Vu la procédure suivante :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision du 8 février 2016 par laquelle la commission d'appel antidopage de la Fédération française de boxe lui a infligé une sanction d'interdiction de participation aux manifestations sportives de la Fédération française de boxe pendant une durée de six mois. Par un jugement n° 1601702 du 2 février 2017, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 17VE01054 du 4 décembre 2018, la cour administrative d'appel de Versailles a, sur appel de M. B..., annulé ce jugement.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les
31 janvier et 24 avril 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération française de boxe demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions d'appel ;
3°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du sport ;
- le décret n° 2014-1556 du 22 décembre 2014 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- Le rapport de M. Sébastien Gauthier, maître des requêtes en service extraordinaire,
- Les conclusions de M. Guillaume Odinet, rapporteur public,
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de la Fédération française de boxe, et à la SCP Rousseau, Tapie, avocat de
M. B... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond qu'un contrôle antidopage a été effectué par l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) à
Noisy-le-Grand (Seine-Saint-Denis), le 31 octobre 2015, à l'endroit de M. A... B..., licencié de la Fédération française de boxe et boxeur professionnel, à l'issue d'un combat organisé par l'European Boxing Union. Par un jugement du 2 février 2017, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision du 8 février 2016 par laquelle, au vu des résultats de ce contrôle, la commission d'appel antidopage de la Fédération française de boxe a confirmé la sanction de suspension décidée le 6 janvier 2016 par la commission fédérale disciplinaire de première instance de lutte contre le dopage en réduisant sa durée à six mois. La Fédération française de boxe se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 4 décembre 2018 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a annulé ce jugement et la décision de sanction.
2. L'article L. 232-21 du code du sport, dans sa version applicable au
31 octobre 2015, dispose : " Le sportif licencié qui a contrevenu aux dispositions des articles
L. 232-9, L. 232-10 et L. 232-17 et dont le contrôle a été effectué dans les conditions prévues aux 1°, 2°, 3° ou 4° du I de l'article L. 232-5 ou à l'article L. 232-16 encourt des sanctions disciplinaires (...)". Aux termes de l'article L. 232-5 du code du sport, dans sa version applicable à la date du contrôle : " I.- L'Agence française de lutte contre le dopage, autorité publique indépendante définit et met en oeuvre les actions de lutte contre le dopage. A cette fin, elle coopère avec l'Agence mondiale antidopage, avec les organismes reconnus par celle-ci et disposant de compétences analogues aux siennes et avec les fédérations sportives internationales. / A cet effet: / (...) 2o Elle diligente les contrôles dans les conditions prévues au présent chapitre : a) Pendant les manifestations sportives organisées par les fédérations sportives ou autorisées par les fédérations délégataires ; b) Pendant les manifestations sportives soumises à une procédure de déclaration ou d'autorisation prévue par le présent code ; c) Pendant les manifestations sportives internationales mentionnées à l'article
L. 230-2 ; (...) 6° Elle réalise ou fait réaliser l'analyse des prélèvements effectués lors de contrôles ; dans ce cadre, elle peut effectuer des analyses ou des prélèvements pour le compte de tiers (...) ".
