La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/11/2019 | FRANCE | N°424573

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 06 novembre 2019, 424573


Vu les procédures suivantes :

1° Par une requête enregistrée le 28 septembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat sous le n° 424573, la société Engie demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 27 juillet 2018 par laquelle le ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire et le ministre de l'économie et des finances ont fixé les tarifs réglementés de vente d'électricité applicables aux consommateurs résidentiels en France métropolitaine continentale ;

2°) de mettre à la charge de l

'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice adminis...

Vu les procédures suivantes :

1° Par une requête enregistrée le 28 septembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat sous le n° 424573, la société Engie demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 27 juillet 2018 par laquelle le ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire et le ministre de l'économie et des finances ont fixé les tarifs réglementés de vente d'électricité applicables aux consommateurs résidentiels en France métropolitaine continentale ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° Par une requête enregistrée le 28 septembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat sous le n° 424576, la société Engie demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 27 juillet 2018 par laquelle le ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire et le ministre de l'économie et des finances ont fixé les tarifs réglementés de vente d'électricité applicables aux consommateurs non résidentiels en France métropolitaine continentale ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

3° Par une requête, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique enregistrés les 28 septembre et 27 décembre 2018 et le 30 août 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat sous le n° 424586, l'Association nationale des opérateurs détaillants en énergie (ANODE) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 27 juillet 2018 par laquelle le ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire et le ministre de l'économie et des finances ont fixé les tarifs réglementés de vente d'électricité applicables aux consommateurs non résidentiels en France métropolitaine continentale ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

4° Par une requête, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique enregistrés les 28 septembre et 27 décembre 2018 et le 30 août 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat sous le n° 424589, l'Association nationale des opérateurs détaillants en énergie (ANODE) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 27 juillet 2018 par laquelle le ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire et le ministre de l'économie et des finances ont fixé les tarifs réglementés de vente d'électricité applicables aux consommateurs résidentiels en France métropolitaine continentale ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

5° Par une requête, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique enregistrés les 28 septembre et 27 décembre 2018 et le 30 août 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat sous le n° 424590, l'Association nationale des opérateurs détaillants en énergie (ANODE) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 27 juillet 2018 par laquelle le ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire et le ministre de l'économie et des finances ont fixé les tarifs réglementés de vente d'électricité jaunes et verts applicables aux consommateurs en France métropolitaine continentale ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le traité sur l'Union européenne et le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la directive 2009/72/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et abrogeant la directive 2003/54/CE ;

- le code de l'énergie ;

- la loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010 ;

- le décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Céline Guibé, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, avocat de la société Engie et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la société Electricité de France ;

Vu les notes en délibéré, enregistrées le 11 octobre 2019, présentées par la Commission de régulation de l'électricité ;

Vu les notes en délibéré, enregistrées le 11 octobre 2019, présentées par la société EDF ;

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes de la société Engie et de l'Association nationale des opérateurs détaillants en énergie (ANODE) sont dirigées contre les mêmes décisions et présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

2. Aux termes de l'article L. 337-4 du code de l'énergie : " La Commission de régulation de l'énergie transmet aux ministres chargés de l'économie et de l'énergie ses propositions motivées de tarifs réglementés de vente d'électricité. La décision est réputée acquise en l'absence d'opposition de l'un des ministres dans un délai de trois mois suivant la réception de ces propositions. Les tarifs sont publiés au Journal officiel (...) ". Sur le fondement de ces dispositions, le ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire et le ministre de l'économie et des finances ont, par trois décisions du 27 juillet 2018, fixé les tarifs réglementés de vente de l'électricité applicables en France métropolitaine continentale à compter du 1er août 2018, conformément à la proposition de la Commission de régulation de l'énergie (CRE) du 12 juillet 2018. L'ANODE demande l'annulation pour excès de pouvoir de ces trois décisions. La société Engie demande uniquement l'annulation pour excès de pouvoir des deux décisions fixant les tarifs dits " bleus " applicables aux clients résidentiels et aux clients non résidentiels en France métropolitaine continentale.

Sur la légalité externe des décisions attaquées :

3. Il ne ressort des pièces du dossier ni que la Commission de régulation de l'énergie n'aurait pas disposé d'un délai suffisant pour transmettre aux ministres chargés de l'économie et de l'énergie ses propositions motivées de tarifs en application de l'article L. 337-4 du code de l'énergie, ni que le Conseil supérieur de l'énergie, qui a été saisi des projets de décisions le 13 juillet 2018 en application du 1° de l'article R. 142-21 du code de l'énergie et a rendu son avis le 25 juillet suivant, n'aurait pas disposé d'un délai suffisant pour se prononcer. Ainsi, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure ayant précédé l'adoption des décisions attaquées ne peut qu'être écarté.

