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02/07/2021 | FRANCE | N°416964

France | France, Conseil d'État, 5ème - 6ème chambres réunies, 02 juillet 2021, 416964


Vu les procédures suivantes :

Par une décision du 19 décembre 2019, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux sur les requêtes n° 416964 de la confédération nationale des syndicats dentaires, devenue Les Chirurgiens-Dentistes de France, et autres, n°s 417078, 417937, 418010, 418013 du Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes, n° 417963 du Conseil national de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes et n° 419746 du Conseil national de l'ordre des infirmiers, tendant à l'annulation pour excès de pouvoir du décret n° 2017-1520 du 2 novembre 2017 relatif à la re

connaissance des qualifications professionnelles dans le domaine de la...

Vu les procédures suivantes :

Par une décision du 19 décembre 2019, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux sur les requêtes n° 416964 de la confédération nationale des syndicats dentaires, devenue Les Chirurgiens-Dentistes de France, et autres, n°s 417078, 417937, 418010, 418013 du Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes, n° 417963 du Conseil national de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes et n° 419746 du Conseil national de l'ordre des infirmiers, tendant à l'annulation pour excès de pouvoir du décret n° 2017-1520 du 2 novembre 2017 relatif à la reconnaissance des qualifications professionnelles dans le domaine de la santé ainsi que des arrêtés de la ministre des solidarités et de la santé du 4 décembre 2017 relatif à la déclaration préalable de prestation de services pour les professions médicales et les pharmaciens, du 8 décembre 2017 relatif à l'avis rendu par les commissions d'autorisation d'exercice ou par les ordres des professions de santé en cas d'accès partiel à une profession dans le domaine de la santé, du 8 décembre 2017 relatif à la déclaration préalable de prestation de services pour les conseillers en génétique, les physiciens médicaux et les préparateurs en pharmacie et en pharmacie hospitalière, ainsi que pour les professions figurant au livre III de la partie IV du code de la santé publique et du 8 décembre 2017 désignant les préfets de région compétents pour l'examen des demandes d'autorisation d'exercice ou de prestation de services des professions de santé, a sursis à statuer jusqu'à ce que la Cour de justice de l'Union européenne se soit prononcée sur la question de savoir si le 6 de l'article 4 septies de la directive 2005/36/CE du 7 septembre 2005 exclut qu'un Etat membre instaure la possibilité d'un accès partiel à l'une des professions auxquelles s'applique le mécanisme de la reconnaissance automatique des qualifications professionnelles prévu par les dispositions du chapitre III du titre III de la même directive.

Par un arrêt n° C-940/19 du 25 février 2021, la Cour de justice de l'Union européenne s'est prononcée sur cette question.

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Vu les autres pièces des dossiers, y compris celles visées par la décision du Conseil d'État du 19 décembre 2019 ;

Vu :

- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la directive 2005/36/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 septembre 2005 ;

- la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013 ;

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 ;

- la loi n° 2018-132 du 26 février 2018 ;

- l'ordonnance n° 2016-1809 du 22 décembre 2016 ;

- l'ordonnance n° 2017-50 du 19 janvier 2017 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alain Seban, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Cécile Barrois de Sarigny, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat du Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes, à la SCP Hémery, Thomas-Raquin, Le Guerer, avocat du Conseil national de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes et au Cabinet Briard, avocat du Conseil national de l'ordre des infirmiers ;

Considérant ce qui suit :

Sur la légalité du décret attaqué :

1. Par l'arrêt du 25 février 2021 se prononçant sur la question dont le Conseil d'Etat statuant au contentieux l'avait saisie à titre préjudiciel après avoir écarté les autres moyens des conclusions des requêtes tendant à l'annulation du décret du 2 novembre 2017, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que le 6 de l'article 4 septies de la directive 2005/36/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles, telle que modifiée par la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013, doit être interprété en ce sens qu'il ne s'oppose pas à une législation admettant la possibilité d'un accès partiel à l'une des professions relevant du mécanisme de la reconnaissance automatique des qualifications professionnelles prévu par les dispositions du chapitre III du titre III de cette directive.

