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18/03/2020 | FRANCE | N°429806

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 18 mars 2020, 429806


Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier :

- d'annuler la décision de la caisse d'allocations familiales de l'Hérault du 29 septembre 2016 de récupérer des indus de prestations sociales, en tant qu'elle porte sur des indus de revenu de solidarité active, de prime d'activité et d'allocation de logement à caractère familial, ainsi que la décision rejetant son recours contre cette décision ;

- d'annuler la décision du président du conseil départemental de l'Hérault du 20 janvier 2017 confirmant la récupératio

n de l'indu de revenu de solidarité active ;

- de le décharger des sommes ainsi ré...

Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier :

- d'annuler la décision de la caisse d'allocations familiales de l'Hérault du 29 septembre 2016 de récupérer des indus de prestations sociales, en tant qu'elle porte sur des indus de revenu de solidarité active, de prime d'activité et d'allocation de logement à caractère familial, ainsi que la décision rejetant son recours contre cette décision ;

- d'annuler la décision du président du conseil départemental de l'Hérault du 20 janvier 2017 confirmant la récupération de l'indu de revenu de solidarité active ;

- de le décharger des sommes ainsi réclamées et de le rétablir dans ses droits à prestation.

Par un jugement n°s 1701380, 1705820 du 13 février 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ces demandes.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 15 avril et 15 juillet 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de mettre à la charge du département de l'Hérault et de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Arnaud Skzryerbak, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Marie Sirinelli, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Colin-Stoclet, avocat de M. A..., et à la SARL Meier-Bourdeau, Lecuyer et associés, avocat du département de l'Hérault ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond qu'à la suite d'un contrôle de la situation de M. B... A..., la caisse d'allocations familiales de l'Hérault a estimé qu'il n'avait pas déclaré l'activité qu'il exerçait au sein d'une société dont il était le gérant. En conséquence, elle a décidé de récupérer, le 29 septembre 2016, des indus de prestations sociales au titre de la période du 1er octobre 2013 au 30 septembre 2016. M. A... a formé des recours administratifs contre cette décision, qui ont été rejetés, pour ce qui concerne le revenu de solidarité active dit " socle ", alloué au titre du montant forfaitaire mentionné au 2° de l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles, par une décision du président du conseil départemental de l'Hérault du 20 janvier 2017 et, pour les autres prestations, par une décision de la caisse d'allocations familiales notifiée le 6 octobre 2017. Par un jugement du 13 février 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision du 29 septembre 2016, en tant qu'elle porte sur des indus de revenu de solidarité active, de prime d'activité et d'allocation de logement à caractère familial, ainsi que des décisions rejetant ses recours administratifs contre cette décision. Par son pourvoi en cassation, M. A... doit être regardé comme demandant l'annulation de ce jugement en tant qu'il rejette ses conclusions relatives au revenu de solidarité active et à la prime d'activité.

Sur le revenu de solidarité active :

2. D'une part, en vertu du premier alinéa de l'article L. 262-7 du code de l'action sociale et des familles, dans sa rédaction applicable au litige, pour bénéficier du revenu de solidarité active, le travailleur relevant du régime social des indépendants, mentionné à l'article L. 611-1 du code de la sécurité sociale, " doit n'employer, au titre de son activité professionnelle, aucun salarié et réaliser un chiffre d'affaires n'excédant pas un niveau fixé par décret ", précisé par l'article D. 262-16 du même code, alors applicable. D'autre part, en vertu du 11° de l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale, sont affiliés obligatoirement aux assurances sociales du régime général : " Les gérants de sociétés à responsabilité limitée et de sociétés d'exercice libéral à responsabilité limitée à condition que lesdits gérants ne possèdent pas ensemble plus de la moitié du capital social, étant entendu que les parts appartenant, en toute propriété ou en usufruit, au conjoint, au partenaire lié par un pacte civil de solidarité et aux enfants mineurs non émancipés d'un gérant sont considérées comme possédées par ce dernier ".

3. Il résulte de ces dispositions que les conditions, fixées à l'article L. 262-7 du code de l'action sociale et des familles, auxquelles est subordonné, pour les travailleurs indépendants, le bénéfice du revenu de solidarité active, ne s'appliquent qu'aux personnes qui relèvent du régime social des indépendants. Elles ne sont, par suite, pas applicables aux personnes exerçant une activité ne relevant pas de ce régime, en particulier, même s'ils ne sont pas rémunérés, aux gérants des sociétés à responsabilité limitée qui n'ont pas une position majoritaire au sein de la société, dont la loi prévoit qu'ils relèvent du régime général.

4. Il suit de là que le tribunal administratif de Montpellier a commis une erreur de droit en jugeant que les dispositions de l'article L. 262-7 du code de l'action sociale et des familles s'appliquaient à un gérant de société à responsabilité limitée non rémunéré qui n'est pas majoritaire, dès lors qu'il disposait du pouvoir de recruter un salarié qui lui était subordonné et de décider de sa rémunération.

Sur la prime d'activité :

5. Aux termes de l'article L. 841-1 du code de la sécurité sociale : " La prime d'activité a pour objet d'inciter les travailleurs aux ressources modestes, qu'ils soient salariés ou non salariés, à l'exercice ou à la reprise d'une activité professionnelle et de soutenir leur pouvoir d'achat ". Aux termes du premier alinéa de L. 842-6 du même code, alors en vigueur : " Pour bénéficier de la prime d'activité, le travailleur relevant du régime social des indépendants mentionné à l'article L. 611-1 doit réaliser un chiffre d'affaires n'excédant pas un niveau fixé par décret ".

6. Si, au cours de la période au titre de laquelle M. A... a perçu la prime d'activité, l'article L. 842-6 du code de la sécurité sociale en subordonnait le bénéfice, pour les travailleurs relevant du régime social des indépendants, à la condition de ne pas réaliser un chiffre d'affaires excédant un certain seuil, aucune disposition ne prévoyait l'application, pour cette prestation, de l'article L. 262-7 du code de l'action sociale et des familles ni n'en subordonnait le bénéfice, pour les travailleurs non salariés, à la condition de n'employer aucun salarié. Par suite et en tout état de cause, M. A... est fondé à soutenir que le tribunal administratif de Montpellier a commis une erreur de droit en se fondant sur la circonstance qu'il ne remplissait pas la condition tenant à l'absence d'emploi d'un salarié pour rejeter ses conclusions relatives à la prime d'activité.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque en tant qu'il statue sur les conclusions de ses demandes relatives au revenu de solidarité active et à la prime d'activité.

8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de M. A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les articles 2 et 3 du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 13 février 2019 sont annulés.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Montpellier dans la mesure de la cassation prononcée.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. A... et par le département de l'Hérault sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B... A..., au ministre des solidarités et de la santé et au département de l'Hérault.

Copie en sera adressée à la caisse d'allocations familiales de l'Hérault.


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 429806
Date de la décision : 18/03/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 18 mar. 2020, n° 429806
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Arnaud Skzryerbak
Rapporteur public ?: Mme Marie Sirinelli
Avocat(s) : SCP COLIN-STOCLET ; SARL MEIER-BOURDEAU, LECUYER ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:429806.20200318
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