Vu les procédures suivantes :
1° La société Veolia Eau - Compagnie Générale des Eaux a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la restitution partielle de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises et de la taxe additionnelle à cette cotisation acquittées au titre des exercices clos en 2010, 2011 et 2012. Par un jugement n° 1507327 du 3 novembre 2016, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 16VE03879 du 20 février 2018, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par la société Veolia Eau - Compagnie Générale des Eaux contre ce jugement.
Sous le n° 419968, par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 19 avril et 19 juillet 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Veolia Eau - Compagnie Générale des Eaux demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° La société Veolia Propreté a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la restitution partielle de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises et de la taxe additionnelle à cette cotisation acquittées au titre des exercices clos en 2010, 2011 et 2012. Par un jugement n° 1507325 du 3 novembre 2016, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 16VE03887 du 20 février 2018, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par la société Veolia Propreté contre ce jugement.
Sous le n° 419970, par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 19 avril et 19 juillet 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Veolia Propreté demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Céline Guibé, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Soltner, Texidor, Perier, avocat de la société Veolia Eau - Compagnie Générale des Eaux et de la société Veolia Propreté ;
Considérant ce qui suit :
1. Les pourvois visés ci-dessus présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.
2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à l'issue d'une vérification de la comptabilité de la société Veolia Environnement, société mère d'un groupe fiscalement intégré, l'administration fiscale a constaté que celle-ci avait effectué des prestations de services au profit des sociétés Veolia Eau - Compagnie Générale des Eaux et Veolia Propreté sans facturer l'intégralité de la rémunération prévue par les contrats d'assistance conclus avec ces filiales. En conséquence, elle a réintégré le montant non facturé de ces prestations dans la valeur ajoutée servant de base à la cotisation minimale de taxe professionnelle à laquelle la société Veolia Environnement a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2009 et à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2010. Par réclamations des 27 décembre 2012 et 23 décembre 2013, les sociétés Veolia Eau - Compagnie Générale des Eaux et Veolia Propreté ont demandé, en vain, la restitution partielle des cotisations sur la valeur ajoutée des entreprises qu'elles ont acquittées au titre des exercices clos en 2010, 2011 et 2012, au motif que le montant des prestations rendues par leur mère au cours de ces exercices et qui ne leur avait pas été facturé devait, par symétrie, être déduit de leur propre valeur ajoutée. Elles se pourvoient en cassation contre les arrêts du 20 février 2018 par lesquels la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté les appels qu'elles avaient formés contre les jugements du tribunal administratif de Montreuil du 3 novembre 2016 rejetant leurs demandes de restitution de ces impositions.
3. Aux termes de l'article 1586 ter du code général des impôts : " I - Les personnes physiques ou morales (...) qui exercent une activité dans les conditions fixées aux articles 1447 et 1447 bis et dont le chiffre d'affaires est supérieur à 152 500 euros sont soumises à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. / II - 1. La cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises est égale à une fraction de la valeur ajoutée produite par l'entreprise, telle que définie à l'article 1586 sexies (...) ". Aux termes du I de l'article 1586 sexies du même code : " (...) 4. La valeur ajoutée est égale à la différence entre : / a) D'une part, le chiffre d'affaires tel qu'il est défini au 1, majoré (...) b) Et, d'autre part : / (...) les services extérieurs diminués des rabais, remises et ristournes obtenus (...) ".
4. En premier lieu, les charges nées au cours d'un exercice doivent entrer en compte pour la détermination de la valeur ajoutée servant de base à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises due au titre de cet exercice, alors même qu'elles n'auraient pas encore été payées au moment de la clôture de cet exercice, sauf à démontrer qu'à cette date, ces charges demeuraient incertaines dans leur principe ou dans leur montant.
5. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'article 6 des contrats d'assistance conclus le 20 décembre 2010 entre la société Veolia Environnement et les sociétés Veolia Eau - Compagnie Générale des Eaux et Veolia Propreté stipule que les prestations d'assistance générales et d'appui au développement effectuées par la société mère pour le compte de ses filiales font l'objet d'une facturation trimestrielle sous forme d'acomptes provisoires. L'article 5 de ces conventions prévoit que le montant des acomptes correspond à une estimation réalisée au cours de l'année précédant la réalisation des prestations au titre de laquelle la rémunération est due, l'article 6 prévoyant que ce montant est ajusté en fonction des dépenses réelles de l'année concernée au plus tard à l'occasion de la facture établie le 30 novembre de cette même année. En en déduisant que les charges correspondant à ces prestations étaient certaines dans leur montant à la clôture des exercices en cause, alors même que la société Veolia Environnement avait, en méconnaissance des stipulations de la convention d'assistance, omis de facturer une partie de ces prestations à ses filiales, la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt sur ce point, n'a pas dénaturé les faits soumis à son appréciation et n'a pas commis d'erreur de droit.
6. En deuxième lieu, la cour a relevé, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, que les sociétés Veolia Eau - Compagnie Générale des Eaux et Veolia Propreté ne pouvaient ignorer avoir été bénéficiaires des prestations réalisées par la société Veolia Environnement mais non facturées par celle-ci et que l'omission de comptabiliser ces dépenses en charges résultait d'une pratique concertée avec leur société mère, qui n'avait elle-même pas comptabilisé les recettes correspondantes. En déduisant de ces éléments, qui étaient de nature à établir le caractère volontaire de l'absence de comptabilisation des charges en cause, en méconnaissance des stipulations des contrats d'assistance conclus le 20 décembre 2010, qu'une telle omission constituait une erreur comptable délibérée commise par les sociétés Veolia Eau - Compagnie Générale des Eaux et Veolia Propreté, dont elles ne pouvaient par suite pas demander la rectification, la cour, qui n'avait pas à rechercher le motif pour lequel les requérantes avaient passé ces écritures erronées et qui a suffisamment motivé son arrêt sur ce point, a exactement qualifié les faits de l'espèce et n'a pas commis d'erreur de droit.
7. En troisième lieu, le moyen tiré de ce qu'une somme fait l'objet d'une double imposition économique dans le chef de deux contribuables différents ne peut être utilement invoqué pour demander la restitution ou la décharge d'une imposition établie conformément à la loi fiscale française et aux conventions internationales applicables. Ce motif, exclusif de toute appréciation de fait de la part du juge de cassation, doit être substitué au motif retenu par la cour pour écarter le moyen soulevé devant elle tiré de ce que les charges en litige avaient fait l'objet d'une double imposition économique dans le chef de la société mère Veolia Environnement et de ses filiales les sociétés Veolia Eau - Compagnie Générale des Eaux et Veolia Propreté.
8. Il résulte de ce qui précède que les pourvois de la société Veolia Eau - Compagnie Générale des Eaux et de la société Veolia Propreté doivent être rejetés, y compris leurs conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : Les pourvois de la société Veolia Eau - Compagnie Générale des Eaux et de la société Veolia Propreté sont rejetés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Veolia Eau - Compagnie Générale des Eaux, à la société Veolia Propreté et au ministre de l'action et des comptes publics.