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10/05/2021 | FRANCE | N°430994

France | France, Conseil d'État, 2ème - 7ème chambres réunies, 10 mai 2021, 430994


Vu la procédure suivante :

Par une décision n° 17030397 du 21 février 2019, la Cour nationale du droit d'asile a rejeté la demande présentée par M. B... A... B... tendant à l'annulation de la décision du 16 juin 2017 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande d'asile et refusé de lui reconnaître la qualité de réfugié ou, à défaut, de lui accorder le bénéfice de la protection subsidiaire.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés l

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Vu la procédure suivante :

Par une décision n° 17030397 du 21 février 2019, la Cour nationale du droit d'asile a rejeté la demande présentée par M. B... A... B... tendant à l'annulation de la décision du 16 juin 2017 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande d'asile et refusé de lui reconnaître la qualité de réfugié ou, à défaut, de lui accorder le bénéfice de la protection subsidiaire.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 22 mai 2019, 6 août 2019 et 15 mars 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette décision ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit aux conclusions présentées devant la Cour nationale du droit d'asile ;

3°) de mettre à la charge de l'OFPRA la somme de 3 000 euros à verser à la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, son avocat, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 relatif au statut des réfugiés ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Sébastien Gauthier, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Sophie Roussel, rapporteure publique,

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de M. A... B... et à la SCP Foussard, Froger, avocat de l'Office français de protection des refugies et apatrides ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis à la Cour nationale du droit d'asile que, par décision du 16 juin 2017, le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté la demande d'asile présentée par M. A... B..., retenant que les déclarations de l'intéressé ne permettaient pas de regarder comme fondées les craintes de persécution alléguées. Par une décision du 21 février 2019, la Cour nationale du droit d'asile a rejeté le recours de M. A... B... contre cette décision en se fondant sur le motif tiré qu'il y avait des raisons sérieuses de penser que l'intéressé s'était rendu coupable d'agissements contraires aux buts et aux principes des Nations unies. M. A... B... se pourvoit en cassation contre cette décision.

2. Aux termes du 2° du A de l'article 1er de la convention de Genève du 28 juillet 1951, doit être considérée comme réfugiée toute personne qui " craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut, ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ".

3. Aux termes du F de l'article 1er de la convention de Genève : " les dispositions de cette convention ne seront pas applicables aux personnes dont on aura des raisons sérieuses de penser (...) c) qu'elles se sont rendues coupables d'agissements contraires aux buts et aux principes des Nations unies ". Aux termes de l'article L. 711-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, devenu l'article L. 511-6 : " Le statut de réfugié n'est pas accordé à une personne qui relève de l'une des clauses d'exclusion prévues aux sections D, E ou F de l'article 1er de la convention de Genève du 28 juillet 1951 (...) / La même section F s'applique également aux personnes qui sont les instigatrices ou les complices des crimes ou des agissements mentionnés à ladite section ou qui y sont personnellement impliquées ". Le complice est celui qui, sciemment, a par ses agissements contribué à la préparation ou à la réalisation du crime ou en a facilité la commission ou a assisté à son exécution sans chercher à aucun moment, eu égard à sa situation, à le prévenir ou à s'en dissocier.

4. En premier lieu, si M. A... B... soutient que la Cour nationale du droit d'asile aurait méconnu le principe du caractère contradictoire de la procédure en refusant de faire droit à sa demande de réouverture de l'instruction afin qu'il puisse disposer du temps nécessaire pour prendre connaissance et répondre aux éléments figurant dans le mémoire de l'OFPRA qui lui a été communiqué le 15 janvier 2019, il ressort des pièces du dossier de la procédure que la Cour a informé les parties, par une mesure prise le 18 décembre 2018 en application de l'article R. 733-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable, que la décision à intervenir était notamment susceptible de se fonder sur le F de l'article 1er de la convention de Genève et les a invitées à produire des observations complémentaires avant le 15 janvier 2019. M. A... B... a produit des observations le 14 janvier 2019, de même que l'OFPRA dont le mémoire a été communiqué le 15 janvier 2019 à M. A... B..., qui disposait d'un délai courant jusqu'au 26 janvier 2019 pour y répliquer, ce qu'il a fait le 23 janvier 2019. Dans ces conditions, le moyen mettant en cause le caractère contradictoire de la procédure suivie devant la Cour doit être écarté.

5. En second lieu, pour retenir, en mettant en oeuvre les stipulations et dispositions citées au point 3, qu'il y avait des raisons sérieuses de penser que M. A... B... s'était rendu, aux côtés de Daech, coupable d'agissements contraires aux buts et aux principes des Nations unies, la Cour nationale du droit d'asile, après avoir relevé que l'intéressé avait tenu un discours sensiblement différent devant l'OFPRA et devant elle et avait fait montre d'une volonté manifeste de dissimuler la nature exacte de son parcours et de ses activités au cours des années 2013 à 2015, s'est notamment fondée, au terme de son appréciation souveraine des faits de l'espèce, sur la circonstance que M. A... B..., qui résidait dans le quartier de Baghiliya de la ville de Deir Ez-Zor, avait volontairement déménagé pour s'installer à partir du mois de juin 2013 dans le quartier de Hamidiya, contrôlé par le Front islamique syrien, sans donner d'éléments factuels sur ses activités dans ce quartier à proximité duquel a pourtant eu lieu un massacre, le 11 juin 2014 attribué au Front Al-Nosra de plusieurs habitants de confession chiite au sein du village de Hatla, sur la circonstance qu'il avait fait allégeance à Daech en mars 2014 et qu'il s'était rendu volontairement à Raqqa, capitale autoproclamée de Daech en Syrie, au début de l'année 2015 grâce à un titre d'identité et de circulation qui lui avait été remis par Daech dès le mois de mars 2014, soit plus d'un an avant que la population civile ne puisse normalement bénéficier de ce type de documents, lequel lui a permis de franchir sans difficulté les divers points de contrôle établis par Daech sur le territoire syrien, et sur la circonstance que, une fois arrivé à Raqqa, il avait pu sans difficulté y séjourner, un logement ayant été mis à sa disposition, sans qu'il ne donne aucun élément précis sur ses activités et l'origine des fonds qui lui ont permis de vivre à Raqqa puis de financer son départ vers la Turquie au mois de septembre 2015.

6. En jugeant, en l'état de ses constatations souveraines exemptes de dénaturation et au vu de l'ensemble des circonstances qu'elle a retenues, qu'il existait un faisceau d'éléments factuels significativement probants et concordants permettant d'avoir des raisons sérieuses de penser que l'intéressé avait sciemment prêté son concours à des agissements contraires aux buts et aux principes des Nations unies ou facilité l'exécution de ceux-ci, la Cour n'a pas commis d'erreur de droit.

7. Il résulte de ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision de la Cour nationale du droit d'asile qu'il attaque.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient accueillies les conclusions présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de M. A... B... est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B... A... B... et à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.


Synthèse
Formation : 2ème - 7ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 430994
Date de la décision : 10/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 10 mai. 2021, n° 430994
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Sébastien Gauthier
Rapporteur public ?: Mme Sophie Roussel
Avocat(s) : SCP FOUSSARD, FROGER ; SCP RICARD, BENDEL-VASSEUR, GHNASSIA

Origine de la décision
Date de l'import : 12/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:430994.20210510
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