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24/07/2019 | FRANCE | N°422487

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 24 juillet 2019, 422487


Vu la procédure suivante :

Mme C...épouse A...a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 2 juillet 2015 du préfet de Seine-et-Marne refusant l'échange de son permis de conduire algérien contre un permis conduire français ainsi que celles des 12 août 2015 et 31 mai 2016 rejetant ses recours gracieux et hiérarchique contre cette décision. Par une ordonnance n° 1608873 du 12 mars 2018, le président de la 7ème chambre du tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire,

enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 23 juillet e...

Vu la procédure suivante :

Mme C...épouse A...a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 2 juillet 2015 du préfet de Seine-et-Marne refusant l'échange de son permis de conduire algérien contre un permis conduire français ainsi que celles des 12 août 2015 et 31 mai 2016 rejetant ses recours gracieux et hiérarchique contre cette décision. Par une ordonnance n° 1608873 du 12 mars 2018, le président de la 7ème chambre du tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 23 juillet et 23 octobre 2018, Mme A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de la route ;

- la loi n° 90-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Marc Lambron, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Cécile Barrois de Sarigny, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gadiou, Chevallier, avocat de MmeB....

1. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, alors en vigueur : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision et, ce dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ". Aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ". Il résulte de ces dispositions, d'une part, que lorsque la notification ne comporte pas les mentions requises, ce délai n'est pas opposable et, d'autre part, que cette notification doit, s'agissant des voies de recours, mentionner, le cas échéant, l'existence d'un recours administratif préalable obligatoire ainsi que l'autorité devant laquelle il doit être porté ou, dans l'hypothèse d'un recours contentieux direct, indiquer si celui-ci doit être formé auprès de la juridiction administrative de droit commun ou devant une juridiction spécialisée et, dans ce dernier cas, préciser laquelle.

2. Toutefois, le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci en a eu connaissance. Dans une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et délais de recours ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable. En règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l'exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des textes particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu'il en a eu connaissance.

3. Pour rejeter la requête de Mme A...au motif qu'elle n'a pas été présentée dans le délai raisonnable mentionné ci-dessus, l'ordonnance attaquée se borne à relever qu'elle tend à l'annulation d'une décision du 2 juillet 2015 et n'a été enregistrée au greffe du tribunal administratif que le 27 octobre 2016. Faute de rechercher si la décision attaquée avait été notifiée à l'intéressée et à quelle date, ou s'il était établi qu'elle en avait eu connaissance et à quelle date, alors que le délai raisonnable ne pouvait courir qu'à compter de l'un ou l'autre de ces événements, le président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Melun a commis une erreur de droit. Il lui appartenait, en outre, de s'interroger sur l'incidence sur le cours du délai des recours gracieux et hiérarchique que Mme A...avait présentés contre la décision. L'ordonnance attaquée doit, par suite, être annulée.

4. Mme A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Gadiou, Chevallier, avocat de MmeA..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à cette société.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Melun du 12 mars 2018 est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Melun.

Article 3 : L'Etat versera à la SCP Gadiou, Chevallier, avocat de MmeA..., la somme de 3 000 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme C...épouse A...et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 422487
Date de la décision : 24/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 24 jui. 2019, n° 422487
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Marc Lambron
Rapporteur public ?: Mme Cécile Barrois de Sarigny
Avocat(s) : SCP GADIOU, CHEVALLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 30/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:422487.20190724
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