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30/01/2020 | FRANCE | N°417565

France | France, Conseil d'État, 10ème - 9ème chambres réunies, 30 janvier 2020, 417565


Vu la procédure suivante :

La société par actions simplifiée Pôle Hospitalier Privé a demandé au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le maire de Nouméa sur sa réclamation contentieuse du 22 avril 2015 et de lui accorder la décharge des droits et pénalités mis à sa charge par la commune de Nouméa au titre de la taxe communale d'aménagement par un avis d'imposition du 6 août 2013.

Par un jugement n° 1500468 du 26 mai 2016, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté

sa demande.

Par une ordonnance n° 16PA02817 du 18 janvier 2018, enregistrée au se...

Vu la procédure suivante :

La société par actions simplifiée Pôle Hospitalier Privé a demandé au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le maire de Nouméa sur sa réclamation contentieuse du 22 avril 2015 et de lui accorder la décharge des droits et pénalités mis à sa charge par la commune de Nouméa au titre de la taxe communale d'aménagement par un avis d'imposition du 6 août 2013.

Par un jugement n° 1500468 du 26 mai 2016, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande.

Par une ordonnance n° 16PA02817 du 18 janvier 2018, enregistrée au secrétariat du contentieux le 23 janvier 2018, le président de la cour administrative d'appel de Paris a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête et le mémoire, enregistrés les 29 août 2016 et 3 mai 2017 au greffe de cette cour, présentés par la société Pôle Hospitalier Privé.

Par cette requête, ce mémoire et deux mémoires en réplique, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 19 septembre 2018 et le 8 mars 2019, la société Pôle Hospitalier Privé demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Nouméa la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi organique n° 99-209 et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999, relatives à la Nouvelle-Calédonie ;

- le code des impôts de la Nouvelle-Calédonie ;

- l'arrêté n° 2014-491/GNC du 25 février 2014 modifiant l'arrêté n° 2010-1661/GNC du 13 avril 2010 relatif à la taxe communale d'aménagement ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Réda Wadjinny-Green, auditeur,

- les conclusions de M. Alexandre Lallet, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, avocat de la société Pole Hospitalier Privé et à la SCP Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat de la commune de Nouméa ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SAS Pôle Hospitalier Privé (PHP) a demandé à la commune de Nouméa de lui accorder la décharge, en droits et pénalités, de la taxe communale d'aménagement à laquelle elle a été assujettie à raison de la délivrance d'un permis de construire une clinique par un arrêté du maire de Nouméa en date du 6 août 2013. La société PHP se pourvoit en cassation contre le jugement du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie en date du 26 mai 2016 rejetant sa demande de décharge de cette taxe.

2. L'article Lp. 890-1 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie institue au profit des communes de la Nouvelle-Calédonie une taxe communale d'aménagement, établie sur la construction, la reconstruction et l'agrandissement des bâtiments de toute nature. L'article Lp 890-5 du même code prévoit que " I. La taxe communale d'aménagement est due par le bénéficiaire de l'autorisation de construire (...) VI Le redevable de la taxe peut en obtenir la décharge, la réduction ou la restitution totale ou partielle : 1°) s'il justifie qu'il n'a pas été en mesure de donner suite à l'autorisation de construire (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société PHP a obtenu un permis de construire une clinique par arrêté du 6 août 2013 à raison duquel elle a été imposée à la taxe communale d'aménagement. Mais la " loi du pays " n° 2014-2 du 21 janvier 2014 a ajouté à l'article Lp. 890-2 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie un nouveau cas d'exonération de cette taxe en faveur des " [établissements] de santé [publics et privés], d'intérêt territorial dont la liste est fixée par le gouvernement ". L'arrêté n° 2014-491/GNC du 25 février 2014 a fixé la liste des établissements exonérés en y incluant la société PHP. Cette dernière a alors déposé une nouvelle demande de permis de construire une clinique le 3 mars 2014 et, par un arrêté du 1er avril 2014, une nouvelle autorisation de construire lui a été délivrée par le maire de Nouméa. La délivrance d'un nouveau permis de construire au bénéficiaire d'un précédent permis, sur le même terrain, ayant implicitement mais nécessairement pour effet de rapporter le permis initial, la société PHP n'était objectivement plus en mesure d'exécuter le permis de construire du 6 août 2013 qui avait été rapporté, avant tout commencement d'exécution des travaux qu'il autorisait, par l'arrêté du 1er avril 2014 et pouvait, pour ce motif, obtenir la restitution des sommes acquittées à l'occasion de sa délivrance. Il s'ensuit que le tribunal administratif a commis une erreur de droit en jugeant que la société requérante, ne justifiant pas ne pas avoir été en mesure de donner suite à l'autorisation de construire initialement obtenue, avait commis une fraude à la loi et ne pouvait en conséquence bénéficier, sur le fondement du VI de l'article Lp 890-5 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie, de la décharge de la taxe communale d'aménagement à laquelle elle a été assujettie à raison du permis de construire délivré le 6 août 2013.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que la société PHP est fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Nouméa une somme de 3 000 euros à verser à la société PHP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les dispositions de cet article font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la société PHP qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie.

