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09/09/2020 | FRANCE | N°431283

France | France, Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 09 septembre 2020, 431283


Vu la procédure suivante :

La société européenne Dassault Systèmes (société Dassault Systèmes) a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie, en droits, intérêts et majorations, au titre des exercices clos en 2008, 2009, 2010 et 2011. Par deux jugements n° 1506821 et 1605795 des 26 janvier et 5 octobre 2017, ce tribunal a rejeté ces demandes.

Par un arrêt n° 17VE00935-17VE03622 du 2 avril 2019, la co

ur administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par la société Dass...

Vu la procédure suivante :

La société européenne Dassault Systèmes (société Dassault Systèmes) a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie, en droits, intérêts et majorations, au titre des exercices clos en 2008, 2009, 2010 et 2011. Par deux jugements n° 1506821 et 1605795 des 26 janvier et 5 octobre 2017, ce tribunal a rejeté ces demandes.

Par un arrêt n° 17VE00935-17VE03622 du 2 avril 2019, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par la société Dassault Systèmes contre ces jugements.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et deux nouveaux mémoires, enregistrés les 3 juin, 23 août, 10 décembre 2019 et le 29 avril 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Dassault Systèmes demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution ;

- la directive 90/435/CEE du Conseil du 23 juillet 1990 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- le code monétaire et financier ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la décision du 8 novembre 2019 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux a décidé qu'il n'y avait pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la société Dassault Systèmes ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Guillaume de La Taille Lolainville, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de la société Européenne Dassault Systèmes ;

Considérant ce qui suit :

1. Issues du I de l'article 12 de la loi n° 93-1444 du 31 décembre 1993 portant diverses dispositions relatives à la Banque de France, à l'assurance, au crédit et aux marchés financiers, les dispositions codifiées, à compter du 1er janvier 2001, au premier alinéa de l'article L. 432-12 du code monétaire et financier puis, à compter du 10 janvier 2009, à l'article L. 211-27 du même code, définissent la pension de titres comme l'opération par laquelle, d'une part, et moyennant un prix convenu, des titres financiers sont cédés en pleine propriété, d'autre part, le cédant et le cessionnaire s'engagent respectivement et irrévocablement, le premier à reprendre les titres, le second à les lui rétrocéder pour un prix et à une date convenus.

2. En premier lieu, selon des dispositions issues des VII et VIII de ce même article 12, codifiées aux articles L. 432-18 et L. 432-19 puis L. 211-32 et L. 211-33, la pension entraîne, chez le cédant, le maintien à l'actif de son bilan des titres financiers mis en pension et l'inscription au passif du bilan du montant de sa dette vis-à-vis du cessionnaire, tandis que les titres financiers reçus en pension ne sont pas inscrits au bilan du cessionnaire, qui enregistre à l'actif de son bilan le montant de sa créance sur le cédant. Aux termes des dispositions issues du VI de l'article 12, codifiées à l'article L. 432-17 puis à l'article L. 211-31 : " La rémunération du cessionnaire, quelle qu'en soit la forme, constitue un revenu de créance. Elle est traitée sur le plan comptable comme des intérêts. / Lorsque la durée de la pension couvre la date de paiement des revenus attachés aux titres financiers donnés en pension, le cessionnaire les reverse au cédant qui les comptabilise parmi les produits de même nature. " Par application de l'article 38 bis-0 A du code général des impôts, et indépendamment de son imposition sur le revenu de créance que, le cas échéant, il perçoit à raison de l'opération, le cessionnaire de titres financiers remis en pension dans ces conditions n'est pas imposé sur les éventuels revenus attachés à ces titres, qu'il lui appartient de reverser au cédant. Il en va notamment ainsi lorsque, à raison de sa détention d'autres titres de la société émettrice que ceux qu'il a pris en pension, le régime des sociétés mères lui est applicable.

3. En second lieu, en vertu des dispositions combinées du 1 de l'article 38 et de l'article 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises. Aux termes du premier alinéa du I de l'article 216 du même code : " Les produits nets des participations, ouvrant droit à l'application du régime des sociétés mères et visées à l'article 145, touchés au cours d'un exercice par une société mère, peuvent être retranchés du bénéfice net total de celle-ci, défalcation faite d'une quote-part de frais et charges. " Selon le 1 de l'article 145 de ce code, le régime fiscal des sociétés mères, tel qu'il est défini à l'article 216, est applicable aux sociétés et autres organismes soumis à l'impôt sur les sociétés au taux normal qui détiennent des participations satisfaisant à certaines conditions. En particulier, la première phrase du cinquième alinéa du c du 1 de l'article 145 prévoit que : " Les titres prêtés, mis en pension ou remis en garantie dans les conditions prévues aux articles 38 bis à 38 bis-0 A bis ne peuvent être pris en compte par les parties au contrat en cause pour l'application du régime défini au présent article. " Ces dernières dispositions déterminent seulement, selon les caractéristiques des participations qu'ils détiennent et les conditions de cette détention, les contribuables auxquels le régime des sociétés mères s'applique. Le 6 du même article, qui a pour objet d'énumérer, parmi les produits des participations détenues par ces contribuables, ceux auxquels le régime fiscal des sociétés mères reste inapplicable, c'est-à-dire ceux qui, par exception, ne peuvent pas être retranchés du bénéfice net, ne mentionne pas les revenus attachés aux titres pris en pension.

4. Pour confirmer le rejet, prononcé par le tribunal administratif de Montreuil, des conclusions que la société Dassault Systèmes avait présentées en décharge des suppléments d'imposition demeurant en litige, la cour administrative d'appel de Versailles a d'abord rappelé, à titre de motif de droit, les termes du premier alinéa du 1 de l'article 145 du code général des impôts, ainsi que ceux de la première phrase du cinquième alinéa du c de ce 1, avant de juger qu'il n'en résultait pas " que l'exclusion du régime des sociétés mère ne vaudrait que pour les mises en pension bénéficiant [en application de l'article 38 bis-0 A] de la neutralité fiscale. " Toutefois, eu égard à ce qui a été dit au point 3 ci-dessus, ces dispositions n'ont pas pour objet de définir le régime fiscal des dividendes attachés à des titres qu'un contribuable bénéficiant du régime des sociétés mères aurait pris en pension dans les conditions prévues par le code monétaire et financier. Il en résulte qu'en jugeant que les dispositions du 1 de l'article 145 du code général des impôts faisaient obstacle à ce que les produits des titres pris en pension bénéficient du régime des sociétés mères, la cour a commis une erreur de [0]droit.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que l'arrêt attaqué doit être annulé. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la société Dassault Systèmes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt du 2 avril 2019 de la cour administrative d'appel de Versailles est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Versailles.

Article 3 : L'Etat versera à la société Dassault Systèmes la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société européenne Dassault Systèmes et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.


Synthèse
Formation : 8ème - 3ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 431283
Date de la décision : 09/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 09 sep. 2020, n° 431283
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Guillaume de LA TAILLE LOLAINVILLE
Rapporteur public ?: M. Romain Victor
Avocat(s) : SCP BARADUC, DUHAMEL, RAMEIX

Origine de la décision
Date de l'import : 16/09/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:431283.20200909
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