2. Il résulte de l'interprétation ainsi donnée par la Cour de justice de l'Union européenne que l'article L. 4002-3 du code de la santé publique, qui ouvre la possibilité d'un accès partiel à l'ensemble des professions de santé régies par la quatrième partie de ce code, y compris, par conséquent, aux professions auxquelles s'applique le mécanisme de la reconnaissance automatique des qualifications professionnelles, n'est pas incompatible avec le 6 de l'article 4 septies de la directive 2005/36/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 septembre 2005 modifiée. Il en résulte que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le décret qu'ils attaquent, pris sur le fondement de cet article L. 4002-3, serait illégal du fait de la contrariété de cet article avec le droit de l'Union. Leurs conclusions tendant à l'annulation de ce décret doivent, par suite, être rejetées.

Sur la légalité des arrêtés attaqués :

3. Aux termes de l'article 5 de la directive 2005/36/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles, telle que modifiée par la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013 : " 1. Sans préjudice de dispositions spécifiques du droit communautaire ni des articles 6 et 7 de la présente directive, les États membres ne peuvent restreindre, pour des raisons relatives aux qualifications professionnelles, la libre prestation de services dans un autre État membre : / a) si le prestataire est légalement établi dans un État membre pour y exercer la même profession (ci-après dénommé " État membre d'établissement ") / (...) / 2. Les dispositions du présent titre s'appliquent uniquement dans le cas où le prestataire se déplace vers le territoire de l'État membre d'accueil pour exercer, de façon temporaire et occasionnelle, la profession visée au paragraphe 1. / Le caractère temporaire et occasionnel de la prestation est apprécié au cas par cas, notamment en fonction de la durée de la prestation, de sa fréquence, de sa périodicité et de sa continuité ". Aux termes de l'article 7 de la même directive : " 1. Les États membres peuvent exiger que, lorsque le prestataire se déplace d'un État membre à l'autre pour la première fois pour fournir des services, il en informe préalablement l'autorité compétente de l'État membre d'accueil par une déclaration écrite comprenant les informations relatives aux couvertures d'assurance ou autres moyens de protection personnelle ou collective concernant la responsabilité professionnelle. Une telle déclaration est renouvelée une fois par an si le prestataire compte fournir des services d'une manière temporaire ou occasionnelle dans cet État membre au cours de l'année concernée. Le prestataire peut fournir cette déclaration par tout moyen. / 2. En outre, lors de la première prestation de service ou en cas de changement matériel relatif à la situation établie par les documents, les États membres peuvent exiger que la déclaration soit accompagnée des documents suivants : / a) une preuve de la nationalité du prestataire ; / b) une attestation certifiant que le détenteur est légalement établi dans un État membre pour y exercer les activités en question, et qu'il n'encourt, lorsque l'attestation est délivrée, aucune interdiction même temporaire d'exercer ; / c) une preuve des qualifications professionnelles ; / d) pour les cas visés à l'article 5, paragraphe 1, point b), la preuve par tout moyen que le prestataire a exercé les activités en question pendant au moins une année au cours des dix années précédentes ; / e) en ce qui concerne les professions dans les domaines de la sécurité et de la santé et les professions liées à l'éducation des mineurs, y compris la garde d'enfants et l'éducation de la petite enfance, si l'État membre l'exige de ses propres ressortissants, une attestation confirmant l'absence d'interdictions temporaires ou définitives d'exercer la profession ou de condamnations pénales ; / f) pour les professions ayant des implications en matière de sécurité des patients, une déclaration concernant la connaissance qu'a le demandeur de la langue nécessaire pour l'exercice de la profession dans l'État membre d'accueil ; / (...) / 2 bis. La présentation par le prestataire d'une déclaration requise conformément au paragraphe 1 autorise ce prestataire à accéder à l'activité de services ou à exercer cette activité sur l'ensemble du territoire de l'État membre concerné. (...) 4. Lors de la première prestation de services, dans le cas de professions réglementées qui ont des implications en matière de santé ou de sécurité publiques et qui ne bénéficient pas d'une reconnaissance automatique en vertu du titre III, chapitre II, III ou III bis, l'autorité compétente de l'État membre d'accueil peut procéder à une vérification des qualifications professionnelles du prestataire avant la première prestation de services. Une telle vérification préalable n'est possible que si son objectif est d'éviter des dommages graves pour la santé ou la sécurité du destinataire du service, du fait du manque de qualification professionnelle du prestataire, et dans la mesure où elle n'excède pas ce qui est nécessaire à cette fin. / (...) ".

