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05/02/2020 | FRANCE | N°425578

France | France, Conseil d'État, 1ère - 4ème chambres réunies, 05 février 2020, 425578


Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 22 novembre 2018 et le 26 août 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Orphan Europe, devenue Recordati rare diseases, demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du comité économique des produits de santé du 15 mars 2018 instituant et fixant un tarif unifié pour le groupe générique " acide carglumique 200 milligrammes " ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 d

u code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la dir...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 22 novembre 2018 et le 26 août 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Orphan Europe, devenue Recordati rare diseases, demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du comité économique des produits de santé du 15 mars 2018 instituant et fixant un tarif unifié pour le groupe générique " acide carglumique 200 milligrammes " ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 89/105/CEE du Conseil du 21 décembre 1988 concernant la transparence des mesures régissant la fixation des prix des médicaments à usage humain et leur inclusion dans le champ d'application des systèmes d'assurance-maladie ;

- le règlement (CEE) n° 2309/93 du Conseil du 22 juillet 1993 établissant des procédures communautaires pour l'autorisation et la surveillance des médicaments à usage humain et à usage vétérinaire et instituant une agence européenne pour l'évaluation des médicaments ;

- le règlement (CE) n° 141/2000 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 1999 concernant les médicaments orphelins ;

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Luc Nevache, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Vincent Villette, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP L. Poulet, Odent, avocat de la société Orphan Europe ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 28 janvier 2020, présentée par le Comité économique des produits de santé ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du IV de l'article L. 162-16-5 du code de la sécurité sociale, applicable aux spécialités pharmaceutiques que certains établissements de santé ou groupements de coopération sanitaire, disposant d'une pharmacie à usage intérieur, sont autorisés à vendre au public : " La base de remboursement d'une spécialité peut faire l'objet d'un tarif unifié fixé par décision du Comité économique des produits de santé. Dans ce cas, ce tarif unifié est appliqué aux spécialités génériques et à leurs spécialités princeps, aux spécialités biologiques similaires et à leurs spécialités biologiques de référence, ainsi qu'à toute spécialité comparable en ce qui concerne les indications ou la visée thérapeutique. Le cas échéant, le tarif unifié peut être modulé au regard de différences de posologie ou du circuit de distribution de la spécialité, notamment l'importation prévue à l'article L. 5124-13 du code de la santé publique (...) ". Le IV de l'article L. 162-16-6 du même code prévoit, dans des termes identiques, que le comité économique des produits de santé peut fixer un tarif unifié pour le remboursement des spécialités pharmaceutiques dispensées aux patients dans les établissements de santé qui peuvent être prises en charge par l'assurance maladie en sus des prestations d'hospitalisation.

2. La société Orphan Europe, devenue Recordati rare diseases, demande l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 15 mars 2018 par laquelle le comité économique des produits de santé, sur le fondement des dispositions du IV de l'article L. 162-16-5 et du IV de l'article L. 162-16-6 du code de la sécurité sociale, a instauré, à compter du 31 octobre 2018, un tarif unifié pour le groupe générique " acide carglumique 200 milligrammes ", fixé au niveau du prix de cession et du tarif de responsabilité les plus bas constatés parmi les spécialités concernées. Ce groupe, créé le 14 novembre 2017 par décision du directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, comprend, d'une part, la spécialité Carbaglu 200 milligrammes, comprimé dispersible, commercialisée par la société requérante et bénéficiant d'une autorisation européenne de mise sur le marché délivrée le 24 janvier 2003 pour le traitement de l'hyperammoniémie secondaire au déficit primaire en N-acétylglutamate synthase et d'une extension d'indications thérapeutiques, obtenue le 27 mai 2011, pour le traitement des hyperammoniémies secondaires à une acidémie isovalérique, méthylmalonique ou propionique, et, d'autre part, la spécialité Ucedane 200 milligrammes, comprimé dispersible, commercialisée par la société Lucane Pharma, bénéficiant d'une autorisation européenne de mise sur le marché délivrée le 23 juin 2017 pour la seule première indication de Carbaglu, dont il constitue un générique.

