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02/08/2021 | FRANCE | N°448530

France | France, Conseil d'État, 4ème chambre, 02 août 2021, 448530


Vu la procédure suivante :

M. R..., M. E... I..., Mme K... A..., M. F... O..., Mme N... L... et M. G... B... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'élection de Mme D... P... en qualité de conseillère municipale à l'issue des opérations électorales qui se sont déroulées le 15 mars 2020 dans la commune de Boulazac Isle Manoire (Dordogne) pour l'élection des conseillers municipaux et communautaires. Par un jugement n° 2002130 du 10 décembre 2020, le tribunal administratif a annulé l'élection de Mme P... et déclaré M. H... M... élu en tant que consei

ller municipal et communautaire.

Par une requête, un mémoire compléme...

Vu la procédure suivante :

M. R..., M. E... I..., Mme K... A..., M. F... O..., Mme N... L... et M. G... B... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'élection de Mme D... P... en qualité de conseillère municipale à l'issue des opérations électorales qui se sont déroulées le 15 mars 2020 dans la commune de Boulazac Isle Manoire (Dordogne) pour l'élection des conseillers municipaux et communautaires. Par un jugement n° 2002130 du 10 décembre 2020, le tribunal administratif a annulé l'élection de Mme P... et déclaré M. H... M... élu en tant que conseiller municipal et communautaire.

Par une requête, un mémoire complémentaire et deux mémoires en réplique, enregistrés les 8 janvier, 8 février, 29 mars et 25 mai 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme P... et M. J... C... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la protestation de M. Q... et autres ;

3°) de mettre à la charge de M. Q... et autres la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code électoral ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent Cabrera, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP de Nervo, Poupet, avocat de Mme P... et de M. C... ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 10 juin 2021, présentée par M. Q... et autres ;

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue des opérations électorales qui se sont déroulées le 15 mars 2020 dans la commune de Boulazac Isle Manoir, la liste " Ensemble pour Boulazac Isle Manoir ", conduite par M. C..., maire sortant, a obtenu 2432 voix, soit 61,05% des suffrages exprimés, tandis que la liste " Vivons Boulazac Isle Manoir ", conduite par M. Q..., a obtenu 1551 voix, soit 38,94% des suffrages exprimés. M. C... et Mme P... font appel du jugement du 10 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'élection de Mme P... en qualité de conseillère municipale et déclaré M. H... M... élu.

2. Aux termes des dispositions de l'article L. 231 du code électoral : " Ne peuvent être élus conseillers municipaux dans les communes situées dans le ressort où ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins de six mois : / (...) 8° Les personnes exerçant, au sein du conseil régional, du conseil départemental, de la collectivité de Corse, de la collectivité de Guyane ou de Martinique, d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ou de leurs établissements publics, les fonctions de directeur général des services, directeur général adjoint des services, directeur des services, directeur adjoint des services ou chef de service (...). " Il appartient au juge de l'élection, saisi d'un grief relatif à l'inéligibilité d'un candidat à une élection municipale, de rechercher, lorsque le poste que l'intéressé occupe au sein d'une collectivité territoriale n'est pas mentionné en tant que tel au 8° de l'article L. 231 du code électoral, si la réalité des fonctions exercées ne confère pas à leur titulaire des responsabilités équivalentes à celles qui sont exercées par les personnes mentionnées par ces dispositions.

3. Il résulte de l'instruction que Mme P... a été recrutée par la communauté d'agglomération du Grand Périgueux, établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune de Boulazac Isle Manoire est membre, à compter du 2 décembre 2019, en qualité de chargée de mission d'évaluation et de contrôle des associations et organismes extérieurs. Il résulte également de l'instruction que si Mme P... est directement rattachée au directeur général des services de la communauté d'agglomération du Grand Périgueux et assiste en tant que de besoin aux instances de direction et de coordination, elle n'exerce aucune fonction d'encadrement, n'entretient des rapports de proximité avec les élus que dans le cadre de la préparation des séances de l'organe délibérant de la communauté d'agglomération, et ne dispose d'aucun pouvoir propre de décision, notamment en matière d'attributions des subventions, dont elle assure seulement le suivi administratif et le contrôle de l'utilisation. Eu égard à la nature de ces fonctions, l'intéressée, en dépit de la circonstance, au demeurant postérieure au scrutin, qu'elle ait participé à la cellule de crise mise en place par la communauté d'agglomération du Grand Périgueux dans le cadre du plan de continuité de l'activité adopté dans le contexte de l'épidémie de covid-19, ne pouvait être regardée comme exerçant des responsabilités équivalentes à celles d'un chef de service, visées au 8° de l'article L. 231 du code électoral. Par suite, Mme P... n'était pas inéligible au conseil municipal de Boulazac Isle Manoir.

4. Il résulte de ce qui précède que Mme P... et M. C... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'élection de Mme P... en qualité de conseillère municipale de la commune de Boulazac Isle Manoir. Par suite, les conclusions présentées par M. Q... et autres tendant à ce que Mme P... soit condamnée au remboursement à la commune de Boulazac Isle Manoire des indemnités d'élue perçues par elle ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées.

5. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par Mme P... et M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 10 décembre 2020 est annulé.

Article 2 : L'élection de Mme P... en qualité de conseillère municipale à l'issue des opérations électorales qui se sont tenues le 15 mars 2020 dans la commune de Boulazac-Isle-Manoire est validée.

Article 3 : Les conclusions de M. Q... et autres tendant à ce que Mme P... soit condamnée au remboursement à la commune de Boulazac Isle Manoire des indemnités d'élus perçues par elle à compter de la date du jugement du tribunal administratif de Bordeaux, ainsi que leur protestation sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions de Mme P... et M. C... présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme D... P..., à M. J... C..., à M. R..., premier défendeur dénommé, et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 448530
Date de la décision : 02/08/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 02 aoû. 2021, n° 448530
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Laurent Cabrera
Rapporteur public ?: M. Raphaël Chambon
Avocat(s) : SCP DE NERVO, POUPET

Origine de la décision
Date de l'import : 06/08/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:448530.20210802
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