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30/12/2020 | FRANCE | N°426216

France | France, Conseil d'État, 4ème chambre, 30 décembre 2020, 426216


Vu la procédure suivante :

La société Transports de l'agglomération de Montpellier a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 27 mai 2015 par laquelle l'inspectrice du travail de l'unité territoriale de l'Hérault a refusé de l'autoriser à licencier M. D... B... pour inaptitude. Par un jugement n° 1504229 du 29 novembre 2016, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 17MA00408 du 12 octobre 2018, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel de la société Transports de l'agglom

ération de Montpellier, annulé ce jugement ainsi que cette décision.

Par un...

Vu la procédure suivante :

La société Transports de l'agglomération de Montpellier a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 27 mai 2015 par laquelle l'inspectrice du travail de l'unité territoriale de l'Hérault a refusé de l'autoriser à licencier M. D... B... pour inaptitude. Par un jugement n° 1504229 du 29 novembre 2016, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 17MA00408 du 12 octobre 2018, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel de la société Transports de l'agglomération de Montpellier, annulé ce jugement ainsi que cette décision.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 12 décembre 2018 et 12 mars 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de la société Transports de l'agglomération de Montpellier la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme A... C..., auditrice,

- les conclusions de M. D... Dieu, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à Me Le Prado, avocat de M. B... et à la SCP Gatineau, Fattaccini, Rebeyrol, avocat de la société Transports de l'agglomération de Montpellier ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 1226-2 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige : " Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. / Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. / L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ".

2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. D... B... a été embauché à compter du 12 août 2006 en qualité de conducteur-receveur par la société Transports de l'agglomération de Montpellier qui exerce une activité de transport urbain et suburbain de voyageurs. Après l'avoir à plusieurs reprises déclaré temporairement inapte à exercer ces fonctions, le médecin du travail a, par deux avis des 15 octobre et 4 novembre 2013, déclaré M. B... définitivement inapte à ce poste. M. B... a, par la suite, été affecté à plusieurs autres postes sur lesquels son employeur a estimé que son travail ne donnait pas satisfaction. Par une décision du 27 mai 2015, l'inspectrice du travail a refusé d'accorder à la société Transports de l'agglomération de Montpellier l'autorisation qu'elle sollicitait de licencier pour inaptitude ce salarié protégé. M. B... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 12 octobre 2018 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a annulé le jugement du 29 novembre 2016 du tribunal administratif de Montpellier qui rejetait la demande de la société tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision de l'inspectrice du travail, d'une part, et, d'autre part, annulé cette décision de refus.

3. En vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail. Lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par l'inaptitude physique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si l'inaptitude est telle qu'elle justifie le licenciement envisagé et si, dans l'affirmative, l'employeur a cherché à reclasser le salarié sur d'autres postes appropriés à ses capacités, le cas échéant par la mise en oeuvre, dans l'entreprise ou au sein du groupe, de mesures telles que mutations ou transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail. La circonstance que l'avis du médecin du travail déclare le salarié protégé " inapte à tout emploi dans l'entreprise " ne dispense pas l'employeur, qui connaît les possibilités d'aménagement de l'entreprise et peut solliciter le groupe auquel il appartient, le cas échéant, de rechercher toute possibilité de reclassement dans l'entreprise ou au sein du groupe. Le licenciement ne peut être autorisé que dans le cas où l'employeur n'a pu reclasser le salarié dans un emploi approprié à ses capacités au terme d'une recherche sérieuse, menée tant au sein de l'entreprise que, le cas échéant, au sein du groupe auquel elle appartient.

4. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour juger que la société Transports de l'agglomération de Montpellier avait procédé à des recherches réelles et sérieuses en vue du reclassement de M. B..., la cour administrative d'appel s'est bornée à relever que l'intéressé, postérieurement aux avis médicaux des 15 octobre 2013 et 4 novembre 2013 le déclarant définitivement inapte au poste de conducteur-receveur d'autobus en exploitation commerciale, avait reçu des affectations sur plusieurs emplois compatibles avec les préconisations du médecin du travail et que la dernière de ces affectations, pour une période de deux mois à compter du 22 décembre 2015, avait fait l'objet d'une évaluation qui s'est révélée défavorable. En statuant ainsi, sans indiquer, notamment, les raisons pour lesquelles le reclassement du salarié n'avait pas été possible sur les premiers postes auxquels il avait été affecté après avoir été déclaré inapte, ni si d'autres postes de reclassement étaient encore susceptibles de lui être proposés, la cour administrative d'appel a entaché son arrêt d'insuffisance de motivation.

5. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de son pourvoi, M. B... est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de M. B..., qui dans la présente instance, n'est pas la partie perdante. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Transports de l'agglomération de Montpellier la somme que demande M. B... au titre des mêmes dispositions.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 12 octobre 2018 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Marseille.

Article 3 : La société Transports de l'agglomération de Montpellier versera à M. B... la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par la société Transports de l'agglomération de Montpellier au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. D... B... et à la société Transports de l'agglomération de Montpellier.

Copie en sera adressée à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion.


Synthèse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 426216
Date de la décision : 30/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 déc. 2020, n° 426216
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Yaël Treille
Rapporteur public ?: M. Frédéric Dieu
Avocat(s) : LE PRADO ; SCP GATINEAU, FATTACCINI, REBEYROL

Origine de la décision
Date de l'import : 08/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:426216.20201230
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