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31/12/2019 | FRANCE | N°407147

France | France, Conseil d'État, 6ème chambre, 31 décembre 2019, 407147


Vu la procédure suivante :

Par une décision du 30 mai 2018, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux sur les requêtes de l'association Organisation juive européenne et de la société vignoble PSAGOT LTD tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de l'avis du ministre de l'économie et des finances du 24 novembre 2016 destiné aux opérateurs économiques, relatif à l'indication des marchandises issues des territoires occupés par Israël depuis 1967, a sursis à statuer jusqu'à ce que la Cour de justice de l'Union européenne se soit prononcée sur les questions suivantes

:

1°) le droit de l'Union européenne et en particulier le règlement n...

Vu la procédure suivante :

Par une décision du 30 mai 2018, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux sur les requêtes de l'association Organisation juive européenne et de la société vignoble PSAGOT LTD tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de l'avis du ministre de l'économie et des finances du 24 novembre 2016 destiné aux opérateurs économiques, relatif à l'indication des marchandises issues des territoires occupés par Israël depuis 1967, a sursis à statuer jusqu'à ce que la Cour de justice de l'Union européenne se soit prononcée sur les questions suivantes :

1°) le droit de l'Union européenne et en particulier le règlement n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires, lorsque la mention de l'origine d'un produit entrant dans le champ de ce règlement est obligatoire, impose-t-il pour un produit provenant d'un territoire occupé par Israël depuis 1967, la mention de ce territoire ainsi qu'une mention précisant que ce produit provient d'une colonie israélienne lorsque tel est le cas '

2°) à défaut, les dispositions du règlement, notamment celles de son chapitre VI, permettent-elles à un Etat membre d'exiger de telles mentions '

Par un arrêt n° C-363/18 du 12 novembre 2019, la Cour de justice de l'Union européenne s'est prononcée sur ces questions.

Vu les autres pièces des dossiers, y compris celles visées par la décision du Conseil d'Etat du 30 mai 2018 ;

Vu :

- la Constitution ;

- la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ;

- le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, notamment son article 267 ;

- le règlement n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires ;

- le code de la consommation ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de la consommation ;

- le code pénal ;

- la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ;

- l'arrêt n° C-363/18 du 12 novembre 2019 de la Cour de justice de l'Union européenne ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Catherine Moreau, conseiller d'Etat en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, Robillot, avocat de l'association Organisation juive européenne et au Cabinet Briard, avocat de la société vignoble PSAGOT LTD.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article 1er du règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires : " 1. Le présent règlement contient les dispositions de base permettant d'assurer un niveau élevé de protection des consommateurs en matière d'information sur les denrées alimentaires, dans le respect des différences de perception desdits consommateurs et de leurs besoins en information, tout en veillant au bon fonctionnement du marché intérieur. / 2. Le présent règlement définit les principes généraux, les exigences et les responsabilités générales régissant l'information sur les denrées alimentaires et, en particulier, l'étiquetage des denrées alimentaires. Il fixe les dispositifs garantissant le droit des consommateurs à l'information et les procédures d'information sur les denrées alimentaires, tout en tenant compte de la nécessité de prévoir une souplesse suffisante permettant de répondre aux évolutions futures et aux nouvelles exigences en matière d'information. / (...) " Aux termes du g) de l'article 2 du même règlement : " 'lieu de provenance' : le lieu indiqué comme étant celui dont provient la denrée alimentaire, mais qui n'est pas le 'pays d'origine' tel que défini conformément aux articles 23 à 26 du règlement (CEE) no 2913/92 ; le nom, la dénomination commerciale ou l'adresse de l'exploitant du secteur alimentaire figurant sur l'étiquette ne vaut pas, au sens du présent règlement, indication du pays d'origine ou du lieu de provenance de la denrée alimentaire ". Aux termes du 1 de l'article 2 du même règlement : " L'information sur les denrées alimentaires tend à un niveau élevé de protection de la santé et des intérêts des consommateurs en fournissant au consommateur final les bases à partir desquelles il peut décider en toute connaissance de cause et utiliser les denrées alimentaires en toute sécurité, dans le respect, notamment, de considérations sanitaires, économiques, écologiques, sociales et éthiques. ". Aux termes du paragraphe 1 de l'article 9 de ce règlement : " Conformément aux articles 10 à 35, et sous réserve des exceptions prévues dans le présent chapitre, les mentions suivantes sont obligatoires : i) le pays d'origine ou le lieu de provenance lorsqu'il est prévu par l'article 26 ". Aux termes du 2 de l'article 26 du même règlement : " L'indication du pays d'origine ou du lieu de provenance est obligatoire : / a) dans les cas où son omission serait susceptible d'induire en erreur les consommateurs sur le pays d'origine ou le lieu de provenance réel de la denrée alimentaire, en particulier si les informations jointes à la denrée ou l'étiquette dans son ensemble peuvent laisser penser que la denrée a un pays d'origine ou un lieu de provenance différent ; / (...) ".

2. Dans l'arrêt du 12 novembre 2019 par lequel elle s'est prononcée sur les questions dont le Conseil d'Etat, statuant au contentieux l'avait saisie à titre préjudiciel, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que le paragraphe 1 de l'article 9 du règlement n° 1169/2011, combiné avec le paragraphe 2 de son article 26, doit être interprété en ce sens que l'étiquetage des denrées alimentaires originaires d'un territoire occupé par l'Etat d'Israël doit porter non seulement la mention de ce territoire, mais également, dans le cas où de telles denrées alimentaires proviennent d'une localité ou d'un ensemble de localités constituant une colonie israélienne à l'intérieur de ce territoire, la mention de cette provenance. Il résulte de l'interprétation ainsi donnée par la Cour de justice de l'Union européenne que l'avis attaqué du ministre de l'économie et des finances, qui précise que l'étiquetage des denrées alimentaires originaires d'un territoire occupé par l'Etat d'Israël doit porter non seulement la mention de ce territoire, mais également, dans le cas où de telles denrées alimentaires proviennent d'une localité ou d'un ensemble de localités constituant une colonie israélienne à l'intérieur de ce territoire, la mention de cette provenance, reprenant d'ailleurs ce que prévoit la communication interprétative de la Commission européenne du 12 novembre 2015, donne de l'obligation issue du règlement n° 1169/2011 du 25 octobre 2011 une interprétation exacte. Le moyen tiré de ce que l'avis méconnaîtrait le règlement n° 1169/2011 du 25 octobre 2011 doit donc être écarté.

3. Il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de ce que par la prescription spécifique qu'il prévoit pour les produits importés en provenance des territoires occupés par l'Etat d'Israël, l'avis attaqué méconnaîtrait les articles 225-1 et 225-2 du code pénal prohibant la discrimination ainsi que le principe d'égalité ne peuvent qu'être écartés.

4. Enfin, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.

5. Le Conseil d'Etat ayant, par sa décision du 30 mai 2018, écarté les moyens de légalité externe présentés par les requérantes, il résulte de ce qui précède que les requêtes de l'association Organisation juive européenne et de la société vignoble PSAGOT LTD, y compris leurs conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées.

D E C I D E :

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Article 1er : Les requêtes de l'association Organisation juive européenne et de la société vignoble PSAGOT LTD sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'association Organisation juive européenne, à la société vignoble PSAGOT LTD et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 407147
Date de la décision : 31/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 31 déc. 2019, n° 407147
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Catherine Moreau
Rapporteur public ?: M. Stéphane Hoynck
Avocat(s) : SCP POTIER DE LA VARDE, BUK LAMENT, ROBILLOT

Origine de la décision
Date de l'import : 07/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:407147.20191231
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