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31/12/2020 | FRANCE | N°431675

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 31 décembre 2020, 431675


Vu la procédure suivante :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision implicite rejetant son recours administratif contre la décision implicite par laquelle la caisse d'allocations familiales des Bouches-du-Rhône a refusé de lui verser des rappels de revenu de solidarité active et d'aide exceptionnelle de fin d'année depuis le mois de février 2016, d'ordonner à la caisse de lui verser la somme de 11 025,93 euros à ce titre et de la condamner à lui verser une somme d'un même montant en réparation des préjudices qu'elle estime avoir

subis. Par une ordonnance n° 1808304 du 26 avril 2019, la président...

Vu la procédure suivante :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision implicite rejetant son recours administratif contre la décision implicite par laquelle la caisse d'allocations familiales des Bouches-du-Rhône a refusé de lui verser des rappels de revenu de solidarité active et d'aide exceptionnelle de fin d'année depuis le mois de février 2016, d'ordonner à la caisse de lui verser la somme de 11 025,93 euros à ce titre et de la condamner à lui verser une somme d'un même montant en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis. Par une ordonnance n° 1808304 du 26 avril 2019, la présidente du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 5 juin et 30 septembre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, Mme B... demande au Conseil d'État :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de la caisse d'allocations familiales et du département des Bouches-du-Rhône la somme de 3 600 euros à verser à la SCP Lesourd, son avocat, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme A... C..., maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme A... E..., rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Lesourd, avocat de Mme B..., et à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat du département des Bouches-du-Rhône ;

Considérant ce qui suit :

1. D'une part, aux termes de l'article R. 222 1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif (...) peuvent, par ordonnance : (...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ".

2. D'autre part, la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique prévoit, en son article 2, que les personnes physiques dont les ressources sont insuffisantes pour faire valoir leurs droits en justice peuvent bénéficier d'une aide juridictionnelle et, en son article 25, que le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle a droit à l'assistance d'un avocat choisi par lui ou, à défaut, désigné par le bâtonnier de l'ordre des avocats.

3. Les dispositions du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative permettent notamment le rejet par ordonnance, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, des requêtes qui ne peuvent qu'être rejetées dès lors qu'il est manifeste qu'aucun des moyens qu'elles comportent n'est assorti des précisions permettant au juge d'en apprécier le bien-fondé. Toutefois, si le requérant a obtenu la désignation d'un avocat au titre de l'aide juridictionnelle et si cet avocat n'a pas produit de mémoire, le juge ne peut, afin d'assurer au requérant le bénéfice effectif du droit qu'il tire de la loi du 10 juillet 1991, rejeter la requête sur le fondement du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative sans avoir préalablement mis l'avocat désigné en demeure d'accomplir, dans un délai qu'il détermine, les diligences qui lui incombent et porté cette carence à la connaissance du requérant, afin de le mettre en mesure, le cas échéant, de choisir un autre représentant.

4. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, pour rejeter la demande de Mme D... B... par une ordonnance prise sur le fondement des dispositions précitées du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, la présidente du tribunal administratif de Marseille a relevé que l'argumentation de la requérante n'était manifestement pas assortie des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. Il ressort toutefois des pièces de la procédure devant le tribunal administratif que Mme B..., qui avait introduit sa requête sans le ministère d'un avocat, a présenté une demande d'aide juridictionnelle, à laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Marseille a fait droit le 20 février 2019, et qu'un avocat a été désigné pour la représenter. En rejetant la requête de Mme B... sur le fondement du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative le 26 avril 2019, alors que l'avocat désigné au titre de l'aide juridictionnelle n'avait pas encore produit de mémoire et n'avait pas été mis en demeure d'accomplir les diligences qui lui incombaient, la présidente du tribunal administratif de Marseille n'a pas assuré à la requérante le respect effectif du droit qu'elle tirait de la loi du 10 juillet 1991.

5. Il résulte de ce qui précède que Mme B... est fondée, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi, à demander l'annulation de l'ordonnance de la présidente du tribunal administratif de Marseille qu'elle attaque.

6. Mme B... ayant obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Lesourd, son avocat, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge du département des Bouches-du-Rhône une somme de 1 200 euros à verser à cette SCP.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance de la présidente du tribunal administratif de Marseille du 26 avril 2019 est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Marseille.

Article 3 : Le département des Bouches-du-Rhône versera à la SCP Lesourd, avocat de Mme B..., une somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette SCP renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme D... B..., au ministre des solidarités et de la santé et au département des Bouches-du-Rhône.

Copie en sera adressée à la caisse d'allocations familiales des Bouches-du-Rhône.


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 431675
Date de la décision : 31/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 31 déc. 2020, n° 431675
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Marie Walazyc
Rapporteur public ?: Mme Marie Sirinelli
Avocat(s) : SCP LESOURD ; SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 08/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:431675.20201231
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