En ce qui concerne l'arrêté du 8 décembre 2017 désignant les préfets de région compétents pour l'examen des demandes d'autorisation d'exercice ou de prestation de services des professions de santé :

4. Il résulte de ce qui a été dit au point 2 que le Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes n'est pas fondé à demander l'annulation de cet arrêté par voie de conséquence de l'annulation du décret du 2 novembre 2017.

En ce qui concerne l'arrêté du 4 décembre 2017 relatif à la déclaration préalable de prestation de services pour les professions médicales et les pharmaciens :

5. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 2 que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation de cet arrêté par voie de conséquence de l'annulation du décret du 2 novembre 2017.

6. En deuxième lieu, aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait que l'intervention de l'arrêté attaqué soit précédée de la consultation, lorsqu'ils existent, des conseils nationaux des ordres professionnels des professions de santé qu'il concerne.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 4112-7 du code de la santé publique : " Le médecin, le praticien de l'art dentaire ou la sage-femme ressortissant d'un Etat, membre de l'Union européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen, qui est établi et exerce légalement les activités de médecin, de praticien de l'art dentaire ou de sage-femme dans un Etat, membre ou partie, peut exécuter en France, de manière temporaire et occasionnelle, des actes de sa profession sans être inscrit au tableau de l'ordre correspondant. / L'exécution de ces actes est subordonnée à une déclaration préalable, qui est accompagnée de pièces justificatives dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé de la santé. Le prestataire joint une déclaration concernant les connaissances linguistiques nécessaires à la réalisation de la prestation (...) ". Ces dispositions s'appliquent, ainsi qu'il résulte de leurs termes mêmes, à tout praticien " ressortissant d'un Etat, membre de l'Union européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen " qui, de plus, " est établi et exerce légalement [s]es activités (...) dans un Etat, membre de l'Union européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen ", sans poser de condition de résidence. Par suite, l'article 4 de l'arrêté attaqué, en envisageant la possibilité qu'un praticien désireux d'intervenir en France sur ce fondement réside dans un Etat tiers, n'a pas méconnu le champ d'application de l'article L. 4112-7 du code de la santé publique.

8. Enfin, dans le cas où " les titres de formation ont été délivrés par un Etat tiers et reconnus dans un Etat membre de l'Union européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen, autre que la France ", le b) du 4° de l'article 2 de l'arrêté attaqué prévoit que la déclaration est accompagnée de " toutes pièces utiles justifiant [que le demandeur] a exercé la profession dans cet Etat pendant trois ans à temps plein ou à temps partiel pendant une durée totale équivalente ". Cette disposition permet au demandeur, quel que soit l'Etat membre ou partie où il a exercé une profession de santé et quelles que soient les modalités d'exercice dont il fait état, de justifier de cet exercice par tout document utile, l'autorité compétente portant, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, l'appréciation qui lui revient sur l'authenticité et la valeur probante des pièces produites. Les requérants ne sont, par suite, pas fondés à soutenir que l'arrêté qu'ils attaquent serait, faute d'avoir précisé la liste des justificatifs susceptibles d'être présentés, entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en raison de ce qu'il ne permettrait pas de s'assurer de leur authenticité.

En ce qui concerne l'arrêté du 8 décembre 2017 relatif à la déclaration préalable de prestation de services pour les conseillers en génétique, les physiciens médicaux et les préparateurs en pharmacie et en pharmacie hospitalière, ainsi que pour les professions figurant au livre III de la partie IV du code de la santé publique :

S'agissant de la légalité externe :

9. En premier lieu, s'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué a été signé le jour même où le Haut Conseil des professions paramédicales, dont la consultation était requise en vertu des articles D. 4381-1 et D. 4381-2 du code de la santé publique, a rendu son avis à la ministre des solidarités et de la santé, cette seule circonstance n'est pas de nature à établir qu'il n'aurait pu être tenu compte de cet avis.