Article 3 : La commune de Nouméa versera une somme de 3 000 euros à la société Pôle Hospitalier Privé au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la commune de Nouméa présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Pôle Hospitalier Privé et à la commune de Nouméa.


Synthèse
Formation : 10ème - 9ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 417565
Date de la décision : 30/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GÉNÉRALITÉS - RÈGLES GÉNÉRALES D'ÉTABLISSEMENT DE L'IMPÔT - ABUS DE DROIT ET FRAUDE À LA LOI - SOCIÉTÉ ASSUJETTIE À LA TAXE COMMUNALE D'AMÉNAGEMENT À RAISON D'UN PERMIS DE CONSTRUIRE - AYANT DEMANDÉ ET OBTENU UN NOUVEAU PERMIS AFIN DE BÉNÉFICIER D'UNE EXONÉRATION - FRAUDE À LA LOI - ABSENCE.

19-01-03-03 Société ayant obtenu un permis de construire une clinique à raison duquel elle a été assujettie à la taxe communale d'aménagement instituée en Nouvelle-Calédonie. Loi du pays n° 2014-2 du 21 janvier 2014 instituant, postérieurement à cette autorisation, une exonération de la taxe en faveur des établissements de santé figurant sur une liste fixée par le gouvernement (article Lp 890-2 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie), incluant cette société. Société déposant une nouvelle demande d'autorisation de construire la clinique, qui lui est accordée.,,,La délivrance d'un nouveau permis de construire au bénéficiaire d'un précédent permis, sur le même terrain, ayant implicitement mais nécessairement pour effet de rapporter le permis initial, la société n'était objectivement plus en mesure d'exécuter le permis de construire initial, qui avait été rapporté, avant tout commencement d'exécution des travaux qu'il autorisait, et pouvait, pour ce motif, obtenir la restitution des sommes acquittées à l'occasion de sa délivrance. En jugeant que la société avait commis une fraude à la loi et ne pouvait en conséquence bénéficier de la décharge de taxe communale d'aménagement à laquelle elle a été assujettie à raison du premier permis de construire sur le fondement du V de l'article Lp 890-5 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie, le tribunal a commis une erreur de droit.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILÉES ET REDEVANCES - TAXES ASSIMILÉES - TAXE COMMUNALE D'AMÉNAGEMENT INSTITUÉE EN NOUVELLE-CALÉDONIE - DISPOSITIF DE DÉCHARGE PRÉVU PAR L'ARTICLE LP 890-5 DU CODE DES IMPÔTS DE LA NOUVELLE-CALÉDONIE - NOTION DE REDEVABLE JUSTIFIANT NE PAS AVOIR ÉTÉ EN MESURE DE DONNER SUITE À L'AUTORISATION DE CONSTRUIRE [RJ1] - REDEVABLE DONT LE PERMIS INITIAL A ÉTÉ RAPPORTÉ PAR LA DÉLIVRANCE D'UN NOUVEAU PERMIS DE CONSTRUIRE - INCLUSION.

