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01/07/2021 | FRANCE | N°450960

France | France, Conseil d'État, 9ème chambre, 01 juillet 2021, 450960


Vu la procédure suivante :

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, sur le fondement de l'article L. 52-15 du code électoral, a saisi le tribunal administratif de Lyon de sa décision du 30 novembre 2020 par laquelle elle a rejeté le compte de campagne de Mme B... C..., candidate tête de liste aux élections municipales qui se sont tenues les 15 mars et 28 juin 2020 dans la commune de Saint-Fons (Rhône).

Par un jugement n° 2009446 du 23 février 2021, ce tribunal administratif a confirmé le bien-fondé du rejet du compte de campagne,

déclaré Mme C... inéligible pour une durée de douze mois et démissionn...

Vu la procédure suivante :

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, sur le fondement de l'article L. 52-15 du code électoral, a saisi le tribunal administratif de Lyon de sa décision du 30 novembre 2020 par laquelle elle a rejeté le compte de campagne de Mme B... C..., candidate tête de liste aux élections municipales qui se sont tenues les 15 mars et 28 juin 2020 dans la commune de Saint-Fons (Rhône).

Par un jugement n° 2009446 du 23 février 2021, ce tribunal administratif a confirmé le bien-fondé du rejet du compte de campagne, déclaré Mme C... inéligible pour une durée de douze mois et démissionnaire d'office de son mandat de conseillère municipale, et proclamé élu M. A... D....

Par une requête enregistrée le 22 mars 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme C... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il statue sur son inéligibilité et la saisine de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques ;

2°) de rejeter cette saisine et de fixer le montant du remboursement forfaitaire de ses dépenses de campagne à la somme de 9 200 euros ;

3°) de la proclamer élue ;

4°) de mettre à la charge de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code électoral ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Lionel Ferreira, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Il résulte de l'instruction que par une décision du 30 novembre 2020, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) a rejeté le compte de campagne de Mme C..., tête de la liste " Saint-Fons en mouvement ", qui a recueilli 7,50 % des suffrages exprimés et un siège au conseil municipal à l'issue des opérations électorales qui se sont tenues le 28 juin 2020 dans la commune de Saint-Fons (Rhône), aux motifs, d'une part, que ce compte de campagne n'a pas été déposé dans les délais prescrits, et, d'autre part, qu'il présentait un solde déficitaire. Saisi par cette commission sur le fondement de l'article L. 52-15 du code électoral, le tribunal administratif de Lyon a, par un jugement du 23 février 2021, déclaré Mme C... inéligible pour une durée de douze mois et démissionnaire d'office de son mandat de conseillère municipale, et a en conséquence proclamé élu M. D..., suivant de liste. Mme C... relève appel de ce jugement.

2. D'une part, aux termes de l'article L. 52-12 du code électoral : " I. Chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement prévu à l'article L. 52-11 est tenu d'établir un compte de campagne lorsqu'il a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés (...) / (...) Le compte de campagne doit être en équilibre ou excédentaire et ne peut présenter un déficit. (...) / (...) II.- Au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin, chaque candidat ou candidat tête de liste présent au premier tour dépose à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques son compte de campagne et ses annexes (...) ". En vertu du 4° du XII de l'article 19 de la loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19, la date limite de dépôt du compte de campagne a été reportée au 11 septembre 2020 à 18 heures pour les listes de candidats présentes seulement au second tour.

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 118-3 du code électoral, dans sa rédaction issue de la loi du 2 décembre 2019 visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral : " Lorsqu'il relève une volonté de fraude ou un manquement d'une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales, le juge de l'élection, saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, peut déclarer inéligible : / 1° Le candidat qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits à l'article L. 52-12 ; / 2° Le candidat dont le compte de campagne, le cas échéant après réformation, fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales ; / 3° Le candidat dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit. / L'inéligibilité mentionnée au présent article est prononcée pour une durée maximale de trois ans et s'applique à toutes les élections. (...) ".

4. En application des dispositions précitées de l'article L. 118-3 du code électoral, dans sa rédaction issue de la loi du 2 décembre 2019, en dehors des cas de fraude, le juge de l'élection ne peut prononcer l'inéligibilité d'un candidat sur le fondement de ces dispositions que s'il constate un manquement d'une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales. Il lui incombe à cet effet de prendre en compte l'ensemble des circonstances de l'espèce et d'apprécier s'il s'agit d'un manquement caractérisé à une règle substantielle relative au financement des campagnes électorales et s'il présente un caractère délibéré.

5. Il est constant que le compte de campagne déposé par Mme C... le 12 septembre 2020, postérieurement au délai prescrit par l'article L. 52-12 du code électoral qui expirait le 11 septembre 2020 à 18 heures, faisait apparaître un solde excédentaire de 18 euros et que la Commission nationale des comptes de campagne et des finances politiques a constaté que, contrairement aux données chiffrées déclarées, ce compte présentait, au terme du délai légal de dépôt, un solde déficitaire de 1 212 euros. Par suite, c'est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne de Mme C... et saisi le tribunal administratif de Lyon.

6. En déposant un compte de campagne, dont la Commission nationale des comptes de campagne et des finances politiques a constaté qu'il présentait un déficit de près de dix pour cent des dépenses engagées, après l'expiration du délai prescrit, Mme C... a méconnu deux obligations substantielles. L'intéressée fait valoir que ce déficit, qui n'est pas contesté, correspond aux frais dus à une fuite de gaz qui aurait affecté son local de campagne et que les circonstances nées de l'épidémie de Covid-19 ont constitué un cas de force majeur justifiant le retard constaté. Toutefois, il résulte de l'instruction que l'incident dont Mme C... allègue qu'il est à l'origine du déficit de son compte de campagne est intervenu le 16 mars 2020, et que ni le faible montant de ses revenus mensuels, ni le décès de sa mère, intervenu près de deux mois après l'expiration du délai qui lui était imparti par les dispositions de l'article L. 52-12 citées au point 2, pas plus que les circonstances que Mme C... ait été testée positive en mai 2020 à la covid et que plusieurs de ses colistiers ainsi que son directeur de campagne aient été atteints par cette maladie étaient de nature à faire obstacle à ce qu'elle dépose un compte de campagne ne présentant pas de déficit dans le délai requis.

7. Eu égard à ces manquements caractérisés à des règles substantielles relatives au financement des campagnes électorales, à leur particulière gravité et aux circonstances de l'espèce Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a prononcé son inéligibilité pour une durée de douze mois et a annulé son élection.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme B... C... et à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.

Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et à M. A... D....


Synthèse
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 450960
Date de la décision : 01/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 01 jui. 2021, n° 450960
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Lionel Ferreira
Rapporteur public ?: Mme Céline Guibé

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:450960.20210701
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