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02/12/2020 | FRANCE | N°437941

France | France, Conseil d'État, 7ème chambre, 02 décembre 2020, 437941


Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Limoges de condamner le ministre de la défense à lui verser la somme de 28 095,15 euros au titre de sa perte de pension de retraite du 1er juin 2017 au 4 mai 2019. Par un jugement n° 1701000 du 21 novembre 2019, le tribunal administratif de Limoges a condamné l'Etat à verser la somme de 8 000 euros à Mme A... au titre de sa perte de pension de retraite pour la même période.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 23 janvier et 24 avril 2020 au secrétariat d

u contentieux du Conseil d'Etat, la ministre des armées demande au Consei...

Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Limoges de condamner le ministre de la défense à lui verser la somme de 28 095,15 euros au titre de sa perte de pension de retraite du 1er juin 2017 au 4 mai 2019. Par un jugement n° 1701000 du 21 novembre 2019, le tribunal administratif de Limoges a condamné l'Etat à verser la somme de 8 000 euros à Mme A... au titre de sa perte de pension de retraite pour la même période.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 23 janvier et 24 avril 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la ministre des armées demande au Conseil d'Etat d'annuler ce jugement et de rejeter la requête de Mme A....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

- la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2013-1155 du 13 décembre 2013 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Thomas Pez-Lavergne, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Mireille Le Corre, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de Mme A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A..., née le 4 mai 1957, employée en qualité d'ouvrière de l'Etat logisticienne à la 12ème base de soutien du matériel de Neuvy-Pailloux, a bénéficié d'une indemnité de départ volontaire à compter du 1er juin 2014, date de sa radiation des contrôles du ministère de la défense par une décision du 5 juin 2014. Par un courrier du 7 janvier 2017, elle a demandé la liquidation de sa pension au titre des carrières longues à compter de ses soixante ans, soit au 1er juin 2017. Par un courrier du 23 janvier 2017, le ministre de la défense l'a informée qu'elle ne remplissait pas les conditions requises pour prétendre à une liquidation de pension de retraite au titre des carrières longues. Par un courrier du 1er mars 2017, Mme A... a demandé un réexamen de sa situation ainsi que la liquidation et la mise en paiement de sa pension à compter du 1er juin 2017. Statuant sur le recours gracieux formé le 21 mars 2017, le ministère des armées a, par une décision du 3 avril 2017, confirmé sa décision du 23 janvier 2017 et rejeté sa demande d'octroi de pension au titre des carrières longues. La ministre des armées se pourvoit en cassation contre le jugement du 21 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Limoges a condamné l'Etat à verser à Mme A... une somme de 8 000 euros au titre de sa perte de pension de retraite du 1er juin 2017 au 4 mai 2019.

2. Aux termes de l'article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " I. - La durée des services et bonifications admissibles en liquidation s'exprime en trimestres. Le nombre de trimestres nécessaires pour obtenir le pourcentage maximum de la pension civile ou militaire est fixé à cent soixante trimestres (...). / II. - Le nombre de trimestres mentionné au premier alinéa du I évolue dans les conditions définies, pour la durée d'assurance ou de services, à l'article 5 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites (...) ". Selon l'article 5 de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites : " (...) IV. - Pour les assurés nés à compter du 1er janvier 1955, la durée d'assurance ou de services et bonifications permettant d'assurer le respect de la règle énoncée au I est fixée par décret, pris après avis technique du Conseil d'orientation des retraites portant sur l'évolution du rapport entre la durée d'assurance ou la durée de services et bonifications et la durée moyenne de retraite, et publié avant le 31 décembre de l'année au cours de laquelle ces assurés atteignent l'âge mentionné au dernier alinéa du même I, minoré de quatre années ". Aux termes de l'article 1er du décret du 13 décembre 2013 relatif à la durée d'assurance nécessaire pour bénéficier d'une pension de retraite à taux plein et à la durée des services et bonifications nécessaire pour obtenir le pourcentage maximum d'une pension civile ou militaire de retraite applicable aux assurés nés en 1957 : " La durée d'assurance nécessaire pour bénéficier d'une pension de retraite à taux plein et la durée des services et bonifications nécessaire pour obtenir le pourcentage maximum d'une pension civile ou militaire de retraite sont fixées à 166 trimestres pour les assurés nés en 1957 ".

