Vu la procédure suivante :
M. B... H..., pharmacien, a porté plainte contre M. G... D... et Mme C... E..., pharmaciens, devant la chambre de discipline du conseil de l'ordre des pharmaciens de Polynésie française. Mme A... F... a également porté plainte contre M. D... devant la même chambre. Enfin, M. D... a porté plainte contre M. H... devant le même conseil.
M. H... et Mme F... ont demandé à la chambre de discipline du Conseil national de l'ordre des pharmaciens de renvoyer ces trois plaintes à la chambre de discipline d'un autre conseil de l'ordre. Par une décision n° AD 5348 du 22 juin 2018, rectifiée le 29 juin 2018, la chambre de discipline s'est attribué le jugement de ces trois plaintes.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire, un mémoire en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés les 23 août et 26 novembre 2018, le 9 décembre 2019 et le 14 mai 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'ordre des pharmaciens de la Polynésie française demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette décision ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de M. H... et Mme F... ;
3°) de mettre à la charge de M. H... et Mme F... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Alain Seban, conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Cécile Barrois de Sarigny, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, Robillot, avocat de l'Ordre des pharmaciens de la Polynésie Française et à la SCP Boré, Salve de Bruneton, Mégret, avocat de Mme F... et de M. H... ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 20 mai 2020, présentée par l'ordre des pharmaciens de la Polynésie française.
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme F... et M. H..., pharmaciens d'officine en Polynésie française, ont saisi la chambre de discipline du conseil de l'ordre des pharmaciens de la Polynésie française de deux plaintes dirigées contre leurs confrères M. D... et Mme E... et que M. D... a déposé devant la même chambre de discipline une plainte à l'encontre de M. H.... Dans les instances ainsi ouvertes, Mme F... et M. H... ont saisi la chambre de discipline du Conseil national de l'ordre des pharmaciens d'une demande de renvoi de ces plaintes pour cause de suspicion légitime. Par la décision du 22 juin 2018 dont l'ordre des pharmaciens de la Polynésie française demande l'annulation, la chambre de discipline du Conseil national de l'ordre des pharmaciens s'est attribué le jugement de ces trois plaintes.
2. La voie du recours en cassation n'est ouverte qu'aux personnes qui ont eu la qualité de partie dans l'instance ayant donné lieu à la décision attaquée. Doit être notamment regardée comme une partie à l'instance devant les juges du fond la personne qui a été invitée par la juridiction à présenter des observations et qui, si elle ne l'avait pas été, aurait eu qualité pour former tierce opposition contre la décision rendue par les juges du fond.
3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par la demande d'observations qui a été adressée à sa chambre de discipline par la chambre de discipline du Conseil national de l'ordre des pharmaciens statuant sur la demande de renvoi pour cause de suspicion légitime, l'ordre des pharmaciens de la Polynésie française, qui n'était pas à l'origine des plaintes, a été appelé pour observations à l'instance ayant donné lieu à la décision attaquée. Toutefois, cette décision ne saurait être regardée, alors même qu'elle se fonde sur le risque de partialité de la chambre de discipline de l'ordre des pharmaciens de la Polynésie française, comme préjudiciant aux droits de l'ordre des pharmaciens de la Polynésie française. Il suit de là que ce dernier n'a pas la qualité de partie dans l'instance ayant donné lieu à la décision attaquée.
4. Mme F... et M. H... sont, par suite, fondés à soutenir que le pourvoi de l'ordre des pharmaciens de la Polynésie française est irrecevable et doit être rejeté.
5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de Mme F... et de M. H..., qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante. Elles font également obstacle à ce qu'une somme soit versée à ce titre au Conseil national de l'ordre des pharmaciens qui, ayant été appelé en cause pour produire des observations, n'est pas partie à la présente instance. Enfin, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'ordre des pharmaciens de la Polynésie française la somme de 1 500 euros à verser à ce titre, tant à Mme F... qu'à M. H....
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de l'ordre des pharmaciens de la Polynésie française est rejeté.
Article 2 : L'ordre des pharmaciens de la Polynésie française versera à Mme F... et M. H... une somme de 1 500 euros chacun, au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions présentées par le Conseil national de l'ordre des pharmaciens au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'ordre des pharmaciens de la Polynésie française, à M. B... H..., premier défendeur dénommé, à M. G... D..., à Mme C... E..., au Conseil national de l'ordre des pharmaciens, au haut-commissaire de la République en Polynésie française, au président de la Polynésie française et à la ministre des solidarités et de la santé.