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13/10/2021 | FRANCE | N°434658

France | France, Conseil d'État, 4ème chambre, 13 octobre 2021, 434658


Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 434658, par une requête, un mémoire en réplique et un autre mémoire, enregistrés le 16 septembre 2019, le 12 mars 2020 et le 5 septembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, M. WARIN demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir les délibérations des 13 septembre 2018 et 24 janvier 2019 par lesquelles le conseil académique restreint de l'université du Littoral Côte d'Opale s'est prononcé sur le profil du poste de professeur des universités en informatique ouvert au recrutement sous

le n° 27 PR 0149 et sur la composition du comité de sélection, la délibération...

Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 434658, par une requête, un mémoire en réplique et un autre mémoire, enregistrés le 16 septembre 2019, le 12 mars 2020 et le 5 septembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, M. WARIN demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir les délibérations des 13 septembre 2018 et 24 janvier 2019 par lesquelles le conseil académique restreint de l'université du Littoral Côte d'Opale s'est prononcé sur le profil du poste de professeur des universités en informatique ouvert au recrutement sous le n° 27 PR 0149 et sur la composition du comité de sélection, la délibération du comité de sélection du 5 avril 2019 statuant sur sa candidature au concours de recrutement d'un professeur des universités en informatique ouvert en 2019 ainsi que les délibérations du comité de sélection, du conseil académique et du conseil d'administration relatives à ce concours ;

2°) d'enjoindre à l'université du Littoral Côte d'Opale d'organiser un nouveau concours de recrutement pour le poste de professeur en informatique à l'institut universitaire de technologie (UIT) du Littoral Côte d'Opale dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision ;

3°) de mettre à la charge de l'université du Littoral Côte d'Opale la somme de 3 650 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° Sous le n° 438428, par une requête, un mémoire en réplique et deux autres mémoires, enregistrés les 10 février et 17 mai 2020 et les 6 avril et 1er septembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, M. WARIN demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du Président de la République du 16 décembre 2019 en tant qu'il nomme M. A... B... en qualité de professeur des universités et l'affecte à l'université du Littoral Côte d'Opale ;

2°) d'enjoindre à l'université du Littoral Côte d'Opale d'organiser un nouveau concours de recrutement pour le poste de professeur en informatique à l'IUT du Littoral Côte d'Opale dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision ;

3°) de mettre à la charge de l'université du Littoral Côte d'Opale la somme de 3 650 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code de l'éducation ;

- le décret n° 84-431 du 6 juin 1984 ;

- le code de justice administrative ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 14 septembre 2021, rectifiée le même jour, présentée par M. WARIN sous le n° 434658 et sous le n° 438428 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Dorothée Pradines, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Frédéric Dieu, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces des dossiers que M. E... F..., maître de conférences en informatique, a présenté sa candidature à un concours de recrutement ouvert par l'université du Littoral Côte d'Opale pour un emploi de professeur des universités sur le poste " 27 PR 0149 ". Par une délibération du 5 avril 2019, le comité de sélection a émis un avis défavorable à sa candidature. M. WARIN demande, par deux requêtes distinctes, l'annulation des délibérations des 13 septembre 2018 et 24 janvier 2019 par lesquelles le conseil académique restreint de l'université du Littoral Côte d'Opale s'est prononcé, respectivement, sur le profil du poste ouvert au recrutement et sur la composition du comité de sélection, de la délibération du 5 avril 2019 relative à sa candidature, de la délibération du 10 mai 2019 du comité de sélection classant les candidats auditionnés, des délibérations du 4 juin 2019 du conseil académique restreint et du conseil d'administration restreint relatives au concours de recrutement, ainsi que du décret du président de la République du 16 décembre 2019 en tant qu'il nomme M. A... B... en qualité de professeur des universités et l'affecte à l'université du Littoral Côte d'Opale. Ces deux requêtes présentant à juger les mêmes questions, il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la délibération du 13 septembre 2018 :

2. La délibération par laquelle le conseil académique se prononce sur le profil d'un poste d'enseignant-chercheur ouvert au recrutement présente le caractère d'acte préparatoire et n'est, dès lors, pas susceptible de faire l'objet de recours pour excès de pouvoir. Par suite, les conclusions de M. WARIN tendant à l'annulation de la délibération par laquelle le conseil académique restreint de l'université du Littoral Côte d'Opale s'est prononcé sur le profil du poste " 27 PR 0149 " sont irrecevables.

