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17/07/2019 | FRANCE | N°425607

France | France, Conseil d'État, 8ème chambre, 17 juillet 2019, 425607


Vu la procédure suivante :

La société à responsabilité limitée (SARL) Voyag'Air a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de rétablir le déficit qu'elle avait déclaré au titre des exercices clos en 2009 et 2010, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercices clos en 2011 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2009 au 29 février 2012, ainsi que des majorations correspondantes. Par un jugement n° 1406621

du 29 juin 2017, ce tribunal a prononcé la décharge des cotisations supplément...

Vu la procédure suivante :

La société à responsabilité limitée (SARL) Voyag'Air a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de rétablir le déficit qu'elle avait déclaré au titre des exercices clos en 2009 et 2010, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercices clos en 2011 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2009 au 29 février 2012, ainsi que des majorations correspondantes. Par un jugement n° 1406621 du 29 juin 2017, ce tribunal a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés établies au titre de l'année 2011 à concurrence de la différence résultant de la rectification des déficits reportables enregistrés au titre des exercices clos en 2010 et 2011, pour des montants respectifs de 33 727 et 74 437 euros, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que des majorations correspondant aux impositions supplémentaires ainsi réduites, et rejeté le surplus de cette demande.

Par un arrêt n° 17NC02118 du 27 septembre 2018, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par la société Voyag'Air contre l'article 5 de ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 23 novembre 2018, 6 février 2019 et 28 mai 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Voyag'Air demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Liza Bellulo, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de la société Voyag'Air ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité de la société Voyag'Air, l'administration fiscale a estimé que des prestations de location d'avion d'affaires avaient été facturées par cette société à M. A...et à l'association AGIPI, que ce dernier préside, à un prix minoré, sans contrepartie. Regardant les conditions dans lesquelles cette société exploitait son activité de location d'avion comme constitutives d'un acte anormal de gestion, l'administration a évalué un montant de recettes à réintégrer dans ses résultats déclarés au titre des exercices clos de 2007 à 2011, déterminé à partir d'une marge qu'elle a considérée comme normale, a réduit en conséquence les déficits déclarés au titre des exercices clos de 2007 à 2010, et a assujetti la SARL à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2011. L'administration a également assujetti la société à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2009 au 29 février 2012. Par un jugement du 29 juin 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a réduit les résultats de la société pour les exercices clos en 2010 et 2011 d'un montant respectif de 33 727 et 74 437 euros, prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre de l'exercice clos en 2011 en conséquence de la rectification du bénéfice de cet exercice ainsi que des majorations correspondantes, prononcé la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et rejeté le surplus de la demande de la société. Celle-ci se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 27 septembre 2018 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel qu'elle avait formé contre ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

2. En vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion normale. Constitue un acte anormal de gestion l'acte par lequel une entreprise décide de s'appauvrir à des fins étrangères à son intérêt.

3. Pour juger que la société Voyag'Air avait fixé le prix des prestations de location d'avion d'affaires assurées au bénéfice de M. A...et de l'association AGIPI, ses deux clients exclusifs, dans des conditions caractérisant une renonciation à recettes constitutive d'un acte anormal de gestion, la cour administrative d'appel s'est fondée, après avoir relevé, par des motifs non contestés en cassation, que la société entretenait une communauté d'intérêts avec ces clients, sur ce que le niveau des tarifs pratiqués ne permettait pas, lors des exercices clos de 2006 à 2009, de couvrir les charges d'exploitation de l'aéronef, sans que la société justifie avoir reçu aucune autre contrepartie. En déduisant de ces seules circonstances que les décisions tarifaires de la société Voyag'Air devaient être regardées comme tendant à l'appauvrir à des fins étrangères à son intérêt, sans avoir, notamment, recherché si les prix pratiqués à l'égard de M. A...et de l'association AGIPI différaient de ceux pratiqués par des entreprises similaires exploitées normalement à l'égard de clients non liés à elles par une communauté d'intérêt, la cour a commis une erreur de droit.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que la société Voyag'Air est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la société Voyag'Air au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 27 septembre 2018 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Nancy.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 3 000 euros à la société Voyag'Air au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société à responsabilité limitée Voyag'Air et au ministre de l'action et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 425607
Date de la décision : 17/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 17 jui. 2019, n° 425607
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Liza Bellulo
Rapporteur public ?: Mme Karin Ciavaldini
Avocat(s) : SCP BARADUC, DUHAMEL, RAMEIX

Origine de la décision
Date de l'import : 24/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:425607.20190717
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