3. Il résulte de l'article 5 du règlement (CE) n° 141/2000 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 1999 concernant les médicaments orphelins que la Commission peut désigner un médicament comme " médicament orphelin " si, ainsi que le prévoit le 1 de l'article 3 de ce règlement : " son promoteur peut établir : / a) qu'il est destiné au diagnostic, à la prévention ou au traitement d'une affection entraînant une menace pour la vie ou une invalidité chronique ne touchant pas plus de cinq personnes sur dix mille dans la Communauté, au moment où la demande est introduite, ou / qu'il est destiné au diagnostic, à la prévention ou au traitement, dans la Communauté, d'une maladie mettant la vie en danger, d'une maladie très invalidante ou d'une affection grave et chronique, et qu'il est peu probable que, en l'absence de mesures d'incitation, la commercialisation de ce médicament dans la Communauté génère des bénéfices suffisants pour justifier l'investissement nécessaire / et / b) qu'il n'existe pas de méthode satisfaisante de diagnostic, de prévention ou de traitement de cette affection ayant été autorisée dans la Communauté, ou, s'il en existe, que le médicament en question procurera un bénéfice notable à ceux atteints de cette affection ". Aux termes du 1 de l'article 8 " Exclusivité commerciale " de ce règlement : " Lorsqu'une autorisation de mise sur le marché est accordée pour un médicament orphelin en application du règlement (CEE) n° 2309/93 ou lorsque tous les Etats membres ont accordé une autorisation de mise sur le marché pour ce médicament (...), la Communauté et les Etats membres s'abstiennent, pendant dix ans, eu égard à la même indication thérapeutique, d'accepter une autre demande d'autorisation de mise sur le marché, d'accorder une autorisation de mise sur le marché ou de faire droit à une demande d'extension d'une autorisation de mise sur le marché existante pour un médicament similaire ". Pour garantir l'effet utile de ces dispositions, les autorités nationales doivent s'abstenir de toute mesure qui favoriserait des prescriptions hors indications d'un médicament pour des indications thérapeutiques couvertes par l'exclusivité commerciale dont bénéficie un autre médicament à ce titre. En outre, si les autorités nationales sont compétentes pour fixer les prix et décider du remboursement des médicaments, quelle que soit la procédure selon laquelle leur mise sur le marché a été autorisée, elles doivent, dans l'exercice de cette compétence, s'abstenir de mesures qui, en assimilant un médicament bénéficiant d'une exclusivité commerciale pour une ou plusieurs de ses indications à un médicament similaire qui n'est pas autorisé dans les mêmes indications, priverait le premier médicament des bénéfices attendus de cette exclusivité, dont l'objet était d'inciter à sa commercialisation en dépit du montant de l'investissement nécessaire.

4. Il ressort des pièces du dossier que la société Orphan Europe a obtenu la désignation de la spécialité acide N-carbamyl-L-glutamique, ultérieurement commercialisée sous le nom de fantaisie de Carbaglu, comme médicament orphelin pour le traitement du déficit en N-acétylglutamate synthétase par une décision de la Commission du 18 octobre 2000, puis pour le traitement de l'acidémie isovalérique, de l'acidémie méthylmalonique et de l'acidémie propionique par trois décisions de la Commission du 7 novembre 2008. Par la décision attaquée, entrant en vigueur le 31 octobre 2018, soit moins de dix ans après l'extension, le 27 mai 2011, de l'autorisation de mise sur le marché de la spécialité Carbaglu aux nouvelles indications thérapeutiques pour lesquelles elle a également été désignée comme médicament orphelin, le comité économique des produits de santé a institué un tarif unifié comme base de remboursement des spécialités relevant du groupe générique " acide carglumique 200 milligrammes ", fixé au niveau du prix de cession et du tarif de responsabilité de la spécialité générique Ucedane, autorisée dans la plus ancienne des indications de Carbaglu seulement. Le comité économique des produits de santé a ainsi adopté une mesure qui, en assimilant la spécialité Carbaglu, y compris dans ses indications bénéficiant encore d'une exclusivité commerciale, à une spécialité similaire ne bénéficiant pas d'une autorisation dans les mêmes indications, fait obstacle à ce que la société commercialisant la spécialité Carbaglu puisse tirer de l'exclusivité commerciale qui lui est reconnue pour ses trois nouvelles indications les bénéfices attendus, destinés à rémunérer l'investissement consenti, conformément à l'objectif poursuivi par le règlement (CE) n° 141/2000. Une telle mesure est susceptible de priver d'effet utile les dispositions de l'article 8 du règlement 141/2000/CE. Par suite, la société requérante est fondée à soutenir que la décision attaquée a été prise en méconnaissance de ces dispositions.