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la délibération du 24 janvier 2019 :

3. Aux termes de l'article 9 du décret du 6 juin 1984 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux enseignants-chercheurs et portant statut particulier du corps des professeurs des universités et du corps des maîtres de conférences : " (...) Le comité de sélection est créé par délibération du conseil académique (...) siégeant en formation restreinte aux représentants élus des enseignants-chercheurs, des chercheurs et des personnels assimilés. Cette délibération précise le nombre de membres du comité, compris entre huit et vingt, et, conformément aux dispositions de l'article L. 952-6-1 du code de l'éducation, le nombre de ceux choisis hors de l'établissement et le nombre de ceux choisis parmi les membres de la discipline en cause. (...). / Le conseil académique ou, pour les établissements qui n'en disposent pas, le conseil d'administration, siégeant en formation restreinte, désigne parmi les membres du comité de sélection celui qui exercera les fonctions de président ainsi qu'un vice-président appelé à le suppléer en cas d'absence. / La composition du comité de sélection est rendue publique avant le début de ses travaux. ". En se prononçant par une unique délibération sur la composition du comité de sélection et la désignation de son président et de son vice-président, le conseil académique restreint de l'université Côte d'Opale n'a nullement méconnu ces dispositions. Par suite, M. WARIN n'est pas fondé à demander l'annulation de la délibération du 24 janvier 2019.

Sur les conclusions tendant à l'annulation des délibérations relatives aux candidatures :

4. Aux termes de l'article L. 952-6-1 du code de l'éducation : " (...) lorsqu'un emploi d'enseignant-chercheur est créé ou déclaré vacant, les candidatures des personnes dont la qualification est reconnue par l'instance nationale prévue à l'article L. 952-6 sont soumises à l'examen d'un comité de sélection (...). / Le comité est composé d'enseignants-chercheurs et de personnels assimilés, pour moitié au moins extérieurs à l'établissement, d'un rang au moins égal à celui postulé par l'intéressé. (...) Le comité siège valablement si au moins la moitié des membres présents sont extérieurs à l'établissement. / Au vu de son avis motivé, le conseil académique ou, pour les établissements qui n'en disposent pas, le conseil d'administration, siégeant en formation restreinte aux enseignants-chercheurs et personnels assimilés de rang au moins égal à celui postulé, transmet au ministre compétent le nom du candidat dont il propose la nomination ou une liste de candidats classés par ordre de préférence ". Aux termes de l'article 9-2 du décret du 6 juin 1984 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux enseignants-chercheurs et portant statut particulier du corps des professeurs des universités et du corps des maîtres de conférences : " Le comité de sélection examine les dossiers des maîtres de conférences ou professeurs (...). Au vu de rapports pour chaque candidat, présentés par deux de ses membres, le comité établit la liste des candidats qu'il souhaite entendre. (...) Le comité de sélection émet un avis motivé unique portant sur l'ensemble des candidats ainsi qu'un avis motivé sur chaque candidature. Ces deux avis sont communiqués aux candidats sur leur demande. (...) L'avis du comité de sélection est transmis au conseil académique ou à l'organe compétent pour exercer les attributions mentionnées au IV de l'article L. 712-6-1. / Au vu de l'avis motivé émis par le comité de sélection, le conseil académique ou l'organe compétent pour exercer les attributions mentionnées au IV de l'article L. 712-6-1, siégeant en formation restreinte aux enseignants-chercheurs et personnels assimilés de rang au moins égal à celui postulé, propose le nom du candidat sélectionné ou, le cas échéant, une liste de candidats classés par ordre de préférence. Il ne peut proposer que les candidats retenus par le comité de sélection. En aucun cas, il ne peut modifier l'ordre de la liste de classement. / Le conseil d'administration, siégeant en formation restreinte aux enseignants-chercheurs et personnels assimilés de rang au moins égal à celui postulé, prend connaissance du nom du candidat sélectionné ou, le cas échéant, de la liste des candidats proposée par le conseil académique ou l'organe compétent pour exercer les attributions mentionnées au IV de l'article L. 712-6-1. / Sauf dans le cas où le conseil d'administration émet un avis défavorable motivé, le président ou directeur de l'établissement communique au ministre chargé de l'enseignement supérieur le nom du candidat sélectionné ou, le cas échéant, une liste de candidats classés par ordre de préférence. En aucun cas, il ne peut modifier l'ordre de la liste de classement ".