Sur la légalité interne des décisions attaquées :

4. A l'appui de ses conclusions dirigées contre les décisions des ministres chargés de l'économie et de l'énergie, la société Engie conteste les éléments retenus par la Commission de régulation de l'énergie pour formuler ses propositions de détermination des tarifs réglementés de vente de l'électricité qu'elle a établies le 12 juillet 2018.

En ce qui concerne la possibilité pour les fournisseurs alternatifs d'exercer une concurrence tarifaire effective

5. L'article L. 337-5 du code de l'énergie dispose que : " Les tarifs réglementés de vente d'électricité sont définis en fonction de catégories fondées sur les caractéristiques intrinsèques des fournitures, en fonction des coûts mentionnés à l'article L. 337-6 ". Aux termes de l'article L. 337-6 du même code : " Les tarifs réglementés de vente d'électricité sont établis par addition du prix d'accès régulé à l'électricité nucléaire historique, du coût du complément d'approvisionnement au prix de marché, de la garantie de capacité, des coûts d'acheminement de l'électricité et des coûts de commercialisation ainsi que d'une rémunération normale de l'activité de fourniture (...) ". Ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 7 décembre 2010 portant nouvelle organisation du marché de l'électricité dont elles sont issues, ont pour objet de permettre le développement d'une concurrence tarifaire effective sur le marché de détail de l'électricité.

S'agissant du coût du complément d'approvisionnement sur le marché

6. Le troisième alinéa de l'article R. 337-19 du code de l'énergie prévoit que " le coût du complément d'approvisionnement sur le marché est calculé en fonction des caractéristiques moyennes de consommation et des prix de marché à terme constatés ".

7. Il ressort de la délibération du 12 juillet 2018 de la Commission de régulation de l'énergie que celle-ci a calculé le coût du complément d'approvisionnement sur le marché par référence aux prix de marché à terme observés au cours des deux années précédant l'année d'entrée en vigueur des tarifs, ce qui permet de refléter les coûts exposés par un fournisseur adoptant une stratégie d'approvisionnement progressif au cours des vingt-quatre mois précédant la livraison de l'électricité à ses clients. La Commission a ainsi maintenu la période de lissage de deux ans retenue pour l'élaboration de ses précédentes propositions, laquelle a été fixée sur la base des réponses des acteurs du marché à la consultation publique lancée le 16 février 2016 sur la méthodologie de construction des tarifs réglementés, pour représenter la moyenne des stratégies d'approvisionnement des fournisseurs pour leurs clients résidentiels et petits professionnels, variables d'un fournisseur à l'autre. La société Engie et l'ANODE soutiennent que cette méthode ne reflète pas les coûts réels exposés par les fournisseurs alternatifs, et notamment ceux des opérateurs entrant sur le marché, qui ne seraient pas en mesure d'anticiper aussi longtemps à l'avance l'évolution de leur clientèle et s'approvisionneraient au fur et à mesure de l'acquisition de nouveaux clients.

8. La méthodologie retenue par la Commission de régulation de l'énergie correspond à une stratégie d'approvisionnement progressif, qui permet de limiter l'exposition des fournisseurs d'offres de marché à la volatilité des prix sur le marché de gros de l'électricité, et, par voie de conséquence, de limiter la répercussion de ces fluctuations sur les prix de détail facturés aux consommateurs. La Commission de régulation de l'énergie indique, sans être contredite, que les fournisseurs ne s'exposent pas à un risque important en s'approvisionnant pour des échéances de livraison lointaines sur la base des prévisions d'évolution de leur portefeuille de clientèle, dans la mesure où celle-ci peut être anticipée avec une marge d'erreur limitée sur les marchés " de masse " des clients résidentiels et des petits professionnels. Les tarifs intègrent en outre, au sein de la composante correspondant à la rémunération normale de l'activité de fourniture, la couverture du risque pour un fournisseur de supporter des coûts supplémentaires d'approvisionnement du fait d'erreurs de prévision de l'évolution de son portefeuille. Il ne ressort pas des pièces du dossier que les fournisseurs alternatifs présents sur le marché ne pouvaient, à la date d'entrée en vigueur des tarifs en litige, reproduire une stratégie d'approvisionnement progressif sur une période de deux ans. Par ailleurs, si un opérateur entrant sur le marché ne peut reproduire une stratégie d'approvisionnement progressif sur une période aussi longue, l'article L. 337-6 du code de l'énergie ne prévoit pas que les tarifs réglementés de vente de l'électricité couvrent les coûts d'entrée spécifiques exposés par un nouvel opérateur, pourvu qu'ils ne créent pas de barrière à l'entrée sur le marché. Par suite, la Commission de régulation de l'énergie n'a pas commis d'erreur de droit en calculant le coût du complément d'approvisionnement sur le marché par référence à une stratégie d'approvisionnement progressif au cours d'une période longue et n'a pas commis une erreur manifeste d'appréciation en retenant en l'espèce, à l'instar de ses précédentes propositions tarifaires, une période de référence de deux ans.