19-03-05 Société ayant obtenu un permis de construire une clinique à raison duquel elle a été assujettie à la taxe communale d'aménagement instituée en Nouvelle-Calédonie. Loi du pays n° 2014-2 du 21 janvier 2014 instituant, postérieurement à cette autorisation, une exonération de la taxe en faveur des établissements de santé figurant sur une liste fixée par le gouvernement (article Lp 890-2 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie), incluant cette société. Société déposant une nouvelle demande d'autorisation de construire la clinique, qui lui est accordée.,,,La délivrance d'un nouveau permis de construire au bénéficiaire d'un précédent permis, sur le même terrain, ayant implicitement mais nécessairement pour effet de rapporter le permis initial, la société requérante n'était objectivement plus en mesure d'exécuter le permis de construire initial, qui avait été rapporté, avant tout commencement d'exécution des travaux qu'il autorisait, et pouvait, pour ce motif, obtenir la restitution des sommes acquittées à l'occasion de sa délivrance sur le fondement du V de l'article Lp 890-5 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie.

OUTRE-MER - DROIT APPLICABLE - RÉGIME ÉCONOMIQUE ET FINANCIER - TAXE COMMUNALE D'AMÉNAGEMENT INSTITUÉE EN NOUVELLE-CALÉDONIE - DISPOSITIF DE DÉCHARGE PRÉVU PAR L'ARTICLE LP 890-5 DU CODE DES IMPÔTS DE LA NOUVELLE-CALÉDONIE - NOTION DE REDEVABLE JUSTIFIANT NE PAS AVOIR ÉTÉ EN MESURE DE DONNER SUITE À L'AUTORISATION DE CONSTRUIRE [RJ1] - REDEVABLE DONT LE PERMIS INITIAL A ÉTÉ RAPPORTÉ PAR LA DÉLIVRANCE D'UN NOUVEAU PERMIS DE CONSTRUIRE - INCLUSION.

46-01-06 Société ayant obtenu un permis de construire une clinique à raison duquel elle a été assujettie à la taxe communale d'aménagement instituée en Nouvelle-Calédonie. Loi du pays n° 2014-2 du 21 janvier 2014 instituant, postérieurement à cette autorisation, une exonération de la taxe en faveur des établissements de santé figurant sur une liste fixée par le gouvernement (article Lp 890-2 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie), incluant cette société. Société déposant une nouvelle demande d'autorisation de construire la clinique, qui lui est accordée.,,,La délivrance d'un nouveau permis de construire au bénéficiaire d'un précédent permis, sur le même terrain, ayant implicitement mais nécessairement pour effet de rapporter le permis initial, la société requérante n'était objectivement plus en mesure d'exécuter le permis de construire initial, qui avait été rapporté, avant tout commencement d'exécution des travaux qu'il autorisait, et pouvait, pour ce motif, obtenir la restitution des sommes acquittées à l'occasion de sa délivrance sur le fondement du V de l'article Lp 890-5 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie.


Références :

[RJ1]

Comp., s'agissant de la taxe locale d'équipement, CE, Plénière, 25 avril 1979,,, n° 4873, p. 165, en cas de péremption du permis ;

CE, 4 juin 1982, Compagnie française du Grand Delta (COFRADEL), n° 23947, p. 207, en cas de renonciation à construire.


Publications
Proposition de citation : CE, 30 jan. 2020, n° 417565
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Réda Wadjinny-Green
Rapporteur public ?: M. Alexandre Lallet
Avocat(s) : SCP MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE ; SCP GARREAU, BAUER-VIOLAS, FESCHOTTE-DESBOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:417565.20200130
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