3. La procédure d'autorisation mentionnée au b) du 2° de l'article L. 232-5 du code du sport est organisée par l'article L. 331-5 du même code, qui dispose que : " Toute personne physique ou morale de droit privé, autre que les fédérations sportives, qui organise une manifestation ouverte aux licenciés d'une discipline qui a fait l'objet d'une délégation de pouvoir conformément à l'article L. 131-14 et donnant lieu à remise de prix en argent ou en nature dont la valeur excède un montant fixé par arrêté du ministre chargé des sports, doit obtenir l'autorisation de la fédération délégataire concernée (...) ". En vertu des dispositions de l'article A 331-1 du même code : " Le montant de la valeur des prix prévu au premier alinéa du I de l'article L. 331-5, au-delà duquel l'organisation de la manifestation sportive est, dans les conditions précisées par ledit article, subordonnée à l'agrément de la fédération sportive délégataire, est fixé à 3 000 euros. " La procédure de déclaration mentionnée au b) du 2° de l'article cité au point 2 est précisée par l'article R. 331-4 du code du sport, qui dispose dans sa version applicable à l'espèce que : " Les organisateurs de manifestations sportives, récréatives ou culturelles à but lucratif dont le public et le personnel qui concourt à la réalisation de la manifestation peuvent atteindre plus de 1 500 personnes, soit d'après le nombre de places assises, soit d'après la surface qui leur est réservée, sont tenus d'en faire la déclaration dans les formes et sous les conditions prévues par le décret n° 97-646 du 31 mai 1997 relatif à la mise en place de services d'ordre par les organisateurs de manifestations sportives, récréatives ou culturelles à but lucratif. "
4. Enfin, aux termes des dispositions de l'article L. 230-2 du même code, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Pour l'application du présent titre, une manifestation sportive internationale est une manifestation sportive pour laquelle un organisme sportif international : / 1° Soit édicte les règles qui sont applicables à cette manifestation ; / 2° Soit nomme les personnes chargées de faire respecter les règles applicables à cette manifestation. / Constituent des organismes sportifs internationaux au sens du présent article : / 1° Le Comité international olympique ; / 2° Le Comité international paralympique ; / 3° Une fédération sportive internationale signataire du code mondial antidopage mentionné par la convention internationale contre le dopage dans le sport, adoptée à Paris le 19 octobre 2005 ; / 4° Une organisation responsable d'une grande manifestation sportive internationale signataire du code mondial antidopage mentionné par la convention internationale contre le dopage dans le sport, adoptée à Paris le 19 octobre 2005. "
5. Pour annuler la sanction prononcée à l'encontre de M. B..., la cour administrative d'appel de Versailles a estimé que la manifestation sportive à la suite de laquelle le contrôle avait été réalisé était une manifestation sportive ne relevant ni du a), ni du c) de l'article L. 232-5 du code du sport. Elle a, en outre, estimé que faute que soit établi que le combat du 31 octobre 2015 avait donné lieu " à remise de prix en argent ou en nature d'un montant supérieur à la somme de 3 000 euros fixée par l'article A. 331-1 du code du sport ", cette manifestation n'était soumise ni à autorisation, ni à déclaration et, par suite, ne relevait pas non plus du b) de cet article. Elle en a déduit que l'AFLD n'avait pu diligenter un contrôle dont le résultat était susceptible de fonder une sanction disciplinaire par la Fédération française de boxe sur le fondement de l'article L. 232-21 du code du sport. En se fondant sur la circonstance que la manifestation n'avait pas donné lieu à la remise d'un prix d'un montant supérieur à celui prévu par l'article A 331-1 du code du sport pour juger que la manifestation n'était pas soumise à la déclaration, alors que cette circonstance est dépourvue d'incidence sur l'application du régime de déclaration, la cour a commis une erreur de droit.
6. Dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi, la Fédération française de boxe est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond.
8. Il ressort des pièces du dossier que le combat du 31 octobre 2015 a été organisé par l'European Boxing Union, qui a mandaté l'AFLD pour effectuer un contrôle pour son compte en application des dispositions du 6° du I de l'article L. 232-5 du code du sport cité au point 2. Par suite, la décision de sanction étant fondée sur les dispositions précitées de l'article L. 232-21 du même code, inapplicables en l'espèce, M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande d'annulation de cette décision, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête.
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la Fédération française de boxe présentées à ce titre. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'affaire, de faire droit à la demande de
M. B... présentée au même titre.
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 4 décembre 2018 de la cour administrative d'appel de Versailles est annulé.
Article 2 : Le jugement du 2 février 2017 du tribunal administratif de Montreuil est annulé.
Article 3 : La sanction prise le 8 février 2016 à l'encontre de M. B... par la commission d'appel antidopage de la Fédération française de boxe et la sanction prise le 6 janvier 2016 par la commission fédérale disciplinaire de première instance de lutte contre le dopage de la Fédération française de boxe sont annulées.
Article 4 : Les conclusions présentées par les parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la Fédération française de boxe et à M. A... B....