S'agissant du coût de la garantie de capacité

9. Les articles L. 335-1 à L. 335-6 du code de l'énergie imposent aux fournisseurs d'électricité de disposer de garanties de capacités d'effacement de consommation ou de production destinées à assurer la sécurité d'approvisionnement d'électricité de la France. Depuis le 1er janvier 2017, les garanties de capacité s'échangent sur un marché dédié au cours d'enchères organisées plusieurs fois par an. Le troisième alinéa de l'article R. 337-19 du code de l'énergie prévoit que " le coût de la garantie de capacité est pris en compte dans la part proportionnelle à l'énergie consommée du prix de fourniture ".

10. Il ressort des pièces du dossier que, pour calculer le coût de la garantie de capacité, la Commission de régulation de l'énergie a retenu la moyenne des prix révélés par les enchères de capacité réalisées les 9 novembre et 14 décembre 2017, au cours desquelles se sont échangées des garanties de capacités à livrer au cours de l'année 2018. La société Engie soutient que cette méthode ne permet pas de couvrir les coûts exposés par les fournisseurs alternatifs, qui prennent en compte non seulement le prix des capacités à livrer au cours de l'année de commercialisation de leurs offres, mais également celui des capacités à livrer au cours des années postérieures couvertes par ces offres.

11. Toutefois, l'article L. 337-6 du code de l'énergie impose uniquement que les tarifs soient fixés de manière à permettre à des fournisseurs alternatifs de proposer des offres sur le marché de détail de l'électricité à un prix égal ou inférieur aux tarifs réglementés sans encourir de pertes. En revanche, il n'impose pas que ces tarifs couvrent les coûts effectivement exposés par l'ensemble des fournisseurs présents sur le marché, lesquels varient notamment en fonction de la nature des offres proposées aux consommateurs finals et de l'efficacité de ces opérateurs. A cet égard, seuls les fournisseurs commercialisant des offres de marché à prix fixe doivent intégrer dans leurs prix de détail l'augmentation du coût de fourniture qu'ils anticipent du fait de l'augmentation du prix des garanties de capacité au cours de la période couverte par ces offres. A l'inverse, les fournisseurs commercialisant des offres de marché à prix variable sont libres de répercuter les augmentations du prix des capacités au fur et à mesure sur les consommateurs, au cours des années de livraison concernées. Ainsi, l'absence de prise en compte, pour la détermination des tarifs réglementés applicables au cours d'une année donnée, de l'évolution des prix révélée par les enchères portant sur des capacités à livrer au cours d'années postérieures, ne fait pas obstacle à la faculté pour un opérateur concurrent d'Electricité de France (EDF) de proposer, au cours de l'année en cause, des offres à des prix égaux ou inférieurs aux tarifs réglementés sur le marché de détail de l'électricité sans encourir de pertes. Par suite, la Commission de régulation de l'énergie n'est pas tenue de calculer le coût de la garantie de capacité en tenant compte de l'évolution des prix révélée par les enchères portant sur des capacités à livrer au cours d'années postérieures à celle de l'entrée en vigueur des tarifs. Il lui appartient toutefois, dans une telle hypothèse, de modifier les tarifs réglementés lorsqu'elle constate que l'évolution du prix des capacités applicable en cours de la période tarifaire est susceptible de créer un écart significatif entre les tarifs qu'elle a fixés et le coût de fourniture des offres de marché, de nature à faire obstacle à l'exercice d'une concurrence tarifaire effective sur le marché de détail de l'électricité. Il résulte de ce qui précède que la Commission de régulation de l'énergie n'a pas méconnu l'article L. 337-6 du code de l'énergie ni entaché sa délibération d'erreur manifeste d'appréciation en proposant de fixer les tarifs applicables au 1er août 2018 sans prendre en compte le prix des capacités à livrer au cours d'années postérieures.

S'agissant des coûts de commercialisation

12. Aux termes du cinquième alinéa de l'article R. 337-19 du code de l'énergie : " Les coûts de commercialisation correspondent aux coûts de commercialisation d'un fournisseur d'électricité au moins aussi efficace qu'Electricité de France dans son activité de fourniture des clients ayant souscrit aux tarifs réglementés de vente de l'électricité ". Cette disposition doit être interprétée comme imposant de fixer la composante des tarifs correspondant aux coûts de commercialisation par référence aux coûts de la société EDF.

13. En premier lieu, ni les dispositions des articles L. 337-5 et L. 337-6 du code de l'énergie, ni l'objectif de réalisation d'un marché de l'électricité concurrentiel prévu par la directive 2009/72/CE n'imposent que la composante des tarifs réglementés de vente de l'électricité correspondant aux coûts de commercialisation couvre les coûts des fournisseurs d'électricité moins efficaces que la société EDF pourvu que les coûts de commercialisation des fournisseurs alternatifs ne soient pas, à la date de détermination des tarifs, structurellement plus élevés que ceux d'EDF. Par suite, et sous cette réserve, la société Engie n'est pas fondée à soutenir que le pouvoir réglementaire a méconnu ces dispositions et cet objectif en prévoyant, au cinquième alinéa de l'article R. 337-19 du code de l'énergie, que les coûts de commercialisation entrant dans la détermination des tarifs réglementés de vente de l'électricité sont évalués par référence aux coûts d'EDF.

