La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/06/2020 | FRANCE | N°436187

France | France, Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 09 juin 2020, 436187


Vu la procédure suivante :

La société ID Espace a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 27 février 2018 par laquelle le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris lui a refusé le bénéfice de l'agrément prévu au II de l'article 209 du code général des impôts. Par un jugement n° 1805974/1-1 du 13 mars 2019, ce tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 19PA01149 du 26 septembre 2019, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la société I

D Espace contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et ...

Vu la procédure suivante :

La société ID Espace a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 27 février 2018 par laquelle le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris lui a refusé le bénéfice de l'agrément prévu au II de l'article 209 du code général des impôts. Par un jugement n° 1805974/1-1 du 13 mars 2019, ce tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 19PA01149 du 26 septembre 2019, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la société ID Espace contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 25 novembre 2019, 27 janvier 2020 et 22 mai 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société ID Espace demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bastien Lignereux, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP L. Poulet, Odent, avocat de la cociété Id Espace ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le patrimoine de la société Idweblogs a été transmis le 29 novembre 2017, en raison de sa dissolution sans liquidation placée sous le régime prévu par l'article 210 A du code général des impôts, à la société ID Espace, qui a sollicité l'agrément prévu par les dispositions du II de l'article 209 du même code en vue de bénéficier du transfert des déficits antérieurs non encore déduits de la société Iweblogs. La société ID Espace se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 26 septembre 2019 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel qu'elle avait formé contre le jugement du tribunal administratif de Paris du 13 mars 2019 rejetant sa requête tendant à l'annulation pour excès de pouvoir du refus opposé par l'administration fiscale à cette demande.

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 611-8 du code de justice administrative : " Lorsqu'il apparaît au vu de la requête que la solution de l'affaire est d'ores et déjà certaine, le président du tribunal administratif ou le président de la formation de jugement ou, à la cour administrative d'appel, le président de la chambre ou, au Conseil d'Etat, le président de la sous-section peut décider qu'il n'y a pas lieu à instruction ". La circonstance que le président de la deuxième chambre de la cour administrative d'appel de Paris a fait application de cette disposition en dispensant d'instruction l'appel formé par la société ID Espace n'affecte pas le respect du caractère contradictoire de la procédure à son égard et ne saurait, dès lors, être utilement invoquée par elle à l'appui de son pourvoi en cassation.

3. En deuxième lieu, aux termes du II de l'article 209 du code général des impôts : " En cas de fusion ou opération assimilée placée sous le régime de l'article 210 A, les déficits antérieurs (...) non encore déduits par la société absorbée ou apporteuse sont transférés, sous réserve d'un agrément délivré dans les conditions prévues à l'article 1649 nonies, à la ou aux sociétés bénéficiaires des apports, et imputables sur ses ou leurs bénéfices ultérieurs dans les conditions prévues (...) au troisième alinéa du I (...). / (...) L'agrément est délivré lorsque : / (...) b) L'activité à l'origine des déficits (...) dont le transfert est demandé n'a pas fait l'objet par la société absorbée ou apporteuse, pendant la période au titre de laquelle ces déficits (...) ont été constatés, de changement significatif, notamment en termes de clientèle, d'emploi, de moyens d'exploitation effectivement mis en oeuvre, de nature et de volume d'activité ; / c) L'activité à l'origine des déficits (...) dont le transfert est demandé est poursuivie par la ou les sociétés absorbantes ou bénéficiaires des apports pendant un délai minimal de trois ans, sans faire l'objet, pendant cette période, de changement significatif, notamment en termes de clientèle, d'emploi, de moyens d'exploitation effectivement mis en oeuvre, de nature et de volume d'activité ; / (...) ".

4. Il résulte des dispositions du b du II de cet article que la condition qu'elles énoncent tient à ce qu'examinée pour elle-même, l'activité transférée à la société absorbante n'ait pas fait l'objet de changements significatifs pendant la période au titre de laquelle ont été constatés les déficits dont le transfert est demandé. Cette période s'étend de l'exercice de naissance des déficits en cause jusqu'à celui au cours duquel est effectuée la demande tendant à leur transfert. Il résulte toutefois de ces dispositions, interprétées à la lumière des travaux préparatoires de la loi du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012 de laquelle elles sont issues, que la circonstance que l'activité à l'origine des déficits ait été en tout ou partie transférée par anticipation, avant l'opération de fusion ou assimilée, à la société qui la poursuit et demande à ce titre le transfert des déficits qui y trouvent leur origine, ne saurait être regardée comme un changement significatif d'activité justifiant le refus de l'agrément sollicité.

5. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, pour refuser l'octroi de l'agrément prévu par ces dispositions, l'administration fiscale s'est fondée sur ce que la société Idweblogs avait connu une forte baisse de son chiffre d'affaires avant la transmission universelle de son patrimoine à la société ID Espace et qu'elle n'employait plus aucun salarié au terme de l'exercice clos le 30 juin 2017. Si la société ID Espace avait fait valoir, dans sa demande de première instance, que ces circonstances résultaient d'un transfert anticipé de l'activité de la société Idweblogs à son profit, elle s'est en revanche bornée, dans sa requête d'appel, à soutenir que les dispositions du b du II de l'article 209 du code général des impôts faisaient obstacle à ce que l'administration tienne compte de circonstances postérieures aux exercices de naissance des déficits transférés pour caractériser un changement significatif dans l'activité où ils ont trouvé leur origine. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 qu'en jugeant que la période au titre de laquelle l'intervention de tels changements fait obstacle à l'octroi de l'agrément s'étend de l'exercice de naissance des déficits en cause jusqu'à celui au cours duquel est effectuée la demande tendant à leur transfert et en écartant pour ce motif le moyen soulevé devant elle, la cour n'a pas commis d'erreur de droit. Elle n'a pas davantage entaché son arrêt d'insuffisance de motivation en écartant ce moyen sans répondre aux arguments soulevés à son soutien, tirés de l'invocation des travaux préparatoires de la loi du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012.

6. Enfin, en jugeant que la baisse prononcée du chiffre d'affaires de la société Idweblogs et la circonstance qu'elle n'employait plus aucun salarié étaient constitutives, en termes notamment de volume et de moyens, d'un changement significatif de son activité au sens et pour l'application des dispositions du b du II de l'article 209 du code général des impôts, la cour a, contrairement à ce que soutient le pourvoi, retenu une exacte qualification des faits soumis à son examen.

7. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de la société ID Espace doit être rejeté. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la société ID Espace est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société ID Espace et au ministre de l'action et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 8ème - 3ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 436187
Date de la décision : 09/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

19-04-01-04-03 CONTRIBUTIONS ET TAXES. IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES. RÈGLES GÉNÉRALES. IMPÔT SUR LES BÉNÉFICES DES SOCIÉTÉS ET AUTRES PERSONNES MORALES. DÉTERMINATION DU BÉNÉFICE IMPOSABLE. - FUSION OU OPÉRATION ASSIMILÉE - TRANSFERT DES DÉFICITS ANTÉRIEURS DE LA SOCIÉTÉ ABSORBÉE - AGRÉMENT (ART. 209, II DU CGI) - CONDITION TENANT À CE QUE L'ACTIVITÉ À L'ORIGINE DES DÉFICITS DONT LE TRANSFERT EST DEMANDÉ N'AIT PAS FAIT L'OBJET PAR LA SOCIÉTÉ ABSORBÉE DE CHANGEMENT SIGNIFICATIF (ART. 209, II, B DU CGI) - 1) PÉRIODE D'APPRÉCIATION [RJ1] - 2) NOTION DE CHANGEMENT SIGNIFICATIF - EXCLUSION - TRANSFERT DE L'ACTIVITÉ À L'ORIGINE DES DÉFICITS PAR ANTICIPATION.

19-04-01-04-03 1) Il résulte du b du II de l'article 209 du code général des impôts (CGI) que la condition qu'il énonce tient à ce qu'examinée pour elle-même, l'activité transférée à la société absorbante n'ait pas fait l'objet de changements significatifs pendant la période au titre de laquelle ont été constatés les déficits dont le transfert est demandé. Cette période s'étend de l'exercice de naissance des déficits en cause jusqu'à celui au cours duquel est effectuée la demande tendant à leur transfert.... ,,2) Il résulte toutefois de ces dispositions, interprétées à la lumière des travaux préparatoires de la loi n° 2012-958 du 16 août de laquelle elles sont issues, que la circonstance que l'activité à l'origine des déficits ait été en tout ou partie transférée par anticipation, avant l'opération de fusion ou assimilée, à la société qui la poursuit et demande à ce titre le transfert des déficits qui y trouvent leur origine, ne saurait être regardée comme un changement significatif d'activité justifiant le refus de l'agrément sollicité.


Références :

[RJ1]

Cf., en précisant, CE, 25 octobre 2017, SARL Serena Caoutchouc, n° 401403, T. p. 575.

Rappr., s'agissant de l'appréciation de la poursuite de l'activité réelle pour le report déficitaire, CE, 18 mai 2005, SARL Sophie B, n° 259275, T. p. 858.


Publications
Proposition de citation : CE, 09 jui. 2020, n° 436187
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bastien Lignereux
Rapporteur public ?: Mme Karin Ciavaldini
Avocat(s) : SCP L. POULET-ODENT

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:436187.20200609
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award