10. En second lieu, les moyens tirés de ce que le Haut Conseil des professions paramédicales aurait été irrégulièrement composé, que le quorum n'aurait pas été atteint et que son avis serait incomplet ne sont pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé.

S'agissant de la légalité interne :

11. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 2 que le Conseil national de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté qu'il attaque par voie de conséquence de l'annulation du décret du 2 novembre 2017.

12. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 4321-11 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 19 janvier 2017 : " Le masseur-kinésithérapeute, ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne ou d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen, qui est établi et exerce légalement les activités de masseur-kinésithérapeute dans un Etat, membre ou partie, peut exécuter en France des actes professionnels, de manière temporaire et occasionnelle, sans avoir à procéder aux formalités prévues à l'article L. 4321-10. / Lorsque l'exercice ou la formation conduisant à la profession n'est pas réglementé dans l'Etat où il est établi, le prestataire de services doit justifier avoir exercé dans un ou plusieurs Etats, membres ou parties, pendant un an au moins à temps plein ou à temps partiel pendant une durée totale équivalente au cours des dix années précédentes. / L'exécution de ces actes est subordonnée à une déclaration préalable, qui est accompagnée de pièces justificatives dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé de la santé. Le prestataire joint une déclaration concernant les connaissances linguistiques nécessaires à la réalisation de la prestation (...) ". Aux termes de l'article R. 4321-30 du même code : " Les dispositions des articles R. 4311-38 à R. 4311-41-2 sont applicables à la prestation de services des masseurs-kinésithérapeutes dont la déclaration est prévue à l'article L. 4321-11. " Aux termes de l'article R. 4311-38 : " La déclaration prévue à l'article L. 4311-22 est adressée avant la première prestation de services au Conseil national de l'ordre. / Elle comporte des informations relatives à l'état civil, à la nationalité, à la formation initiale, à l'expérience professionnelle et à la formation tout au long de la vie ayant fait l'objet d'une validation par un organisme compétent, aux connaissances linguistiques, à la légalité de l'établissement dans l'Etat membre d'origine ou de provenance, à l'absence d'interdiction, même temporaire, d'exercer, aux qualifications professionnelles, à l'assurance professionnelle et au lieu d'exécution de la première prestation de services, ainsi que la liste des pièces justificatives qui l'accompagnent. / Le caractère temporaire et occasionnel de la prestation de services est apprécié au cas par cas, notamment en fonction de sa durée, de sa fréquence, de sa périodicité et de sa continuité. " Aux termes de l'article R. 4311-41-2 : " Sont fixés par arrêté du ministre chargé de la santé : / 1° Le modèle de la déclaration et de la déclaration d'exercice partiel ainsi que la liste des pièces justificatives qui l'accompagnent ; / 2° Les informations à fournir dans les états statistiques. "

13. En prévoyant, au 2° de son article 2, la production par le professionnel qui déclare l'exercice d'une prestation de service d'" une copie du titre de formation permettant l'exercice de la profession dans le pays d'obtention ", l'arrêté attaqué ne fait pas obstacle à la possibilité, pour l'autorité compétente, de demander, en cas de doute sur l'authenticité ou la valeur probante des pièces produites, les éléments lui permettant de porter sur ces points l'appréciation qui lui revient. Il suit de là que le moyen tiré de ce qu'il serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation, faute de prévoir la production de pièces permettant vérifier la nature et la consistance de la formation initiale suivie par le professionnel souhaitant intervenir en France, doit être écarté.

14. En troisième lieu, le moyen tiré de ce que, faute de prévoir la fourniture d'informations relatives au lieu d'exécution de la première prestation de services, l'arrêté attaqué méconnaîtrait les dispositions de l'article R. 4311-38 du code de la santé publique ne peut qu'être écarté, ces dispositions devant être regardées comme n'ayant requis une telle information qu'à titre facultatif, dès lors qu'elle ne figure pas au nombre de celles qui sont prévues par les dispositions citées ci-dessus de l'article 7 de la directive 2005/36 du 7 septembre 2005. Le formulaire annexé à l'arrêté attaqué prévoit d'ailleurs une mention : " coordonnées en France (facultatif) ".