5. Il résulte de ce qui précède que la société requérante est fondée, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, à demander l'annulation de la décision attaquée.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à verser à la société Recordati rare diseases au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision du comité économique des produits de santé du 15 mars 2018 est annulée.

Article 2 : L'Etat versera à la société Recordati rare diseases une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Recordati rare diseases et au comité économique des produits de santé.

Copie en sera adressée à la ministre des solidarités et de la santé.


Synthèse
Formation : 1ère - 4ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 425578
Date de la décision : 05/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

SANTÉ PUBLIQUE - PHARMACIE - PRODUITS PHARMACEUTIQUES - EFFET UTILE DU RÈGLEMENT (CE) N° 141/2000 DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL DU 16 DÉCEMBRE 1999 - CONSÉQUENCES - 1) OBLIGATION DES AUTORITÉS NATIONALES - DANS L'EXERCICE DE LEUR COMPÉTENCE EN MATIÈRE DE REMBOURSEMENT DES MÉDICAMENTS [RJ1] - DE S'ABSTENIR DE MESURES PRIVANT UN MÉDICAMENT ORPHELIN DES BÉNÉFICES DE SON EXCLUSIVITÉ COMMERCIALE [RJ2] - 2) ESPÈCE.

61-04-01-022 1) Pour garantir l'effet utile du 1 de l'article 3, de l'article 5 et du 1 de l'article 8 du règlement (CE) n° 141/2000 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 1999 concernant les médicaments orphelins, les autorités nationales doivent s'abstenir de toute mesure qui favoriserait des prescriptions hors indications d'un médicament pour des indications thérapeutiques couvertes par l'exclusivité commerciale dont bénéficie un autre médicament à ce titre. En outre, si les autorités nationales sont compétentes pour fixer les prix et décider du remboursement des médicaments, quelle que soit la procédure selon laquelle leur mise sur le marché a été autorisée, elles doivent, dans l'exercice de cette compétence, s'abstenir de mesures qui, en assimilant un médicament bénéficiant d'une exclusivité commerciale pour une ou plusieurs de ses indications à un médicament similaire qui n'est pas autorisé dans les mêmes indications, priverait le premier médicament des bénéfices attendus de cette exclusivité, dont l'objet était d'inciter à sa commercialisation en dépit du montant de l'investissement nécessaire.,,,2) Société ayant obtenu la désignation de la spécialité acide N-carbamyl-L-glutamique, ultérieurement commercialisée sous le nom de fantaisie de Carbaglu, comme médicament orphelin pour le traitement du déficit en N-acétylglutamate synthétase par une décision de la Commission du 18 octobre 2000, puis pour le traitement de l'acidémie isovalérique, de l'acidémie méthylmalonique et de l'acidémie propionique par trois décisions de la Commission du 7 novembre 2008.... ,,Décision du comité économique des produits de santé (CEPS), entrant en vigueur le 31 octobre 2018, soit moins de dix ans après l'extension, le 27 mai 2011, de l'autorisation de mise sur le marché de la spécialité Carbaglu aux nouvelles indications thérapeutiques pour lesquelles elle a également été désignée comme médicament orphelin, instituant un tarif unifié comme base de remboursement des spécialités relevant du groupe générique acide carglumique 200 milligrammes, fixé au niveau du prix de cession et du tarif de responsabilité de la spécialité générique Ucedane, autorisée dans la plus ancienne des indications de Carbaglu seulement.... ,,Le CEPS a ainsi adopté une mesure qui, en assimilant la spécialité Carbaglu, y compris dans ses indications bénéficiant encore d'une exclusivité commerciale, à une spécialité similaire ne bénéficiant pas d'une autorisation dans les mêmes indications, fait obstacle à ce que la société commercialisant la spécialité Carbaglu puisse tirer de l'exclusivité commerciale qui lui est reconnue pour ses trois nouvelles indications les bénéfices attendus, destinés à rémunérer l'investissement consenti, conformément à l'objectif poursuivi par le règlement (CE) n° 141/2000. Une telle mesure est susceptible de priver d'effet utile les dispositions de l'article 8 du règlement 141/2000/CE. Par suite, la société requérante est fondée à soutenir que la décision du CEPS a été prise en méconnaissance de ces dispositions.

