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17/06/2021 | FRANCE | N°450671

France | France, Conseil d'État, 9ème chambre, 17 juin 2021, 450671


Vu les procédures suivantes :

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, sur le fondement de l'article L. 52-15 du code électoral, a saisi le tribunal administratif de Lille de sa décision du 10 décembre 2020 par laquelle elle a constaté l'absence de dépôt du compte de campagne de M. B... E..., candidat tête de liste aux élections municipales et communautaires qui se sont tenues le 15 mars 2020 dans la commune de d'Armentières (Nord).

Par un jugement n° 2009218 du 18 février 2021, ce tribunal administratif a déclaré avoir été s

aisi à bon droit, a jugé que le candidat concerné n'avait pas droit au remb...

Vu les procédures suivantes :

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, sur le fondement de l'article L. 52-15 du code électoral, a saisi le tribunal administratif de Lille de sa décision du 10 décembre 2020 par laquelle elle a constaté l'absence de dépôt du compte de campagne de M. B... E..., candidat tête de liste aux élections municipales et communautaires qui se sont tenues le 15 mars 2020 dans la commune de d'Armentières (Nord).

Par un jugement n° 2009218 du 18 février 2021, ce tribunal administratif a déclaré avoir été saisi à bon droit, a jugé que le candidat concerné n'avait pas droit au remboursement forfaitaire de ses dépenses électorales et a prononcé l'inéligibilité de celui-ci pour une durée de dix-huit mois à compter de la date à laquelle son jugement deviendrait définitif.

I. Sous le n° 450671, par une requête enregistrée le 15 mars 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, M. E... demande au Conseil d'État d'annuler ce jugement en tant qu'il a prononcé son inéligibilité.

II. Sous le n° 451494, par une ordonnance n°210951 du 7 avril 2021, enregistrée le même jour au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président du tribunal administratif de Lille a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, l'appel, enregistré le 14 mars 2021 au greffe de ce tribunal, formé par M. E... contre le même jugement. Par cette requête, M. E... demande au Conseil d'État d'annuler ce jugement en tant qu'il a prononcé son inéligibilité.

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code électoral ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme C... F..., conseillère d'Etat,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes visées ci-dessus sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

2. Par une décision du 10 décembre 2020, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a constaté que M. E..., candidat non élu tête de la liste " Armentières se réinvente ! ", qui a recueilli 7,78 % des suffrages exprimés à l'issue des opérations électorales qui se sont tenues le 15 mars 2020 dans la commune d'Armentières (Nord), n'avait pas déposé son compte de campagne. Saisi par cette commission sur le fondement de l'article L. 52-15 du code électoral, le tribunal administratif de Lille a, par un jugement du 18 février 2021, déclaré M. E... inéligible pour une durée de dix-huit mois. M. E... relève appel de ce jugement.

3. D'une part, aux termes de l'article L. 52-12 du code électoral : " I. Chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement prévu à l'article L. 52-11 est tenu d'établir un compte de campagne lorsqu'il a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés (...) / (...) II.- Au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin, chaque candidat ou candidat tête de liste présent au premier tour dépose à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques son compte de campagne et ses annexes (...) ". En vertu du 4° du XII de l'article 19 de la loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19, la date limite de dépôt du compte de campagne a été reportée au 10 juillet 2020 à 18 heures pour les listes de candidats participant seulement au 1er tour.

4. D'autre part, aux termes de l'article L. 118-3 du code électoral, dans sa rédaction applicable, issue de la loi du 2 décembre 2019 visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral : " Lorsqu'il relève une volonté de fraude ou un manquement d'une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales, le juge de l'élection, saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, peut déclarer inéligible : / 1° Le candidat qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits à l'article L. 52-12 ; /(...)/ L'inéligibilité mentionnée au présent article est prononcée pour une durée maximale de trois ans et s'applique à toutes les élections. (...) ".

5. Il résulte des dispositions précitées que la déclaration d'inéligibilité d'un candidat qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits à l'article L. 52-12, ou dont le compte de campagne, le cas échéant après réformation, fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales, ou encore dont le compte a été rejeté à bon droit, est une simple faculté dont dispose le juge de l'élection, lequel ne déclare inéligible un candidat qu'en cas de volonté de fraude ou de manquement d'une particulière gravité aux règles relatives au financement des campagnes électorales. Pour apprécier si le manquement justifie que le candidat soit déclaré inéligible, le juge doit prendre en compte l'ensemble des circonstances de l'espèce et, en particulier, la nature de la règle méconnue, le caractère délibéré ou non du manquement, l'existence éventuelle d'autres motifs d'irrégularité du compte, ainsi que le montant des sommes en cause.

6. Il résulte de l'instruction que M. E... n'a pas effectué toutes les diligences requises de sa part entre le 15 mars 2020, date du premier tour des élections municipales et le 10 juillet, date limite de dépôt de son compte de campagne. S'il soutient que son mandataire financier, M. D..., n'aurait pas remis les documents comptables indispensables à l'établissement de ce compte, et n'aurait répondu ni à ses sollicitations, ni à celles de son expert-comptable, le seul courrier qu'il produit à l'instance est postérieur au 10 juillet 2020. S'il se prévaut, en outre, d'une correspondance adressée par son expert-comptable à M. D..., ce dernier fait état de ce qu'il n'avait pu transmettre les pièces nécessaires à l'expert-comptable en raison des propres carences de M. E... qui, en dépit des relances et avertissements multiples qu'il lui avait adressés, ne lui avait pas fourni les informations et documents nécessaires à l'établissement du compte de campagne. Ainsi, M.E... qui a fait preuve de négligences répétées en ne prenant aucune mesure afin de déposer son compte de campagne dans le délai prescrit et qui n'a pas régularisé sa situation devant la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, rendant impossible tout contrôle en la privant de la faculté de prendre connaissance des recettes perçues et des dépenses versées, doit être regardé comme ayant commis, dans les circonstances de l'espèce, un manquement délibéré d'une particulière gravité. Par suite, M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille, a prononcé son inéligibilité pour une durée de dix-huit mois.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les requêtes de M. E... sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B... E... et à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.

Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur, au préfet du Nord et à M. A... D....


Synthèse
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 450671
Date de la décision : 17/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 17 jui. 2021, n° 450671
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Catherine Fischer-Hirtz
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:450671.20210617
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