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14/12/2020 | FRANCE | N°428622

France | France, Conseil d'État, 2ème chambre, 14 décembre 2020, 428622


Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 31 mai 2018 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande d'asile ou, à défaut, de lui accorder le bénéfice de la protection subsidiaire.

Par une décision n° 18033072 du 10 janvier 2019, la Cour nationale du droit d'asile a annulé cette décision et a renvoyé la demande d'asile de Mme A... devant l'OFPRA.

Par un pourvoi, enregistré le 5 mars 2019 au secrétariat

de la section du contentieux du Conseil d'Etat, l'OFPRA demande au Conseil d'Etat d'an...

Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 31 mai 2018 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande d'asile ou, à défaut, de lui accorder le bénéfice de la protection subsidiaire.

Par une décision n° 18033072 du 10 janvier 2019, la Cour nationale du droit d'asile a annulé cette décision et a renvoyé la demande d'asile de Mme A... devant l'OFPRA.

Par un pourvoi, enregistré le 5 mars 2019 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat, l'OFPRA demande au Conseil d'Etat d'annuler cette décision et de renvoyer l'affaire devant la Cour nationale du droit d'asile.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New-York le 31 janvier 1967 relatifs au statut des réfugiés ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- Le rapport de M. Sébastien Gauthier, maître des requêtes en service extraordinaire,

- Les conclusions de M. Guillaume Odinet, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, et à la SCP Delamarre, Jehannin, avocat de Mme A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que

Mme A..., ressortissante chinoise d'origine tibétaine, a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 31 mai 2018 par laquelle l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a refusé de lui reconnaître la qualité de réfugiée et de lui accorder le bénéfice de la protection subsidiaire. L'OFPRA se pourvoit en cassation contre la décision du 10 janvier 2019 par laquelle la Cour nationale du droit d'asile a annulé cette décision et lui a renvoyé la demande d'asile de l'intéressée.

2. Aux termes de l'article L. 733-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version alors applicable : " Saisie d'un recours contre une décision du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, la Cour nationale du droit d'asile statue, en qualité de juge de plein contentieux, sur le droit du requérant à une protection au titre de l'asile au vu des circonstances de fait dont elle a connaissance au moment où elle se prononce. / La cour ne peut annuler une décision du directeur général de l'office et lui renvoyer l'examen de la demande d'asile que lorsqu'elle juge que l'office a pris cette décision sans procéder à un examen individuel de la demande ou en se dispensant, en dehors des cas prévus par la loi, d'un entretien personnel avec le demandeur et qu'elle n'est pas en mesure de prendre immédiatement une décision positive sur la demande de protection au vu des éléments établis devant elle ". En application de ces dispositions, le moyen tiré de ce que l'entretien personnel du demandeur d'asile à l'Office se serait déroulé dans de mauvaises conditions n'est pas de nature à justifier que la Cour nationale du droit d'asile annule une décision de l'Office et lui renvoie l'examen de la demande d'asile. En revanche, il revient à la Cour de procéder à cette annulation et à ce renvoi si elle juge que le demandeur a été dans l'impossibilité de se faire comprendre lors de cet entretien, faute d'avoir pu bénéficier du concours d'un interprète dans la langue qu'il a choisie dans sa demande d'asile ou dans une autre langue dont il a une connaissance suffisante, et que ce défaut d'interprétariat est imputable à l'Office.

3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A..., qui avait demandé, à l'appui de sa demande d'asile, à être entendue par l'OFPRA en " tibétain de l'Amdo ", l'a été, avec le concours d'un interprète, en " tibétain de Lhassa ". Si le compte rendu de l'entretien réalisé le 30 mai 2018 fait apparaître quelques difficultés occasionnelles de compréhension liées aux différences des dialectes, il ressort de ses énonciations que l'intéressée a reconnu comprendre l'interprète et a pu apporter les précisions demandées. Par suite, en relevant, pour annuler la décision de l'OFPRA rejetant la demande d'asile de Mme A... et renvoyer cette dernière devant l'Office, qu'elle avait été dans l'impossibilité de se faire comprendre lors de l'entretien en raison d'un défaut d'interprétariat imputable à l'Office, la Cour nationale du droit d'asile a dénaturé les pièces du dossier.

4. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides est fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque.

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides sur leur fondement.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision de la Cour nationale du droit d'asile en date du 10 janvier 2019 est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la Cour nationale du droit d'asile.

Article 3 : Les conclusions présentées par Mme A... au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides et à Mme B... A....


Synthèse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 428622
Date de la décision : 14/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 14 déc. 2020, n° 428622
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Sébastien Gauthier
Rapporteur public ?: M. Guillaume Odinet
Avocat(s) : SCP FOUSSARD, FROGER ; SCP DELAMARRE, JEHANNIN

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:428622.20201214
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