SANTÉ PUBLIQUE - PHARMACIE - PRODUITS PHARMACEUTIQUES - EFFET UTILE DU RÈGLEMENT (CE) N° 141/2000 DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL DU 16 DÉCEMBRE 1999 - CONSÉQUENCES - 1) OBLIGATION DES AUTORITÉS NATIONALES - DANS L'EXERCICE DE LEUR COMPÉTENCE EN MATIÈRE DE REMBOURSEMENT DES MÉDICAMENTS [RJ1] - DE S'ABSTENIR DE MESURES PRIVANT UN MÉDICAMENT ORPHELIN DES BÉNÉFICES DE SON EXCLUSIVITÉ COMMERCIALE [RJ2] - 2) ESPÈCE.

61-04-01-023 1) Pour garantir l'effet utile du 1 de l'article 3, de l'article 5 et du 1 de l'article 8 du règlement (CE) n° 141/2000 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 1999 concernant les médicaments orphelins, les autorités nationales doivent s'abstenir de toute mesure qui favoriserait des prescriptions hors indications d'un médicament pour des indications thérapeutiques couvertes par l'exclusivité commerciale dont bénéficie un autre médicament à ce titre. En outre, si les autorités nationales sont compétentes pour fixer les prix et décider du remboursement des médicaments, quelle que soit la procédure selon laquelle leur mise sur le marché a été autorisée, elles doivent, dans l'exercice de cette compétence, s'abstenir de mesures qui, en assimilant un médicament bénéficiant d'une exclusivité commerciale pour une ou plusieurs de ses indications à un médicament similaire qui n'est pas autorisé dans les mêmes indications, priverait le premier médicament des bénéfices attendus de cette exclusivité, dont l'objet était d'inciter à sa commercialisation en dépit du montant de l'investissement nécessaire.,,,2) Société ayant obtenu la désignation de la spécialité acide N-carbamyl-L-glutamique, ultérieurement commercialisée sous le nom de fantaisie de Carbaglu, comme médicament orphelin pour le traitement du déficit en N-acétylglutamate synthétase par une décision de la Commission du 18 octobre 2000, puis pour le traitement de l'acidémie isovalérique, de l'acidémie méthylmalonique et de l'acidémie propionique par trois décisions de la Commission du 7 novembre 2008.... ,,Décision du comité économique des produits de santé (CEPS), entrant en vigueur le 31 octobre 2018, soit moins de dix ans après l'extension, le 27 mai 2011, de l'autorisation de mise sur le marché de la spécialité Carbaglu aux nouvelles indications thérapeutiques pour lesquelles elle a également été désignée comme médicament orphelin, instituant un tarif unifié comme base de remboursement des spécialités relevant du groupe générique acide carglumique 200 milligrammes, fixé au niveau du prix de cession et du tarif de responsabilité de la spécialité générique Ucedane, autorisée dans la plus ancienne des indications de Carbaglu seulement.... ,,Le CEPS a ainsi adopté une mesure qui, en assimilant la spécialité Carbaglu, y compris dans ses indications bénéficiant encore d'une exclusivité commerciale, à une spécialité similaire ne bénéficiant pas d'une autorisation dans les mêmes indications, fait obstacle à ce que la société commercialisant la spécialité Carbaglu puisse tirer de l'exclusivité commerciale qui lui est reconnue pour ses trois nouvelles indications les bénéfices attendus, destinés à rémunérer l'investissement consenti, conformément à l'objectif poursuivi par le règlement (CE) n° 141/2000. Une telle mesure est susceptible de priver d'effet utile les dispositions de l'article 8 du règlement 141/2000/CE. Par suite, la société requérante est fondée à soutenir que la décision du CEPS a été prise en méconnaissance de ces dispositions.

