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14/06/2021 | FRANCE | N°439379

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 14 juin 2021, 439379


Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nantes, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de la décision implicite par laquelle le directeur de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) " Résidences bocage d'Anjou " l'a placée en position de congé sans traitement. Par une ordonnance n° 2001202 du 21 février 2020, le juge des référés du tribunal administratif a suspendu l'exécution de cette décision impli

cite.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés le...

Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nantes, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de la décision implicite par laquelle le directeur de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) " Résidences bocage d'Anjou " l'a placée en position de congé sans traitement. Par une ordonnance n° 2001202 du 21 février 2020, le juge des référés du tribunal administratif a suspendu l'exécution de cette décision implicite.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 9 et 24 mars 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'EHPAD " Résidences bocage d'Anjou " demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de rejeter la demande de Mme A... ;

3°) de mettre à la charge de Mme A... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Pearl Nguyên Duy, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de l'EHPAD " Résidences Bocage d'anjou " et à Me Balat, avocat de Mme A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (...) ".

2. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés qu'après avoir été recrutée, à compter du 1er juin 2010, en qualité d'aide-soignante stagiaire par un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) devenu après fusion, en 2013, avec deux autres établissements, l'EHPAD " Résidences bocage d'Anjou ", Mme A... a été placée en congé de longue durée, du 28 avril 2011 au 28 avril 2019, à plein traitement pendant les cinq premières années puis à demi-traitement les trois années suivantes, avant, à l'expiration de ce congé, d'être placée, dans un premier temps, en congé sans traitement à compter du 28 avril 2019, puis déclarée inapte à l'exercice de ses fonctions d'aide-soignante de manière définitive et absolue par la commission de réforme lors de sa séance du 3 septembre 2019. Par une ordonnance du 21 février 2020, contre laquelle l'EHPAD " Résidences bocage d'Anjou " se pourvoit en cassation, le juge des référés du tribunal administratif de Nantes a, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, suspendu l'exécution de la décision implicite par laquelle la directrice de l'EHPAD a placé Mme A... en position de congé sans traitement.

3. Le juge des référés, saisi d'une demande de suspension de l'exécution d'une décision administrative, peut retenir un moyen propre à créer un doute sérieux quant à sa légalité qui n'a pas été soulevé à l'appui de la demande à fin d'annulation ou de réformation de cette décision, sauf si ce moyen n'est pas d'ordre public et relève d'une cause juridique distincte de celle à laquelle se rattachent les moyens soulevés dans l'instance au fond dans le délai de recours contentieux.

4. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que, d'une part, Mme A... a introduit, le 28 novembre 2019, une demande au fond tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite la plaçant en position de congé sans traitement, et, par une requête distincte du 29 janvier 2020, une demande en référé tendant à la suspension de la même décision, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, et, d'autre part, que ces requêtes ne comportaient qu'un moyen de légalité externe. Il ressort des mêmes pièces que ce n'est que, dans un mémoire complémentaire enregistré le 12 février 2020 dans la procédure en référé, qu'a été présenté pour la première fois le moyen de légalité interne tiré du défaut d'examen d'un reclassement ou d'un placement la concernant sur un poste adapté au sein du groupe EPHAD " Résidences bocage d'Anjou ". Ayant été présenté plus de deux mois après l'expiration du délai de recours contentieux qui a commencé à courir au plus tard le 28 novembre 2019, un tel moyen, qui n'est pas d'ordre public et relève d'une cause juridique distincte de celle à laquelle se rattachait le moyen jusque-là soulevé dans l'instance au fond et en suspension, était irrecevable et, par suite, insusceptible de justifier tant l'annulation de la décision contestée que la suspension de son exécution. La circonstance que, le 29 janvier 2020, Mme A... a introduit à nouveau un recours pour excès de pouvoir contre la même décision, fondé sur le même moyen de légalité externe, n'a pu avoir, en tout état de cause, pour effet de rouvrir le délai de recours contentieux qui avait commencé à courir, ainsi qu'il a été dit, le 28 novembre 2019. Au demeurant, cette demande qui faisait double emploi avec celle enregistrée le 28 novembre 2019, a été radiée du registre du greffe par une ordonnance du 16 mars 2020.

5. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que l'EHPAD " Résidences bocage d'Anjou " est fondé à demander l'annulation de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nantes du 21 février 2020.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé et de statuer sur la demande de suspension présentée par Mme A..., en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

7. En premier lieu, ainsi qu'il a été dit au point 4, le moyen tiré du défaut d'examen d'un reclassement ou d'un placement la concernant sur un poste adapté au sein du groupe EPHAD " Résidences bocage d'Anjou " relève d'une cause juridique différente de celle à laquelle se rattache le seul moyen présenté jusque-là par Mme A... dans le cadre de sa requête au fond ou en référé suspension. Ce nouveau moyen, qui n'est pas d'ordre public et qui a été présenté au-delà du délai de recours contentieux, est par suite irrecevable.

8. En second lieu, il ressort des termes du mémoire en réplique produit par Mme A... et enregistré le 12 février 2020 que cette dernière a pris acte, à la lecture de l'argumentation en défense de l'EPHAD " Résidences bocage d'Anjou ", de ce qu'elle avait été placée en congé sans traitement, le 28 avril 2019, dans l'attente de l'avis de la commission de réforme qui est finalement intervenu le 3 septembre 2019. Elle doit ainsi être regardée comme ayant renoncé à son unique moyen de légalité externe tiré de ce qu'elle n'avait pas été mise à même de produire ses observations devant le comité médical ou la commission de réforme avant l'intervention de la mesure contestée.

9. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la condition d'urgence, que Mme A... n'est pas fondée à demander, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision par laquelle l'EHPAD " Résidences bocage d'Anjou " l'a placée en congé sans traitement le 28 avril 2019.

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par Mme A... à ce titre. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A... la somme demandée au même titre par l'EHPAD " Résidences bocage d'Anjou ".

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du 12 février 2020 du juge des référés du tribunal administratif de Nantes est annulée.

Article 2 : La demande de Mme A... est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de l'EHPAD " Résidences bocage d'Anjou " présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes " Résidences bocage d'Anjou " et à Mme B... A....


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 439379
Date de la décision : 14/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 14 jui. 2021, n° 439379
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Pearl Nguyên Duy
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge
Avocat(s) : SCP CELICE, TEXIDOR, PERIER ; BALAT

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:439379.20210614
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