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05/03/2021 | FRANCE | N°446672

France | France, Conseil d'État, 7ème chambre, 05 mars 2021, 446672


Vu la procédure suivante :

M. B... E... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler les opérations électorales du 28 juin 2020 relatives au second tour des élections municipales de la commune de Saint-Germain-sur-Morin (Seine-et-Marne).

Par un jugement n° 2005054 du 20 octobre 2020, le tribunal administratif de Melun a rejeté cette protestation.

Par une requête, un mémoire en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés les 19 novembre 2020, 13 et 15 février 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. E... demande au Conseil d'Etat :<

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1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prendre toutes les mesures utiles à l'enco...

Vu la procédure suivante :

M. B... E... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler les opérations électorales du 28 juin 2020 relatives au second tour des élections municipales de la commune de Saint-Germain-sur-Morin (Seine-et-Marne).

Par un jugement n° 2005054 du 20 octobre 2020, le tribunal administratif de Melun a rejeté cette protestation.

Par une requête, un mémoire en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés les 19 novembre 2020, 13 et 15 février 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. E... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prendre toutes les mesures utiles à l'encontre de la liste " Pour Saint-Germain continuons ensemble ".

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code électoral ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Didier Ribes, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue du second tour des élections municipales qui se sont déroulées le 28 juin 2020 dans la commune de Saint-Germain-sur-Morin (Seine-et-Marne), la liste " Pour Saint-Germain, continuons ensemble ", menée par M. D..., maire sortant, a obtenu 491 voix, soit 47,57 % des voix, devançant la liste " Saint-Germain et moi " conduite par Mme A..., qui a recueilli 405 voix, soit 39,24 % des voix. Par un jugement du 20 octobre 2020, le tribunal administratif de Melun a rejeté la protestation de M. E..., colistier de Mme A..., tendant à l'annulation du second tour de ces élections municipales.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Le requérant ne peut utilement soutenir que le tribunal administratif de Melun n'a pas répondu au moyen tiré de ce que le conseil municipal ne pouvait pas se réunir entre les deux tours des élections municipales, qui n'avait pas été soulevé devant lui.

Sur le déroulement de la campagne électorale :

En ce qui concerne les griefs tirés de la violation de l'article 52-8 du code électoral :

3. Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 52-8 du code électoral : " Les personnes morales, à l'exception des partis ou groupements politiques, ne peuvent participer au financement de la campagne électorale d'un candidat, ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, services ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués (...) ".

4. Il résulte de l'instruction que le maire sortant de la commune a annoncé dès le 28 mai 2020 son intention de porter plainte à l'encontre du maire de la commune voisine de Couilly-Pont-aux-Dames au motif qu'il aurait tenu des propos diffamatoires sur la politique immobilière de la commune. Le maire de Saint-Germain-sur-Morin a alors rédigé et signé en sa qualité de maire et non de candidat un tract intitulé " Au conseil municipal du 28 mai 2020 ", comportant l'en-tête officiel de la commune, qui a ensuite été diffusé aux électeurs à l'aide des moyens de la commune puis a été affiché sur le site internet de la commune.

5. Il résulte également de l'instruction que le maire a fait distribuer le 4 juin 2020 à plusieurs habitants du quartier de la Champagne un courrier avec en-tête de la mairie indiquant qu'en tant que candidat à sa réélection, il avait abandonné son projet d'urbaniser un terrain de ce quartier.

6. Il résulte enfin de l'instruction que la chargée de communication de la mairie a rempli un rôle essentiel d'interlocuteur entre le maire et le prestataire extérieur en charge d'élaborer les documents de propagande électorale de ce dernier.

7. Il résulte de ce qui précède que les moyens de la commune ont été utilisés au profit de la liste conduite par M. D..., en méconnaissance des dispositions de l'article L. 52-8 du code électoral. Cependant ces agissements n'ont pas été de nature, ni pris isolément ni en tenant compte de leur cumul, à altérer la sincérité du scrutin compte tenu, d'une part, du délai d'un mois dont disposait la liste menée par Mme A... pour répondre à l'élément nouveau de polémique électorale que constituait le tract du maire, d'autre part, du fait qu'il n'est pas établi que le courrier du maire a été distribué à tous les résidents du quartier de la Champagne et, enfin, de l'important écart de voix constaté entre les deux premières listes à l'issue du second tour.

8. Par ailleurs, la circonstance que la crise sanitaire liée à l'épidémie de covid-19 a entraîné un report de l'organisation du second tour des élections municipales est par elle-même sans incidence sur la sincérité du scrutin en dépit des irrégularités relevées aux points 4 à 6.

En ce qui concerne les autres griefs :

9. En premier lieu, il n'appartient pas au juge électoral de se prononcer sur le bien-fondé des argumentaires développés par les candidats à une élection, sauf si ces argumentaires contiennent des informations diffamatoires qui portent atteinte à l'intégrité et à l'honneur des autres candidats. Il s'ensuit que le moyen tiré de ce que les tracts diffusés par la liste dirigée par le maire sortant contenaient de fausses informations sur les avis négatifs rendus sur le plan local d'urbanisme de la commune doit être écarté.

10. En deuxième lieu, aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 52-1 du code électoral : " A compter du premier jour du sixième mois précédant le mois au cours duquel il doit être procédé à des élections générales, aucune campagne de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion d'une collectivité ne peut être organisée sur le territoire des collectivités intéressées par le scrutin. Sans préjudice des dispositions du présent chapitre, cette interdiction ne s'applique pas à la présentation, par un candidat ou pour son compte, dans le cadre de l'organisation de sa campagne, du bilan de la gestion des mandats qu'il détient ou qu'il a détenus ".

11. Il résulte de l'instruction que le courrier rédigé par l'adjoint au maire en charge des travaux, candidat sur la liste du maire sortant et qui a été distribué dans le quartier du Grand Morin, se bornait à informer les résidents des travaux liés à la rénovation de l'éclairage de la commune. Ce faisant, une telle distribution ne peut être regardée comme constitutive d'une méconnaissance de l'article L. 52-1 du code électoral.

12. En dernier lieu, le requérant ne démontre pas en quoi les renvois opérés par le site internet du maire sortant vers le site internet de la mairie auraient porté atteinte à l'impartialité des informations délivrées sur ce dernier.

13. Il résulte de tout ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa protestation.

Sur les conclusions de M. D... tendant à la suppression de passages injurieux ou diffamatoires :

14. Les termes du mémoire présenté par M. E... le 15 février 2021 n'excèdent pas les limites de la controverse entre parties dans le cadre d'une procédure contentieuse. Dès lors, il n'y a pas lieu d'en prononcer la suppression en application de l'article L. 741-2 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Le surplus des conclusions présentées par M. D... est rejeté.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. B... E..., à M. C... D... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 446672
Date de la décision : 05/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 05 mar. 2021, n° 446672
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Didier Ribes
Rapporteur public ?: M. Marc Pichon de Vendeuil

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:446672.20210305
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