15. En quatrième lieu, le moyen tiré de ce que l'arrêté serait contraire aux dispositions de l'article L. 4321-11 du code de la santé publique qui prévoient que : " Le prestataire joint une déclaration concernant les connaissances linguistiques nécessaires à la réalisation de la prestation " est inopérant, l'arrêté attaqué étant pris, ainsi qu'il a été dit, pour l'application des dispositions de l'article R. 4311-38 du code de la santé publique et les connaissances linguistiques faisant l'objet d'une déclaration distincte de celle prévue par cet article.

16. En cinquième lieu, l'article R. 4311-38 du code de la santé publique se bornant à prévoir la communication, par le professionnel concerné, d'informations " relatives (...) à l'assurance professionnelle " qu'il a souscrite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir qu'en prévoyant seulement, dans le formulaire dont il fixe le modèle, que le demandeur indique le nom de sa compagnie d'assurance et le numéro de sa police d'assurance professionnelle, l'arrêté attaqué serait entaché d'illégalité, faute d'exiger le détail des garanties souscrites dans son contrat d'assurance.

17. Enfin, le moyen tiré de ce que, faute de prévoir la fourniture d'informations permettant à l'autorité compétente de porter son appréciation sur le caractère temporaire et occasionnel des prestations sur lesquelles porte la déclaration, l'arrêté attaqué méconnaîtrait les dispositions du dernier alinéa de l'article R. 4311-38 du code de la santé publique ne peut qu'être écarté, ces dispositions ne pouvant être regardées comme ayant requis une telle information, qui n'est pas au nombre de celles qui sont prévues par les dispositions citées ci-dessus de l'article 7 de la directive 2005/36 du 7 septembre 2005

En ce qui concerne l'arrêté du 8 décembre 2017 relatif à l'avis rendu par les commissions d'autorisation d'exercice ou par les ordres des professions de santé en cas d'accès partiel à une profession dans le domaine de la santé :

18. Aux termes de l'article L. 4002-4 du code de la santé publique : " La demande d'accès partiel de l'intéressé est examinée, selon le cas, comme une demande à fin d'établissement ou de libre prestation de services de la profession concernée. L'autorité compétente se prononce sur les demandes à fin d'établissement après avis de l'ordre le cas échéant concerné. " Aux termes de l'article R. 4002-4 du même code : " En cas de demande d'accès partiel à fin d'établissement, l'autorité compétente se prononce sur l'autorisation sollicitée après avis de la commission de la profession de santé concernée, ainsi que, pour les professions dotées d'un ordre, après avis de cet ordre. / Le dossier présenté par le professionnel fait l'objet d'une analyse spécifique, conduite dans le respect du droit à la libre circulation des ressortissants des Etats membres de l'Union européenne ou parties à l'accord sur l'Espace économique européen et des conditions fixées au I de l'article L. 4002-3, et comportant l'examen du périmètre de l'exercice partiel sollicité, des titres de formation, de l'expérience professionnelle et de la formation suivie tout au long de la vie reconnue par un organisme compétent, de l'intéressé. / L'avis émis par la commission, et, le cas échéant, par l'ordre, expose la portée et les conséquences attendues de la demande d'accès partiel sur l'offre de soins des activités concernées par cette demande. / L'avis émis par la commission, et, le cas échéant, par l'ordre, est motivé, notamment par l'analyse des conséquences d'une éventuelle autorisation sur la qualité et la sécurité des soins, l'information des professionnels de santé et des usagers du système de santé ainsi que la sécurité d'exercice des professionnels appelés à exercer sous le régime de l'accès partiel. Il se prononce à ce titre en particulier sur les points suivants : / 1° Le respect des conditions fixées au I de l'article L. 4002-3 ; / 2° L'identification et la délimitation du champ d'exercice ou des actes que le professionnel serait autorisé à réaliser sous le régime de l'accès partiel ; / 3° La description de l'intégration effective de ces actes dans les processus de soins et leur incidence éventuelle sur la continuité de la prise en charge ; / 4° L'identification des actes réalisés sous le régime de l'accès partiel pour les professionnels de santé et pour les usagers du système de santé ; / 5° Toute recommandation de nature à faciliter la bonne insertion du professionnel auquel l'autorisation d'exercice partiel serait accordée. / Un arrêté du ministre chargé de la santé fixe le modèle de formulaire de présentation de l'avis émis par la commission et, le cas échéant, par l'ordre concernés. "

