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29/12/2020 | FRANCE | N°445708

France | France, Conseil d'État, 8ème chambre, 29 décembre 2020, 445708


Vu la procédure suivante :

Par une protestation, M. R... G..., M. O... I..., M. K... E..., Mme A...-laure L..., Mme M... F..., Mme C... Y..., Mme D... J..., M. AC... S..., Mme T... X..., M. P... W... et Mme N... B... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble :

1°) d'annuler les opérations électorales qui se sont déroulées les 15 mars et 28 juin 2020 pour l'élection des conseillers municipaux et communautaires de la commune de Chamrousse (Isère) ;

2°) de déclarer inéligible M. AB...-O... H... ;

3°) de déclarer inéligible Mme Q... V... ;

4°) de constater que M. H... et Mme V... ont été élus au second tour des élections municipal...

Vu la procédure suivante :

Par une protestation, M. R... G..., M. O... I..., M. K... E..., Mme A...-laure L..., Mme M... F..., Mme C... Y..., Mme D... J..., M. AC... S..., Mme T... X..., M. P... W... et Mme N... B... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble :

1°) d'annuler les opérations électorales qui se sont déroulées les 15 mars et 28 juin 2020 pour l'élection des conseillers municipaux et communautaires de la commune de Chamrousse (Isère) ;

2°) de déclarer inéligible M. AB...-O... H... ;

3°) de déclarer inéligible Mme Q... V... ;

4°) de constater que M. H... et Mme V... ont été élus au second tour des élections municipales avec respectivement 167 et 162 voix ;

5°) d'annuler l'élection de M. H... et de Mme V... ;

6°) de proclamer élus Mme N... B... et Mme A...-AA... L... ;

7°) à titre subsidiaire, de prononcer la suspension des mandats de M. H... et Mme V....

Par un jugement n° 2003547 du 2 octobre 2020, ce tribunal a rejeté cette protestation.

Par une requête d'appel et un mémoire en réplique enregistrés les 27 octobre et 11 décembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. G..., M. I..., M. E..., Mme L..., Mme F..., Mme Y..., Mme J..., M. S..., Mme X..., M. W... et Mme B... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de faire droit à leur protestation ;

3°) de mettre à la charge de Mme V... et de M. H... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code électoral ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Liza Bellulo, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Marlange, de la Burgade, avocat de M. G..., de M. I..., de M. E..., de Mme L..., de Mme F..., de Mme Y..., de Mme J..., de M. S..., de Mme X..., de M. W... et de Mme B... et à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de Mme Z... et de M. H... ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 15 décembre 2020, présentée par M. G... et autres ;

Considérant ce qui suit :

1. M. G... et autres relèvent appel du jugement du 2 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur protestation dirigée contre les opérations électorales qui se sont déroulées les 15 mars et 28 juin 2020 pour l'élection des conseillers municipaux et communautaires de la commune de Chamrousse (Isère) à l'issue desquelles 6 des 11 sièges à pourvoir ont été attribués à des candidats inscrits sur la liste " Chamrousse Ensemble " conduite par Mme V..., ensuite élue maire, et les 5 autres sièges ont été attribués à des candidats inscrits sur la liste " Pour Chamrousse " conduite par M. G..., maire sortant.

2. En premier lieu, la minute du jugement attaqué comporte les signatures du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier d'audience, requises par l'article R. 741-7 du code de justice administrative. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions manque en fait.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 48-2 du code électoral : " Il est interdit à tout candidat de porter à la connaissance du public un élément nouveau de polémique électorale à un moment tel que ses adversaires n'aient pas la possibilité d'y répondre utilement avant la fin de la campagne électorale ".

4. Si M. G... et autres font valoir que la liste " Chamrousse ensemble " aurait publié sur son site internet de campagne, deux jours avant le premier tour de scrutin, un article critiquant le recours au fioul pour alimenter la future chaufferie biomasse de la commune, alors que ce combustible n'était destiné qu'à relayer marginalement le bois dans les périodes de grand froid, et qu'elle aurait publié, également dans des délais ne permettant pas d'y répondre utilement, un article faisant état de ce que projet comportait des cheminées de 22 mètres de hauteur, alors que cette hauteur n'est que de 13 mètres, il résulte de l'instruction que ce projet a constitué l'un des thèmes centraux de la campagne électorale au moins à partir du 11 février 2020. Dès lors, les éléments de polémique électorale critiqués, qui n'étaient pas nouveaux, n'ont pas été portés à la connaissance du public en méconnaissance des dispositions de l'article L. 48-2 du code électoral.

