Vu la procédure suivante :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 18 janvier 2019 du ministre de l'intérieur constatant l'invalidité de son permis de conduire pour solde de points nul ainsi que les décisions de retrait de points qui y étaient récapitulées et d'enjoindre au ministre de lui restituer les points retirés. Par un jugement n°1901286 du 14 octobre 2019, le tribunal administratif a annulé les retraits de points consécutifs aux infractions commises les 1er mai 2017, 18 mars 2018 et 18 juin 2018, ainsi que la décision du 18 janvier 2019, enjoint au ministre de restituer les points illégalement retirés et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
Par un pourvoi, enregistré le 4 novembre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il fait partiellement droit à la demande de M. A... ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter dans cette mesure la demande de M. A....
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de procédure pénale ;
- le code de la route ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Dominique Chelle, conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Cécile Barrois de Sarigny, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Le ministre de l'intérieur demande l'annulation du jugement du tribunal administratif de Melun du 14 octobre 2019 en tant qu'il annule les retraits de points opérés sur le permis de conduire de M. A... à la suite d'infractions constatées le 1er mai 2017 et les 18 mars et 18 juin 2018, ainsi qu'en tant qu'il annule, par voie de conséquence, la décision du 18 janvier 2019 constatant la perte de validité de ce permis pour solde de points nul.
2. Il résulte des dispositions des articles L. 123-3 et R. 223-3 du code de la route que l'administration ne légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues à ces articles, lesquelles constituent une garantie essentielle en ce qu'elles mettent l'intéressé en mesure de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis.
Sur le jugement attaqué en tant qu'il statue sur l'infraction du 1er mai 2017 :
3. Il résulte de l'ensemble des dispositions régissant l'enregistrement et le contrôle des informations figurant dans le système national des permis de conduire que la mention, dans le relevé d'information intégral relatif à un permis, du paiement d'une amende forfaitaire établit, en principe, la réalité de ce paiement et, par suite, que l'intéressé a nécessairement reçu l'avis de contravention. Eu égard aux mentions dont cet avis doit être revêtu, la même constatation conduit également à regarder comme établi que l'administration s'est acquittée envers lui de son obligation de lui délivrer, préalablement au paiement de l'amende, les informations requises, à moins que l'intéressé, à qui il appartient à cette fin de produire l'avis qu'il a nécessairement reçu, ne démontre avoir été destinataire d'un avis inexact ou incomplet.
4. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que le relevé d'information intégral relatif au permis de conduire de M. A... mentionne qu'il s'est acquitté de l'amende forfaitaire afférente à l'infraction constatée le 1er mai 2017. Par suite, en jugeant, alors que M. A... n'apportait à l'appui de son recours aucun élément de nature à mettre en doute l'exactitude de cette mention, que l'administration n'apportait pas la preuve de la communication des informations mentionnées au point 2, le tribunal administratif a commis une erreur de droit.
Sur le jugement attaqué en tant qu'il statue sur l'infraction du 18 mars 2018 :
5. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'avis de réception postal établissant, aux dires de l'administration, la notification d'un avis d'amende forfaitaire majorée comportant les informations mentionnées au point 2, ne mentionnait pas le nom de M. A.... Par suite, en jugeant que le ministre de l'intérieur n'apportait pas la preuve de la communication des informations exigées par la loi, le tribunal administratif a porté sur les pièces du dossier qui lui était soumis une appréciation souveraine, exempte de dénaturation et n'a pas commis d'erreur de droit.
Sur le jugement attaqué en tant qu'il statue sur l'infraction du18 juin 2018 :
6. En estimant qu'il n'était pas établi que M. A... ait été informé de la qualification pénale de l'infraction constatée le 18 juin 2018, le juge du fond n'a pas dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis. Il n'a pas non plus commis d'erreur de droit en jugeant que, dans ces conditions, les informations qu'il avait reçues lors de la constatation d'infractions antérieures, relatives à l'existence d'un traitement automatisé des points et à la possibilité d'y accéder, n'était pas nature à se substituer à ce défaut d'information. Par suite, le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à soutenir qu'en jugeant que le retrait de points consécutif à l'infraction du 18 juin 2018 avait été effectué en méconnaissance des obligations d'information prévues par la loi, le tribunal aurait entaché son jugement d'une erreur de droit.
Sur le jugement attaqué en tant qu'il statue sur le retrait du permis de conduire :
7. Le ministre de l'intérieur n'étant pas fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque en tant qu'il annule les retraits de points consécutifs aux infractions constatées les 18 mars et 18 juin 2018, il n'est, par suite, pas fondé à demander l'annulation par voie de conséquence du même jugement en tant qu'il annule sa décision du 18 janvier 2019 constatant la perte de validité du permis de M. A... pour solde de points nul.
8. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur n'est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque qu'en tant qu'il annule le retrait de points consécutif à l'infraction constatée le 1er mai 2017 et ordonne le rétablissement des points correspondants.
D E C I D E :
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Article 1er : Les articles 1er et 3 du jugement du tribunal administratif de Melun du 14 octobre 2019 sont annulés en tant qu'ils annulent le retrait de points consécutif à l'infraction commise le 1er mai 2017 et enjoignent au ministre de l'intérieur de restituer les deux points retirés à la suite de cette infraction.
Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, au tribunal administratif de Melun.
Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi du ministre de l'intérieur est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et à M. B... A....