SÉCURITÉ SOCIALE - PRESTATIONS - PRESTATIONS D'ASSURANCE MALADIE - EFFET UTILE DU RÈGLEMENT (CE) N° 141/2000 DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL DU 16 DÉCEMBRE 1999 - CONSÉQUENCES - 1) OBLIGATION DES AUTORITÉS NATIONALES - DANS L'EXERCICE DE LEUR COMPÉTENCE EN MATIÈRE DE REMBOURSEMENT DES MÉDICAMENTS [RJ1] - DE S'ABSTENIR DE MESURES PRIVANT UN MÉDICAMENT ORPHELIN DES BÉNÉFICES DE SON EXCLUSIVITÉ COMMERCIALE [RJ2] - 2) ESPÈCE.

62-04-01 1) Pour garantir l'effet utile du 1 de l'article 3, de l'article 5 et du 1 de l'article 8 du règlement (CE) n° 141/2000 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 1999 concernant les médicaments orphelins, les autorités nationales doivent s'abstenir de toute mesure qui favoriserait des prescriptions hors indications d'un médicament pour des indications thérapeutiques couvertes par l'exclusivité commerciale dont bénéficie un autre médicament à ce titre. En outre, si les autorités nationales sont compétentes pour fixer les prix et décider du remboursement des médicaments, quelle que soit la procédure selon laquelle leur mise sur le marché a été autorisée, elles doivent, dans l'exercice de cette compétence, s'abstenir de mesures qui, en assimilant un médicament bénéficiant d'une exclusivité commerciale pour une ou plusieurs de ses indications à un médicament similaire qui n'est pas autorisé dans les mêmes indications, priverait le premier médicament des bénéfices attendus de cette exclusivité, dont l'objet était d'inciter à sa commercialisation en dépit du montant de l'investissement nécessaire.,,,2) Société ayant obtenu la désignation de la spécialité acide N-carbamyl-L-glutamique, ultérieurement commercialisée sous le nom de fantaisie de Carbaglu, comme médicament orphelin pour le traitement du déficit en N-acétylglutamate synthétase par une décision de la Commission du 18 octobre 2000, puis pour le traitement de l'acidémie isovalérique, de l'acidémie méthylmalonique et de l'acidémie propionique par trois décisions de la Commission du 7 novembre 2008.... ,,Décision du comité économique des produits de santé (CEPS), entrant en vigueur le 31 octobre 2018, soit moins de dix ans après l'extension, le 27 mai 2011, de l'autorisation de mise sur le marché de la spécialité Carbaglu aux nouvelles indications thérapeutiques pour lesquelles elle a également été désignée comme médicament orphelin, instituant un tarif unifié comme base de remboursement des spécialités relevant du groupe générique acide carglumique 200 milligrammes, fixé au niveau du prix de cession et du tarif de responsabilité de la spécialité générique Ucedane, autorisée dans la plus ancienne des indications de Carbaglu seulement.... ,,Le CEPS a ainsi adopté une mesure qui, en assimilant la spécialité Carbaglu, y compris dans ses indications bénéficiant encore d'une exclusivité commerciale, à une spécialité similaire ne bénéficiant pas d'une autorisation dans les mêmes indications, fait obstacle à ce que la société commercialisant la spécialité Carbaglu puisse tirer de l'exclusivité commerciale qui lui est reconnue pour ses trois nouvelles indications les bénéfices attendus, destinés à rémunérer l'investissement consenti, conformément à l'objectif poursuivi par le règlement (CE) n° 141/2000. Une telle mesure est susceptible de priver d'effet utile les dispositions de l'article 8 du règlement 141/2000/CE. Par suite, la société requérante est fondée à soutenir que la décision du CEPS a été prise en méconnaissance de ces dispositions.


Références :

[RJ1]

Rappr., sur la compétence des Etats membres en la matière, CJUE, 21 novembre 2018, Novartis Farma SpA, aff. C-29/17.,,

[RJ2]

Rappr. TUE, 11 juin 2015, Laboratoire CTRS c/ Commission européenne, aff. T-452/14.


Publications
Proposition de citation : CE, 05 fév. 2020, n° 425578
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Luc Nevache
Rapporteur public ?: M. Vincent Villette
Avocat(s) : SCP L. POULET-ODENT

Origine de la décision
Date de l'import : 18/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:425578.20200205
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