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27/03/2020 | FRANCE | N°422738

France | France, Conseil d'État, 2ème chambre, 27 mars 2020, 422738


Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 23 octobre 2017 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a mis fin à son statut de réfugié et de le rétablir dans ce statut.

Par une décision n° 17047809 du 25 mai 2018, la Cour nationale du droit d'asile a fait droit à cette demande et maintenu M. A... dans son statut de réfugié.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 30 juillet et 30 octobre 2018 a

u secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Office français de protection des ré...

Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 23 octobre 2017 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a mis fin à son statut de réfugié et de le rétablir dans ce statut.

Par une décision n° 17047809 du 25 mai 2018, la Cour nationale du droit d'asile a fait droit à cette demande et maintenu M. A... dans son statut de réfugié.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 30 juillet et 30 octobre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette décision ;

2°) de renvoyer l'affaire devant la Cour nationale du droit d'asile.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Stéphanie Vera, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Sophie Roussel, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, et à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de M. A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 23 octobre 2017, le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a mis fin au statut de réfugié qui avait été reconnu à M. A..., de nationalité sri-lankaise, le 2 décembre 1991. Par une décision du 25 mai 2018, contre laquelle l'Office se pourvoit en cassation, la Cour nationale du droit d'asile l'a rétabli dans cette qualité.

2. Aux termes du 2° du paragraphe A de l'article 1er de la convention de Genève, la qualité de réfugié est notamment reconnue à " toute personne (...) qui, craignant avec raison d'être persécutée du fait (...) de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut, ou du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays (...) ". Aux termes du paragraphe C de l'article 1er de la même convention, " Cette convention cessera, dans les cas ci-après d'être applicable à toute personne visée par les dispositions de la section A ci-dessus : / 1° Si elle s'est volontairement réclamée à nouveau de la protection du pays dont elle a la nationalité ; / ou 2° Si, ayant perdu sa nationalité, elle l'a volontairement recouvrée ; ou / 3° Si elle a acquis une nouvelle nationalité et jouit de la protection du pays dont elle a acquis la nationalité ou ; / 4° Si elle est retournée volontairement s'établir dans le pays qu'elle a quitté ou hors duquel elle est demeurée de crainte d'être persécutée ;ou / 5° Si les circonstances à la suite desquelles elle a été reconnue comme réfugiée ayant cessé d'exister, elle ne peut plus continuer à refuser de se réclamer de la protection du pays dont elle a la nationalité ; Etant entendu, toutefois, que les dispositions du présent paragraphe ne s'appliqueront pas à tout réfugié visé au paragraphe 1 de la section A du présent article qui peut invoquer, pour refuser de se réclamer de la protection du pays dont il a la nationalité, des raisons impérieuses tenant à des persécutions antérieures. / 6) S'agissant d'une personne qui n'a pas de nationalité, si, les circonstances à la suite desquelles elle a été reconnue comme réfugiée ayant cessé d'exister, elle est en mesure de retourner dans le pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle (...) ".

3. Le premier alinéa de l'article L. 711-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicable au litige, dispose que " L'Office français de protection des réfugiés et apatrides peut mettre fin, de sa propre initiative ou à la demande de l'autorité administrative, au statut de réfugié lorsque la personne concernée relève de l'une des clauses de cessation prévues à la section C de l'article 1er de la convention de Genève, du 28 juillet 1951, précitée. Pour l'application des 5 et 6 de la même section C, le changement dans les circonstances ayant justifié la reconnaissance de la qualité de réfugié doit être suffisamment significatif et durable pour que les craintes du réfugié d'être persécuté ne puissent plus être considérées comme fondées. / L'office peut également mettre fin à tout moment, de sa propre initiative ou à la demande de l'autorité administrative, au statut de réfugié lorsque : / 1° Le réfugié aurait dû être exclu du statut de réfugié en application des sections D, E ou F de l'article 1er de la convention de Genève, du 28 juillet 1951, précitée ; / 2° La décision de reconnaissance de la qualité de réfugié a résulté d'une fraude ; / 3° Le réfugié doit, compte tenu de circonstances intervenues après la reconnaissance de cette qualité, en être exclu en application des sections D, E ou F de l'article 1er de la convention de Genève, du 28 juillet 1951, précitée.".

4. Il appartient à la Cour nationale du droit d'asile, qui est saisie d'un recours de plein contentieux, de se prononcer elle-même sur le droit de l'intéressé à la qualité de réfugié ou au bénéfice de la protection subsidiaire d'après l'ensemble des circonstances de fait et de droit qui ressortent du dossier soumis à son examen et des débats à l'audience. Lorsque lui est déférée une décision par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a, en application des stipulations précitées du C de l'article 1er de la convention de Genève, mis fin au statut de réfugié dont bénéficiait un étranger, et qu'elle juge infondé le motif pour lequel le directeur général de l'Office a décidé de mettre fin à cette protection, il appartient à la Cour de se prononcer sur le droit au maintien de la qualité de réfugié en examinant, au vu du dossier et des débats à l'audience, si l'intéressé relève d'une autre des clauses de cessation énoncées au paragraphe C de l'article 1er de la convention de Genève ou de l'une des situations visées aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 711- 4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier soumis à la Cour que, pour retirer à M. A... la qualité de réfugié qui lui avait été antérieurement reconnue, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, après avoir estimé qu'aucun élément ne permettait de considérer que celui-ci éprouverait des craintes de persécutions ni qu'il pouvait se prévaloir d'une raison impérieuse tenant à des persécutions antérieurement subies ou des atteintes graves antérieures qui justifierait son refus de se réclamer de la protection de son pays d'origine, a fait application de la clause de cessation prévue à l'alinéa 1er de l'article L. 711-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour faire droit à la requête de l'intéressé et le rétablir dans la qualité de réfugié, la cour s'est bornée à examiner si le motif de cessation retenu par la décision de l'OFPRA était fondé et l'a écarté comme non fondé. En statuant ainsi, sans rechercher si la qualité de réfugié de M. A... devait lui être retirée par application de l'une des autres clauses de cessation énoncées au paragraphe C de l'article 1er de la convention de Genève ou des dispositions des 1°, 2° et 3° de l'article L. 711- 4 précité, la Cour a commis une erreur de droit.

6. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides est fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides sur leur fondement.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision de la Cour nationale du droit d'asile du 25 mai 2018 est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la Cour nationale du droit d'asile.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. A... au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et à M. B... A....


Synthèse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 422738
Date de la décision : 27/03/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 27 mar. 2020, n° 422738
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Stéphanie Vera
Rapporteur public ?: Mme Sophie Roussel
Avocat(s) : SCP FOUSSARD, FROGER ; SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:422738.20200327
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