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18/03/2020 | FRANCE | N°429042

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 18 mars 2020, 429042


Vu la procédure suivante :

M. D... B... et Mme C... B..., agissant pour leur propre compte ainsi qu'en qualité de représentants légaux de leurs enfants mineurs E... A... et F..., ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Melun, sur le fondement de l'article R.541-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge des Hôpitaux de Saint-Maurice et de la société Axa France IARD le versement d'une somme de 120 000 euros à chacun d'eux ainsi que des sommes de 327 000 euros à Yasmine A... et de 40 000 euros à F..., leurs enfants, à titre de provision

à valoir sur l'indemnisation des préjudices qu'ils estiment avoir su...

Vu la procédure suivante :

M. D... B... et Mme C... B..., agissant pour leur propre compte ainsi qu'en qualité de représentants légaux de leurs enfants mineurs E... A... et F..., ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Melun, sur le fondement de l'article R.541-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge des Hôpitaux de Saint-Maurice et de la société Axa France IARD le versement d'une somme de 120 000 euros à chacun d'eux ainsi que des sommes de 327 000 euros à Yasmine A... et de 40 000 euros à F..., leurs enfants, à titre de provision à valoir sur l'indemnisation des préjudices qu'ils estiment avoir subis. Par une ordonnance n° 1800965-1801115 du 30 avril 2018, le juge des référés a condamné les Hôpitaux de Saint-Maurice et la société Axa France IARD à verser à M. et Mme B... une somme de 10 000 euros chacun au titre de leurs préjudices propres, une somme de 104 500 euros au titre de leur fille Yasmine A... et une somme de 1 000 euros au titre de leur fille F....

Par un arrêt n° 18PA01672 du 7 mars 2019, la cour administrative d'appel de Paris a, sur appel des Hôpitaux de Saint-Maurice et de la société Axa France IARD, annulé cette ordonnance et rejeté les demandes de M. B... et autres.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 22 mars et 4 avril 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... et autres demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de rejeter l'appel des Hôpitaux de Saint-Maurice et de la société Axa France IARD ;

3°) de mettre à la charge des Hôpitaux de Saint-Maurice et de la société Axa France IARD la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Florian Roussel, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Cécile Barrois de Sarigny, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de M. B... et autres, et à la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Axa France IARD et des Hôpitaux de Saint-Maurice.

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis à la cour administrative d'appel de Paris que M. et Mme B..., constatant des difficultés d'apprentissage de leur fille Yasmine A... scolarisée en cours élémentaire et soupçonnant un lien entre ces troubles et les conditions dans lesquelles s'était déroulé l'accouchement de Mme B... au centre hospitalier Esquirol de Saint-Maurice, ont obtenu du juge des référés du tribunal administratif de Melun la désignation de deux experts ayant à se prononcer sur l'existence d'un tel lien. A la suite de la remise des rapports d'experts, M. et Mme B... ont demandé au juge des référés de ce même tribunal le versement d'une provision sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative. Par une ordonnance du 30 avril 2018, le juge des référés du tribunal administratif a condamné le centre hospitalier et la société Axa France IARD à verser à M. et Mme B... une somme de 10 000 euros chacun à titre de provision en réparation de leurs préjudices propres, une somme de 104 500 euros en leur qualité de représentants légaux de leur fille mineure E... A... et une somme de 1 000 euros en leurs qualités de représentants légaux de leur fille mineure F.... Par un arrêt du 7 mars 2019, la cour administrative d'appel de Paris a, sur appel des Hôpitaux de Saint-Maurice et de la société Axa France IARD, annulé cette ordonnance et rejeté la demande de provision. M. et Mme B... se pourvoient en cassation contre cet arrêt.

2. Aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie. "

3. En estimant que, compte tenu de ce que la jeune E... A... n'avait, dans les années ayant suivi sa naissance, présenté aucune des atteintes neurologiques communément prévisibles après une anoxie néonatale, il ne pouvait être exclu que les troubles d'apprentissage de l'enfant aient une origine génétique et soient, par suite, sans lien avec les conditions de sa naissance, la cour, qui a pu régulièrement tenir compte des éléments, versés au dossier et soumis au débat contradictoire, qui figuraient dans le rapport de l'expert diligenté par le centre hospitalier, a porté sur les faits qui lui étaient soumis une appréciation souveraine, exempte de dénaturation et n'a, ni commis d'erreur de droit, ni méconnu son office, ni, en tout état de cause, méconnu le principe d'égalité des armes garanti par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

4. En jugeant ensuite que, si les conditions dans lesquelles s'était déroulé l'accouchement de Mme B... révélaient l'existence d'une faute de la part du centre hospitalier Esquirol, l'incertitude portant sur le lien entre cette faute et les préjudices liés aux troubles d'apprentissage de l'enfant ne permettait pas, en l'état de l'instruction, de regarder la créance de M. et Mme B... et de leurs enfants comme non sérieusement contestable, la cour n'a pas inexactement qualifié les faits dont elle était saisie et n'a pas commis d'erreur de droit. Est à cet égard sans incidence la circonstance qu'elle ait, à titre surabondant, indiqué que les fautes commises lors de l'accouchement pouvaient n'avoir causé qu'une " perte de chance " pour l'enfant.

5. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... et autres ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge des Hôpitaux de Saint-Maurice, qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes, une somme au titre des frais exposés par M. et Mme B... et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme B... le versement aux Hôpitaux de Saint-Maurice et à la société Axa France IARD de la somme qu'ils demandent au titre de ces mêmes dispositions.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. et Mme B... est rejeté.

Article 2 : Les conclusions présentées par les Hôpitaux de Saint Maurice au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. D... B..., premier requérant dénommé, aux Hôpitaux de Saint Maurice et à la société Axa France IARD.

Copie en sera adressée à la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis.


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 429042
Date de la décision : 18/03/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 18 mar. 2020, n° 429042
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Florian Roussel
Rapporteur public ?: Mme Cécile Barrois de Sarigny
Avocat(s) : SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO ; SCP CELICE, TEXIDOR, PERIER

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:429042.20200318
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