19. En premier lieu, il résulte des dispositions du dernier alinéa de l'article R. 4002-2 du code de la santé publique, cité ci-dessus, d'une part, que le ministre chargé de la santé était compétent pour prendre l'arrêté attaqué et, d'autre part, que celui-ci n'avait pas à être signé par le ministre chargé de l'enseignement supérieur.

20. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 2 que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation de cet arrêté par voie de conséquence de l'annulation du décret du 2 novembre 2017.

21. En troisième lieu, il résulte des dispositions citées ci-dessus que le principe du recueil de l'avis de l'ordre professionnel concerné sur les demandes d'exercice en accès partiel est prévu par les dispositions de l'article L. 4002-4 du code de la santé publique. En fixant, sur le fondement de ces dispositions, les modalités de recueil de cet avis et en renvoyant à un arrêté ministériel le soin de fixer le modèle de formulaire de présentation de cet avis, l'article R. 4002-4 du même code, cité ci-dessus, n'a, contrairement à ce que soutiennent les requérants, pas consenti une subdélégation illégale. Ceux-ci ne sont donc pas fondés à soutenir que l'arrêté attaqué serait, pour ce motif, entaché d'incompétence.

22. En quatrième lieu, en prévoyant, au 1° du III de l'annexe de l'arrêté attaqué, que les commissions d'autorisation d'exercice et les ordres professionnels donnent leur avis sur les " incidences possibles [de l'accès partiel] sur les conditions de prise en charge ", le ministre chargé de la santé a entendu permettre à l'autorité compétente de disposer des éléments permettant, conformément aux dispositions du septième alinéa de l'article R. 4002-4 du code de la santé publique, d'apprécier, pour certains actes ou groupes d'actes, la compatibilité de leur réalisation sous le régime de l'accès partiel avec les règles de remboursement par l'assurance-maladie. Les requérants ne sont, par suite, pas fondés à soutenir que l'arrêté serait sur ce point illégal faute d'être suffisamment précis.

23. En cinquième lieu, les dispositions du IV de l'annexe de l'arrêté attaqué, qui se bornent à reproduire celles du huitième alinéa de l'article R. 4002-4 du code de la santé publique, sont d'une précision suffisante et ne peuvent être tenues pour illégales.

24. Enfin, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué aurait méconnu la compétence confiée au ministre chargé de la santé en prévoyant, outre le recueil de l'avis des ordres professionnels compétents, celui des commissions appelées à se prononcer, en vertu des dispositions de la quatrième partie du code de la santé publique, sur les autorisations individuelles d'exercice des professions de santé, ne peut qu'être écarté, le recueil de ces avis étant prévu par les dispositions citées ci-dessus de l'article R. 4002-2 du même code.

25. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation du décret et des arrêtés ministériels qu'ils attaquent. Leurs requêtes doivent, par suite, être rejetées, y compris, en conséquence, leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : Les requêtes n°s 416964, 417078, 417937, 417963, 418010, 418013 et 419746 des Chirurgiens-dentistes de France et autres sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée aux Chirurgiens-dentistes de France, premier requérant dénommé dans la requête n° 416964, au conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes, au conseil national de l'ordre des masseurs-kinésithérapeutes, au conseil national de l'ordre des infirmiers, au ministre des solidarités et de la santé, à la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation et au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 5ème - 6ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 416964
Date de la décision : 02/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 02 jui. 2021, n° 416964
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Alain Seban
Rapporteur public ?: Mme Cécile Barrois de Sarigny

Origine de la décision
Date de l'import : 20/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:416964.20210702
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