5. En premier lieu, la seule circonstance qu'un membre d'un jury d'examen professionnel connaisse un candidat ne suffit pas à justifier qu'il s'abstienne de participer aux délibérations qui concernent ce candidat. En revanche le respect du principe d'impartialité exige que s'abstienne de participer, de quelque manière que ce soit, aux interrogations et aux délibérations qui concernent un candidat un membre du jury qui aurait avec celui-ci des liens, tenant à la vie personnelle ou aux activités professionnelles, qui seraient de nature à influer sur son appréciation.

6. Il ressort des pièces des dossiers que si, depuis 2013, M. WARIN entretient des rapports difficiles avec la direction de son laboratoire et celle de son équipe de recherche, se plaignant régulièrement du mode de gestion et de direction du laboratoire auquel il appartient, il ne peut être retenu qu'ils seraient l'expression ou la conséquence d'un conflit personnel qui l'opposerait au directeur du laboratoire. Par suite, contrairement à ce que soutient le requérant, le directeur de son laboratoire a pu, sans méconnaître le principe d'impartialité, participer aux interrogations et aux délibérations du comité de sélection agissant en qualité de jury d'examen.

7. En deuxième lieu, il ressort des pièces des dossiers que, pour motiver sa délibération du 5 avril 2019 défavorable à l'audition de M. WARIN, le comité de sélection de l'université du Littoral Côte d'Opale s'est fondé, non pas sur les mérites scientifiques du candidat mais sur l'adéquation de la candidature de l'intéressé au profil du poste, indiquant que " La recherche thématique du candidat est trop éloignée du profil recherché ". Cette motivation, bien que sommaire, permet de connaître les raisons pour lesquelles le comité de sélection a estimé que la candidature de M. WARIN correspondait peu au profil recherché. Par suite, M. WARIN n'est pas fondé à soutenir que cette délibération serait insuffisamment motivée.

8. En troisième lieu, M. WARIN n'est, en tout état de cause, pas fondé à soutenir qu'en se bornant à rappeler les missions du futur titulaire du poste de professeur, la partie " enseignement " du profil du poste, qui indiquait que le futur titulaire du poste de professeur devrait " assurer des enseignements en informatique générale pour des étudiants en première et en deuxième année de D.U.T. d'informatique ", " s'impliquer dans le suivi des projets et des stages " et " s'investir dans les tâches administratives du département ", aurait méconnu le principe d'égalité entre les candidats.

9. En quatrième lieu, la circonstance que le laboratoire ait décidé de modifier la partie " recherche " du profil de poste en 2019 par rapport à sa version de 2018 ne suffit pas à caractériser l'existence d'un détournement de procédure visant à écarter une candidature. Il ne ressort pas des pièces du dossier que ce nouveau profil, bien que différent de celui de l'année précédente, ne réponde pas aux besoins de l'université. Par suite, M. WARIN n'est pas fondé à soutenir que la partie " recherche " du profil du poste aurait été arrêtée en méconnaissance du principe d'égalité entre les candidats ni que le décret du 16 décembre 2019 serait, en tant qu'il nomme M. B... en qualité de professeur des universités affecté à l'université du Littoral Côte d'Opal, constitutif d'un détournement de pouvoir.

10. Il résulte de toute ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées par l'université Littoral Côte d'Opale, que les requêtes de M. WARIN ne peuvent qu'être rejetées.

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'université du Littoral Côte d'Opale, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. WARIN la somme demandée par l'université du Littoral Côte d'Opale au titre des mêmes dispositions.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les requêtes présentées par M. WARIN sont rejetées

Article 2 : Les conclusions présentées par l'université du Littoral Côte d'Opale au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. E... F..., à M. A... B..., au Premier ministre, à la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation et à l'université du Littoral Côte d'Opale.


Synthèse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 434658
Date de la décision : 13/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 13 oct. 2021, n° 434658
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Dorothée Pradines
Rapporteur public ?: M. Frédéric Dieu

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:434658.20211013
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