14. En second lieu, la Commission de régulation de l'énergie indique dans sa délibération du 12 juillet 2018 avoir mené une étude des coûts de commercialisation de plusieurs fournisseurs alternatifs préalablement à l'élaboration de ses propositions tarifaires, desquelles il ressort une variabilité très importante de ces coûts selon l'organisation et les stratégies commerciales mises en oeuvre, certains fournisseurs présentant des coûts d'acquisition et de gestion de clientèle très faibles alors que d'autres concurrents supportent des coûts plus élevés. Il ne ressort pas des pièces du dossier que les fournisseurs d'offres de marché supportent structurellement des coûts de commercialisation plus élevés que ceux de la société EDF. Dans ces conditions, il résulte de ce qui a été dit précédemment qu'en fixant la composante des tarifs correspondant aux coûts de commercialisation par référence aux coûts d'EDF, la Commission de régulation de l'énergie n'a pas méconnu les articles L. 337-6 et R. 337-19 du code de l'énergie.

S'agissant de la rémunération normale de l'activité de fourniture

15. Il ressort des pièces du dossier que, pour déterminer la rémunération normale de l'activité de fourniture d'électricité, la Commission de régulation de l'énergie a retenu une marge dite " à risque " ayant vocation à couvrir les coûts liés aux risques associés à cette activité ainsi qu'à assurer la rémunération des capitaux engagés dans l'activité de fourniture.

16. En premier lieu, la société Engie soutient que la couverture des risques liés aux erreurs d'évaluation du portefeuille de clients, à la thermo-sensibilité des consommations et à la garantie de capacité aurait dû être prise en compte pour déterminer les composantes des tarifs correspondant aux coûts d'approvisionnement en énergie et en capacité. Elle ne conteste toutefois pas sérieusement que la méthodologie de la marge " à risque " adoptée par la Commission de régulation de l'énergie permet de prendre en compte les spécificités de l'activité de fourniture d'électricité, qui est peu capitalistique et présente d'importants coûts opérationnels et d'approvisionnement.

17. En deuxième lieu, la Commission de régulation de l'énergie a évalué le coût de couverture du risque pour les fournisseurs de supporter des coûts supplémentaires d'approvisionnement en énergie du fait d'erreurs de prévision de l'évolution de leur portefeuille de clientèle en se fondant sur l'hypothèse d'une évolution réelle du portefeuille avec un écart-type de 3% par an par rapport aux prévisions réalisées par les fournisseurs et d'une volatilité des prix de marché à terme de 20% par an. En prenant en compte le seul risque supporté par les fournisseurs déjà présents sur le marché, à l'exclusion des nouveaux entrants, la Commission n'a, contrairement à ce que soutient la société Engie, pas méconnu l'article L. 337-6 du code de l'énergie, lequel ne prévoit pas que les tarifs réglementés de vente de l'électricité couvrent les coûts d'entrée spécifiques exposés par un nouvel opérateur sur le marché. Par ailleurs, la Commission de régulation de l'énergie n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en retenant un écart-type de 3%, lequel a été fixé au regard des données recueillies dans le cadre de sa mission de surveillance des marchés ainsi que de ses échanges avec les fournisseurs présents sur le marché.

18. En troisième lieu, la Commission de régulation de l'énergie a évalué le coût de couverture du risque pour les fournisseurs de supporter des coûts supplémentaires d'acquisition de garanties de capacités du fait d'erreurs de prévision de l'évolution de leur portefeuille de clientèle en se fondant sur l'hypothèse d'une évolution réelle du portefeuille avec un écart-type de 3% par an par rapport aux prévisions réalisées par les fournisseurs et d'une volatilité des prix des capacités échangées de 50 % par an.

19. Pour les motifs exposés au point 11, la société Engie n'est pas fondée à soutenir que la Commission aurait dû prendre en compte les coûts exposés par les fournisseurs pour couvrir le risque d'erreurs de prévision d'évolution du prix des garanties de capacité révélées par des enchères portant sur des capacités à livrer au cours d'années postérieures à l'année de détermination des tarifs.

20. En quatrième lieu, la société Engie soutient que la Commission de régulation de l'énergie aurait dû prendre en compte, dans le calcul de la rémunération normale de l'activité de fourniture, le risque d'écrêtement des volumes d'électricité nucléaire historique attribués aux fournisseurs alternatifs, du fait de l'atteinte prévisible du volume global susceptible d'être cédé annuellement par la société EDF dans le cadre du dispositif d'accès régulé à l'électricité nucléaire historique.