3. Aux termes de l'article D. 16-1 du code des pensions civiles et militaires de retraite dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce : " I. - L'âge d'ouverture du droit à une pension de retraite est abaissé à soixante ans, en application de l'article L. 25 bis, pour les fonctionnaires ayant débuté leur activité avant l'âge de vingt ans et qui justifient, dans le régime des pensions civiles et militaires de retraite et, le cas échéant, dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires, d'une durée d'assurance ayant donné lieu à cotisations à leur charge au moins égale à la durée d'assurance définie à l'article L. 14 et applicable l'année où ils atteignent l'âge de soixante ans ". Selon l'article D. 16-2 de ce code : " I. - Pour l'application de la condition de durée d'assurance ayant donné lieu à cotisations à la charge des fonctionnaires définie à l'article D. 16-1, sont réputées avoir donné lieu à cotisations : (...) / 2° Les périodes pendant lesquelles les fonctionnaires ont été placés en congé de maladie statutaire dans la limite de quatre trimestres. / Ces périodes sont retenues sans que le nombre de trimestres ayant donné lieu à cotisations ou réputés tels puisse excéder quatre pour une même année civile. / II. - Sont également réputées avoir donné lieu à cotisations les périodes accomplies dans les autres régimes obligatoires de base et réputées comme telles en application du présent article ou, dans les conditions qu'elles fixent, de dispositions réglementaires ayant le même objet. Les trimestres réputés cotisés dans le régime des pensions civiles et militaires de retraite et dans les autres régimes obligatoires de base sont pris en compte dans les limites suivantes : (...) / 2° Les trimestres réputés cotisés au titre des périodes pendant lesquelles les fonctionnaires ont été placés en congé de maladie statutaire et les trimestres réputés cotisés dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires au titre de la maladie et de l'inaptitude temporaire ne peuvent excéder au total quatre trimestres ; / 3° Les trimestres réputés cotisés dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires de base au titre de la maternité sont intégralement pris en compte ; (...) / 6° Les trimestres réputés cotisés au titre des périodes comptées comme périodes d'assurance au titre du chômage ne peuvent excéder quatre trimestres (...) ". Aux termes de l'article D. 16-3 du même code : " Pour l'application de la condition de début d'activité définie à l'article D. 16-1, sont considérés comme ayant débuté leur activité avant l'âge de seize, dix-sept ou vingt ans les fonctionnaires justifiant : soit d'une durée d'assurance d'au moins cinq trimestres à la fin de l'année au cours de laquelle est survenu, respectivement, leur seizième, dix-septième ou vingtième anniversaire (...) ".

4. Il ressort des énonciations du jugement attaqué que, pour fixer à 168 le nombre total de trimestres cotisés par Mme A... et juger que, contrairement à ce qu'avait estimé la ministre des armées, elle comptabilisait les 166 trimestres exigés par les dispositions précitées pour bénéficier du départ anticipé à la retraite au 1er juin 2017, le tribunal administratif de Limoges a tenu compte de huit trimestres cotisés en 2014 et 2015, années dont il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond qu'elles correspondent à une période au cours de laquelle Mme A... était au chômage. En statuant ainsi, alors qu'il résulte des dispositions précitées du 6° du II de l'article D. 16-2 du code des pensions civiles et militaires de retraite que les trimestres réputés cotisés au titre des périodes comptées comme périodes d'assurance au titre du chômage ne peuvent excéder quatre trimestres, le tribunal a commis une erreur de droit. La ministre des armées est par suite sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque.

5. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du 21 novembre 2019 du tribunal administratif de Limoges est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Limoges.

Article 3 : Les conclusions présentées par la SCP Celice, Texidor, Perier, avocat de Mme A... au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la ministre des armées, à Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.


Synthèse
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 437941
Date de la décision : 02/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 02 déc. 2020, n° 437941
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Thomas Pez-Lavergne
Rapporteur public ?: Mme Mireille Le Corre
Avocat(s) : SCP CELICE, TEXIDOR, PERIER

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:437941.20201202
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