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30/07/2021 | FRANCE | N°452277

France | France, Conseil d'État, 7ème chambre, 30 juillet 2021, 452277


Vu la procédure suivante :

Mme A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'ordonner à l'Etat de lui verser la somme de 4 563,80 euros due au titre de son éviction illégale du 12 avril 2019 au 25 novembre 2019, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à tout le moins d'ordonner à l'administration d'examiner sa requête en référé provision enregistrée sous le n° 2100503 le 5 avril 2021 et d'y répondre.

Par une ordonnance n° 2100844

du 20 avril 2021, le juge des référés de tribunal administratif de Châlons-en-...

Vu la procédure suivante :

Mme A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'ordonner à l'Etat de lui verser la somme de 4 563,80 euros due au titre de son éviction illégale du 12 avril 2019 au 25 novembre 2019, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à tout le moins d'ordonner à l'administration d'examiner sa requête en référé provision enregistrée sous le n° 2100503 le 5 avril 2021 et d'y répondre.

Par une ordonnance n° 2100844 du 20 avril 2021, le juge des référés de tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 5 et 20 mai 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire, enregistré le 20 mai 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat, en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 et à l'appui de son pourvoi tendant à l'annulation de l'ordonnance du 20 avril 2021 du juge des référés de tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des articles L. 511-1 et L. 521-2 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son article 61-1 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Audrey Prince, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Mireille Le Corre, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, au cabinet Rousseau et Tapie, avocat de Mme B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux ".

Sur la question prioritaire de constitutionnalité :

2. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.

3. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés statue par des mesures qui présentent un caractère provisoire. Il n'est pas saisi du principal et se prononce dans les meilleurs délais. " Aux termes de l'article L.521-2 de ce code : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures. "

4. Mme B... soutient que les articles L. 511-1 et L. 521-2 du code de justice administrative, en tant qu'ils imposent au juge des référés de ne prendre que des mesures provisoires et lui interdisent ainsi de prononcer, sur le fondement de l'article L. 521-2, une condamnation au paiement d'une indemnité, méconnaissent le droit à un recours effectif, le droit de former une action en responsabilité contre l'auteur d'un dommage et le droit de propriété.

5. En premier lieu, d'une part, le caractère provisoire des mesures que le juge des référés peut prendre, en application des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, pour assurer la sauvegarde d'une liberté fondamentale, est la condition nécessaire à son intervention en extrême urgence, qui représente une garantie du droit à un recours juridictionnel effectif. D'autre part, si le caractère provisoire des mesures que peut prendre le juge du référé en application de ces dispositions fait obstacle à ce qu'il soit utilement saisi de conclusions indemnitaires, cette circonstance ne porte pas atteinte au droit de présenter de telles conclusions devant un juge, qu'il s'agisse du juge du fond ou du juge du référé saisi en application des dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative. En second lieu, en l'absence de créance établie, la méconnaissance du droit de propriété ne peut être utilement invoquée pour contester l'absence de décision reconnaissant le droit à indemnisation. Par suite, la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux.

6. Ainsi, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, le moyen tiré de ce que les articles L. 511-1 et L. 521-2 du code de justice administrative, en tant qu'ils imposent au juge des référés de ne prendre que des mesures provisoires, porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit être écarté.

Sur les autres moyens du pourvoi :

7. Pour demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque, Mme B... soutient que le juge des référés du tribunal administrait de Châlons-en-Champagne a :

- entaché son ordonnance d'une erreur de droit et a méconnu son office en jugeant qu'il n'appartenait pas au juge des référés, saisi sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, de prononcer une condamnation au paiement d'une indemnité au motif que celui-ci ne prend que des mesures provisoires ;

- ce faisant, méconnu les droits garantis par les articles 6-1 et 13 la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que par l'article 1er de son premier protocole additionnel.

8. Aucun de ces moyens n'est de nature à permettre l'admission du pourvoi.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par Mme B....

Article 2 : Le pourvoi de Mme B... n'est pas admis.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme A... B... et à la ministre des armées.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel, au Premier ministre et au garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 452277
Date de la décision : 30/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 jui. 2021, n° 452277
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Audrey Prince
Rapporteur public ?: Mme Mireille Le Corre
Avocat(s) : CABINET ROUSSEAU ET TAPIE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/08/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:452277.20210730
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