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16/10/2020 | FRANCE | N°432346

France | France, Conseil d'État, 6ème chambre, 16 octobre 2020, 432346


Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 8 juillet 2019 et le 18 février 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, l'avis non conforme du Conseil supérieur de la magistrature du 16 mai 2019 sur sa candidature à la nomination en qualité de magistrat exerçant à titre temporaire, d'autre part, la décision du 24 mai 2019 de la garde des sceaux, ministre de la justice, refusant de le nommer aux fonctions de magistrat exerçant

à titre temporaire ;

2°) d'enjoindre à la garde des sceaux, ministre de l...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 8 juillet 2019 et le 18 février 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, l'avis non conforme du Conseil supérieur de la magistrature du 16 mai 2019 sur sa candidature à la nomination en qualité de magistrat exerçant à titre temporaire, d'autre part, la décision du 24 mai 2019 de la garde des sceaux, ministre de la justice, refusant de le nommer aux fonctions de magistrat exerçant à titre temporaire ;

2°) d'enjoindre à la garde des sceaux, ministre de la justice, de le nommer à ces fonctions dans un délai d'un mois à compter de la décision à venir, sous peine d'astreinte à hauteur de 500 euros par jour de retard.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme C... D..., maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Olivier Fuchs, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier que M. B... A... a présenté sa candidature aux fonctions de magistrat exerçant à titre temporaire. Celle-ci a été transmise par la garde des sceaux, ministre de la justice, au Conseil supérieur de la magistrature en vue d'une proposition de nomination. Le Conseil supérieur de la magistrature a rendu, le 16 mai 2019, un avis non conforme sur sa candidature et, par une décision du 24 mai 2019, la garde des sceaux, ministre de la justice, a refusé de le nommer dans ces fonctions. M. A... demande l'annulation de cet avis et de cette décision.

2. Aux termes de l'article 41-10 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature : " Peuvent être nommées magistrats exerçant à titre temporaire, pour exercer des fonctions de juge des contentieux de la protection, d'assesseur dans les formations collégiales des tribunaux judiciaires, de juge du tribunal de police ou de juge chargé de valider les compositions pénales, les personnes âgées d'au moins trente-cinq ans que leur compétence et leur expérience qualifient particulièrement pour exercer ces fonctions. / Elles peuvent également être nommées pour exercer une part limitée des compétences matérielles pouvant être dévolues par voie réglementaire aux chambres de proximité. / Elles doivent soit remplir les conditions prévues au 1°, 2° ou 3° de l'article 22, soit être membre ou ancien membre des professions libérales juridiques et judiciaires soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et justifier de cinq années au moins d'exercice professionnel. / Les magistrats exerçant à titre temporaire ne peuvent demeurer en fonctions au-delà de l'âge de soixante-quinze ans ". En vertu de l'article 41-12 de la même ordonnance : " Les magistrats recrutés au titre de l'article 41-10 sont nommés pour une durée de cinq ans, renouvelable une fois, dans les formes prévues pour les magistrats du siège (...) / Avant de rendre son avis sur le projet de nomination pour la première période de cinq ans, la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature soumet l'intéressé à une formation probatoire organisée par l'Ecole nationale de la magistrature et comportant un stage en juridiction effectué selon les modalités prévues à l'article 19. Le troisième alinéa de l'article 25-3 est applicable aux stagiaires. / La formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature peut, à titre exceptionnel et au vu de l'expérience professionnelle du candidat, le dispenser de la formation probatoire prévue au troisième alinéa du présent article./ Les magistrats n'ayant pas été soumis à la formation probatoire prévue au même troisième alinéa suivent une formation organisée par l'Ecole nationale de la magistrature et comportant un stage en juridiction effectué selon les modalités prévues à l'article 19./ Le directeur de l'Ecole nationale de la magistrature établit, sous forme d'un rapport, le bilan du stage probatoire du candidat, qu'il adresse à la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature et au garde des sceaux, ministre de la justice ". Aux termes de l'article 28 de la même ordonnance : " Les décrets de nomination aux fonctions de président d'un tribunal judiciaire ou d'un tribunal de première instance ou de conseiller référendaire à la Cour de cassation sont pris par le Président de la République sur proposition de la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature. / Les décrets portant promotion de grade ou nomination aux fonctions de magistrat autres que celles mentionnées à l'alinéa précédent sont pris par le Président de la République sur proposition du garde des sceaux, ministre de la justice, après avis conforme de la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature pour ce qui concerne les magistrats du siège et après avis de la formation compétente du Conseil supérieur pour ce qui concerne les magistrats du parquet (...) "

3. En premier lieu, l'avis rendu par le Conseil supérieur de la magistrature sur une proposition de nomination d'un magistrat exerçant à titre temporaire n'est pas au nombre des décisions individuelles refusant un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes remplissant les conditions légales pour l'obtenir qui, en application de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration, doivent être motivées. Aucun autre texte ni principe n'en impose la motivation. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision attaquée doit être écarté.

4. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que le Conseil supérieur de la magistrature a rendu un avis non conforme à la nomination de l'intéressé au motif qu'il ne remplissait pas les conditions prévues pour une telle nomination par l'article 41-10 de l'ordonnance du 22 décembre 1958. Par suite, le moyen tiré de ce qu'il ne pouvait pas émettre un tel avis avant la réalisation d'un stage, conformément à l'article 41-12 de la même ordonnance, doit être écarté. Il en va de même du moyen tiré de l'atteinte au principe d'égalité avec les candidats ayant effectué un tel stage.

5. En troisième lieu, si M. A... a produit des pièces et témoignages attestant des qualités qu'il a démontrées dans l'exercice de ses fonctions précédentes, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment de la description de ses activités dans le domaine juridique au cours des six dernières années et de ses fonctions de membre du cabinet du président d'une région de plus de quatre millions d'habitants chargé du développement économique, de la formation professionnelle et du tourisme, que le Conseil supérieur de la magistrature ait commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant qu'il ne disposait pas d'une expérience le qualifiant particulièrement pour l'exercice de fonctions judiciaires et en rendant un avis non-conforme sur sa candidature.

6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la garde des sceaux, que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'avis non conforme du Conseil supérieur de la magistrature et, par voie de conséquence, de la décision de la garde des sceaux, ministre de la justice, refusant de proposer sa nomination aux fonctions de magistrat exerçant à titre temporaire.

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B... A... et au garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 432346
Date de la décision : 16/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 16 oct. 2020, n° 432346
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Coralie Albumazard
Rapporteur public ?: M. Olivier Fuchs

Origine de la décision
Date de l'import : 24/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:432346.20201016
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