21. D'une part, aux termes du deuxième alinéa de l'article R. 337-19 du code de l'énergie, " Le coût de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique est déterminé en fonction du prix de l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique appliqué au prorata de la quantité de produit théorique calculée en application de l'article R. 336-14, compte tenu, le cas échéant, de l'atteinte du volume global maximal d'électricité nucléaire historique fixé par l'article L. 336-2 ". Ces dispositions imposent seulement à la Commission de régulation de l'énergie de tenir compte de l'atteinte effective du volume global maximal d'électricité nucléaire historique susceptible d'être cédé pour fixer les composantes des tarifs réglementés correspondant aux coûts d'approvisionnement en électricité.

22. D'autre part, seuls les fournisseurs commercialisant des offres de marché à prix fixe doivent intégrer dans leurs prix de détail l'augmentation du coût d'approvisionnement qu'ils anticipent du fait de l'atteinte du volume global maximal d'électricité nucléaire historique au cours de la période couverte par ces offres. A l'inverse, les fournisseurs proposant des offres de marché à prix variable ou à prix indexé sur les tarifs réglementés sont libres de répercuter sur leurs clients les coûts d'approvisionnement complémentaires sur le marché qu'ils devront supporter dans une telle hypothèse, de sorte qu'il n'y a pas lieu, pour eux, de prendre en compte un tel risque pour déterminer les prix des offres commercialisées avant que ce plafond ne soit effectivement atteint. Ainsi, l'absence de prise en compte d'un tel risque, pour la fixation des tarifs applicables à la période antérieure à l'atteinte du plafond, ne fait pas obstacle à la faculté pour un opérateur concurrent d'EDF de proposer, au cours de cette période, des offres à des prix égaux ou inférieurs aux tarifs réglementés sur le marché de détail de l'électricité sans encourir de pertes. Cette faculté est par ailleurs assurée, pour la période postérieure à l'atteinte du plafond, par la révision tarifaire à laquelle doit procéder la Commission de régulation de l'énergie en application de l'article R. 337-19 du code de l'énergie cité au point 21. Par suite, la Commission de régulation de l'énergie n'a pas méconnu l'article L. 337-6 du code de l'énergie ni entaché sa délibération d'erreur manifeste d'appréciation en proposant de fixer les tarifs applicables au 1er août 2018 sans prendre en compte le risque d'atteinte de ce plafond postérieurement à cette date.

23. En dernier lieu, il ressort de la délibération de la Commission de régulation de l'énergie que le niveau de rémunération retenu inclut, outre les coûts de couverture des risques mentionnés aux points 15 et 16, une marge de 3,5 %, d'un niveau supérieur à la marge commerciale des fournisseurs d'énergie européens comparables ressortant de l'étude réalisée par la Commission de régulation de l'énergie pour l'élaboration des propositions tarifaires relatives à l'année 2016. Si la société Engie soutient que cette marge est insuffisante pour assurer une rémunération normale des capitaux investis, elle n'apporte aucun élément précis permettant de remettre en cause le bien-fondé du taux retenu par la Commission de régulation de l'énergie.

En ce qui concerne l'application des tarifs réglementés de vente de l'électricité aux sites des clients non domestiques

24. Aux termes de l'article L. 337-7 du code de l'énergie, " Les tarifs réglementés de vente de l'électricité (...) bénéficient, à leur demande, aux consommateurs finals domestiques et non domestiques pour leurs sites souscrivant une puissance inférieure ou égale à 36 kilovoltampères ". Aux termes de l'article R. 337-18 du même code : " Les tarifs réglementés de vente d'électricité comportent des catégories, options et versions tarifaires. / Les catégories tarifaires sont définies en fonction de la tension de raccordement et de la puissance souscrite par le client pour le site concerné : / Le tarif dit " bleu " est proposé aux consommateurs finals pour tout site situé en France métropolitaine, raccordé en basse tension (...) et dont la puissance maximale souscrite est inférieure ou égale à 36 kilovoltampères / (...) / Le tarif dit " vert " est proposé aux consommateurs finals pour tout site raccordé en haute tension (...), situé dans une zone non interconnectée au réseau métropolitain continental, ou situé en métropole continentale et dont la puissance maximale souscrite est inférieure ou égale à 36 kilovoltampères ou 33 kilowatts selon l'unité dans laquelle les puissances sont souscrites. / Les consommateurs finals situés en France métropolitaine continentale, raccordés en basse tension, dont la puissance souscrite est inférieure ou égale à 36 kilovoltampères, qui bénéficient au 31 décembre 2015 d'un " tarif jaune " et dont le dispositif de comptage permet les dépassements de puissance, peuvent conserver ce tarif tant qu'ils ne demandent pas à changer d'option, de version ou de puissance souscrites. / Les consommateurs finals situés en France métropolitaine continentale, raccordés en basse tension, dont la puissance souscrite est inférieure ou égale à 36 kilovoltampères ou 33 kilowatts selon l'unité dans laquelle les puissances sont souscrites, qui bénéficient au 31 décembre 2015 d'un " tarif vert ", peuvent conserver ce tarif tant qu'ils ne demandent pas à changer d'option, de version ou de puissance souscrites (...) ".