5. Par ailleurs, si la liste " Chamrousse ensemble " a proposé sur son site internet, le 26 juin 2020 soit deux jours avant le second tour de scrutin, de communiquer aux électeurs qui en feraient la demande de nouvelles informations relatives à l'investisseur pressenti du projet de développement touristique " Chamrousse 2020-2030 ", ce projet a constitué l'un des thème majeurs du débat électoral préalable au second tour des élections municipales et cet élément de polémique électorale s'inscrivait dans le prolongement d'échanges nourris entre les listes. Ainsi, la liste " Pour Chamrousse " a annoncé le 19 juin 2020 que " le grand projet de rénovation urbaine Chamrousse 2020-2030 [avait] décroch[é] un nouvel investisseur ", avant que ne réplique la liste " Chamrousse ensemble ", les 20 et 23 juin 2020, en s'interrogeant sur les capacités réelles de cet investisseur, et que la liste " Pour Chamrousse ", le 23 juin 2020, précise l'identité de cet investisseur. Ainsi, dans les circonstances de l'espèce, cet élément de polémique électorale ne peut davantage être regardé comme présentant un caractère nouveau au sens de l'article L. 48-2 du code électoral.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article 52-1 du code électoral : " Pendant les six mois précédant le premier jour du mois d'une élection et jusqu'à la date du tour de scrutin où celle-ci est acquise, l'utilisation à des fins de propagande électorale de tout procédé de publicité commerciale par la voie de la presse ou par tout moyen de communication audiovisuelle est interdite ".

7. S'il est constant que la liste " Chamrousse ensemble " a mené une opération de démarchage téléphonique de certains électeurs dans les six mois précédant les opérations électorales, celle-ci ne saurait être assimilée à un procédé de publicité commerciale proscrit par l'article L. 52-1 du code électoral. Les requérants n'établissent en outre pas que la liste " Chamrousse ensemble " aurait, dans ce cadre, utilisé des données personnelles à des fins de démarchage, en méconnaissance des dispositions du règlement (UE) n° 2016/679 du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données.

8. En quatrième lieu, la production d'une attestation, au demeurant contredite par quatre autres témoignages, selon laquelle l'un des membres de la liste " Chamrousse ensemble " aurait délivré de fausses attestations de domicile en vue de l'inscription sur les listes électorales de membres du personnel de la société qu'il dirige ne suffit pas à établir une manoeuvre de nature à altérer la sincérité du scrutin.

9. En cinquième lieu, les requérants, qui ont invoqué ce grief tardivement, ne peuvent utilement faire valoir que le nom de M. U... a été maintenu à tort, en tant que colistier, sur la liste " Chamrousse Ensemble ", alors même que ce dernier avait notifié sa démission à Mme V....

10. En dernier lieu, ayant écarté les griefs tirés de l'existence de manoeuvres frauduleuses de nature à porter atteinte à la sincérité des opérations électorales des 15 mars et 28 juin 2020 en vue de l'élection des conseillers municipaux et communautaires de la commune de Chamrousse, le tribunal administratif ne pouvait que rejeter les conclusions tendant à ce que Mme V... et M. H... soient déclarés inéligibles en application de l'article L. 118-4 du code électoral.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. G... et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté leur protestation.

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de Mme V... et de M. H..., qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. G... et autres est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. R... G..., premier dénommé pour l'ensemble des requérants, à Mme Q... V..., à M. AB...-O... H... et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 445708
Date de la décision : 29/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 29 déc. 2020, n° 445708
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Liza Bellulo
Rapporteur public ?: Mme Karin Ciavaldini
Avocat(s) : SCP MARLANGE, DE LA BURGADE ; SCP LYON-CAEN, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 08/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:445708.20201229
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