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03/07/2020 | FRANCE | N°435073

France | France, Conseil d'État, 3ème chambre, 03 juillet 2020, 435073


Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de la décision par laquelle le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de la Moselle s'est opposé à sa demande de disponibilité pour convenances personnelles avec effet au 1er août 2019 jusqu'à ce qu'il soit statué sur la requête au fond, d'enjoindre à l'autorité compétente de se prononcer sur sa demande de disponibilité dans un délai de 5 jours à compter de la notifica

tion de l'ordonnance à intervenir, à titre subsidiaire, d'ordonner une...

Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de la décision par laquelle le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de la Moselle s'est opposé à sa demande de disponibilité pour convenances personnelles avec effet au 1er août 2019 jusqu'à ce qu'il soit statué sur la requête au fond, d'enjoindre à l'autorité compétente de se prononcer sur sa demande de disponibilité dans un délai de 5 jours à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir, à titre subsidiaire, d'ordonner une médiation en application des dispositions de l'article L. 213-7 du code de justice administrative, et de mettre à la charge du SDIS de la Moselle la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Par une ordonnance n ° 1906323 du 18 septembre 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a suspendu la décision du SDIS s'opposant au départ de M. A... et a enjoint au SDIS de prendre toutes dispositions utiles permettant de mettre en oeuvre la décision implicite par laquelle la demande de mise en disponibilité de M. A... est réputée avoir été acceptée.

Par un pourvoi et un mémoire complémentaire, enregistrés les 3 et 18 octobre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le SDIS de la Moselle demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de rejeter la demande de M. A... ;

3°) de mettre à la charge de M. A... la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Cécile Isidoro, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Laurent Cytermann, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de la Moselle et à la SCP Sevaux, Mathonnet, avocat de M. A... ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 11 juin 2020, présentée par M. A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg que M. A..., officier commandant au service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de la Moselle, a, par demande reçue le 14 mars 2019, sollicité une disponibilité pour convenances personnelles afin de rejoindre le Corps Grand-Ducal d'incendie et de secours du Luxembourg. Le président du conseil d'administration du SDIS de la Moselle lui a indiqué, par courrier du 28 mars 2019, qu'il se prononcerait sur sa demande après avoir recueilli l'avis préalable de la commission administrative paritaire (CAP) des sapeurs-pompiers de catégorie A. La CAP a émis un avis favorable lors de sa réunion du 4 juillet 2019. Le 14 août 2019, le directeur départemental et le directeur départemental adjoint informaient oralement M. A... de ce que des nécessités de service s'opposaient à son départ immédiat en disponibilité. Une lettre de mission couvrant le second semestre 2019 lui était alors remise. Le SDIS de la Moselle se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 18 septembre 2019 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a fait droit à la demande de suspension de l'exécution de la décision par laquelle il s'est opposé au départ en disponibilité de M. A....

2. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. (...) ". L'urgence justifie la suspension de l'exécution d'un acte administratif lorsque celui-ci porte atteinte de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés, saisi d'une demande tendant à la suspension d'une telle décision, d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de celle-ci sur la situation de ce dernier ou le cas échéant, des personnes concernées, sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue. Il lui appartient également, l'urgence s'appréciant objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de chaque espèce, de faire apparaître dans sa décision tous les éléments qui, eu égard notamment à l'argumentation des parties, l'ont conduit à considérer que la suspension demandée revêtait un caractère d'urgence.

3. Il ressort des énonciations de l'ordonnance attaquée que, pour apprécier concrètement si les effets du refus de départ en disponibilité de M. A... étaient de nature à caractériser une urgence, le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg s'est borné à reprendre les justifications fournies par l'intéressé, sans se prononcer sur les éléments avancés par le SDIS, tenant notamment à ce que, compte tenu des compétences professionnelles de l'intéressé, particulièrement utiles pour réaliser certaines tâches prioritaires programmées en 2019, le bon fonctionnement du service serait compromis par son départ immédiat. En omettant de mettre en balance cet intérêt public avec celui du requérant, le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg a commis une erreur de droit.

4. Dès lors, le SDIS de la Moselle est fondé, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, à demander l'annulation de l'ordonnance qu'il attaque.

5. Il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée.

6. Il ressort des pièces du dossier que le SDIS de Moselle ne s'est opposé au départ pour convenances personnelles de M. A... que jusqu'à la date du 1er janvier 2020. Dès lors que le refus opposé à M. A... a cessé de produire ses effets à compter de cette date, la condition d'urgence ne peut être regardée, à la date de la présente décision, comme remplie.

7. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'existence d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux sur la légalité de la décision contestée, la requête de M. A... doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant au prononcé d'une injonction et à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme de 3 000 euros à verser au SDIS de la Moselle au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : L'ordonnance du 18 septembre 2019 du juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg est annulée.

Article 2 : La requête présentée par M. A... devant le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg est rejetée.

Article 3 : M. A... versera la somme de 3 000 euros au SDIS de la Moselle au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B... A... et au service départemental d'incendie et de secours de la Moselle.


Synthèse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 435073
Date de la décision : 03/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 03 jui. 2020, n° 435073
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Cécile Isidoro
Rapporteur public ?: M. Laurent Cytermann
Avocat(s) : SCP CELICE, TEXIDOR, PERIER ; SCP SEVAUX, MATHONNET

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:435073.20200703
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