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04/10/2019 | FRANCE | N°424265

France | France, Conseil d'État, 4ème - 1ère chambres réunies, 04 octobre 2019, 424265


Vu la procédure suivante :

M. A... C... B... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler pour excès de pouvoir la décision du recteur de l'académie de Caen du 23 décembre 2015 lui infligeant la sanction d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée de six mois. Par un jugement n° 1601177 du 2 mars 2017, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 17NT01104 du 16 juillet 2018, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé par M. B... contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et de

ux nouveaux mémoires, enregistrés les 17 septembre et 17 décembre 2018 et les 30...

Vu la procédure suivante :

M. A... C... B... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler pour excès de pouvoir la décision du recteur de l'académie de Caen du 23 décembre 2015 lui infligeant la sanction d'exclusion temporaire de fonctions d'une durée de six mois. Par un jugement n° 1601177 du 2 mars 2017, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 17NT01104 du 16 juillet 2018, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé par M. B... contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et deux nouveaux mémoires, enregistrés les 17 septembre et 17 décembre 2018 et les 30 janvier et 17 septembre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Yaël Treille, auditeur,

- les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Didier, Pinet, avocat de M. A... C... B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que par arrêté du 23 décembre 2015, le recteur de l'académie de Caen a prononcé à l'encontre M. A... C... B..., recruté en qualité de professeur contractuel pour enseigner l'économie et la gestion au lycée des Andaines de la Ferté-Macé, la sanction d'exclusion de fonctions pour une durée de six mois. Par un jugement du 2 mars 2017, le tribunal administratif de Caen a rejeté la demande de M. B... tendant à l'annulation de cette sanction. M. B... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 16 juillet 2018 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté son appel contre ce jugement.

2. En l'absence de texte imposant la lecture publique d'une décision juridictionnelle, l'exigence de publicité qui découle, notamment, de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales peut être satisfaite, soit par l'initiative d'une telle lecture, soit par tout autre moyen approprié assurant l'accès au texte de la décision, en particulier par sa consultation au greffe de la juridiction qui l'a prononcée.

3. Aux termes de l'article L. 10 du code de justice administrative : " Les jugements sont publics (...) ". L'article R. 741-1 du code de justice administrative dispose que : " Réserve faite des dispositions applicables aux ordonnances, la décision est prononcée en audience publique ". Il résulte de ces dispositions que les décisions juridictionnelles auxquelles elles s'appliquent sont rendues publiques par une lecture en audience publique.

4. En l'espèce, il ressort toutefois des pièces du dossier, en particulier des éléments que M. B... y a versés, que l'arrêt attaqué n'a pas été lu en audience publique. M. B... est, dès lors, fondé à soutenir qu'il est entaché d'irrégularité et à en demander, pour ce motif, l'annulation, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

6. En premier lieu, il y a lieu d'adopter les motifs par lesquels le tribunal administratif a écarté le moyen, invoqué par M. B... en première instance et repris en appel, tiré de ce que l'arrêté du 23 décembre 2015 aurait été signé par une autorité incompétente.

7. En deuxième lieu, les stipulations du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peuvent utilement être invoquées pour critiquer la régularité d'une procédure administrative conduisant à une décision administrative infligeant une sanction disciplinaire à un agent public. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations à raison de l'absence de publicité des débats devant la commission paritaire ne peut, par suite, qu'être écarté comme inopérant.

8. En troisième lieu, si M. B... soutient que la commission administrative paritaire aurait été irrégulièrement composée au regard du " cadre juridique en vigueur ", il n'assortit son moyen d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé.

9. En quatrième lieu, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire sont matériellement établis et constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

10. Il ressort des pièces du dossier, notamment des témoignages concordants des élèves de la classe du requérant, que M. B... ne conteste pas sérieusement en se bornant à faire valoir qu'ils ne seraient pas crédibles, que le requérant a eu un comportement violent le 14 septembre 2015 à l'égard d'un de ses élèves. Il ressort en outre des éléments versés au dossier que M. B... a tenu des propos à caractère discriminatoire et sexiste dans sa classe. Ces faits présentent un caractère fautif et sont de nature à justifier le prononcé d'une sanction.

11. Eu égard à la nature et la gravité des faits reprochés, le recteur de l'académie de Caen n'a pas infligé à l'intéressé une sanction disproportionnée en prononçant à son encontre une mesure d'exclusion de ses fonctions d'une durée de six mois.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 16 juillet 2018 est annulé.

Article 2 : La requête présentée par M. B... devant la cour administrative d'appel de Nantes est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de M. B... présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A... C... B... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.


Synthèse
Formation : 4ème - 1ère chambres réunies
Numéro d'arrêt : 424265
Date de la décision : 04/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 04 oct. 2019, n° 424265
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Yaël Treille
Rapporteur public ?: M. Raphaël Chambon
Avocat(s) : SCP DIDIER, PINET

Origine de la décision
Date de l'import : 24/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:424265.20191004
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