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06/08/2021 | FRANCE | N°428527

France | France, Conseil d'État, 6ème chambre, 06 août 2021, 428527


Vu la procédure suivante :

L'association Bourdeilles Environnement, la Sepanso Dordogne, M. P... I..., Mme AA... I..., M. et Mme L... et W... Q..., M. et Mme O... et Sian Y..., M. et Mme J... et AC... AE..., M. E... U..., M. N... D..., M. Tino D..., M. et Mme Jean et AH... V..., AI... AB..., M. et Mme S... et AF... Pinon, M. et Mme AJ... et Z... G..., AL... AD..., M. et Mme X... et R... AG..., AK... M..., AM... T... et M. K... H... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 11 mars 2013 par lequel le préfet de la Dordogne a décla

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Vu la procédure suivante :

L'association Bourdeilles Environnement, la Sepanso Dordogne, M. P... I..., Mme AA... I..., M. et Mme L... et W... Q..., M. et Mme O... et Sian Y..., M. et Mme J... et AC... AE..., M. E... U..., M. N... D..., M. Tino D..., M. et Mme Jean et AH... V..., AI... AB..., M. et Mme S... et AF... Pinon, M. et Mme AJ... et Z... G..., AL... AD..., M. et Mme X... et R... AG..., AK... M..., AM... T... et M. K... H... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 11 mars 2013 par lequel le préfet de la Dordogne a déclaré d'utilité publique le projet d'aménagement de la route départementale 78, contournement du bourg de Bourdeilles, sur le territoire de la commune de Bourdeilles. Par un jugement n° 1301642 du 14 janvier 2016, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 16BX00925 du 31 décembre 2018, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel formé par l'association Bourdeilles Environnement et autres contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et deux autres mémoires, enregistrés les 28 février et 27 mai 2019 et les 29 janvier et 7 mai 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association Bourdeilles Environnement et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 ;

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Coralie Albumazard, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Olivier Fuchs, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Le Bret-Desaché, avocat de l'association Bourdeilles Environnement et autres et au cabinet Rousseau et Tapie, avocat du département de la Dordogne ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, à la demande du département de la Dordogne, le préfet de la Dordogne a, par un arrêté du 11 mars 2013, déclaré d'utilité publique le projet d'aménagement de la route départementale n° 78, sur une longueur de 2,2 kilomètres, en vue du contournement du bourg de la commune de Bourdeilles. Saisi par l'association Bourdeilles Environnement, l'association Sepanso Dordogne et plusieurs personnes physiques riveraines du projet, le tribunal administratif de Bordeaux a, par un jugement du 14 janvier 2016, rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Elles se pourvoient en cassation contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 31 décembre 2018 rejetant leur appel contre ce jugement.

2. En premier lieu, aux termes du III de l'article L. 122-1 du code de l'environnement, dans sa version alors applicable : " Dans le cas d'un projet relevant des catégories d'opérations soumises à étude d'impact, le dossier présentant le projet, comprenant l'étude d'impact et la demande d'autorisation, est transmis pour avis à l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement. Dans le cas d'un projet relevant de la procédure d'examen au cas par cas, l'autorité administrative de l'Etat compétente en matière d'environnement est saisie par le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage d'un dossier présentant le projet et détermine si ce dernier doit être soumis à la réalisation d'une étude d'impact. (...) ". Ces dispositions transposent l'article 6 de la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, aux termes duquel : " Les Etats membres prennent les mesures nécessaires pour que les autorités susceptibles d'être concernées par le projet, en raison de leurs responsabilités spécifiques en matière d'environnement, aient la possibilité de donner leur avis sur les informations fournies par le maître d'ouvrage et sur la demande d'autorisation. (...) "

3. Les dispositions du code de l'environnement précitées n'imposent pas de soumettre à l'autorité environnementale les éléments complémentaires que le pétitionnaire produit, à la suite d'un avis qu'elle a rendu, en vue d'assurer une meilleure information du public et de l'autorité chargée de statuer sur la demande d'autorisation, sauf dans le cas où les éléments complémentaires produits par le pétitionnaire sont destinés à combler des lacunes de l'étude d'impact d'une importance telle que l'autorité environnementale ne pouvait, en leur absence, rendre un avis sur la demande d'autorisation, en ce qui concerne ses effets sur l'environnement.

4. Pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du III de l'article L. 122-1 du code de l'environnement précité, la cour, après avoir relevé, d'une part, que l'autorité environnementale avait, dans son avis, estimé que " l'analyse de l'état initial de l'environnent du site d'implantation est traitée de manière satisfaisante dans l'étude d'impact hormis pour le milieu naturel " et, d'autre part, que compte tenu de l'importance des compléments qu'avait dû apporter le département sur ce dernier point, l'autorité environnementale ne pouvait être regardée comme ayant pu émettre utilement son avis sur les effets du projet sur l'environnement, a toutefois estimé que, eu égard aux conclusions de l'étude complémentaire, indiquant que le projet ne portait aucune atteinte à la biodiversité, cette lacune n'avait pas été de nature à nuire à l'information complète du public ni à influer sur le sens de la décision prise. Ce faisant, la cour, qui a porté sur les faits de l'espèce une appréciation exempte de dénaturation, n'a pas entaché son arrêt d'une erreur de droit.

5. En deuxième lieu, l'article R. 122-3 du code de l'environnement, dans sa version applicable au litige, définit le contenu de l'étude d'impact, lequel doit être en relation avec l'importance des travaux et aménagements projetés et avec leurs incidences prévisibles sur l'environnement. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

6. Par l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel a détaillé les motifs qui l'ont conduite à écarter le moyen tiré du caractère insuffisant de l'étude d'impact, s'agissant notamment de l'examen du tracé de la route projeté, de la biodiversité et de la protection des eaux. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle aurait, ce faisant, entaché son arrêt d'erreur de droit ou de dénaturation.

7. En troisième lieu, l'article L. 414-4 du code de l'environnement impose la réalisation d'une évaluation des incidences d'un projet de construction lorsque celui-ci est susceptible d'affecter de manière significative un site Natura 2000, individuellement ou en raison de ses effets cumulés avec d'autres projets. Pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions, la cour a relevé, d'une part, que le projet contesté avait donné lieu à la réalisation d'une étude d'incidences, comme l'exigent ces dispositions, et, d'autre part, que la réalisation du projet litigieux ne comportait aucun impact résiduel susceptible de remettre en cause la conservation des habitats et espèces du site Natura 2000. En statuant ainsi, la cour n'a ni dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis, ni commis d'erreur de droit.

8. En quatrième lieu, une opération ne peut être légalement déclarée d'utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier, les inconvénients d'ordre social, la mise en cause de la protection et de la valorisation de l'environnement et l'atteinte éventuelle à d'autres intérêts publics qu'elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente.

9. Pour écarter le moyen tiré de ce que l'opération litigieuse ne présente pas un caractère d'utilité publique, la cour a successivement relevé que le projet litigieux, qui a pour but d'améliorer la circulation ainsi que la sécurité de la route du centre du bourg de Bourdeilles, laquelle présente une fréquentation élevée, ne pouvait être réalisé sans recourir à l'expropriation pour la construction de la déviation. Elle a ensuite relevé que sa réalisation ne comporterait pas d'impact résiduel susceptible de remettre en cause la conservation des habitats et espèces du site Natura 2000, compte tenu des mesures d'atténuation des impacts, et que le maître d'ouvrage avait prévu divers aménagements de nature à limiter les nuisances sonores. Elle en a déduit que les inconvénients du projet n'apparaissaient pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'il présente et qu'ils n'étaient pas de nature à lui retirer son caractère d'utilité publique. En statuant ainsi, la cour a exactement qualifié les faits de l'espèce. Par suite, les moyens tirés d'erreur de qualification juridique et de dénaturation doivent être écartés.

10. Il résulte de tout ce qui précède que l'association Bourdeilles Environnement et autres ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent. Leur pourvoi doit, par suite, être rejeté, y compris leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association Bourdeilles Environnement et autres une somme au titre de ces mêmes dispositions.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de l'association Bourdeilles Environnement et autres est rejeté.

Article 2 : Les conclusions présentées par le département de la Dordogne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'association Bourdeilles Environnement, première dénommée pour l'ensemble des requérants, à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et au département de la Dordogne.

Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 428527
Date de la décision : 06/08/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 06 aoû. 2021, n° 428527
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Coralie Albumazard
Rapporteur public ?: M. Olivier Fuchs
Avocat(s) : SCP LE BRET-DESACHE ; CABINET ROUSSEAU ET TAPIE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:428527.20210806
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