25. Il résulte des dispositions de la directive 2009/72/CE, interprétées à la lumière des arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne dans ses arrêts Federutility e.a. contre Autorità per l'energia elettrica e il gas du 20 avril 2010 (affaire C-265/08) et ANODE du 7 septembre 2016 (affaire C-121/15), que la conformité d'une réglementation des prix de vente au détail de l'électricité, qui constitue, par sa nature même, une entrave à la réalisation d'un marché de l'électricité concurrentiel, aux objectifs poursuivis par cette directive est subordonnée au respect de la triple condition qu'elle réponde à un objectif d'intérêt économique général, qu'elle ne porte atteinte à la libre fixation des prix que dans la seule mesure nécessaire à la réalisation de cet objectif et notamment durant une période limitée dans le temps et, enfin, qu'elle soit clairement définie, transparente, non discriminatoire et contrôlable. La réglementation des tarifs de vente au détail de l'électricité instituée par le code de l'énergie, qui peut être regardée comme poursuivant l'objectif d'intérêt économique général de stabilité des prix, est compatible avec les objectifs poursuivis par la directive 2009/72/CE, sauf, d'une part, en ce qu'elle présente un caractère permanent et, d'autre part, en ce qu'elle est applicable à tous les consommateurs finals, domestiques et non domestiques, pour leurs sites souscrivant une puissance inférieure ou égale à 36 kilovoltampères.

26. Par ailleurs, aux termes de l'article R. 337-20 du code de l'énergie " Les options que comporte une catégorie tarifaire peuvent être mises en extinction (...). Les options mises en extinction ne sont plus proposées aux clients à compter de la date d'effet de cette mise en extinction. Un client dont le contrat en cours à cette date comporte une telle option la conserve, y compris lors de la tacite reconduction de celui-ci, tant qu'il ne demande pas un changement d'option tarifaire. La part fixe et les parts proportionnelles d'une option mise en extinction peuvent continuer de faire l'objet d'évolutions en structure comme en niveau ". Il résulte de ces dispositions que si les clients ne peuvent souscrire de nouveau contrat comportant une option tarifaire mise en extinction, une telle option demeure applicable aux contrats en cours.

27. Les décisions attaquées prévoient, conformément à la proposition de la Commission de régulation de l'énergie et par application de l'article R. 337-20 du code de l'énergie, que les options des tarifs dits " bleus " applicables aux clients non résidentiels en France métropolitaine continentale et les options des tarifs dits " verts " applicables aux consommateurs en France métropolitaine continentale sont mises en extinction en tant qu'elles s'appliquent aux grandes entreprises au sens du décret du 18 décembre 2008 relatif aux critères permettant de déterminer la catégorie d'appartenance d'une entreprise pour les besoins de l'analyse statistique et économique, c'est-à-dire les entreprises qui occupent plus de 5000 personnes ou dont le chiffre d'affaires annuel excède 1500 millions d'euros ou dont le total de bilan excède 2000 millions d'euros.

28. Il résulte de la directive 2009/72/CE, telle qu'interprétée par la Cour de justice de l'Union européenne, qu'il convient de tenir compte, pour déterminer les catégories de consommateurs éligibles aux tarifs réglementés de vente de l'électricité, d'une part, de la différence de situation entre les entreprises et les consommateurs domestiques et, d'autre part, des différences objectives entre les entreprises elles-mêmes, selon leur taille. S'agissant des consommateurs en France métropolitaine continentale, la nature des intérêts en présence justifie seulement que les clients professionnels ayant un profil similaire à celui des consommateurs domestiques, tels que les artisans, commerçants et professions libérales, soient traités de manière identique. Par suite, une réglementation permettant à toutes les entreprises n'appartenant pas à la catégorie des grandes entreprises au sens du décret du 18 décembre 2008, qui comprennent des entreprises moyennes et des entreprises de taille intermédiaire, de bénéficier des tarifs réglementés de vente de l'électricité n'est pas proportionnée à l'objectif de stabilité des prix poursuivi par cette réglementation. Il suit de là que les dispositions du code de l'énergie citées au point 24 ne pouvaient, sans méconnaître les objectifs de la directive 2009/72/CE, servir de base légale à l'article 2 des décisions attaquées définissant les grandes entreprises inéligibles aux tarifs réglementés par référence au décret du 18 décembre 2008.

29. Dans l'hypothèse où des dispositions législatives ou réglementaires se révèlent incompatibles avec des règles du droit de l'Union européenne, il appartient aux autorités administratives nationales de ne pas en faire application tant que ces dispositions n'ont pas été modifiées. Par suite et sans qu'y fassent obstacle le principe de sécurité juridique ni les principes généraux du droit des contrats, les dispositions du code de l'énergie citées au point 24 ne pouvaient davantage, sans méconnaître les objectifs de la directive 2009/72/CE, servir de base légale aux décisions attaquées en tant qu'elles permettent le maintien du bénéfice des tarifs dits " bleus " ou " verts " pour les grandes entreprises ayant un contrat en cours à la date de ces décisions tant qu'elles ne demandent pas un changement de puissance ou d'option tarifaire.

