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18/12/2019 | FRANCE | N°423465

France | France, Conseil d'État, 9ème chambre, 18 décembre 2019, 423465


Vu la procédure suivante :

La société par actions simplifiées (SAS) Solaire Saint-Jacques a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler la décision du 9 octobre 2013, par laquelle la société Electricité de France (EDF) a refusé de confirmer l'éligibilité de son projet au tarif prévu par l'arrêté du 12 janvier 2010 et, d'autre part, d'annuler la décision du 21 octobre 2013, par laquelle cette même société a refusé de reconnaître au contentieux relatif à sa proposition technique et financière un caractère suspensif du délai de dix-huit mo

is prévu par l'article 4 du décret du 9 décembre 2010. Par un jugement n° 1380...

Vu la procédure suivante :

La société par actions simplifiées (SAS) Solaire Saint-Jacques a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler la décision du 9 octobre 2013, par laquelle la société Electricité de France (EDF) a refusé de confirmer l'éligibilité de son projet au tarif prévu par l'arrêté du 12 janvier 2010 et, d'autre part, d'annuler la décision du 21 octobre 2013, par laquelle cette même société a refusé de reconnaître au contentieux relatif à sa proposition technique et financière un caractère suspensif du délai de dix-huit mois prévu par l'article 4 du décret du 9 décembre 2010. Par un jugement n° 138078 du 4 janvier 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ces demandes.

Par un arrêt n° 17MA01139 du 2 juillet 2018, la cour administrative d'appel de Marseille a refusé de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la SAS Solaire Saint-Jacques, mettant en cause la conformité à la Constitution des dispositions de l'article 10 de la loi du 10 février 2000, dans sa rédaction issue du 3° du III de l'article 88 de la loi du 12 juillet 2010, et rejeté l'appel formé par la société contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 22 août et 20 novembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SAS Solaire Saint-Jacques demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de la société EDF la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son préambule et son article 61-1 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le protocole additionnel à cette convention ;

- la loi n° 2000-108 du 10 février 2000, notamment son article 10 ;

- le décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010 ;

- le code de l'énergie ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Aurélien Caron, auditeur,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de la société Solaire Saint-Jacques et à la SCP Piwnica, Molinié avocat de la société Electricité de France ;

Considérant ce qui suit :

Sur la contestation du refus de transmission au Conseil d'Etat de la question prioritaire de constitutionnalité :

1. Les dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel prévoient que lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat est saisie de moyens contestant la conformité d'une disposition législative aux droits et libertés garantis par la Constitution, elle transmet au Conseil d'Etat la question de constitutionnalité ainsi posée à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question ne soit pas dépourvue de caractère sérieux.

2. Aux termes de l'avant-dernier alinéa de l'article 10 de la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, dans sa rédaction issue du 3° du III de l'article 88 de la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, qui est désormais repris à l'article L. 314-7 du code de l'énergie : " Les contrats régis par le présent article sont des contrats administratifs qui ne sont conclus et qui n'engagent les parties qu'à compter de leur signature. Le présent alinéa a un caractère interprétatif ".

3. Les dispositions contestées n'ont, en elles-mêmes, ni pour objet, ni pour effet de modifier les modalités de détermination des conditions tarifaires d'achat de l'électricité produite, cette modification résultant de l'intervention ultérieure du décret du 9 décembre 2010 suspendant l'obligation d'achat de l'électricité produite par certaines installations utilisant l'énergie radiative du soleil. Par suite, la société Solaire Saint-Jacques n'est pas fondée à soutenir que ces dispositions méconnaissent le principe constitutionnel de sécurité juridique ni celui de la liberté d'entreprendre au motif qu'elles auraient porté atteinte au droit des producteurs d'électricité à bénéficier de l'obligation d'achat de l'électricité produite aux conditions tarifaires en vigueur à la date de dépôt de leur demande de raccordement au réseau.

4. Il résulte de ce qui précède que la question prioritaire de constitutionnalité tirée de ce que les dispositions de l'avant-dernier alinéa de l'article 10 de la loi du 10 février 2000 méconnaissent les articles 4 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qui n'est pas nouvelle, est dépourvue de caractère sérieux. Par suite, la requérante n'est pas fondée à demander l'annulation du refus de transmission de cette question prioritaire de constitutionnalité qui lui a été opposé par la cour administrative d'appel de Marseille.

Sur les autres moyens du pourvoi :

5. Aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux ".

6. Pour demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque, la SAS Solaire Saint-Jacques soutient que la cour administrative d'appel de Marseille :

- a commis une erreur de droit en s'abstenant d'apprécier concrètement si les décisions attaquées portaient atteinte à ses droits acquis ou à ses espérances légitimes de bénéficier du tarif d'achat fixé par l'arrêté du 12 janvier 2010, protégés par les principes de sécurité juridique et de confiance légitime et l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et en jugeant que les fautes commises par la société ERDF dans l'instruction de sa demande de raccordement étaient sans incidence pour apprécier si elle entrait dans le champ d'application de l'article 3 du décret du 9 décembre 2010 ;

- a commis une erreur de droit, inexactement qualifié les faits ou, à tout le moins, les a dénaturés en jugeant que l'ordonnance du juge des référés du tribunal de commerce de Marseille n'emportait aucune obligation pour la société EDF et en jugeant implicitement que l'article 10 de la loi du 10 février 2000, dans sa rédaction issue du 3° du III de l'article 88 de la loi du 12 juillet 2010, était compatible avec l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

7. Aucun de ces moyens n'est de nature à permettre l'admission du pourvoi.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la société EDF, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il n'y pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la société EDF au même titre.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La contestation du refus de transmission de la question prioritaire de constitutionnalité portant sur les dispositions du 1° de l'article 10 de la loi du 10 février 2000, dans sa rédaction issue du 3° du III de l'article 88 de la loi du 12 juillet 2010, est écartée.

Article 2 : Le surplus des conclusions du pourvoi de la SAS Solaire Saint-Jacques n'est pas admis.

Article 3 : Le conclusions présentées par la société EDF au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SAS Solaire Saint-Jacques, au ministre de la transition écologique et solidaire et à la société Electricité de France.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 423465
Date de la décision : 18/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 18 déc. 2019, n° 423465
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Aurélien Caron
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Avocat(s) : SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO ; SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 24/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:423465.20191218
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