Vu la procédure suivante :
Par une ordonnance n° 1900119 du 19 avril 2021, enregistrée le jour même au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président du tribunal administratif de Nantes a transmis au Conseil d'État, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête présentée à ce tribunal par M. D... F....
Par cette requête, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Nantes le 7 janvier 2019, M. F... demande au Conseil d'État :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 5 novembre 2018 par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé de modifier le décret du 20 août 2013 lui accordant la nationalité française pour y porter le nom de ses filles, I... E... et B... F... ;
2°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de procéder à l'inscription de ses filles sur le décret de naturalisation du 20 août 2013 dans le délai d'un mois suivant la notification de la décision à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code civil ;
- le code justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Clément Tonon, auditeur,
- les conclusions de Mme Sophie Roussel, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. F... a acquis la nationalité française par un décret du 20 août 2013. Il a demandé au ministre de l'intérieur de modifier ce décret pour y porter mention de ses filles, I... E... et B... F..., afin de les faire bénéficier de la nationalité française en vertu de l'effet collectif attaché à sa naturalisation. Par une décision du 5 novembre 2018, le ministre de l'intérieur a rejeté la demande de M. F... au motif que ses enfants n'avaient pas leur résidence habituelle chez leur père à la date de signature du décret lui accordant la nationalité française. M. F... demande l'annulation pour excès de pouvoir de cette décision.
2. Aux termes de l'article 22-1 du code civil : " L'enfant mineur dont l'un des deux parents acquiert la nationalité française, devient français de plein droit s'il a la même résidence habituelle que ce parent ou s'il réside alternativement avec ce parent dans le cas de séparation ou divorce. / Les dispositions du présent article ne sont applicables à l'enfant d'une personne qui acquiert la nationalité française par décision de l'autorité publique ou par déclaration de nationalité que si son nom est mentionné dans le décret ou dans la déclaration ".
3. Il résulte de ces dispositions qu'un enfant ne peut devenir français de plein droit par l'effet du décret qui confère la nationalité française à l'un de ses parents que s'il est mineur, et qu'à condition, d'une part, que ce parent ait porté son existence, sauf impossibilité ou force majeure, à la connaissance de l'administration chargée d'instruire la demande préalablement à la signature du décret et, d'autre part, qu'il ait, à la date du décret, résidé avec ce parent de manière stable et durable sous réserve, le cas échéant, d'une résidence en alternance avec l'autre parent en cas de séparation ou de divorce.
4. Il ressort des pièces du dossier, notamment du jugement de divorce du 29 décembre 2007 du tribunal de Bir-Mourad-Rais (Algérie) que la résidence habituelle de E... et D... F... a été fixée chez leur mère, M. F... s'étant vu octroyer un droit de visite. A l'appui de sa demande de naturalisation, M. F... a lui-même indiqué que ses enfants résidaient avec leur mère. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date à laquelle le décret de naturalisation a été pris, une garde alternée aurait été mise en place postérieurement à ce jugement. Par ailleurs, la circonstance que, postérieurement au décret de naturalisation, M. F... ait obtenu la garde de ses filles est sans incidence sur la légalité de la décision contestée. Dans ces conditions, les enfants de M. F... ne peuvent être regardés, à la date de la publication du décret attaqué, comme résidant alternativement chez leur père au sens des dispositions précitées de l'article 22-1 du code civil.
5. Il résulte de ce qui précède que M. F... n'est pas fondé à demander l'annulation pour excès de pouvoir de la décision par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé de faire droit à sa demande de modification du décret du 20 août 2013 et de faire bénéficier ses enfants de l'effet collectif attaché à l'acquisition de la nationalité française. Ses conclusions à fins d'injonction, ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. D... F... et au ministre de l'intérieur.
Délibéré à l'issue de la séance du 14 octobre 2021 où siégeaient : Mme A... H..., assesseure, présidant ; M. Jean-Yves Ollier, conseiller d'Etat et M. Clément Tonon, auditeur-rapporteur.
Rendu le 4 novembre 2021.
La Présidente :
Signé : Mme A... H...
Le rapporteur :
Signé : M. Clément Tonon
La secrétaire :
Signé : Mme G... C...