En ce qui concerne les autres moyens soulevés par les requérantes

30. En premier lieu, les stipulations de l'article 102 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et de l'article 4, paragraphe 3 du traité sur l'Union européenne imposent aux Etats membres de ne pas prendre ou de ne pas maintenir en vigueur des mesures, même de nature législative ou réglementaire, susceptibles de porter atteinte à l'effet utile des règles de concurrence applicables aux entreprises. Si ces stipulations interdisent à l'autorité administrative d'imposer à un fournisseur détenant une position dominante sur le marché de détail de vendre l'électricité à un prix inférieur à ses coûts de fourniture, elles n'imposent pas que les tarifs de vente réglementés imposés à l'opérateur dominant puissent être contestés par des fournisseurs concurrents moins efficaces. Il n'est pas contesté que les tarifs fixés par les décisions attaquées assurent la couverture des coûts complets de la fourniture de l'électricité aux tarifs réglementés par EDF. Par suite, la société Engie n'est pas fondée à soutenir que ces décisions méconnaissent les stipulations des articles 102 et 106, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

31. En dernier lieu, aucun texte ni aucun principe n'imposait aux ministres d'encadrer les conditions d'utilisation des données de son fichier de clientèle par EDF avant de fixer les tarifs réglementés de vente d'électricité applicables aux clients résidentiels, contrairement à ce que soutient l'ANODE.

32. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de la société Engie doit être rejetée. L'ANODE est quant à elle fondée à demander l'annulation de l'article 2 de la décision du 27 juillet 2018 relative aux tarifs réglementés de vente de l'électricité applicables aux consommateurs non résidentiels en France métropolitaine continentale et, à l'annexe 4 de la proposition de la Commission de régulation de l'énergie du 12 juillet 2018 annexée à cette décision, des dispositions permettant aux sites non résidentiels appartenant à des grandes entreprises qui sont fournis aux tarifs réglementés de conserver le bénéfice de ces tarifs tant qu'ils ne modifient pas leur option ou leur puissance souscrite, ainsi que de l'article 2 de la décision du 27 juillet 2018 relative aux tarifs réglementés de vente de l'électricité jaunes et verts applicables aux consommateurs en France métropolitaine continentale et, à l'annexe 5 de la proposition de la Commission de régulation de l'énergie du 12 juillet 2018 annexée à cette décision, des dispositions permettant aux sites non résidentiels appartenant à des grandes entreprises qui sont fournis aux tarifs réglementés de conserver le bénéfice de ces tarifs tant qu'ils ne modifient pas leur option, leur puissance souscrite ou leur version.

Sur les conclusions de la Commission de régulation de l'énergie relatives à l'amende pour recours abusif

33. Aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 3 000 euros ". La faculté prévue par ces dispositions constituant un pouvoir propre du juge, les conclusions de la Commission de régulation de l'énergie tendant à ce que la société Engie et l'ANODE soit condamnées à une telle amende ne sont pas recevables.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

34. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3000 euros à verser à l'ANODE au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font en revanche obstacle à ce qu'une somme soit accordée à la société Engie et à la Commission de régulation de l'énergie à ce titre.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Sont annulés :

- l'article 2 de la décision du 27 juillet 2018 relative aux tarifs réglementés de vente de l'électricité applicables aux consommateurs non résidentiels en France métropolitaine continentale ;

- à l'annexe 4 de la proposition de la Commission de régulation de l'énergie du 12 juillet 2018 annexée à cette décision, les dispositions permettant aux sites non résidentiels appartenant à des grandes entreprises qui sont fournis aux tarifs réglementés de conserver le bénéfice de ces tarifs tant qu'ils ne modifient pas leur option ou leur puissance souscrite.

Article 2 : Sont annulés :

- l'article 2 de la décision du 27 juillet 2018 relative aux tarifs réglementés de vente de l'électricité jaunes et verts applicables aux consommateurs en France métropolitaine continentale ;

- à l'annexe 5 de la proposition de la Commission de régulation de l'énergie du 12 juillet 2018 annexée à cette décision, les dispositions permettant aux sites non résidentiels appartenant à des grandes entreprises qui sont fournis aux tarifs réglementés de conserver le bénéfice de ces tarifs tant qu'ils ne modifient pas leur option, leur puissance souscrite ou leur version.

Article 3: L'Etat versera à l'ANODE la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La requête de la société Engie, le surplus des conclusions de l'ANODE ainsi que les conclusions de la Commission de régulation de l'énergie tendant à l'application de l'article R. 741-2 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Engie, à l'Association nationale des opérateurs détaillants en énergie, à la Commission de régulation de l'énergie, à la ministre de la transition écologique et solidaire, au ministre de l'économie et des finances et à la société Electricité de France.


