés, déchargé la société Barca Investissements des sommes correspondantes, annulé la décision du 25 octobre 2017 rejetant la réclamation de la société et, enfin, rejeté le surplus des conclusions de la demande dont il était saisi. Eu égard aux moyens qu'il soulève, le pourvoi présenté par la société Barca Investissements doit être regardé comme dirigé contre ce jugement en tant seulement qu'il statue sur la part communale de la taxe d'aménagement litigieuse.

Sur les conclusions à fin d'annulation du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 331-6 du code de l'urbanisme : " Les opérations d'aménagement et les opérations de construction, de reconstruction et d'agrandissement des bâtiments, installations ou aménagements de toute nature soumises à un régime d'autorisation en vertu du présent code donnent lieu au paiement d'une taxe d'aménagement / (...) / Le fait générateur de la taxe est, selon les cas, la date de délivrance de l'autorisation de construire (...) ". Aux termes de l'article L. 331-14 du même code : " Par délibération adoptée avant le 30 novembre, les communes ou établissements publics de coopération intercommunale bénéficiaires de la part communale ou intercommunale de la taxe d'aménagement fixent les taux applicables à compter du 1er janvier de l'année suivante. / Les communes ou établissements publics de coopération intercommunale peuvent fixer des taux différents dans une fourchette comprise entre 1 % et 5 %, selon les aménagements à réaliser, par secteurs de leur territoire (...) ". Aux termes de l'article L. 331-15 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Le taux de la part communale ou intercommunale de la taxe d'aménagement peut être augmenté jusqu'à 20 % dans certains secteurs par une délibération motivée, si la réalisation de travaux substantiels de voirie ou de réseaux ou la création d'équipements publics généraux est rendue nécessaire en raison de l'importance des constructions nouvelles édifiées dans ces secteurs. / Il ne peut être mis à la charge des aménageurs ou constructeurs que le coût des équipements publics à réaliser pour répondre aux besoins des futurs habitants ou usagers des constructions à édifier dans ces secteurs ou, lorsque la capacité des équipements excède ces besoins, la fraction du coût proportionnelle à ceux-ci. (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que la légalité d'une délibération prise sur le fondement de l'article L. 331-15 du code de l'urbanisme afin d'instaurer dans certains secteurs d'une commune un taux majoré pour le calcul de la taxe d'aménagement est subordonnée à la condition que ce taux soit proportionné au coût ou à la fraction du coût des travaux de voirie ou de création d'équipements publics non encore réalisés, rendus nécessaires afin de répondre aux besoins des futurs habitants ou usagers des constructions à édifier dans ces secteurs.

4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, pour s'opposer aux deux titres de perception des 23 mars et 30 juillet 2015 émis en vue de recouvrer les sommes de 615 582 euros et 345 857 euros correspondant à la taxe d'aménagement mise à la charge de la société Barca Investissement à raison de l'autorisation de construire qu'elle avait obtenue le 25 juin 2013, cette société soutenait, par la voie de l'exception, que la délibération du 23 novembre 2011 par laquelle le conseil municipal de Ballancourt-sur-Essonne avait porté à 20 % le taux de la taxe d'aménagement applicable dans le secteur 3 de la commune méconnaissait les dispositions précitées de l'article L. 331-15 du code de l'urbanisme, dès lors que certains travaux invoqués pour justifier le taux majoré de 20 % avaient été achevés avant l'adoption de cette délibération. En omettant de répondre à ce moyen, qui n'était pas inopérant, le tribunal administratif de Versailles a entaché son jugement d'insuffisance de motivation.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que la société Barca Investissements est fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque, en tant que le tribunal administratif de Versailles a statué sur la part communale de la taxe d'aménagement mise à sa charge.

Sur les conclusions de la société Barca Investissements et de la commune de Ballancourt-sur-Essonne tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Il résulte des dispositions des articles L. 331-1, L. 331-19, L. 331-31, R. 331-9 et R. 331-12 du code de l'urbanisme que la taxe d'aménagement constitue une imposition établie, liquidée et recouvrée par l'Etat au profit de la personne morale de droit public qui en est le bénéficiaire légal. Les autorités administratives agissant au nom de l'Etat sont, par suite, seules compétentes pour agir dans les litiges auxquels peuvent donner lieu son assiette et son recouvrement. Il en résulte que la commune de Ballancourt-sur-Essonne, qui n'a pas la qualité de partie dans la présente instance et qui n'a été appelée en la cause devant le Conseil d'Etat que pour produire des observations, ne saurait utilement demander qu'une somme lui soit versée par la société Barca Investissements au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. De même la société Barca Investissements ne peut demander qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de cette commune au titre des mêmes dispositions.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 20 janvier 2020 du tribunal administratif de Versailles est annulé en tant qu'il a statué sur la part communale de la taxe d'aménagement.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, au tribunal administratif de Versailles.

Article 3 : Les conclusions présentées par la société Barca Investissements et la commune de Ballancourt-sur-Essonne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société Barca Investissements, à la commune de Ballancourt-sur-Essonne et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 06 déc. 2021, n° 439700
Inédit au recueil Lebon
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Olivier Guiard
Rapporteur public ?: Mme Céline Guibé
Avocat(s) : SCP MELKA-PRIGENT-DRUSCH ; SCP RICARD, BENDEL-VASSEUR, GHNASSIA

Origine de la décision
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Date de la décision : 06/12/2021
Date de l'import : 08/12/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 439700
Numéro NOR : CETATEXT000044446222 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2021-12-06;439700 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award