Synthèse
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 424573
Date de la décision : 06/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES ET UNION EUROPÉENNE - RÈGLES APPLICABLES - ÉNERGIE - FIXATION DES TARIFS RÉGLEMENTÉS DE VENTE DE L'ÉLECTRICITÉ (ART - L - 337-5 ET L - 337-6 DU CODE DE L'ÉNERGIE) - 1) OBJET DE LA LÉGISLATION - 2) ADMISSIBILITÉ - AU REGARD DU DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE - DE L'ENTRAVE QUE CONSTITUENT CES TARIFS À UN MARCHÉ DE L'ÉLECTRICITÉ CONCURRENTIEL - CONDITION - PROPORTIONNALITÉ - ABSENCE - EN TANT QUE CETTE RÉGLEMENTATION NE DISTINGUE PAS ENTRE PETITS CONSOMMATEURS ET GRANDES ENTREPRISES [RJ1] - NOTION DE GRANDES ENTREPRISES.

15-05-09 1) Les articles L. 337-5 et L. 337-6 du code de l'énergie, éclairés par les travaux préparatoires de la loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010 dont ils sont issus, ont pour objet de permettre le développement d'une concurrence tarifaire effective sur le marché de détail de l'électricité.,,,2) Il résulte de la directive 2009/72/CE du 13 juillet 2009, telle qu'interprétée par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), qu'il convient de tenir compte, pour déterminer les catégories de consommateurs éligibles aux tarifs réglementés de vente de l'électricité, d'une part, de la différence de situation entre les entreprises et les consommateurs domestiques et, d'autre part, des différences objectives entre les entreprises elles-mêmes, selon leur taille.... ...S'agissant des consommateurs en France métropolitaine continentale, la nature des intérêts en présence justifie seulement que les clients professionnels ayant un profil similaire à celui des consommateurs domestiques, tels que les artisans, commerçants et professions libérales, soient traités de manière identique.... ...Par suite, une réglementation permettant à toutes les entreprises n'appartenant pas à la catégorie des grandes entreprises au sens du décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008, qui comprennent des entreprises moyennes et des entreprises de taille intermédiaire, de bénéficier des tarifs réglementés de vente de l'électricité n'est pas proportionnée à l'objectif de stabilité des prix poursuivi par cette réglementation.

ENERGIE - MARCHÉ DE L'ÉNERGIE - TARIFICATION - ELECTRICITÉ - FIXATION DES TARIFS RÉGLEMENTÉS DE VENTE DE L'ÉLECTRICITÉ (ART - L - 337-5 ET L - 337-6 DU CODE DE L'ÉNERGIE) - 1) OBJET DE LA LÉGISLATION - 2) ADMISSIBILITÉ - AU REGARD DU DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE - DE L'ENTRAVE QUE CONSTITUENT CES TARIFS À UN MARCHÉ DE L'ÉLECTRICITÉ CONCURRENTIEL - CONDITION - PROPORTIONNALITÉ - ABSENCE - EN TANT QUE CETTE RÉGLEMENTATION NE DISTINGUE PAS ENTRE PETITS CONSOMMATEURS ET GRANDES ENTREPRISES [RJ1] - NOTION DE GRANDES ENTREPRISES.

29-06-02-01-015 1) Les articles L. 337-5 et L. 337-6 du code de l'énergie, éclairés par les travaux préparatoires de la loi n° 2010-1488 du 7 décembre 2010 dont ils sont issus, ont pour objet de permettre le développement d'une concurrence tarifaire effective sur le marché de détail de l'électricité.,,,2) Il résulte de la directive 2009/72/CE du 13 juillet 2009, telle qu'interprétée par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), qu'il convient de tenir compte, pour déterminer les catégories de consommateurs éligibles aux tarifs réglementés de vente de l'électricité, d'une part, de la différence de situation entre les entreprises et les consommateurs domestiques et, d'autre part, des différences objectives entre les entreprises elles-mêmes, selon leur taille.... ...S'agissant des consommateurs en France métropolitaine continentale, la nature des intérêts en présence justifie seulement que les clients professionnels ayant un profil similaire à celui des consommateurs domestiques, tels que les artisans, commerçants et professions libérales, soient traités de manière identique.... ...Par suite, une réglementation permettant à toutes les entreprises n'appartenant pas à la catégorie des grandes entreprises au sens du décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008, qui comprennent des entreprises moyennes et des entreprises de taille intermédiaire, de bénéficier des tarifs réglementés de vente de l'électricité n'est pas proportionnée à l'objectif de stabilité des prix poursuivi par cette réglementation.


Références :

[RJ1]

Cf. CE, Assemblée, 18 mai 2018, Société Engie et Association nationale des opérateurs détaillants en énergie (ANODE), n°s 413688 414656, p. 204.


Publications
Proposition de citation : CE, 06 nov. 2019, n° 424573
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Céline Guibé
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Avocat(s) : SCP GARREAU, BAUER-VIOLAS, FESCHOTTE-DESBOIS ; SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:424573.20191106
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award